Le pacte social signé entre le gouvernement et les syndicats semble voler en éclat. Certains syndicats menacent de déclencher une grève pour non-respect des engagements du gouvernement. Surtout, pour ce qui concerne le payement des primes de certains enseignants du secondaire. Le syndicat des enseignants du Tchad (SET), section de N’Djamena menace d’aller en grève d’ici lundi prochain, si l’État n’honore pas ses engagements. Reportage.
Les organisations syndicales et le gouvernement avaient signé le 4 octobre dernier un pacte social triennal qui devrait contribuer à l’instauration et à la consolidation d’un climat social apaisé. Mais ce pacte, selon nos sources, ne semble pas avoir été respecté. Certains syndicats comme le SET commencent à grogner. La section SET de N’Djamena menace d’aller en grève d’ici lundi si l’Etat n’honore pas à ses engagements.
Le secrétaire général de la section provinciale de N’Djamena Mbayana Laoukoura qui s’exprimait à propos du non-respect du gouvernement à reverser des rappels des primes de craies et de documentation recommandées par l’Inspection Général de l’État (IGE), souligne que le gouvernement refuse de manière délibérée de payer le salaire de juillet 2018 des enseignants reversés au trésor public. Il s’y ajoute aussi le non-payement des arriérés des salaires des nouveaux intégrés, la négligence des situations salariales et administrative des professeurs scientifiques contractuels. Le SET, section de N’Djamena dénonce aussi le refus du gouvernement de payer les jetons de présence des membres de la CAP des ministères de l’Éducation nationale, de la Formation professionnelle et des Métiers, de la Jeunesse et des Sports, de la Culture et de la Promotion et de la Diversité, et en fin de l’Enseignement supérieur.
Selon les syndicalistes, l’objectif recherché par le gouvernement et les organisations syndicales en signant le pacte social est d’instaurer la paix sociale et un climat de confiance. Mais, souligne-t-il, le gouvernement cherche à faire du dilatoire sur certains points. Le syndicaliste qui, à la sortie d’une longue concertation avec ses camarades de la section provinciale de N’Djamena, exige du gouvernement le strict respect de ses engagements en prenant compte tous les points. Mbayana Laoukoura prévient en cas de non-respect des points énumérés, le trésor public et la solde seront responsables de tout ce qui adviendra. Il demande à ses camarades de rester vigilants et soudés pour des actions à mener en cas de non-respect.
Le mois dernier, certaines sections provinciales du SET, telle que la section du Moyen-Chari et celles des deux Logone avaient émis l’intention de sécher les courent si le gouvernement ne respectait pas ses engagements.
À part le syndicat des enseignants du Tchad, d’autres syndicats comme le syndicat du personnel de la santé et ceux de l’action sociale se sont aussi plaints du non-respect des engagements du gouvernement.
Selon un représentant syndical qui s’exprime sous couvert d’anonyme, l’État a fait de son mieux en respectant plus de la moitié de ses engagements. Il exhorte les autres syndicats comme le SET à être indulgents dans ses réclamations.
Pour préserver les acquis du pacte social, le gouvernement devrait s’évertuer à respecter ses engagements, surtout ceux, des enseignants scientifiques qui ont déserté les cours depuis plus de deux semaines.
Jules Doukoundjé
Le Groupe de Réflexion et d’Action pour l’Appel du 1er juin 2021 a présenté à la presse les propositions relatives aux critères de participation au Dialogue National Inclusif et Souverain (DNIS). Ces critères sont contenus dans un document rendu public le 4 février dernier et destiné aux forces vives tchadiennes. Ces propositions de critères de participation pourront servir de canal pour le dialogue en cours disent les auteurs. Reportage.
À travers ce document, le groupe de réflexion et d’action pour l’appel du 1er juin invite au débat dans la recherche du consensus préalable au DNIS. Le succès du dialogue selon le document repose sur l’information immédiate et transparente du public, des forces vives, de l’agenda et des critères de participation. Cela va permettre à tous de se prononcer et de se préparer pour envoyer des délégués informés et représentatifs. Ses propositions sur les critères de participation se résument à quatre points. La qualité des participants, la parité hommes/femmes, la non-représentativité du Gouvernement et du CNT et le refus du droit de vote aux délégations. Pour le président du GRA-Appel du 1er juin, Bedoumra Kordjé, les délégués doivent avoir la capacité de participer de manière efficace aux débats constructifs. Ces débats selon M. Korê, vont permettre de parvenir à un consensus sur les principales thématiques essentiellement politiques que sont la refondation de l’État, sa forme et les textes législatifs qui en découlent. À propos du 2e point, le président propose que le dialogue se passe entre les deux camps c’est-à-dire entre ceux qui n’ont pas le même point de vue. Selon lui, le paysage politique tchadien est marqué par l’existence de deux camps. D’un côté ceux qui sont au pouvoir ou qui soutiennent le CMT. Et de l’autre côté ceux qui ne se reconnaissent pas dans la politique et les institutions mises en place à la suite du décès du Président Idriss Deby Itno. Il poursuit en disant que ce sont ces deux camps qui doivent discuter lors du dialogue. Pas de représentants du Gouvernement et du CNT lors des assises du dialogue dont le groupe de réflexion le veut souverain. De l’avis de Kordjé, seul le PCMT garde sa fonction de Chef de l’État et le Gouvernement qui assure les affaires courantes de la République. Les délégations des forces de défense et de sécurité, des autorités religieuses, des autorités traditionnelles et coutumières, ne prendront pas part au vote.
Aussi, le président du groupe de réflexion et d’action pour l’appel du 1er juin 2021 Bedoumra Kordjé invite le président du Conseil Militaire de Transition (CMT) Mahamat Idriss Deby à apaiser l’atmosphère et créer un climat de confiance entre les Tchadiens. Qu’il matérialise ainsi par un texte la souveraineté du dialogue et la non-éligibilité des dirigeants de la transition à tout poste électif à la fin de la transition. De plus, il demande au président de la transition de mettre fin au régime de terreur qui inquiète les populations illustrées par les massacres d’Abéché et de Sandana.
Kouladoum Mireille Modestine
D’Abéché capitale provinciale du Ouaddaï en passant par la sous-préfecture de Donia dans le Logone Oriental et maintenant à Sandanan. Les femmes se mettent de plus en plus au-devant de la scène pour réclamer justice en sortant parfois torse nu. Ce phénomène semble nouveau dans l’espèce publique au Tchad. Pour comprendre cette situation, la rédaction a recueilli l’avis de quelques analystes. Reportage.
Les conflits intercommunautaires ne cessent d’endeuiller les familles dans plusieurs provinces du Tchad. Face à cette situation qui persiste et sans aucune réponse fiable, les femmes se mettent au-devant de la scène pour exiger plus de justice. Le 24 janvier dernier, lors d’une manifestation à Abéché pour contester contre l’intronisation du chef de canton de Bani-Halba, des centaines de femmes abéchoises se sont mises au-devant de la scène pour contester la répression des forces de l’ordre. Deux semaines plus tard, c’est à Donia, dans la province du Logone occidental que les femmes ont manifesté torse nu pour contester l’intronisation du nouveau chef de canton. Lors des massacres de Sandana, le 10 février dernier, les femmes avaient pendant 2 jours marché torse nu et les mains sur la tête pour réclamer justice.
La femme tchadienne qui, pendant longtemps mise à l’écart dans les négociations des conflits intercommunautaires s’invite aux débats et ne semble pas prête pour lâcher du leste sans obtenir gain de cause.
Pour expliquer ce phénomène qui semble nouveau, surtout quand les femmes se mettent à torse nu pour manifester, le secrétaire général national du syndicat des enseignants du Tchad (SET) et natif du grand Moyen-Chari, Ngartoïdé Blaise est formel. La situation est insupportable et les femmes, en tant que mères sont les plus touchées. Selon lui, on ne peut pas apprendre à une femme comment pleurer son enfant abattu devant elle. Le SG qui a dénoncé la violence perpétrée par les forces de sécurité publique, estime que celles-ci excellent dans les défenses de la sécurité dans la sous-région, mais peinent à assurer la sécurité de sa propre population. Ngartoïdé Blaise indique que cette situation ne restera pas impunie. Il souligne que les ressortissants de cette localité passeront par les moyens légaux pour que les bourreaux soient jugés et condamnés. Selon lui, ce serait des militaires qui ont quitté le rang pour aller tirer sur les paisibles citoyens de Sandana et c’est eux qui distribuent les armes à feu aux éleveurs.
Au sujet de la manifestation des femmes de Sandana et de Koumogo torse nu, il explique que quand les femmes se mettent à nue, c’est une malédiction qui s’annonce. Pour le SG du SET, quand une femme se déshabille pour montrer ses seins, c’est un signe de malédiction. Il souligne que ceux qui ont tiré sur les populations de Sandana vont mal finir. Il promet aux autorités politiques que les rites sont faits par rapport aux femmes qui sont torses nus auront de conséquences néfastes dans les jours à venir. Ngartoïdé Blaise note que l’échec sera à tous les niveaux.
De l’avis du sociologue Mbété Félix, la nudité des femmes en public et le sang versé sont les deux interdits en pays Sara et Ngambaye. Pour l’analyste, la nudité totale ou partielle de la femme mariée en public est motivée par l’injustice du mari, du frère, de la famille ou par le manque de protection face à l’adversité et les attaques multiformes. Mbété Félix souligne que selon la tradition du groupe Sara, l’homme qui ne répare pas l’exposition de la nudité de sa femme en public ou de sa mère, s’expose à de terribles sanctions mystiques. Selon lui, le mari qui ne répare pas la nudité de sa femme en public peut être soumis à la vengeance de ses frères pour laver l’honneur de leur sœur. Mais de nos jours, précise-t-il, il ne s’agit pas seulement des femmes en milieu Sara, mais le phénomène a été aussi observé à Abéché où les femmes semblent prendre le leadership pour réclamer justice et exprimer leur ras le bol. Le sociologue note qu’à travers ces actes, elles interpellent tous les hommes et l’État tchadien qui n’arrivent pas à protéger la vie humaine sacrée. Pour lui, par ce geste, elles invitent au respect de la vie humaine et de la dignité humaine.
Jules Doukoundjé
La semaine passée s’est enchevêtrée de grèves des agents de l’État dans quelques départements ministériels. À l’éducation, les enseignants scientifiques au secondaire réclament leur reversement dans le statut général de la Fonction publique, mais aussi leurs arriérés de salaires. Le SG du Syndicat national des enseignants du Tchad (SET), Blaise Ngartoïdé, dans un entretien à Ialtchad Presse regrette cette situation. Entrevue.
Le Syndicat national des enseignants du Tchad (SET) s’indigne de ce qui se passe par rapport au traitement des enseignants scientifiques et des maîtres communautaires. « Nous avons pour fonction d’alerter le gouvernement par rapport à des points de revendications. C’est ce que nous avons fait en tant que syndicat responsable. D’abord pour les maîtres communautaires qui constituent près de 70% des enseignants. Cela n’a pas été entendu, le budget de l’État étant voté sans la prise en charge de ces derniers » dit Blaise Ngartoïdé, SG national du SET. Selon lui, cette situation a causé trop du tort à l’école tchadienne. Il affirme que dans toutes les zones méridionales les maîtres communautaires sont en grève. Les professeurs scientifiques, dit-il, ont dans un premier temps signé des contrats avec le ministère de l’Éducation nationale. Certains ont perçu la totalité de leur traitement, d’autres non, souligne le SG du SET. Il soutient que plus de 98% n’ont pas perçu leurs arrêtés de contrat. Il signale tout de même, le reversement d’une petite partie est à l’origine du déclenchement de la grève des professeurs scientifiques contractuels, dit M. Blaise.
Le syndicaliste soutient que le SET n’a pas baissé le bras. « Nous avons écrit au ministre de l’Éducation nationale, nous avons aussi fait une fiche portée à l’attention du Chef de l’État. Il a réagi en contactant le ministre de Finances et du Budget. Il a demandé que le SET lui clarifie sa revendication. Et préciser ceux qui sont concernés par les arriérés et ceux qui n’ont pas été encore reversés. Nous l’avons fait par le biais du secrétaire général des Finances ». À son avis, les choses sont en cours d’être examinées. Seulement, note-t-il, nous sommes dans un pays ou les paroles des autorités ne sont pas prises au sérieux par les travailleurs. Du côté des maîtres communautaires, le ministère des Finances est en train de se grouiller pour qu’ils soient satisfaits, soutient M. Blaise. Il indique que le SET a délégué ses membres qui ont travaillé sur le dossier de l’arrêté de reversement des contractuels. L’équipe du SET assure-t-il, attend d’un moment à l’autre cet arrêté. Il remarque que de façon individuelle, certains professeurs scientifiques se sont fait payer. « Seulement, ceux qui ont des arriérés sont plus nombreux. Ce qu’il faut retenir, nous attendons l’arrêté pour aller vers les professeurs scientifiques et faire de concession avec eux. Si pour ce mois de février, la totalité de leurs arriérés est prise en compte, nous pouvons leur demander la reprise si l’arrêté apparaît », livre le SG.
Un souci orienté vers le devenir de l’école tchadienne
Le SG national du SET affirme, lorsqu’on va vers son employeur avec de revendications à 100%, il faudrait au moins qu’on totalise 60 à 70 % de compromis. Ce qui vaudra pour le syndicaliste que la négociation continue et la reprise soit effective. Pour l’instant exprime-t-il, le SET ne peut pas forcer la main des professeurs scientifiques à reprendre les cours, ils sont dans leurs droits. « Notre plaidoyer c’est un souci orienté vers le devenir de l’école tchadienne. Ça nous gêne de voir nos enfants vadrouillés dans les quartiers. Si le mois de février finit sans une satisfaction aux revendications de ces professeurs, ils totaliseraient déjà deux mois sans cours. L’enjeu est d’ores et déjà important pour les élèves surtout ceux des classes d’examens », constate M. Blaise. Il précise que sans doute, le volume horaire pour composer les examens de fin d’année sera atteint. Le technicien de l’éducation imbu du danger plaide afin que le ministère de Finances décante plus rapidement cette situation. Il révèle aussi, le sort des nouveaux recrûs au ministère de la Jeunesse et des Sports qui n’ont pas perçu la totalité de leur salaire en grève.
La section SET de N’Djamena, dit-il, est en train de préparer une grève de soutien. « Il faut qu’une solution globale et définitive soit trouvée pour toutes ces revendications. Il faudrait que le gouvernement s’attelle afin que l’année ne soit plus perturbée, remettre notre éducation sur les rails. Créer des conditions favorables pour l’organisation des examens de fin d’année », suggère le responsable du SET. L’enseignant estime que ce sera une expression de joie des élèves, des parents, du gouvernement ainsi que nos partenaires éducatifs.
La grève des enseignants scientifiques a été lancée annoncée par le rapporteur adjoint de l’amicale Djiraïbé Kosmadje, le 03 janvier 2022. Ils revendiquent : les reverser sans condition à la Fonction publique, payer intégralement leurs arriérés de salaire conformément au pacte social (50% en octobre et 50% en décembre 2021).
Moyalbaye Nadjasna
Depuis quelques jours, une conversation présumée de Timan Erdimi avec une autorité centrafricaine non-identifier circulait sur les réseaux sociaux. Dans ce coup de téléphone, l’on peut écouter la voix de ces deux hommes qui demandent le soutien de Wagner en la République du Tchad pour renverser le pouvoir du Conseil Militaire de Transition (CMT) et la France. En réaction à cet audio, le ministre de la communication Abdramane Koulamallah a affirmé sur les ondes de la RFI ce 15 février que Monsieur Timan Erdimi s’auto-exclu de la tenue du pré-dialogue de Doha. Professeur Ahmat Mahamat Hassane fait une analyse politique à propos de la réaction du ministre de la communication. Reportage.
« Sous prétexte qu’il veut chasser la France et le CMT, Timan Erdimi est capable d’aller pactiser avec le diable pour venir déstabiliser le pays. C’est extrêmement grave. Nous n’accepterons pas que cet homme qui projette faire la guerre au moment où les gens veulent faire la paix puisse assister à un pré-dialogue. Nous accordons le bénéfice du doute au gouvernement centrafricain mais les autorités centrafricaines doivent donner des explications au gouvernement Tchadien ». Propos du ministre de la communication porte-parole du gouvernement Abdramane Koulamallah suite à la présumée discussion téléphonique. Professeur Ahmat Mahamat Hassane analyste politique, souhaite que les concernés que sont Timan Erdimi et l’autorité centrafricaine démentent ou confirment cette supposée conversation.
Pour lui, la réaction du gouvernement est précipitée. « Les réseaux sociaux font circuler beaucoup de fausses informations de nos jours donc pour un gouvernement responsable, on aurait dû prendre la précaution de vérifier l’authenticité de l’audio avant de prendre une position claire. À moins que le gouvernement est déjà accompli cette petite vérification préliminaire pour crédibiliser sa réaction », a-t-il indiqué. De son avis, Timan n’est pas au pouvoir pour qu’au nom de la République du Tchad puisse engager des conventions internationales avec la Russie qui est un état sujet du droit international. Il trouve la réaction du gouvernement très hâtée et légère.
L’analyste politique souligne également que le même gouvernement qui exclut Timan du pré-dialogue a affirmé à travers le premier ministre de transition que la tenue du Dialogue National Inclusif est conditionnée par le pré dialogue de Doha. « Tout me laisse croire que cette histoire de dialogue risque de ne pas avoir lieu. C’est des recherches de prétexte et c’est dommage. Monsieur Timan Erdimi a des ambitions pour le pouvoir depuis 2005 et il ne l’a jamais caché », précise-t-il. Professeur Ahmat ajoute que ça serait imprudent de prendre une telle décision pour juste une conversation téléphonique qui se limite à un simple souhait de Timan par rapport à Wagner. Ils crédibilisent le coté gouvernement centrafricain en lui accordant le bénéfice du doute poursuit-il, et s’accroche sur l’élément Timan Erdimi. L’analyste politique insiste sur l’authenticité de l’audio. Pour lui, ce n’est pas un élément crédible pour pouvoir s’accrocher dessus. « Un adversaire politique si on veut vraiment aller à un dialogue sincère avec lui, cette discussion ne peut pas empêcher qu’on puisse l’accepter à la table de négociation de Doha. Timan Erdimi n’est pas le seul à être dans les politico-militaire, il ya plusieurs groupes », argue-t-il. Il revient sur le fait que le gouvernement tchadien a pris il n’y a pas longtemps, une loi d’amnistie générale et que Timan Erdimi en bénéficie. Professeur Ahmat rappelle le caractère inclusif du dialogue que le voulait le gouvernement et réaffirme que ce dernier n’a pas à opérer une action de sélection. Il faudra un peu de calme du côté du gouvernement pour pouvoir prendre de bonnes décisions, a-t-il conclut.
Kouladoum Mireille Modestine
Une véritable scène de théâtres ce matin, 15 février 2022 à l’Espace Fiesta-Africa de N’Djamena capitale tchadienne. Les ressortissants du Grand Moyen-Chari se sont donné rendez-vous à ce lieu pour marcher et faire le deuil. Les marcheurs veulent exprimer leur soutien aux Tchadiens tués à Sandana dans le Moyen-Chari et à Abéché dans le Ouaddaï. La manifestation a été violemment dispersée par les agents de la sécurité. Reportage.
7heures. Les marcheurs habillés en noir, signe de deuil, n’ont pas pu se rassembler comme prévu à l’Espace Festa-Africa dans le 6e arrondissement de N’Djamena. Une forte mobilisation policière a pris d’assaut les lieux et les disperse. Ce n’est pas tout, les malheureux manifestants en deuil sont suivis sur l’axe Mbaïlem Dana. En file indienne, hommes comme femmes, ils se retrouvent brusquement sous une pluie des gaz lacrymogènes. C’était la débandade.
Les agents de sécurité étaient les maîtres du terrain, contrôlant toutes les voies secondaires du quartier Moursal. Tous les établissements scolaires dans cette zone ont libéré leurs élèves. Les enfants se précipitent chez eux pour se mettre à l’abri d’éventuel dérapage. Djimssassem Narbaye, coordonnateur de la plateforme du groupe « Robndo » fait partie des marcheurs. Il est frustré du comportement des forces de sécurité. Selon lui c’est juste un recueillement, on n’a pas besoin d’une autorisation pour organiser un deuil. « Nous ne sommes pas venus pour une marche politique ou citoyenne pour s’en prendre au gouvernement. C’est une manifestation de deuil pour apaiser les douleurs d’une communauté meurtrie. C’est un fait social, même les diables pleurent leurs morts. C’est vraiment déplorable, il faut que ce Diable incarné change de camp », dit-il.
Le coordonnateur de la plateforme Robndo remarque que c’est la tournure de la situation sur le terrain à Sandana qui pose problème. Ce n’est pas la première fois, dit-il. En 2015, 2019 c’en était pareil soutien M. Djimssassem Narbaye. « C’est un massacre bien planifié et organisé qui n’a rien à voir avec un conflit agriculteur-éleveur. Ce n’est pas un conflit musulman-chrétien. Pas non plus un conflit intercommunautaire. Il faut que les récupérateurs des situations ne manipulent pas les choses », affirme-t-il. Il rappelle que leur organisation a demandé au gouvernement de ne pas aller sur la base de mensonge des autorités locales. Pour lui, les autorités sont complices et acteurs de ce qui s’est passé. Il soutient que c’est une question de sécurité de personnes et des biens. C’est une des missions régaliennes de l’État. Par exemple, dit-il, un ministre s’est fait tirer dessus. « Il faut préserver la paix et la cohabitation que d’exploser le Tchad en cette période de transition », lance Djimssassem Narbaye.
Selon le communiqué signé du porte-parole des ressortissants du Grand Moyen- Chari M. Ndiguingué Mayenan le 12 février 2022, cette marche est pour la « Dignité et la Justice. » Le document précisait que la marche est effectuée en mémoire des victimes de l’injustice et des barbaries commises à l’égard des paisibles citoyens sur l’ensemble du territoire national.
Moyalbaye Nadjasna
Suite au massacre perpétré sur les habitants de Sandana dans le canton Koumogo le 09 février dernier, les ressortissants du grand Moyen-Chari ont organisé une journée de deuil ce 15 février dans tout le Tchad. Ici, à N’Djamena, les ressortissants se sont réunis au terrain Fest-africa pour exprimer leur mécontentement à travers une marche dite de deuil. Les marcheurs sont tout de suite dispersés par la police. À Sarh, capitale de la province, les habitants ont défié les forces de l’ordre. Reportage
Tôt ce matin, les ressortissants de Sarh constitués majoritairement des jeunes se sont réunis au point de départ pour la marche. Sur les pancartes brandies par les manifestants on peut lire, Justice pour Sandana. Trop, c’est trop. Non à la boucherie humaine. Respectez-nous ou encore CMT égale à insécurité totale. Quelques minutes après que la marche, le Groupement Mobile d’Intervention de la Police (GMIP) a dispersé les marcheurs à coup de grenade lacrymogène.
À N’Djamena les manifestants se sont retirés pour se reconstituer en petit groupe. La marche est devenue sporadique et a pris tout le quartier sud de N’Djamena et à Walia dans le tourbillon. Un groupe de jeunes ayant en leur tête le chef de communauté Sara Madjingaye ont mis du bâton dans les roues des forces de sécurité. Déterminés, ces jeunes ont foncé vers elles. Dans la foulée, une femme sort nue, avance vers le GMIP, se jette par terre et commence à pleurer. Quelques minutes après, les forces de l’ordre commencent à jeter les grenades lacrymogènes sans bouger. La fumée monte de partout. Entre temps, les jeunes mettent de l’eau sur les étuis de gaz pour les éteindre. Après avoir inhalé une bonne dose de lacrymogène, ils se concertent pour foncer sur la police. Pas après pas, les marcheurs atteignent le rond-point Aigle. Leur objectif est d’atteindre le stade de Paris-Congo. La marche a tourné en un véritable affrontement entre les forces de l’ordre et les jeunes marcheurs au rond-point Aigle.
Le camp des marcheurs face à celui des policiers. Ils avancent malgré les tirs des grenades lacrymogènes. Dépassée par la foule, une intervention de plus de 8 véhicules bourrés des agents du GMIP arrive en renfort aux forces de l’ordre. Ils essayent en vain de disperser les jeunes résolus à marcher jusqu’au point de chute. 45 min après, les force du 3e degré composé de l’armée et de l’Unité Spéciale d’ Intervention de la Police USIP ont débarqués. Mais ils n’arrivent toujours pas à disperser les marcheurs. 2h plus tard, les jeunes marcheurs ont décidé par eux-mêmes de rentrer. Les habitants du quartier Moursal ont sympathisé avec les marcheurs. C’est le cas d’une dame à qui on a envoyé le grenade à son domicile touchant ainsi sa fille asthmatique. De l’eau par ci, de l’alcool par là pour l’aider à reprendre conscience. Pour la maman, c’est horrible ce que les Tchadiens vivent maintenant. « Même au temps de Deby, ce n’était pas comme ça. Dans ta propre maison, on t’envoie du gaz lacrymogène. C’est grave. Nos gouvernants veulent quel Tchad ? Je ne sais pas. Qu’ils revoient leur politique de sécurité sinon ça ne peut pas marcher comme ça », s’indigne-t-elle.
Les marcheurs se sont finalement retrouvés au domicile du défunt chef de communauté pour faire une déclaration. Delaville Djimyabaye membre du comité d’organisation de la marche exprime sa gratitude à tout le monde d’avoir fait le déplacement. Pour lui, le comité a envoyé une correspondance pour informer les autorités de la marche. « Personne ne nous a fait part de l’interdiction de la marche. Nous sommes tous surpris de leur intervention musclée pour nous disperser. Vous voyez dans quel pays nous sommes? De toutes les façons, le message est passé », a-t-il souligné. M. Delaville laisse entendre que chacun a perdu un membre de sa famille d’une manière ou d’une autre lors des évènements de Sandana. Le comité informera l’opinion publique des actions à venir. Il est venu le temps de soigner les blessés. a-t-il précisé. L’archevêque métropolitain de N’Djamena qui se rendait au lieu de recueillement au stade Paris-Congo a pris un étui de gaz sur son pied droit et au niveau du bas ventre. Son chapeau est tombé. Le téléphone d’un jeune marcheur depuis sa poche l’a sauvé de la balle réelle qu’on lui a tirée. On dénombre quelques arrestations, des blessés, dont le chef de communauté Sara Madjingaye. Ils sont admis dans les hôpitaux. En solidarité avec les toutes les victimes et particulièrement le correspondant de la radio Lotiko de Sarh, toutes les radios catholiques et les écoles sont fermées ce mardi 15 février. C’est pour la deuxième fois que le village Sandana est attaqué. La première attaque qui a fait 9 morts de part et d’autre est survenue le 26 août 2019.
Kouladoum Mireille Modestine
L’archevêque métropolitain de N’Djamena Monseigneur Edmond Djitangar a été blessé au genou ce mardi à N’Djamena. Il participait à la marche de soutien organisée pour réclamer la justice aux 13 personnes tuées dans le village de Sandanan, dans la province du Moyen Chari. Reportage
L’archevêque de N’Djamena, Edmond Djitangar est blessé au genou et au bas ventre ce mardi matin à N’Djamena. Le chef de l’Église catholique tchadienne participait à la marche pour exiger que justice soit rendue aux personnes tuées le 10 février dernier à Sandanan, un village situé à l’extrême du Tchad, dans la province du Moyen Chari. Selon des sources proches de l’Église catholique, l’archevêque a été aussitôt évacué à l’hôpital Notre-Dame des Apôtres de N’Djamena (NDA) un centre hospitalier catholique.
Par contre le vicaire général, Abbé Samuel Mbairabé Tibingar, l’archevêque Edmond Djitangar a pris part à la marche pour exprimer sa solidarité avec toutes les victimes en tant que pasteur. Selon le vicaire général, Monseigneur Djitangar n’a pas été blessé et vague à ses occupations au siège de la conférence épiscopale. Abbé Samuel exhorte les Tchadiens à prier pour la paix au Tchad.
Dans un message vidéo, le patron de l’Église catholique a lui-même exprimé sa gratitude à tout le monde pour la marque de sympathie à son égard et a appelé au calme, tout en rassurant qu’il se porte bien.
Or, le secrétaire général de la conférence épiscopale, Abbé Xavier a déclaré que Monseigneur Djitangar a reçu un étui de gaz lacrymogène au genou et au bas ventre, mais sans gravité. Il ajoute que lui aussi a reçu les étuis. Le SG précise que lui et l’archevêque ne sont pas partis pour marcher, mais pour aller rendre leurs condoléances au quartier Moursal dans le 6e arrondissement, non loin de la place Talino Manou. Il explique qu’ils sont descendu de la voiture et ont marché avec la foule et c’est au rond-point aigle que 3 camions remplis de policiers ont commencé à tirer sur eux. L’Abbé Xavier a témoigné aussi qu’il a vu 2 jeunes blessés au pied et à l’avant-bras et un 3e blessé à la tête. Ils sont conduits à l’hôpital Notre-Dame des apôtres pour les soins médicaux. Il reconnaît que monseigneur a eu une enflure au genou, mais avec le massage, il se porte bien.
Au sujet de la marche, il affirme que cela s’ajoute à la douleur des souffrances des frères et sœurs qui sont morts à Abéché et à Sandanan. « Ceux qui meurent sont nos frères et sœurs, ce sont les tchadiens. Si les gens se recueillent pour ceux qui sont morts, on a le droit en tant qu’humain pour pleurer aussi nos frères et sœurs », dit-il.
Cette manifestation a été violemment réprimée par la police nationale qui a dispersé des centaines des manifestants.
Indignée, la Ligue tchadienne des Droits de l’Homme (LTDH), apporte son soutien à toutes les victimes de cette situation. Le président par intérim de la LTDH, Me Adoum Mahamat Boukar exige du gouvernement le déplacement de tous les féeriques des zones agricoles, la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour l’affaire de Sandanan, le respect de la présomption d’innocence des personnes arrêtées et le respect strict des procédures judiciaires. Le défenseur des droits humains exige également la nomination objective aux postes de responsabilités des personnes compétentes et qualifiées dans les provinces afin d’éviter le mercantilisme. La marche pacifique et de deuil organisé ce 15 février par les ressortissants de Koumogo et de Sandanan afin d’apporter un soutien moral aux victimes de la barbarie, a été sauvagement réprimée à la place FesAfrica et dans les rues du 6e arrondissement.
Jules Doukoundjé