LITTÉRATURE TCHADIENNE : vie de Joseph Brahim Seid Needi
Nous ouvrons cette rubrique Littérature tchadienne du journal en ligne ialtchad Presse par un hommage au tout premier écrivain tchadien, Joseph Brahim Seid Needi grâce à un texte très intéressant que lui a consacré un autre compatriote écrivain Noël Nétonon Djékéry, texte lu pour vous par le journaliste Ladjal Callixte.
Joseph Brahim Seid Needi aurait eu 90 ans le 27 novembre 2017 mais hélas, l’homme qui aimait tant son pays avait tiré sa révérence pour ne pas assister aux obsèques de son pays le Tchad.
En effet, Joseph Brahim Seid Needi est né le 27 novembre 1927 en pays Gor dans le Logone Oriental. Il est mort en 1980 au moment où le Tchad était déchiré et ensanglanté par une guerre entre les tendances politico militaires et groupes armés qui ont déferlé à N’Djaména à la faveur des événements qui ont éclaté le 12 février 1979 à N’Djaména avant de gagner le reste du pays. Selon Noel Nétonon Djékéry un autre grand écrivain tchadien qui a consacré un texte très intéressant sur Joseph Brahim Seid Needi, l’homme s’éteint éteint au moment où les démons de la guerre se sont à déchiqueter le Tchad. S’était comme si, poursuit Ddjékéry, le patriote élégant qu’avait été Joseph Brahim Seid Needi avait tiré sa révérence pour ne pas avoir à supporter le spectacle macabre de sa terre natale livrée à la voracité des chiens.
Entre 1927 et 1980, soit une parenthèse d’à peine 53 ans, nous révèle Djékéry, Joseph Brahim Seid Needi aurait vécu plusieurs vies. Il commence puis abandonne successivement des études de médecine à Ayos au Cameroun, puis de pharmacie à Brazzaville, abandons tous imputés à son indocilité. Dans ce texte consacré à Joseph Brahim Seid Needi, Noel Djékéry nous révèle un homme au parcours atypique qui a passé 1 mois en prison pour atteinte à l’ordre colonial. Après un séjour d’un mois en prison, Brahim Seid quitte le Tchad et devient brièvement aide maçon au Soudan. Ensuite, il rejoint le Caire où il reprend ses études secondaires. Il y obtient son baccalauréat, ce qui lui permet d’aller étudier le droit à Lyon en France. Diplôme en poche, Joseph Brahim Seid Needi rejoint son pays natal le Tchad, fraichement proclamé indépendant et y exerce le métier de juge. Il sera ensuite nommé ambassadeur du Tchad en France. Au terme de cette carrière diplomatique, il est rappelé au Tchad et intègre le gouvernement de l’époque comme ministre de la justice.
Comme on peut le constater à la lecture de ce texte consacré à Brahim Seid Needi, l’homme n’a pas été écrivain au début mais il s’est révélé comme un grand écrivain patriote qui aime son pays.
Ce qui frappe d’entrée dans les titres retenus par Joseph Brahim Seid Néedi, pour ses 2 ouvrages, nous confie Djékéry, c’est chaque fois la mise ne exergue du nom de son pays : Au Tchad sous les étoiles, Un enfant du Tchad. Cette référence constante à son pays le Tchad sa terre natale signifie clairement que la plume de Joseph Brahim Seid Néedi n’écrit point pour lui-même, mais se veut la voix des siens. Il s’inscrit ainsi nous dit Djékéry, dans cette forte tradition inaugurée par Aimé Césaire en ces termes « …. Je viendrai à ce pays mien et je lui dirai : « … Embrassez-moi sans crainte…Et si je ne sais que parler, c’est pour vous que je parlerai ».
Pour Noël Djékéry, l’écrivain Joseph Brahima Seid Needi est un visionnaire qui, en choisissant d’être porte-voix de son pays, Joseph Brahim Seid Needi s’est mis au diapason d’autres auteurs africains comme Tchicaya U Tamsi, Mongo Béti et les autres. Ce qui tranche chez Joseph Brahim Seid Needi par rapport à ses confrères et contemporains, c’est la dimension quasi prophétique de ses écrits, particulièrement du recueil des contes « Au Tchad sous les étoiles », souligne Djérkéry qui fait remarquer que les contes tirent leur source de l’oralité, cependant, les contes rapportés par Joseph Brahim Seid Needi n’ont pas été simplement collectés auprès de leurs dépositaires et livrés au public sans mise en perspective ne reformulation. Ces contes ont été structurés, insufflés de l’histoire du pays et du génie poétique propre à Joseph Brahim Seid Needi qui a fait de ces contes, une arme de désenvoutement massif contre les maléfices qu’il sentait planer au dessus de son pays.
Joseph Brahim Seid Needi savait que son pays le Tchad est porteur d’une histoire lourde et d’une mémoire blessée. Il a avait conscience que les Tchadiens qui sont les siens, issus de peuples dont les différences ont été exploitées durant des années à des fins d’asservissement, n’allaient pas s’affranchir facilement des haines qu’on leur avait inculquées. Il a utilisé les contes pour mettre les Tchadiens en garde contre les démons de la division, pour les exhorter à promouvoir entente eux la paix, la concorde et le dialogue.
Noël Djékéry nous apprend que ces contes recèlent la forte empreinte spirituelle de Joseph Brahim Seid Needi, une empreinte où s’entremêlent les différentes appartenances qui harnachent ou caractérisent la société tchadienne d’hier et et d’aujourd’hui.
Pour Noêl Djékéry, Joseph Brahim Seid Needi est un personnage complexe. Il est catalogué ou catégorisé tantôt comme musulman, tantôt comme chrétien mais cet étiquetage n’est qu’une solution de facilité qui occulté difficilement la complexité de ce personnage.
Car Joseph Brahim Seid Needi est le Tchadien fondamental qui s’assume par ses écrits à tout le moins, ses héritages musulmans chrétiens et animistes. C’est de ce subtil métissage que s’élève cet inoubliable chant d’humanisme et de tolérance qu’est le recueil « Au Tchad sous les étoiles ». D’après Djékéry, des deux contes inauguraux du recueil, cette volonté syncrétique se trouve confirmée : Tchad pays d’abondance, de bonheur et d’amour ; Djingué ou la sagaie de la famille.