Les agents de la Police municipale et de la protection civile ont donné un coup de balai aux différentes avenues de la ville de N’Djamena, capitale tchadienne. Une action citoyenne qui surprend. Reportage.
Une présence inhabituelle pour une action citoyenne. Alors qu’on les croyait seulement dans les marchés et lors des incendies, les éléments de la Police municipale et de la protection civile ont opté pour une action citoyenne ce 21 novembre. Munis des balais, des pelles et des brouettes, ils ont nettoyé la rue Alifa Zezerti dans le 3e arrondissement et d’autres avenues de la capitale. Action qui a surpris plusieurs citoyens du 3e arrondissement.
Selon le directeur de la Police municipale, Colonel Adamou Brahim Maina, son équipe a répondu à la sollicitation de la direction de l’assainissement de l’environnement et de la Santé de la Mairie de N’Djamena. « Nous sommes venus en renfort aux agents en charge de l’assainissement de la ville de N’Djamena », déclare-t-il. Intervenu de gré ou sur sollicitation, Colonel Adamou croit que le déploiement de son équipe pour l’assainissement des avenues ne doit pas être perçu comme un événement extraordinaire. « Ce n’est pas un fait du hasard. Ça fait partie de notre boulot et les textes qui nous régissent font mention de ce devoir », dit le patron de la Police municipale. Il rassure de la disponibilité de ses éléments à répondre promptement à toute autre invitation.
Gadngar Roasnan Rodrigue est le directeur de l’assainissement de l’environnement et de la santé à la Mairie de N’Djamena. Il explique que l’activité qu’a entreprise son département ce samedi s’inscrit dans la suite logique de la journée de la salubrité instaurée depuis longtemps par la Mairie de la ville. La particularité, dit-il, est la mobilisation des agents de la protection civile et de la Police municipale. Pour lui, les fêtes de fin d’année approchent et N’Djamena doit faire peau neuve. D’autres activités seront menées à part le nettoyage des rues. « Il y aura l’embellissement de la ville. Déjà les jeux de lumière sont en train d’être installés sur les grands artères », dit Gadngar.
Depuis un certain temps, les autorités municipales sont en guerre contre l’insalubrité. La journée de samedi est décrétée journée de salubrité dans les marchés et les quartiers. Mais cette journée ne semble pas être exécutée comme il se le doit. « Nous ne cesserons jamais de déplorer l’incivisme de la population. Voilà nous sommes en train de nettoyer, mais cela n’a pas suscité l’engouement de la population riveraine. Normalement elle doit se mobiliser pour nous accompagner », déplore le directeur de l’assainissement. La population, de son côté, pointe plutôt le manque de sensibilisation. « La Mairie devrait sensibiliser les associations des jeunes des quartiers. Elles, à leurs tours, vont sensibiliser les ménages. C’est ainsi qu’on se peut mobiliser », dit Youssouf Haroun, un jeune du quartier Blabine.
Christian Allahdjim
Entre le futur grand hôtel Palace Toumaï, la future cité internationale des affaires sur le Boulevard François N'garta Tombalbaye et l’École Nationale Supérieure des Travaux Publics (ENSTP) sous le soleil ardent, dans la chaleur suffocante et la poussière, les concasseuses sont là, assises, silencieuses. Dans des gestes presque mécaniques, elles cassent du béton le réduisant en briquaillons. Un travail harassant pour joindre les deux bouts. Et pouvoir élever leurs enfants dans la dignité. Ialtchad Presse vous amène en immersion chez des concasseuses. Reportage.
Fatimé, l’air détendu, étale ses matériels de travail. Un marteau et un seau. Son métier : concasseuse. Elle y exerce depuis 15 ans. Regard endurci, mais le sourire présent, elle nous reçoit en cette matinée froide du mois de novembre. Surnommée la doyenne par ses collègues, Mme Fatimé, la soixantaine est la cheffe d’une quarantaine de femmes qui travaillent sur ce site.
Chaque matin, en compagnie d’une petite fille, elle vient sur le site gagner sa vie. Toute la journée, marteau en main, elle casse du béton pour vendre comme du gravier. Elle a commencé quand la vente du son de mil ou de maïs qu’elle a entreprise ne lui rapportait rien. Elle embrasser alors le concassage. Elle a commencé sa carrière sur un site derrière le lycée Félix Éboué et le stade Idriss Mahamat Ouya. Elle a fini sur le site de la construction de la cité des affaires.
Mme Mariam exerce également dans ce domaine. La cinquantaine révolue, 7 ans d’activité, explique comment elle s’est retrouvée dans ce métier. « Tout est parti après le décès de mon mari. Les membres de ma belle-famille m’ont jeté, moi et ma fille, à la rue. Je ne savais quoi faire pour que moi et ma fille puissions manger. J’ai décidé de venir casser les morceaux des bétons pour revendre », dit-elle posément.
Travail pénible
Ces femmes concasseuses tirent leurs revenus de ce pénible métier. Elles s’installent comme elles peuvent sous des petites tentes de fortune, d’autres sous des parasols, elles sont exposées à tous risques sanitaires. À toutes les intempéries. Une vie de souffrance, de lutte pour la survie.
D’abord, il y a les rayons solaires qui brûlent leurs peaux tous les jours avec son cortège des maladies. Ensuite l’inhalation de la poudre que dégage le béton est aussi source de maladie.
Enfin, travailler marteau à la main toute la journée, à frapper du béton de manière répétitive, encore et encore est la recette parfaite à la fatigue du corps et de l’esprit. Et surtout, le revenu ne suit pas la pénibilité du métier. 1 sac de béton concassé coûte 1 000 F CFA. De plus, en cette période de crise économique et sanitaire, l’écoulement du produit sur le marché est difficile. L’industrie du BTP est à l’arrêt. « C’est très difficile maintenant de vendre 1 sac de gravier. Avant on vendait 4 à 5 sacs par jour. Mais avec cette double crise, rien ne marche pour nous », se plaint Fatimé.
Grâce à une association, des parasols ont été distribués. D’autres promesses leur ont été faites, mais jusque-là non réalisées. « L’année passée, il y a une organisation qui est venue nous recenser, mais jusqu’aujourd’hui, cette organisation n’est pas revenue », dit Mme Fatimé. Il n’y a pas longtemps, le Ministère de la Formation professionnelle et des Petits Métiers a suggéré aux concasseuses de contracter des crédits destinés à la promotion de la femme dans les entreprises. Mais pour les concasseuses, c’est une suggestion hors de leur réalité. « Nous ne sommes que des démunies et nous n’avons aucune garantie à offrir pour obtenir des crédits », disent-elles en chœur. L’idée des autorités est d’amener ces femmes à abandonner ce métier à risque et se tourner vers des secteurs plus prometteurs. « C’est bien beau, mais le risque de remboursement est élevé. Prendre ce crédit, c’est courir le risque de finir en prison », dit la doyenne Mme Fatimé.
Christian Allahdjim
Djilel-tong Djimrangué
Les inondations du mois d’août passé l’avaient rendu inhabitable, le carré 41 d’Amtoukoui peine à se reconstruire. Et la plupart de ses résidents ne sont pas revenus bien que le carré se repeuple peu à peu. Ialtchad Presse est allé constater. Reportage.
Après la pluie, le beau temps dit une maxime. On est tenté de dire, après l’inondation, la réinstallation. C’est le cas au carré 41 du quartier Amtoukouin dans le 8e arrondissement de N’Djamena, capitale tchadienne.
Ce n’est plus le carré inaccessible avec des rues et maisons inondées de tout bord et vide de ses habitants lorsque Ialtchad Presse a fait une série de reportages, il y a trois mois. Cette fois, le carré 41 est bien sur la terre ferme. Les routes un peu plus fréquentables. Et les maisons ou ce qui en reste, plus ou moins habitables. Les restant des eaux stagnantes se sont évaporées. Mi-août, les eaux de pluie ont plongé les habitants dans un cauchemar. Ils étaient contraints d’abandonner leurs habitations. Aujourd’hui, le carré reprend vie peu à peu et se reconstruit.
Reconstruction
Tout est calme dans le carré 41 ce 17 novembre. Rues et ruelles sont presque vides, quelques passants pressent les pas. Aux devantures de certaines maisons, quelques habitants prennent un bain de soleil. Certaines boutiques également ont ouvert. À l’angle d’une rue, un cabaret a rouvert ses portes. Les clients se font rares. Le carré tente à nouveau de reprendre vie sans toutefois retrouver son rythme d’antan. Dans beaucoup des ménages, c’est encore le vide. La plupart des résidents se sont réfugiés ailleurs. Carré fantôme. Sur place, l’heure est à la reconstruction et à la rénovation.
Djibrine Mahamat avait perdu les 4 chambres de sa modeste demeure lors des inondations. Aujourd’hui, il n’a pas les moyens de les reconstruire. Il s’est démené à construire trois chambres de fortune en tôles recyclées. Un véritable bric-à-brac. Bâtir des maisons en tôles c’est le modèle que plusieurs familles ont choisi en raison de leurs moyens financiers très limités. « Construire une maison nécessite des moyens financiers conséquents. Mais tel que vous me voyez, je ne peux faire qu’avec les moyens de bord pour le moment », dit M. Djibrine. Les familles récupèrent les tôles et les chevrons de ses chambres écroulées à la place des briques. Plusieurs ménages le font.
Devant une maison ravagée par les eaux et clôturée par des tôles, un groupe de jeunes d’une famille se repose. Ils viennent de fabriquer des briques sur les débris de leurs maisons écroulées. Ils ont préféré eux-mêmes constituer la main d’œuvre que de faire dépenser la famille. Avec ces briques en terre battue, ils vont reconstruire leurs toits pour que vive leur famille.
Un peu partout dans le carré, le temps est à la reconstruction et à la rénovation. Ceux qui sont un peu nantis engagent leurs chantiers de reconstruction. Par contre, les mieux lotis et mieux nantis sont dans la rénovation. Renforcer la fondation des maisons et remblayer la cour des concessions.
La réinstallation semble difficile pour certaines familles. Elles déplorent la non-assistance des autorités durant les inondations et après les inondations. « Nous n’avons vu personne ni du gouvernement ni de la commune venir s’enquérir de notre situation », dit une dame installée dans une chambre de fortune sur les débris de sa maison. Selon les retournés, cette situation a obligé plus d’un d’entre eux à choisir exil de leur carré, le temps de se refaire une santé financière et faire face à la reconstruction ou à la rénovation. Toutefois, la plupart des maisons sont restées encore cadenassées.
Prévenir
Pour éviter qu’une autre catastrophe frappe encore le carré 41, un ingénieur en génie civil résident au quartier suggère au gouvernement de commencer déjà à étudier les possibilités de construire les canaux pour évacuer les eaux. « C’est le moment d’engager des ingénieurs pour la levée topographique du quartier. Ce qui s’est produit doit interpeller nos autorités », dit-il.
Christian Alladjim
Orthom L’O
Jeune, belle et joyeuse. Tout ce qu’elle touche lui réussit. Elle donne de l’éclat et de la visibilité à un événement quand elle participe. Le milieu de la mode africain se l’arrache. Son nom commence à circuler au sommet du mannequinat mondial. Sa fulgurante carrière semble partie pour ne pas s’arrêter…enfin peut-être…. Elle est presque irrattrapable tellement elle a creusé l’écart avec les autres mannequins de sa génération. Entrevue avec la fulgurante Claudia Mantangar, mannequin tchadienne en vogue.
Mais qui êtes-vous Claudia ? Vous sortez d’où ?
Faire simple ou compliqué ?
À vous le choix.
Bon, écoutez, je suis simplement MANTANGAR CLAUDIA. Je suis tchadienne par mon identité civile et mes valeurs culturelles. Et dans la vie professionnelle, je suis mannequin. J’ai obtenu mon bac en 2017 (rire) c’est pourquoi je souligne le bac. Vous ne trouvez pas que c’est bête ? Alors, je continue, après mon baccalauréat j’ai participé à des petites activités non diplômantes : la gestion des projets et la gestion hôtelière. Je viens de m’inscrire en première année de licence en communication d’entreprise.
Comment êtes-vous arrivé dans le milieu du mannequinat
Enfant, je rêvais d’être mannequin depuis mon enfance. Vous savez je viens d’une culture conservatrice alors oui je rêvais en silence. Chemin faisant, j’ai fait mes premiers pas à l’agence de Samira Loubri At les « Gazelles du Sahel » de la nuit de la femme tchadienne en 2008. C’était un moment inoubliable.
J’ai fait ce choix parce qu’être mannequin est un métier glamour qui t’ouvre au monde. Aussi, c’est un métier avec a une forte exposition médiatique. Il est très exigeant. Il y a une grande concurrence, beaucoup de candidates au départ, très peu sont retenues à l’arrivée. C’est la règle du jeu. Sauf la crème des crèmes arrive à se faire leur place au royaume du mannequinat. J’avoue c’est dur.
Comment te définir ?
D’abord, ambitieuse. J’ai toujours eu cette ambition de porter haut le drapeau de mon pays dans le domaine de la mode. J’avance, il faut que je continue à avancer, de toujours avancer malgré les difficultés.
Ensuite professionnelle. J’adore bien faire mon travail afin de toujours exceller dans ce que je fais.
Enfin, ouverture d’esprit. Parce qu’il faut respecter les opinions des autres. Et je suis réceptive aux critiques. Cela me permet de m’améliorer.
Vous avez participé à des défilés hors du pays ?
Oui plusieurs d’ailleurs. Entre autres défilé à savoir : MASSA(Abidjan), le FESMMA(Benin), FIMOG (Guinée Conakry), FESTIA (Mali), NSA(Bénin), ELIMA(Togo). Je viens aussi de participer à un défilé au Congo organisé par Street Blooz Fashion.
Des prix, vous en avez gagné ?
Oui. J’ai commencé en tant qu’amatrice en 2008, j’ai été élue trois fois de suite miss des soirées de mode au Tchad (2011, 2012 et 2013). J’ai reçu le trophée de meilleur mannequin décerné par l’agence gazelle du sahel en 2015. Enfin, il y’a 2 mois il m’a été décerné le prix de top model africain de FESMMA au Bénin.
Peut-on vivre uniquement du mannequinat ?
Oui. On a des exemples. Le mannequinat est connu comme le métier le plus lucratif dans le domaine de la mode. Mais cet aspect ne peut être remarqué que sous d’autres cieux. En Afrique, surtout, on ne peut pas vivre du mannequinat, ce n’est pas bien rémunéré. Je pense que pour vivre pleinement de la mode, il sera préférable d’avoir aussi de petits projets liés à la mode. Cela permettra au mannequin de s’en sortir..
Propos recueillis par Habiba Abdelhakim
La ville de Koumra est créée en 1962. Elle est comme posée en pleine savane comme un cordon qui relie deux villes historiques, Sarh et Moundou, du grand sud. Le chef-lieu de la province du Mandoul est à 680 km de la capitale, N’Djamena. Ialtchad vous amène à la découverte de cette ville de 75 000 âmes réparties dans 10 quartiers.
Samedi 7 novembre 2020, Koumra accueille le chef de l’État, Idriss Déby Itno. La ville a changé de décor. Les grands axes sont aux couleurs nationales. Des effigies du Maréchal du Tchad et des banderoles sont placées sont partout : aux carrefours et devant certains bâtiments publics. Elles souhaitent toute bienvenue au président. La capitale provinciale du Mandoul est prise d’assaut par les forces de sécurités. A 10 heures tout s’accélère. Tout devient intense. Même la circulation. « La ville est devenue bizarre, il y a trop de mouvements, je préfère rentrer pour éviter les accidents », lance une habitante, visiblement habituée au calme de la ville.
A midi, la grande voie bitumée qui longe le marché moderne est prise d’assaut par les habitants de la ville, en majorité de jeunes. Placés des deux côtés du « goudron », tous attendent l’arrivée du président de la République. « Ce sont des jeunes qui se cherchent et qui sont toujours au-devant de la situation. Ici les femmes sont laborieuses. Elles ne baissent jamais les bras. La ville regorge plusieurs groupements féminins. Koumra est en train de s'agrandir. Nous avons bénéficié de 18 km de route bitumée. Une promesse de 12 autres km nous attend. Notre ville est une ville laborieuse, cosmopolite où il fait bon vivre », dit le maire de la ville, Guidimbaye Madjiro Christian.
Mais quelles sont les potentialités de cette ville qui accueille le chef de l’État ?
D’abord, il y a une myriade de groupements qui créent des activités génératrices de revenus. Elles sont d’excellentes gestionnaires de ces organisations. Les jeunes s’y accrochent et font pieds à pieds leur place. Ville agricole, Koumra est réputée pour son karité et son sésame de qualité supérieure. Même s’il n’y a pas de données officielles sur la capacité de production annuelle, il est reconnu que c’est la province du Mandoul qui approvisionne les autres provinces du pays, surtout en Karité. Le président Déby Itno, lors de son séjour, a promis aux femmes d’industrialiser ce secteur. Les cultures du karité et du sésame rapportent beaucoup de revenus à la population, même si l’exploitation de ces ressources est encore informelle et artisanale.
Longtemps caricaturée comme la ville « aux voleurs coriaces », aujourd’hui elle respire la quiétude. Le maire de la ville se veut rassurant, « C’était faux. Et même si c’était vrai cela est maintenant un phénomène disparu, parce que les forces de sécurité se mettent au travail. Il y a toujours des brigades qui font des patrouilles partout dans la ville, ce qui fait que l’insécurité est maîtrisée. Nous remercions beaucoup les forces de sécurité pour leurs efforts dans ce domaine. Nous, hommes politiques natifs de cette ville nous avons toujours demandé aux jeunes de travailler la terre plutôt que de voler ».
S’il y a bien un autre phénomène qui gangrène la ville de Koumra et toute la province du Mandoul, c’est l’excision. Le président Deby Itno, « je m’adresse directement aux chefs traditionnels, aux chefs religieux, aux cadres du Mandoul et particulièrement à nos sœurs et femmes exciseuses en disant : il faut arrêter. Il faut arrêter définitivement cette pratique moyenâgeuse ». Des instructions sont données séance tenante pour traduire en justice ceux qui se livrent encore à cette pratique.
Le lendemain, la ville s’est réveillée dans le calme. Plus d’agitations. Finie l’effervescence. Le président et sa délégation ont mis le cap vers une autre ville du pays.
Maurice N’gonn Lokaar
Le Projet d’appui aux réfugiés et communautés d’accueil (PARCA) a été lancé le 8 novembre dernier à Koumra, chef-lieu de la province du Mandoul, par le chef de l’État, Idriss Déby Itno. Ialtchad Presse a rencontré le coordonnateur national du projet, Japhet Doudou Beindjila, revient sur le bien-fondé de l’initiative. Entrevue.
Bonjour, monsieur, le coordonnateur national ! Qu’est-ce que le Projet d’appui aux réfugiés et communautés d’accueil ?
C’est un Projet d'appui aux réfugiés et aux communautés d'accueil. C’est une initiative du gouvernement de la République du Tchad qui a bénéficié de l'appui financier et technique de la Banque Mondiale pour aider les ménages vulnérables qui sont autour des camps des réfugiés et également les réfugiés eux-mêmes. L'idée c'est de faire en sorte qu'il y ait un équilibre entre les réfugiés et les communautés hôtes. Depuis toujours, les réfugiés ont bénéficié de l'appui de tous les partenaires. La Banque Mondiale et le gouvernement ont réfléchi. Et ils ont constaté un déséquilibre. Il fallait corriger cela à travers le PARCA. Le but est de diminuer les tensions autour du partage des ressources naturelles entre les réfugiés et les communautés hôtes.
Pourquoi avoir choisi la province du Mandoul ?
C'est simplement parce que nous avons également des réfugiés dans le Mandoul, à Moïssala. Mandoul fait partie de la province qui appuie le projet. Comme je le disais, l'idée c'est d'amener le changement au sein des communautés hôtes qui sont autour des camps. Les Tchadiens ont beaucoup souffert de cette crise des réfugiés qui a envahi le Tchad depuis quelques années. Ils sont là sur le sol tchadien, on a utilisé les mêmes ressources, les Tchadiens ont tout donné pour les réfugiés. Maintenant ils sont devenus plus pauvres que les réfugiés. Donc il faut corriger ce déséquilibre. Et apporter un appui aux Tchadiens qui ont accueilli leurs frères réfugiés de la Centrafrique, du Soudan etc.
Quels sont les domaines d'intervention ?
Il y a deux composantes clés. La première composante est le renforcement des infrastructures communautaires. Le projet va investir dans la construction des écoles et des centres de santé, des châteaux d'eau pour renforcer la communauté hôte. Nous allons également construire des écoles dans les camps des réfugiés et là où il y a un besoin. S'il n'y a pas de besoins, nous allons faire tous ces investissements dans les camps donc ce sont les Tchadiens qui vont bénéficier de cet appui.
La deuxième complaisante est le transfert monétaire non conditionnel. Ce sont les filets sociaux. Sur la base des enquêtes que nous réalisons, nous arrivons à identifier les ménages vulnérables, c’est-à-dire pauvres. Dans le Tchad profond, vous trouverez des gens qui vivent dans des difficultés. Ce sont ces gens-là qui sont nos cibles. Le PARCA s’attaque à leurs problèmes, on essaie d'apporter des ressources financières directes. C'est de l'argent qu'on donne à la communauté, en raison de 45 000 FCFA par trimestre. On donne à chaque ménage qui est identifié et sélectionné. Nous avons une base de données, sur la base d'une enquête. Nous avons eu à la phase pilote. Les résultats sont très encourageants. Tous ceux que nous avons appuyés, 96% sont des personnes démunies. C'est l'étude qui a montré cela. Et c'est cela qui nous encourage. L'appui continu des plus hautes autorités est présent et nous exécutons leurs orientations.
D’autres provinces sont concernées par le projet ?
Nous intervenons dans 7 provinces du Tchad, là où il y a les réfugiés, dans un rayon de 25 kilomètres à savoir : Logone oriental, Ouaddaï, Lac, Wadi Fira, Ennedi Est, Moyen Chari et Mandoul. En ce qui concerne la proportion de financement, nous appuyons à 70 % la communauté hôte et 30 % pour les réfugiés.
Important à savoir : d’un montant global d’environ 67,5 milliards de FCFA, le PARCA couvre, à travers les programmes Filets sociaux, 130 000 ménages pauvres et vulnérables. Ces derniers sont bénéficiaires des transferts monétaires non conditionnels et des subventions d’activités productives, dont 18 800 ménages vulnérables de la province du Mandoul.
Entrevue réalisée par Maurice N’gonn Lokaar
Le décès de sa maman en 2018 lui a procuré le sens de l’entrepreneuriat. Entre ses études universitaires et la vente des criquets frits, elle se prend en charge. Portrait d’une jeune femme battante.
Mariam Djimidaga à 24 ans. Elle est étudiante en 3e année de Droit à l'université de Dschang, au Cameroun. Fille aînée d’une fratrie de 2 filles et 1 garçon, Mariam Djimidaga est une fille battante.
Après le décès brusque de leur maman, Mariam a décidé de pérenniser l’activité de sa défunte mère : vendre les criquets frits. D’ailleurs elle aidait déjà sa défunte mère dans cette tâche. « Je faisais cette activité depuis mon enfance avec ma maman alors rien n'est nouveau pour moi », raconte-t-elle, joyeuse. Au Tchad, voir une jeune fille, de surcroît étudiante s’exposer à la fumée et aux rayons solaires toute la journée relève de l’extraordinaire.
Malgré les études à l'étranger, rien ne l’empêche de faire prospérer sa petite entreprise. « J’étudie au Cameroun, mais cela n’est pas une entrave pour moi. Chaque congé et vacance, je viens à N'Djamena pour le commerce et à mon absence, je confie tout à la petite sœur de maman », rapporte-t-elle. Aucun métier n'est facile, mais Mariam est loin d'abandonner cette activité qui lui génère des revenus. « Les bénéfices que régénère mon commerce allègent un peu les parents dans notre prise en charge et surtout pour nos petits besoins ».
Pour s'approvisionner, elle se rend au marché de Dembé situé dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena. Pour cela, elle doit être matinale chaque jour. Dès 6h, Mariam quitte son domicile à Ardep-djoumbal pour se rendre à Dembé. Et ensuite, aller à son stand de vente à Sabangali devant le Lycée Technique Commercial (LTC).
Les N’Djamenois sont des grands consommateurs en cette période. Les criquets sont vendus cher chez les grossistes. « En début de saison, la petite bassine coûte 10 000f. Lorsque la saison est bien entamée, on achète le même bassin à 8 000 f parfois 7 500f », dit-elle.
Avec son commerce, Mariam achète les criquets en fonction de l'argent qu'elle gagne. « Au début, je ne préparais pas beaucoup, mais depuis que les clients de ma maman ont su que je continue à faire malgré son absence, ils viennent chaque jour acheter et cela m'a permis d'augmenter le chiffre de mon commerce », se réjouit-elle. Elle ajoute qu'elle a commencé avec 20 000F. « Avec ça, je prenais les criquets pour 10 000f mais aujourd'hui, j'achète pour 30 000f et avec les condiments et d'autres besoins pour la préparation, parfois je dépense plus 35 000f ».
Elle affirme que le jour où elle a beaucoup de clients, elle réalise de gros bénéfices. « Je peux faire 10 000f ou plus de bénéfice par jour ». Mais comme chaque jour n'est pas dimanche, il arrive des jours où son fonds de commerce prend un coup. « De fois je me retrouve avec 30 000f ou moins et avec le restant de ma marchandise à la fin de la journée ».
Entreprenante, Mariam Djimindaga a embauché quatre femmes pour l’aider. Elles sont les ex-employées de sa maman. Elle a décidé de les garder. Elle les paie par jour et en fonction de leur travail. Ces aides ont pour travail de nettoyer les criquets et les frire. Mariam se charge juste de les assaisonner et les servir au client.
M Madji est l'un des clients satisfaits. « J'achète les criquets ici depuis des années. Après le boulot, je passe ici pour acheter à mes enfants et à ma femme », dit-il.
Mme Solange, mère de 5 enfants, est aussi une fidèle cliente. Elle est venue accompagnée de ses enfants. « Après avoir récupéré mes enfants à l'école, on passe par ici pour acheter. Le jour où elle ne fait pas, je l'appelle comme j'ai son numéro, pour savoir ce qui ne va pas. Elle prépare tellement bien qu'on aime manger chaque jour », affirme Mme Solange.
Orthom L’Or
Les quartiers Walia et Toukra dans le 9e arrondissement ressemblent à des îles en plein cœur de N’Djamena. En cause la crue du fleuve Chari et du Logone. Ialtchad Presse est allé le constater. Reportage.
Walia. Carré Ngonba dans le 9e arrondissement de la ville de N’Djamena. Un silence de cimetière y règne sur ce carré qui abrite l’ex cimetière Sud de N’Djamena. Quelques maisons abandonnées se dressent au milieu des eaux. A l’entrée de l’ex cimetière, quelques jardiniers s’activent à arroser et planter des légumes. À côté d’eux, des manœuvres chargent une benne de sable.
L’air frais qui souffle en cette matinée du 13 novembre sur le carré Ngonba semble ne produire aucun effet sur Pabamé. Pantalon noir replié jusqu’aux genoux, t-shirt noir aussi, il s’active à renforcer le barrage autour de sa concession. L’eau y est déjà entrée, mais stoppée grâce à une petite digue faite des briques. Depuis le début de la semaine, les eaux du fleuve Chari ont débordé de leur lit et se sont déversées sur le carré. Ngonba s’est retrouvé brusquement inondé.
Les eaux rendent l’accès difficile à la concession de Pabamé, notre conversation s’est tenue à distance comme au temps des Sao. La légende raconte que les Sao, hommes de grande taille, pouvaient communiquer entre eux sur des kilomètres. Selon M. Pabamé, depuis douze ans qu’il habite le coin, c’est la première fois que les eaux du fleuve ont débordé pour atteindre ce niveau. « Cela ne s’est jamais produit depuis que je vis ici. Les anciens du coin disent que c’est un phénomène qui se répète chaque 10 ans », dit-il. Les voisins de M. Pabamé se sont réfugiés dans d’autres quartiers. Même une partie de l’ancien cimetière s’est retrouvée sous les eaux. Malgré tout il est resté avec sa famille sous les eaux. « Je suis le seul à rester malgré l’inondation. Mais là je vois d’autres voisins qui ont commencé à regagner leurs demeures », fait-il observer.
Pour bloquer l’écoulement des eaux du fleuve au quartier, les habitants de Ngonba se sont mobilisés pour construire un barrage sur les berges du Chari. « C’est ce qui a ralenti la montée des eaux. Le niveau d’eau a commencé à baisser », affirme M. Pabamé.
Toukra. Le même scénario se dessine. Les eaux du fleuve Logone ont débordé pour se déverser également dans les quartiers Dingangali, Ngueli, Ngoumna, etc. Les quartiers comme Dingangali et Ngueli ont été évacués simplement. Ses habitants ont été relogés sur le site de Toukra. A Ngoumna par exemple, la résistance s’organise encore grâce à des digues. Vers Toukra, les maisons qui ne sont pas inondées sont encerclées par les eaux obligeant les résidents à vivre comme sur une île.
Cohabiter avec les eaux
Madjirangué Aristide, habite Gardolé Djedid près de 3 ans déjà. Bottes au pied, il marche en direction du goudron. Il doit se rendre en ville pour quelques courses. Bien que sa cour ne soit pas inondée de l’intérieur, à la devanture déjà il faut plonger les pieds dans l’eau. Chaque jour, il faut marcher dans les eaux pour rejoindre la grande voie. « C’est fatigant la marche dans l’eau. Mais on n’a pas le choix », se lamente-t-il. Lui aussi dit que ce phénomène se répète à chaque 10 ans. « Depuis 2012, c’est cette année que ça se reproduit ». Mais précise-t-il, ce n’est pas avec la même ampleur. « Pour la première fois, c’était à une faible intensité. Mais cette fois, c’est inquiétant. » Justement, le niveau d’eau ne fait qu’augmenter de jour en jour. Cependant, souligne Aristide, il n’y a pas des maisons écroulées dans son secteur. « Heureusement qu’ici il n’y a que des maisons en dur. Sinon cela allait très grave. »
Malgré le niveau d’eau qui ne fait qu’augmenter, certains habitants ont préféré être des insulaires en cohabitant avec les eaux. Ils refusent d’abandonner leurs maisons et leurs biens à la merci des voleurs. Le vol a augmenté dans les différents quartiers inondés. Pour assurer la sécurité de leurs biens, certains pères de famille évacuent les progénitures et gardent la maison à la nuit tombée.
Walia et Toukra sont pris en sandwich par les eaux du fleuve Chari et Logone plongeant les populations dans le désarroi. Tout porte à croire que la fin de leur calvaire n’est pas pour demain.
Christian Allahdji