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Le Conseil paix et sécurité de l’Union Africaine (UA) se réunit ce 10 mai à Addis Abeba, en Éthiopie suite à la situation sociopolitique au Tchad. Il va se pencher sur le rapport de la mission de l’UA envoyée à N’Djamena, le 29 avril sou l’égide du Nigérian Bankole Adeoye et l’ambassadeur djiboutien, Mohamed Idriss Farah, président du Conseil de paix et sécurité de l’UA. Des décisions sont attendues à l’issue de cette réunion.

Le Conseil paix et sécurité de l’Union africaine examine le rapport de sa mission dépêchée semaine dernière à N’Djamena, capitale tchadienne, suite à la situation sécuritaire du pays. Il faut rappeler qu’après le décès du président tchadien Idriss Deby, l’armée s’est emparée du pouvoir et a mis à la tête Mahamat Idriss Deby Itno, fils du défunt chef de l’État. Un Comité Militaire de Transition (CMT) a été mis en place suscitant des contestations de l’opposition politique démocratique et de la société civile. Ces mécontents dénoncent un coup d’État institutionnel et réclament un retour à l’ordre constitutionnel. Depuis lors des manifestations pacifiques violemment dispersées se répètent à travers le pays. Conséquences, des Tchadiens meurent et sont blessés graves pour avoir manifesté.  Ce lundi, cette réunion du Conseil de sécurité de l’UA va se servir des éléments recueillis dans le rapport de mission afin de prendre des à l’encontre du Tchad. Sanctions ou pas sanctions.

Des sources révèlent que le rapport de l’enquête de l’UA au Tchad pose aussi des conditions au Conseil militaire de transition qui a pris le pouvoir. Le rapport note entre autres, le respect strict d'une transition de 18 mois maximum, l'organisation d'un dialogue national inclusif aboutissant sur un partage du pouvoir entre militaires et civils, comme cela s'est fait au Soudan. Rappelons que le Conseil paix et sécurité semble divisé sur une ligne de conduite face à la situation qui prévaut au Tchad. Selon les sources divergentes, certains pays proposaient la suspension du Tchad de l’UA en raison de la prise de pouvoir qu'ils qualifient de « coup d'État militaire ». D’autres proposaient à l’UA de déroger exceptionnellement à ses principes et d’accompagner la transition au Tchad. Car, argumentaient-ils que ce pays « est un verrou essentiel contre le terrorisme en Afrique et qu'il est fragile ».

Sur les traces de la mission de l’UA

Le Conseil paix et sécurité de l'UA a envoyé le 29 avril sa mission au Tchad. Cette mission a rencontré les nouvelles autorités, à commencer par le chef du Conseil militaire de transition, Mahamat Idriss Deby, fils de l’ancien président, les partis d’opposition, les organisations de la société civile, les diplomates en poste à  Ndjamena ainsi que les représentants des organisations religieuses. Objectif : veiller à la bonne marche de la transition en cours.

Signalons qu’une manifestation timide a eu lieu le 8 mai, violemment dispersée par la police. La coordination des actions citoyennes a déploré une dizaine de blessés dont trois graves et une cinquantaine d’arrestations sur l’ensemble du territoire. Le Procureur de la République de Ndjamena note une vingtaine d’arrestations dans la capitale et un manifestant blessé par balle réelle. Le 19 avril, Addis Abeba, le Président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat avait réitéré l’attachement indéfectible de l’UA aux solutions pacifiques des problèmes africains par la voix du dialogue et de la recherche du consensus.

La France a salué, lundi dernier la formation par la junte d'un gouvernement de transition dirigé par un Premier ministre civil incluant plusieurs membres de l'opposition. Elle demandait aussi que la transition soit d'une durée limitée. Paris relevait que limiter la transition permettrait au retour rapide à des institutions démocratiquement élues. La France affirmait aussi soutenir l’initiative de l’UA d’accompagner le Tchad dans la transition.

Moyalbaye Nadjasna

 

Engagés depuis avril sur les théâtres des opérations au nord Kanem, les éléments de l’armée tchadienne ont regagné N’Djamena dans la matinée du 9 mai. Un signe qui marque la fin des hostilités, disent les autorités militaires.

Ce sont plusieurs unités de l’armée nationale tchadienne engagées sur le théâtre des combats les mettant aux prises avec les rebelles du FACT depuis avril au nord Kanem qui sont de retour dans la capitale, N’Djamena. En tête du convoi, le chef d’état-major général des armées (Cemga), le général Abdelkérim Daoud Brahim. Il était sur place pour superviser les opérations de ratissage, selon le ministre de la Défense, Daoud Yaya Brahim.

Selon le Cemga, les rebelles sont anéantis. « Nous avons la maîtrise de la situation dès le début. Nous avons amené des prisonniers et des matériels. Au terrain, il ne reste rien. Je demande aux populations de rester tranquille; tout est dans l'ordre maintenant », rassure le général Abdelkerim Daoud Brahim.

Comme butins de guerre, plus d’une centaine de rebelles fait prisonniers et une dizaine de véhicules avec des matériels récupérés ont été présentés à la presse à l’état-major général des armées. D’après le CEMGA, certains de ces prisonniers sont des pauvres qui se sont fait enrôler pour de l’argent. D’autres, dit-il, se sont retrouvés là par force.

Parmi les prisonniers se trouvent deux cadres importants de la rébellion du Front pour l’Alternance et la Concorde au Tchad ( Fact). Il s’agit de celui qui se présente comme directeur de la section gendarmerie et l’autre comme commandant des opérations. Le premier a été arrêté entre la frontière Niger-Tchad. Le second à Nokou, au nord Kanem. Pas des nouvelles du chef rebelle, Mahamat Mahdi Ali. Selon le commandant des opérations du FACT, leur groupe a travaillé aux côtés des forces du Maréchal Halifa Haftar, considéré comme l’homme fort de l’Est libyen. En contrepartie, ils ont reçu armements et équipements militaires. Leur objectif, renverser le régime de N’Djamena dirigé par le défunt président Idriss Deby Itno.

C’est dans ce climat de confiance que le président du Conseil militaire de transition, le général Mahamat Deby Itno a effectué son premier déplacement à l’étranger depuis sa désignation le 20 avril. Il s’est rendu à Niamey ce lundi 10 mai. Dans la capitale nigérienne, le chef de l’État tchadien a eu une séance de travail avec le président Mohamed Bazoum. Puis il s’est rendu dans la zone des trois frontières pour galvaniser les unités tchadiennes déployées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans le Sahel.

Il faut le rappeler, les éléments du groupe rebelle du FACT dirigés par Mahamat Mahdi Ali ont fait leur incursion au Tchad le 11 avril dans la zone de Tibesti. Après des combats éclair, ils sont parvenus à atteindre le nord Kanem. C’est là que des combats atroces les ont opposés à l’armée tchadienne entre le 17, le 18 et le 19 avril. L’armée a, dans un bilan, évoqué la mort de 300 rebelles, plusieurs matériels de guerre récupérés et près de 300 prisonniers. Depuis lors, aucun autre bilan n’a été communiqué sur les combats qui ont repris depuis le 27 avril. En réaction aux autorités militaires, le Fact répond par une phrase en affirmant que « c’est loin d’être fini ».

Le président Deby Itno n’est plus. On a tout dit sur lui. En bien et en mal. Moi, le premier. Il faudra se résoudre à tourner la page. Avant de la tourner, je voudrais revenir commenter une fois encore les évènements de ces dernières semaines.

Mort du président

Version officielle : Le Maréchal est mort au combat les armes à la main. Il est mort comme il a vécu, intensément. Depuis qu’il est entré dans la vie des Tchadiens, il y a bien longtemps, il avait quelque chose qui le distinguait de ses prédécesseurs : sa patience. Une patience mesurée, calculée, réfléchie qui a fait craquer amis et adversaires. Sa patience était sa plus grande force. Lors de son dernier meeting, il avait demandé pardon aux Tchadiens pour s’être emporté. Les Tchadiens, je pense, lui ont déjà pardonné.

Version non officielle : Le Maréchal aurait été assassiné? Par qui? Pourquoi? Mystère et boule de cristal. Je n’ai pas arrêté de fouiller. D’interroger. De questionner. Je continue à m’interroger. Je n’ai comme réponses que des histoires invraisemblables. Sans têtes. Ni queues. Ces histoires mises ensemble ne tiennent pas, comme on dit, la route. Sacré Maréchal. Du haut des cieux, il dira certainement…. « en faite….disons… », son expression favorite. Et passera à une autre expression, « restez unis, mais dans la République… ». Il a marqué ce pays. En bon ou en mauvais. Chacun fera ses comptes.

Mythe?

Un mythe est-il en cours d’être né? Difficile de se prononcer. Si j’étais le conseiller du Maréchal, je lui aurais suggéré d’être Empereur. Un peu comme Napoléon. Tiens son autre surnom « le Napoléon d’Afrique », attribué par le journaliste français Pierre Elkabbach, un de ces jours où son pouvoir avait vacillé. Et qu’il a réussi à s’en sortir.

Le président Deby Itno n’aurait-il pas pardonné au président de l’Assemblée nationale (PAN) de refuser de lui succéder?  Je crois que oui. Parce que la toile d’araignée tissée par le défunt serait difficile à détricoter par le PAN. Alors pourquoi accepter?

Non, la bonne question c’est : pourquoi avoir refusé?

D’abord est-ce pas par loyauté? Presque 30 ans au côté du Maréchal. Le PAN Haroun Kabadi (HK) a refusé d’assumer l’intérim que lui reconnaissent les textes transitoires de la Constitution. Il a refusé donc le pouvoir au pays des hommes qui aiment le pouvoir. Pourtant c’est un homme de pouvoir. Qui a sa place aurait refusé? Peu de personne pour ne pas dire personne. Est-ce ce refus n’est pas plutôt de la sagesse? De l’intelligence? Il a donné ses raisons : maladie et âge respectable. Quoi d’autre aurait empêché HK? La peur? Je ne crois pas. Le manque d’ambition? J’en doute. Du haut de ses 70 ans passés, seul lui sait pourquoi. Il faut respecter sa décision. Mais on finira par le savoir un jour. Peut-être que l’écrivain Ali Abdramane Haggar a raison de dire qu’il a manqué de courage. Mais peut-être que HK a totalement raison d’avoir refusé. Et réserve aux Tchadiens une grosse surprise.

Toujours est-il que HK est encore à la manette. Presque omniprésent. L’Assemblée Nationale après être dissoute par la junte est reconduite avec HK à sa tête jusqu’à la mise en place du nouveau Conseil National de transition (CNT). Fort probablement que le même Kabadi sera à la tête du CNT. En cette période difficile, il serait plus utile là qu’ailleurs.

Entre-temps, que deviennent les partisans de l’ex-régime? Les opposants? La société civile? Les politico-militaires? Chacun se cherche. Chacun voit midi à sa porte.

Avez-vous découvert, comme moi, lors des funérailles que le Tchad était presque la « Corée du Nord de l’Afrique ». Je n’exagère pas. J’ai une preuve qui plaide pour ma farfelue thèse : les pleureuses de la Place de la Nation le jour des funérailles. C’était hallucinant. Non? C’était de l’émotion? Ok mais…

Avez-vous constaté aussi que, au lendemain du décès du Maréchal, les informations n’ont pas aisément  circulé. Tout a été verrouillé aux premiers jours et aux premières heures. Les rumeurs et les « fakes news » ont envoûté les Tchadiens. Bref, c’était plus de peur que de la rumeur vénéneuse. Bon en notre « République presque Gondwanaise » on a réussi, pour l’instant, une succession dynastique en douceur. Le cataclysme prévu s’est éloigné, mais il faut continuer à surveiller la « marmite Tchad » comme du lait sur le feu ardent des passions du pouvoir.


Enfin, les Tchadiens ont un Conseil Militaire de Transition muet. Pas étonnant ce sont les plus gradés de la grande muette. Ils ont également un Premier ministre sans envergure. Ils feront avec. Ils ont opposition démocratique « gaga », ils l’observent. Ils ont société civile fâchée, ils la surveillent. Ils ont une diaspora excitée, ils s’en amusent. Malgré à ces tensions, les Tchadiens sont, étonnement, stoïques. Un vieux papa m’a dit « mon fils, les gens s’agitent, mais Allah à son plan ». Allah? Avec le ramadan, je lâche prise. J’avais envie de lui crier « Allah n’est pas obligé » comme le titre du roman du célèbre écrivain ivoirien Amadou Kourouma. Je me suis abstenu. Et j’ai monologué dans ma barbe, « sacré Tchadien, fataliste au bout du bout du bout ».

Bello Bakary Mana

Le ramadan est un mois sacré pour les fidèles musulmans. C’est aussi l'un des cinq piliers de l'Islam. Les musulmans tchadiens ont commencé le jeûne empruntant le neuvième mois du calendrier lunaire musulman, le 13 avril. Ce jeûne doit bientôt prendre fin avec  la célébration de l'Aïd el fitr. Pour comprendre le sens de cette fête, Ialtchad Presse a rencontré le Secrétaire général du Conseil supérieur des Affaires Islamiques au Tchad (CSAI), Cheikh Abdadayim Abdoulaye Ousman. Reportage.

Il est pratiquement 10 heures lorsque nous entrons dans la grande cour de la grande Mosquée de N’Djamena, capitale tchadienne. Plusieurs personnes démunies, des femmes veuves, des enfants, des personnes handicapées et des vieillards remplissent la cour. Ils sont venus pour les prières, mais aussi pour bénéficier des actes de bienfaisance en ce mois saint de l’islam.

Reçu par le Cabinet du SG Cheikh Abdadayim Abdoulaye Ousman, très rapidement sommes introduits à son bureau. D’un air affirmé, le SG du Conseil supérieur des Affaires Islamiques au Tchad (CSAI), nous reçoit à son tour avec amabilité. Sans tarder nous échangeons sur le sens de la fête de l'Aïd el fitr. Selon lui, la communauté musulmane a deux fêtes. Le premier est l'Aïd el fitr qui marque la fin du jeûne de ramadan et la seconde c’est la fête de Tabaski appelée l'Aïd el Ad Ha. Ce sont des célébrations musulmanes qui datent du temps du prophète Mohammed, informe-t-il. Cheikh Abdadayim que les fidèles musulmans suivent le chemin de leur prophète. Pour lui, qui dit une fête dit la joie même s’il y a d’évènements qui peuvent signifier aussi douleur. Pour lui, la fin de Ramadan se fait en tenant compte de l’apparition de la lune, elle a lieu 29 ou 30 jours après le début du ramadan. Tout est compris dans le Saint Coran que ce soit lunaire ou solaire. « Pour comprendre, il faut savoir que le calendrier musulman est, contraire  au calendrier grégorien occidental. Comme les cycles de la lune sont plus courts, le Ramadan commence à chaque fois dix à douze jours plus tôt que celui de l'année précédente. Le début, mais également la fin du Ramadan sont déterminés par l'apparution de la lune dans le ciel», explique-t-il.

Pour le SG du CSAI, lorsque le jeûne s'achève, les musulmans croyants célèbrent la fin du ramadan : l'Aïd el-Fitr qui signifie fête de la rupture. Selon lui, l'Aïd el-Fitr n'est pas que l'occasion de faire la fête. C’est l’occasion de rassemblements familiaux et amicaux durant lesquels on se présente des vœux de bonheur et de santé en ce jour de fraternité. Dans le monde entier dit-il, les musulmans fêtent l'Aïd el-Fitr, en préparant un repas riche avant de se livrer à des prières. D’après Cheikh Abdadayim, Il est également du devoir des fidèles de garder une partie de leur nourriture pour les plus pauvres. Les bons actes doivent se poursuivre, a-t-il indiqué pendant ce temps de bénédiction.

« Cheikh Abdadayim, il faut du bon sens des fidèles pendant la fête »

Le SG du CSAI soutient qu’il n’est pas bon pour un musulman de se mettre rapidement en colère pendant le ramadan. « Je vous conseille plutôt d’être ouvert, faire preuve de maîtrise de soi. Soyez tolérants et pardonnez toujours au-delà de tout. C’est vertueux. Quand on est dans un esprit d’adoration, il faut suivre les conditions et les conseils», recommande-t-il. Cheikh Abdadayim  exhorte les fidèles à persévérer dans les prières en commun dans les mosquées mêmes après le Ramadan.  Pour lui, Il faut continuer même dans les Nafales (jeûnes et prières volontaires) pendant et après le ramadan.

«Ce que nous déplorons dès que le ramadan finit, quelques fidèles se jettent dans le péché à travers les actes interdits. Aller dans les bars, livrer des bagarres, repartir vers la vie de débauche, constituerait des obstacles selon, les Oulémas pour les imposteurs de rater la miséricorde d’Allah », dit le SG du SCAI.  C’est la même chose lorsqu’il s’agit aussi du pèlerinage signifie-t-il. D’après Cheikh Abdadayim,   le ramadan est un entraînement qui permet de bien se comporter et continuer sur le bon chemin.

Durant ce mois bénit, les musulmans promeuvent les interdits et doivent traiter durement leur corps. Une manière de purifier leur esprit. Ni boisson ni nourriture, les restrictions s'appliquent également au tabac et aux relations sexuelles. Une fois la nuit tombée, les fidèles ont le droit de se réunir pour « rompre le jeûne ». À noter que le Ramadan est synonyme de recueillement et de méditation.

Moyalbaye Nadjasna

Tantôt maintenue tantôt interdite, la marche pacifique de ce samedi semble avoir été un échec. Sur l’itinéraire prévu et dans les quartiers, les manifestants ont fait place aux forces de l’ordre. Reportage.

N’Djamena, capitale du Tchad. Samedi 8 mai, jour de la deuxième marche pacifique initiée par la Coordination des actions citoyennes (CAC) dénommée Wakit Tama pour protester contre la mise en place du Conseil Militaire de Transition (CMT). 

Walia, dans le 9e arrondissement. Le soleil s’est levé, il y a deux heures déjà. Mais le quartier est bien calme. Pourtant le 27 avril dernier, ce secteur a été le théâtre de violentes manifestations. Ce samedi, il est sous une haute surveillance sécuritaire. Des véhicules bourrés des éléments du Groupement mobile d’intervention de la Police (GMIP) et des militaires sont garés à des endroits stratégiques : établissements scolaires, ronds-points, devanture de l’hôtel 3AS.

Devant le lycée de Walia, plus de 4 véhicules du GMIP font instantanément la ronde afin de disperser toute tentative de rassemblement de personnes sur ce lieu. Il faut rappeler qu’à la marche précédente, ce lycée a été investi par les manifestants, brûlant des pneus bloquant ainsi la circulation sur l’unique route nationale.  Un peu devant, au niveau du Lycée privé AGORA, un homme a  mis le feu sur un tas de saletés. Instant d’après, un véhicule de marque Toyota L200 bourré d’éléments s’arrête : « qui a mis le feu ? » lui demande avec insistance le chauffeur. Le monsieur, l’air perdu répond vaguement que ce n’est pas lui. Les policiers le laissent et continuent leur chemin.

Au niveau de l’hôtel 3AS, au moins 5 véhicules militaires sont garés. Comme il n’y a aucun mouvement dans le secteur, certains éléments prennent une pause dans les véhicules, d’autres sont couchés à même le sol.

Sous le viaduc du pont de Chagoua, la présence de ces hommes en treillis donne l’impression qu’une guerre se prépare. Véhicules militaires, policiers, des armes de gros calibre sont visibles. Malgré ce déploiement impressionnant, les activités tout autour du pont semblent fonctionner normalement.

À l’espace FEST’AFRICA où devait commencer la manifestation, ce sont toujours les forces de sécurité qui ont pris d’assaut les lieux alors qu’il était déjà 9 heures passées. Elles sont sur place au petit matin. «  Les leaders ne sont pas encore arrivés, mais déjà les  policiers sont venus chasser les gens qui étaient là ce matin », dit un vendeur.

À quelques mètres, nous apercevons un véhicule de police s’arrêter devant un jeune tenant dans sa main une chemise cartonnée, téléphone à l’oreille. Un policier s’approche de lui et demande à fouiller la chemise. Une fois le spectacle fini, nous nous sommes approchés du jeune homme : « ils m’ont demandé qui j’appelle. Je lui ai répondu que c’est mon petit pour qu’il vienne me déposer quelque part en ville ».  Heureusement, il n’a pas été arrêté.    

 Même constat à Atrone, Habbena et Gassi dans le 7e arrondissement, réputés bastion de la contestation. Ces quartiers sont pris d’assaut par les forces de l’ordre composées de militaires, des éléments du  GMIP, de la Garde nationale et nomade du Tchad (GNNT) et des gendarmes. L’avenue Mathias Ngarteri communément appelée l’axe CA7, connu pour être un terrain d’affrontement entre manifestants et forces de l’ordre, est calme ce samedi. La circulation est fluide. L’axe menant du rond-point 10 octobre jusqu’au quartier Ambatta est l’endroit ciblé par les forces de l’ordre qui font de navettes pour traquer tout récalcitrant. Devant le sous-poste de police situé derrière le centre de santé d’Atrone, plus de 5 véhicules bourrés d’hommes en treillis sont stationnés dans le but de veiller sur le sous-poste, qui le 27 avril dernier est  pris en otage par les manifestants. Des camions-citernes chauffe-eau du GMIP sillonnent également la zone.

Malgré tout ce dispositif mis en place, cela n’a pas empêché de groupes de manifestants de sortir.  Toutefois, leur action a été vite étouffée par les forces de l’ordre qui patrouillent sans cesse ces zones. Aucun cas de brûlure des pneus n’est signalé dans ces quartiers.

Selon le coordinateur de Wakit Tama, Me Max Loalngar, les autorités les ont piégés. « Elles ont dit que la marche allait être autorisée. Donc nous avons indiqué un lieu de rassemblement et un itinéraire. Mais avant que le rassemblement ne soit effectif, les forces de l’ordre ont commencé par tirer sur les gens », s’insurge-t-il. Du coup, la marche pacifique qui devrait être encadrée s’est transformée en  des manifestations sporadiques.

Si la marche de ce jour, comparée à celle du 27 avril, semble ne pas avoir drainé assez de monde, Me Max Loalngar estime que c’est une réussite sur le plan idéologie. « Parce que cela a permis de constater que les autorités de transition sont de mauvaise foi. Elles ont adopté une attitude guerrière en dévoilant leur caractère sectaire  », dit-il.

Bilan : Wakit Tama évoque une quinzaine d’arrestations à N’Djamena dont 9 devant la base de l’opération Barkhane. Une vingtaine d’autres à Moundou et une dizaine à Sarh. 10 blessés dont 3 graves sont également enregistrés à N’Djamena. Un journaliste de la télévision nationale habitant le quartier Atrone, Djimitibeye Yemingaye a été tabassé par les militaires alors qu’il était devant son domicile. Une équipe des journalistes de la Rfi aussi ont été brièvement interpellées à l’espace Fest’Africa. Leur enregistrement a été effacé. Officiellement, les autorités n’ont pas encore fait une communication.

Christian Allahadjim
Togyanouba Santanan
Allarassem Djimrangar

Trois pasteurs de l’Alliance des églises pentecôtistes au Tchad ont été suspendus de toutes activités religieuses sur l’ensemble du territoire national tchadien, par le ministre de l’Administration du territoire et de la Décentralisation. La décision de suspension du 5 mai, leur reproche d’avoir pris part  aux manifestations du 27 avril, contraire à leur vocation apolitique. Ialtchad Presse est allé à la rencontre de ces hommes de Dieu. Reportage.

15 heures passées, nous sommes au quartier moursal, 6e arrondissement de N’Djamena. Sous l’ombre d’un Nimier, sont assis en convivialité les trois hommes de Dieu suspendus. Pasteurs, Keleypetté Dono et Bekoutou Marabey Pierre sont de l’Église du Christ Universel, puis Pasteur Targoto Josias, de l’EMENVI. Pasteur Bekoutou  Marabeye, est le plus âgé des trois. Il parle aux noms des deux autres, « cette suspension ne nous fait ni chaud ni froid… ».

Selon pasteur Bekoutou, le ministère de l’Intérieur les a interpellés hier 06 mai pour leur notifier la décision les suspendant à ne pas exercer leurs activités religieuses sur toute l’étendue du territoire national.  « Ils sont dans leur droit, c’est tout à fait normal. Ils font leur travail et ils sont payés pour ça. Mais pour nous, cela n’a aucun impact. Nous ne sommes pas nommés par décret ni arrêté de leur ministère. Nous sommes des serviteurs de Dieu. Nous avons choisi notre voie celle d’écouter et de recevoir de Dieu. Et non à recevoir des ordres des humains mortels comme nous », a-t-il indiqué. Pour lui, c’est une décision qui peut arrêter leur corps charnel et non l’esprit que Dieu a mis en eux. D’après lui, nous sommes des créatures de Dieu et nous convergeons vers lui. Il rajoute qu’eux les serviteurs de Dieu ont une mission, celle de rendre compte à Dieu.

Pasteur Bekoutou  Marabeye confirme qu’ils ont pris part à la manifestation. «Nous sommes les bergers et les bergers doivent se mettre à l’avant-garde des brebis et non à la queue afin de ne pas les laisser divaguer seules dans la nature. La plupart des manifestants qui sont blessés ou morts sont des fidèles des églises. Nous avons fait cette marche d’une manière symbolique et prophétique pour que le monde sache que rien ne va plus dans cette nation», déclare-t-il.  Selon le religieux, ils n’ont pas marché au nom de l’Église, mais plutôt au nom de leur groupement dénommé, «plateforme des serviteurs de Dieu pour la justice et le droit au Tchad». Il affirme qu’ils ont marché en conscience en tant qu’hommes de Dieu pour désapprouver le coup d’État perpétré par le Conseil militaire de la transition (CMT) après le décès du président Idriss Deby. Il dit que leur plateforme trouve anormal ce qui s’est passé et il faut le dénoncer. « Cette décision de suspension de nos activités ne nous fait ni chauds ni froids», dit-il.  Pour le pasteur, les premiers missionnaires qui sont venus en Afrique et au Tchad ont su que les noirs sont des gens avancés quand bien même qu’ils seraient acculturés.  Il renchérit en signifiant que ceux-ci ont empêché que de faire extérioriser les pensées des noirs. «C’est ainsi qu’ils ont étouffé les premiers chrétiens pour dire que si vous faites la politique vous n’irez pas au ciel», indique le pasteur.

«Lorsqu’un chrétien ne fait pas la politique, c’est un corrompu»

Le pasteur poursuit que dans la Bible, il est noté que les militaires, les douaniers, les administrateurs étaient venus voir le prophète Jean-Baptiste, pour recueillir de lui des conseils et il a mis chacun à sa place. « Ce n’est pas aujourd’hui qu’on ne doit pas faire la politique. Lorsqu’un chrétien ne fait pas la politique, c’est un corrompu. Il s’aligne avec ceux qui détruisent le pays. Aujourd’hui, ce sont les chrétiens qui ont détruit le pays par leur mensonge, leur vol», affirme le pasteur de l’Église du Christ Universel. Bekoutou Marabey Pierre signifie qu’il y a des chrétiens constitutionnalistes dans ce pays qui ne peuvent même pas lever un petit doigt pour dénoncer ces choses. «L’heure est venue pour démanteler ces choses. Les chrétiens doivent dire la vérité à la lumière de la Parole de Dieu. Il faut remettre la pendule à l’heure», martèle le serviteur de Dieu. Il rappelle que le président défunt a dit que le fondement de la nation tchadienne est à terre. Pour cela, Pasteur Bekoutou Marabey Pierre déclare qu’il faudra dès à présent chercher à relever ce fondement afin que le pays se tienne debout. «Nous voulons un pays de justice et d’équité ou n’importe quel tchadien puisse trouver son compte. Nous ne cherchons pas notre intérêt, nous ne cherchons pas non plus à nous positionner quelque part, mais nous voulons faire jaillir la vérité qui est la colonne vertébrale de la justice», conclut-il.

Le révérend pasteur Batein Kaligué Batein est le Secrétaire général de l’Entente des Églises évangéliques et missionnaires au Tchad (EEMET). Selon lui, les pasteurs suspendus ne relèvent pas de sa responsabilité. «Toutefois, c’est une situation qui est arrivée et cela nous prend à la gorge en tant que serviteur de Dieu. L’Administration a joué son rôle», signifie-t-il.

Nous avons joint au téléphone le ministre de la Justice Garde des Sceaux, M. Mahamat Ahamat Alabo. Mais d’après lui, «si quelqu’un est lésé, il porte plainte à la justice.»

Moyalbaye Nadjasna

A quelques jours de la fête du ramadan, les ateliers de couture ne se désemplissent pas. Malgré les difficultés, les couturiers communément appelés « tailleurs » travaillent fort pour satisfaire leurs clients. Reportage.

N’Djamena, capitale tchadienne. Il est 10h ce vendredi 7 mai. La température est de 36° Celsius. La fête de Ramadan est dans quelques jours. Et dans la ville, les préparatifs vont bon train.

Sur l’avenue El Niméry et Charles de Gaulle, dans les 2e et le 3e arrondissement de la ville, des commerces de circonstance sont ouverts tout le long des trottoirs menant au grand marché. On y trouve des vendeurs de chaussures, des jouets, des jus, des prêts-à-porter, etc. Et la fête ne se prépare pas seulement sur les marchés, mais également chez les couturiers.   

Dans des ateliers de couture sur les avenues El Niméry et Charles de Gaulle, il y a du monde. Tailleurs et clients se mêlent. Certains tailleurs, assis sur des nattes, s’activent à fixer des boutons. D’autres, par contre, les yeux rivés sur leurs machines travaillent à tue à-tête. Les clients, quant à eux, se disputent de la place.  La fête du Ramadan approche et la pression monte, de tout côté. Le constat est le même dans les différents ateliers de couture visités. Les modèles les plus sollicités sont les djellabas simples et les grands boubous. Le prix de couture n’est pas fixe. Le prix varie d’un modèle et d’une qualité par rapport à autre. Toutefois, le prix pour les djellabas oscille entre 5 000 à 30.000 francs CFA.

Haroun, un client rencontré dans un atelier de couture non loin de la grande mosquée Roi Fayçal. Il ne cache pas sa satisfaction. « Comme vous pouvez le constater, je suis venu retirer mon habit que j’ai confié  le samedi dernier au couturier. Ce qui me plaît chez lui, est qu’il respecte toujours ses rendez-vous. Il n’est pas comme les autres qui vont te rouler dans la farine », se réjouit-il. Par contre, Idriss, un autre client, rencontré dans un autre atelier, est très en colère. « Mon tailleur n’est pas sérieux. Je lui ai remis le tissu avec l’argent depuis la fin du mois d’avril. Mais jusqu’à présent, il n’a rien fait. Trop c’est trop ! Je vais bouger d’ici avec mon habit. Sinon, il me restitue mon argent ainsi que mon tissu », menace-t-il.

Les couturiers rencontrés déplorent le délestage intempestif d’électricité  depuis le début du mois du ramadan. Selon eux, ce délestage leur crée un manque à gagner. Ils  sont obligés de refuser de prendre en grande quantité les tissus des clients de peur de ne pas tous les coudre à temps. Et cela joue sur les affaires. « Depuis le 13 avril dernier, on a jamais passé une journée avec le courant. Les coupures intempestives d’électricité sont monnaie courante. Cela fait que nous n’avons pas de clients comme dans les années précédentes. Parce qu’on se réserve de prendre les tissus de gens en grande quantité », se plaint Abakar, couturier au grand marché. Alhadji Ousman, renchéris en affirmant que le problème de l’électricité est un véritable problème. Mais depuis quelques jours, dit-il, tout semble s’améliorer. « Quand il y a délestage, nous utilisons les groupes électrogènes, cependant cela ne nous arrange pas tellement. Mais Dieu merci, depuis trois jours, il n’y a pas de coupure d’électricité dans mon secteur ».

Allarassem Djimrangar

Par un arrêté rendu public ce 7 mai par le ministère de la Sécurité publique, les manifestations pacifiques sont autorisées. Mais sous plusieurs conditions.

D’après les termes du document, les manifestations pacifiques sont autorisées « conformément à la charte de transition et à la volonté des plus hautes autorités au respect de l’État de droit. » Et pour cela, indique l’arrêté ministériel, « les forces de l’ordre prendront toutes les dispositions sécuritaires nécessaires à cet effet. » Mais tout cela n’est possible qu’à certaines conditions.

Le ministère de la Sécurité publique exige d’abord des organisateurs d’une manifestation pacifique une demande d’autorisation préalable indiquant un itinéraire bien défini. Cet itinéraire, précise le document, peut être modifié en commun accord avec les autorités au moins cinq jours avant la date demandée.

Ensuite, les organisateurs d’une manifestation pacifique doivent signer un engagement auprès du ministère de la Sécurité publique. L’arrêté n’a pas mentionné la nature de cet engagement.

Puis le ministère de la Sécurité exige des organisateurs d’une manifestation la sensibilisation et l’encadrement des manifestants afin d’éviter tout trouble à l’ordre public.

Et enfin, la dernière condition à remplir est la détention d’une autorisation de fonctionnement pour toute organisation appelant à une manifestation.

Autre précision, le ministère fait savoir que l’objectif d’une manifestation pacifique est d’exprimer une opinion dans le respect des textes en vigueur.

Pour Me Max Loalngar, coordinateur de la plateforme Wakit tamma qui appelle à une marche ce 8 mai, le décret cité dans ce document est désuet. « Qu’on ne nous perturbe pas avec des décrets de 1962 qui sont morts et enterrés avec leurs auteurs », s’agace-t-il. D’après lui, il n’existe dans la législation actuelle aucun argument du droit positif qui ne peut être opposé pour poser tel ou tel acte. « C’est pour cela que la marche de demain (8 mai) est maintenue », confirme Me Max Loalngar.

Prenant en compte quelques points énumérés dans le communiqué du ministère de la Sécurité publique, le coordinateur de Wakit tamma rassure que la marche sera « pacifique ». « Nous allons nous encadrer », promet-il. Au contraire, Me Max Loalngar demande que les forces de l’ordre s’abstiennent de se présenter aux abords de cette manifestation.  « Celle-ci faisant suite à la marche du 27 avril réprimée dans le sang, nous pensons que la présence des forces de l’ordre serait de nature à troubler l’ordre public », estime-t-il. Car, dit-il, le sentiment d’une victime de voir son bourreau peut la pousser à agir violemment.

Ainsi, la marche du 8 mai a pour point de rassemblement l’espace Fest’Africa de Chagoua et avec point de chute le rond-point Fontaine de l’union. « Une motion et un schéma de sortie de crise seront présentés », annonce Me Max Loalngar.

Aux dernières nouvelles, le ministère de la Sécurité publique vient d’interdire la marche.

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