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Par son adoubement instantané de la succession dynastique de Deby, le président Macron remet une pièce dans la machine du procès latent en néocolonialisme de la France.

Feint, fantasmé ou réel, le néocolonialisme ou son sentiment est désastreux pour l’image de la France dans la sphère francophone africaine et sape son universalisme au-delà. L’irrationalité du rapport à l’Afrique de la France, rend sensible toute prise de position de celle-ci sur le continent africain. Espérée par un bord et redoutée par l’autre et inversement : le premier, vouant aux gémonies la France quand elle reste silencieuse ; le second lui réservant le même sort lorsqu’elle parle. Consciente de ce malaise et résistant à l’entrisme de ceux, en Afrique comme en France, faisant fortune de la nébuleuse Françafrique, la France entreprend depuis peu de jeter les bases d’un nouvel édifice partenarial qu’elle voudrait empreinte d’équilibre, de responsabilité et de multilatéralité. Moralité, le Quai d’Orsay peut condamner l’incarcération d’un Alexey Nalvany ou le sort des Ouïgours. Mais pour l’Afrique, il marche sur des œufs. Paris n’ose plus rien dire même sur le reflux ambiant des restrictions des libertés publiques si ce n’est abrité derrière les positions de l’UA ou des organisations multilatérales régionales (CEDEAO, CEMAC, CEEAC). Reste que celles-ci, à la doctrine aussi mouvante qu’élastique sur ces sujets, sont au mieux mezza voce, sinon accommodantes. Il en va ainsi de la vague des modifications pro domo des constitutions ainsi que du destin carcéral réservé aux voix discordantes. Ce faisant, ces organisations réduisent la France au silence, mais couvrent son exposition à la critique. Et puis patatras, est arrivée la dramaturgie tchadienne. Foin de la couverture de l’UA, ni de prudentes réserves : Paris acquiesce doublement ni plus ni moins la violation de la constitution et la succession dynastique. Par le communiqué daté de l’annonce du décès, l’Élysée « prend acte de l’annonce par les autorités tchadiennes de la mise en place d’un conseil militaire »It missa est. On se pince pour y croire. Et quand de N’Djamena où il participait aux obsèques, le président Macron déclare que "La France ne laissera jamais personne, ni aujourd’hui, ni demain, remettre en cause la stabilité et l’intégrité du Tchad", l’incompréhension le dispute à l’incrédulité. Outre le fait que sur la forme, cette déclaration dissipe le bénéfice de la purge de la Françafrique et crée un précédent inespéré pour les rejetons des autocrates régnant en Afrique centrale ; sur le fond, elle paraît inappropriée et d’effets hypothétiques.

Ainsi, sur l’intégrité, il n’y a pas de risque actuel d’agression extérieure du Tchad, et l’arrêt de la CIJ de 1994 a obéré la convoitise libyenne sur le septentrion. Le régime fait certes face à des rebellions dans et hors du territoire. Mais aucune d’elle ne professe une aliénation ou la sécession d’une partie du territoire. La nation tchadienne reste un mirage, mais l’État tchadien ne souffre contestation dans aucune des diverses communautés nationales. Les accords militaires de 1976 ne peuvent être actionnés qu’en cas d’agression extérieure. Les rebellions tchadiennes en relèvent-elles ? En convenir, comme le régime l’a régulièrement obtenu de la partie Française, est une acception contestable et sur laquelle l’arbitrage des juridictions de contrôle en France pourrait être appelé. Par ailleurs, le risque d’une préemption d’une partie du territoire (le BET) par des mouvements djihadistes, est une vue de l’esprit. Ces mouvements ne prospèrent que sur des terreaux confessionnels favorables ou par la soumission des populations vulnérables et sans défense. La pratique d’un Islam traditionnel et la culture guerrière innée chez les Toubous, Téda et Kréda qui peuplent cette région ne laissent que peu de chance à cette hypothèse. Quant à Boko Haram, elle peut certes faire des incursions sur le versant tchadien du Lac-Tchad, mais ne peut y conquérir et conserver une position durable.

S’agissant de la stabilité du pays, elle n’était déjà qu’un leurre en trente ans. Il n’y a pour s’en convaincre qu’à constater le foisonnement des rebellions armées et les récurrents soubresauts internes. La poigne de fer du régime n’a jamais pu en tarir la source. Il en sera malheureusement ainsi pendant aussi longtemps que perdureront l’exclusion, la prédation et l’injustice ambiantes. L’insécurité institutionnelle obligeait Deby lui-même à vivre de façon permanente sous le parapluie de l’armée française et à mettre le pays sous un quasi état d’urgence continu. De même, il n’y a pas de stabilité politique sans institutions, or sous ce régime, il n’y a point d’institution digne en dehors de celle de l’hérédité des Itno et de leurs familles par alliance.

Certes Macron appelle au dialogue inclusif pour garantir une transition partagée. La médiation du G5 Sahel devrait y contribuer. Mais cet appel risque de tomber à plat parce qu’il intervient seulement pour rééquilibrer le blanc-seing donné ab initio à la succession dynastique. Or le nouveau président et tous ses hiérarques dont la culture du dialogue se résume à la soumission de l’altérité par la force, la violence ou l’argent risquent de ne retenir du discours de Macron que le premier volet. La preuve en est leur rejet martial de l’offre de dialogue de la rébellion FACT ainsi que malheureusement la répression meurtrière des manifestants civils. Et puis, quel crédit accorder à l’engagement de cette junte de rendre le pouvoir à l’issue de la transition quand ses membres ont été façonnés à la technique éprouvée du reniement de la parole publique et du fait accompli du défunt chef ? Pour l’opposition politique et la société civile dont la confiance en la vertu démocratique du régime frisait le néant, l’adoubement sans préalable du fils a retiré toute illusion d’espoir d’une neutralité de Paris. Plus personne dans ce camp n’attend rien de Paris, ni d’une communauté internationale dont l’alignement sur la position parisienne ou le silence interroge. Pour ceux-ci, seul importe le rapport de force politique, sociale et civique. L’épreuve de feu contre le 6e mandat avait coagulé le mouvement contestataire contre le Maréchal lui-même, alors croire que le fils le contiendrait serait illusoire.

Pour des raisons historiques et stratégiques, l’armée française considère le Tchad comme relevant de son domaine réservé. Elle a trouvé en Deby un interlocuteur digne de ses attentes, fiable et efficace comme relai et partenaire dans l’accomplissement de ses opérations extérieures. Elle le défend avec l’esprit d’un corps de commando. L’arrivée au Quai d’Orsay de Jean-Yves Le Drian qui fut son chef sous Hollande, a achevé d’aligner la diplomatie sur sa position proactive à Deby. Elle s’inquiète à juste titre de l’éventualité d’un retrait des 2600 militaires du contingent tchadien du Nord du Mali et de la zone des trois frontières ; une perspective qui mettrait ses plans en péril, l’obligerait à renforcer ses effectifs et à renoncer au désengagement annoncé. Reste que cette appréhension est exagérée car personne dans la classe politique tchadienne ne remet en cause cette intervention ni celle de la relation à la France (du moins jusqu’aux dernières sorties de Paris sur la succession ouverte). L’opposition ne dénonçait que le biais politique qu’Idriss Deby tirait de l’interventionnisme militaire extérieur du pays et les chantages au retrait de ses troupes en contrepartie du silence de la communauté internationale sur ses abus domestiques. Paris aurait dû ne rien craindre de ces chantages car à la vérité, l’efficience en opération extérieure de l’armée tchadienne est inversement proportionnelle à la fragilité interne du régime. Le concours de l’armée française était indispensable à la survie du régime du père, il l’est davantage pour le fils. Retirer les troupes et se fâcher avec la France, serait suicidaire pour le clan. Le président Macron qui le savait aurait pu saisir cette opportunité unique, inattendue et inespérée pour exiger en préalable un vrai dialogue inclusif et ouvert pour jeter les bases d’une transition partagée. Il aurait été le facilitateur d’une nouvelle ère démocratique et aurait gagné les cœurs de tous les tchadiens y compris, ceux des Itno qui auraient ainsi pu civiliser leur rapport au pouvoir, mais surtout avec le commun des compatriotes.

Orléans le 29 avril 2021
Abdoulaye Mbotaingar, docteur en droit,
Maîtres de conférences à l’université d’Orléans             

La police a déféré ce 29 avril au parquet du tribunal de Grande Instance de N’Djamena, les personnes arrêtées lors de la marche pacifique du 27 et 28 avril.  Elles  sont au total 686 personnes arrêtées. Reportage.

Ce 29 avril, le soleil est torride et très accablant. La devanture du palais de justice de N’Djamena est prise d’assaut par le groupement mobile d’intervention de la Police (Gmip) sur 3 véhicules bourrés d’hommes en treillis, lourdement armés. Dans la cour, certains détenus déférés sont exposés sous le soleil. D’autres par contre, sont assis devant les salles d’audience, en espérant être auditionnés par le procureur de la République. Sous un hangar, on aperçoit la présence des parents. L’inquiétude se lit sur leurs visages. La colère et la peur aussi. Certains parents que nous avons rencontrés ne cachent pas leurs mécontentements. « Mon enfant a été arrêté arbitrairement par les forces de l’ordre. Il était malade et couché », affirme Angéline, très furieuse. Le malheur de son fils vient du fait que trois manifestants qui tentaient de fuir les forces de l’ordre se sont réfugiés dans leur cour. Et la Police a fait irruption pour les arrêter. Et a embarqué le fils d’Angéline aussi. Une autre raconte que son fils, malade a reçu de la visite des parents. Au moment de raccompagner ses visiteurs, il a été appréhendé.

D’après Me Rimté Guérimbaye, l’un des avocats des détenus, l’audition des détenus par le procureur de la République a commencé depuis le 28 avril, aux environs de 15 heures. Il souligne que sur les 686 personnes arrêtées, certains ont été libérés depuis le commissariat et d’autres au parquet du tribunal de grande instance de N’Djaména. « Depuis hier, 27 personnes ont été déférées à la maison d’arrêt de N’Djamena. A l’heure où je parle, la justice a auditionné plus de 100 personnes et les auditions se poursuivent », affirme Me Rimté Guérimbaye. Les chefs d’accusation retenues contre les 27 déférés sont « attroupement, destruction volontaire des biens, coups et blessures volontaires et trouble à l’ordre public », a énuméré l’avocat.

Allarassem Djimrangar
Younous Sidick Abakar Choukou

Du 27 au 28 avril, des manifestations violemment réprimées ont eu lieu dans plusieurs provinces contre le Conseil Militaire de Transition (CMT) et l’ingérence de la France dans la politique intérieure du Tchad. Ces manifestations se sont soldées par plusieurs morts, beaucoup des blessés et des dégâts matériels. Trois jours plus tard, un calme relatif règne sur N’Djamena, la capitale.

Le calme semble être revenu à N'Djamena après deux jours de violentes manifestations qui ont mis aux prises des forces de l'ordre et des manifestants. La circulation et les marchés reprennent leur cours normal. Le marché central, Dembé et marché à mil sont bondés de monde. Même dans les établissements d’enseignement, la reprise des cours est effective dans les lycées tels que Sacré-Cœur, Adventiste.

Par contre dans les établissements publics,  la reprise est timide.  Au Lycée Félix Eboué, le plus grand et plus vieux lycée où l'on trouve un nombre important, les élèves sont venus uniquement pour l'enrôlement biométrique, nous renseigne l'un d'eux. En face, au Lycée technique commercial, les salles sont presque vides. Une élève nous apprend que ce sont les enseignants qui ne viennent presque pas même. Et rajoute, « il n’y a presque pas d'élèves dans la cour ». Même si le calme semble être revenu, les autorités sont restées méfiantes.

Sur les grands axes et les ronds-points de la ville tels que le rond-point double voie, rond-point Walia en passant par celui de Chagoua, il y a une présence massive des forces de l’ordre. Les policiers, quant à eux, sont redéployés dans certains coins stratégiques de la capitale et autres. Certains quartiers sont patrouillés en permanence. D’autres sont surveillés par les indicateurs de l’Agence Nationale de Sécurité (ANS), le service de renseignements.

Aux dernières nouvelles, les affrontements entre la rébellion du Front pour l’alternance et la concorde et les forces gouvernementales ont repris dans la région du Kanem.

Oumar Adam Oumar
Santana Togyanouba

Des combats mettant aux prises l’armée tchadienne et les rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (Fact) ont repris depuis mardi au nord Kanem.

L’armée tchadienne et les rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (Fact) s’affrontent de nouveau dans le nord Kanem depuis mardi 27 avril. Les combats continuent encore dans la journée de jeudi.

Il y a quatre jours, la junte militaire au pouvoir a annoncé son refus de négocier avec ces rebelles les qualifiant de « hors-la-loi » et les accusant de terrorisme. Pourtant ceux-ci étaient prêts à un cessez-le-feu pour dialoguer.

Selon les nouvelles autorités de N’Djamena, ces « terroristes », acculés par la force de frappe de l’armée, se sont réfugiés au Niger avec leur chef Mahamat Mahdi Ali en vue de se reconstituer. Pour les anéantir, N’Djamena a demandé la coopération militaire de Niamey. Le 26 avril, les autorités nigériennes qui ont chassé ces « hors-la-loi » de leur territoire.

Selon nos informations, les éléments du Fact se sont redirigés vers le Kanem et éparpillés le long de la frontière. L’armée tchadienne est entrée en action. Des opérations terre et ciel sont lancées depuis mardi 27 avril. Jusque-là, l’armée n’a pas communiqué sur ces opérations.

Dans un communiqué publié ce jeudi 29 avril, le chargé de communication du groupe rebelle indique l’armée tchadienne évite des affrontements terrestres au profit des bombardements aériens. Il annonce par la même occasion qu’un hélicoptère de l’armée a été abattu ce 29 avril grâce à leur système de défense antiaérien. Selon Rfi, l’information a été confirmée par des sources sécuritaires tchadiennes. Pour le groupe rebelle,  la France aide l’armée tchadienne avec des vols de reconnaissance. Pour cette raison, il menace d’abattre désormais tout aéronef qui survolera leur position. 

Il faut le rappeler, les incursions des rebelles du Fact sur le territoire tchadien ont commencé le 11 avril, le jour de l’élection présidentielle. Ils ont progressé rapidement pour atteindre le nord Kanem. Le 17 avril, l’armée détruit totalement la logistique des rebelles. Le lendemain, l’armée lance de nouveau l’offensive et annonce avoir mis en déroute les rebelles. Le chef rebelle a reconnu avoir opéré un repli. Le 19 avril, les rebelles lancent une contre-offensive surprise au cours de laquelle le président de la République Idriss Deby Itno est tué. Dès lors, les nouvelles autorités de N’Djamena ont promis en découdre avec ceux qui ont ôté la vie à leur Maréchal chef suprême des armées Idriss Deby Itno.  

La coordination des actions citoyennes a encore appelé à une marche ce mercredi. Sur le terrain, la peur semble avoir gagné les manifestants. Reportage.

La capitale tchadienne, N’Djamena ne s’est pas réveillé comme hier, 27 avril, où une gigantesque manifestation a secoué la ville. Ce mercredi 28 avril, bien que la coordination des actions citoyennes et des partis politiques a encore appelé à manifester, la ville est calme. L’appel ne semble pas avoir été suivi.

Dans les quartiers Atrone, Gassi, Paris-Congo, Sabangali, Walia, une accalmie relative règne. Pas de manifestants sur les voies publiques. Aucune perturbation de la circulation. Moins encore des pneus brûlés. L’heure est au bilan et au repos, nous confient certaines personnes qui ont manifesté la veille. D’autres, à Walia par exemple, nous confient que la police a occupé les axes stratégiques très tôt, les empêchant de manifester. D’autres encore ont en mémoire la brutalité policière lors de la marche précédente. La peur semble avoir gagné du terrain.

Sur le terrain, il n’y a que la présence policière et militaire. Par endroit, ils sont positionnés. À Atrone, la police antiémeute a positionné deux camions chauffe-eau sur l’axe Foullah. À côté, des pick-up avec les policiers sont prêts à intervenir. Un peu vers l’axe du centre de santé d’Atrone, un véhicule rempli de militaires, chicotte en main, fait la patrouille. Sous le viaduc de Chagoua, des véhicules de la gendarmerie et de la police sont stationnés. Pendant ce temps, des agents de la police municipale sont mobilisés pour faire la chasse aux pneus dans la ville. À notre présence, 5 véhicules remplis de pneus roulent en direction de la mairie centrale. Des agents de l’Agence nationale de sécurité (ANS), en civil et à moto, sillonnent les quartiers sud guettant un probable foyer de manifestation.

Cette marche, la deuxième de l’ère de transition, a pour objectif la dénonciation de la transition militaire et l’ingérence de la France dans les affaires internes du Tchad. La première, organisée le 27 avril, a été réprimée. Les organisateurs évoquent un bilan de 15 morts alors que les autorités ne parlent que de 5 morts. La coordination des actions citoyennes dit ne pas baisser les bras. Elle promet d’organiser d’autres grandes manifestations jusqu’à la dissolution du conseil militaire de transition.

Christian Allahadjim
Adam Oumar Adam

Suite aux manifestations d’hier 27 avril, des journalistes ont été arrêtés par les forces de l’ordre déployées pour réprimer la marche. Leurs témoignages et la réaction de l’Union des journalistes tchadiens. Reportage.

Lapia Beati, journaliste au quotidien Le Progrès a été arrêté par les gendarmes avant d’être remis aux policiers du commissariat d’ordre public n°15 puis transféré au COP13. Il a été torturé avant d’être relâché le soir de la même journée alors qu’il était habillé de son gilet de travail. Il dit n’avoir pas jusqu’à preuve du contraire compris les motifs de son arrestation. « Personne ne m’a dit clairement ce qu’on me reproche. Toujours est-il que j’étais sur les lieux habillés du gilet qui a été confectionné et mis à la disposition des organes de presse par la HAMA.

Selon le journaliste, il était bien visible. Alors qu’il filmait la manifestation, les gendarmes étaient arrivés avec leur véhicule bleu, « j’avais mon gilet. J’étais sûr qu’on me posera quelques questions pour vérifier, mais hélas. On m’a directement mis dans le pick-up où se trouvaient 2 jeunes mineurs. Et c’est après m’avoir déjà donné de coups qu’on me demande pourquoi je filme ?  J’ai répondu que je suis journaliste. » Les policiers ont alors demandé pourquoi notre confrère ne leur ai pas dit cela avant. Aussitôt, ils lui ont arraché son gilet et son téléphone. Il a été gardé jusqu’en soirée. « J’ai été libéré grâce à l’intervention de mes supérieurs hiérarchiques. Je pense qu’il faudra que les responsables de nos forces de l’ordre comprennent que ce que nous, journalistes, faisons, ce n’est pas contre quelqu’un, mais on le fait pour informer. »

Cynthia Oundoum, journaliste à Tchadinfos, a été aussi arrêtée lors de ces manifestations. « Hier, c’était vers 10 heures, nous étions sur le terrain pour couvrir la marche avec les autres confrères. Vers le collège évangélique, il y avait un groupe d’artistes qui manifestait avec des banderoles.   Donc comme d’habitude, nous nous sommes empressés d’aller les interroger et les photographier ». Notre collègue avec d’autres journalistes se sont retrouvés nez à nez avec plusieurs véhicules des forces de l’ordre. Ils se sont réfugiés dans la chambre d’un ami avec une dizaine de personnes. Les agents des forces de l’ordre ont défoncé la porte pour les arrêter, selon la journaliste. « Parmi ce nombre, c’est seulement nous les deux journalistes qui ont été arrêtés. Ils nous ont embarqués. Après ils nous ont posé la question si nous avons une autorisation pour couvrir la manifestation. Nous leur avions répondu que nos gilets et nos badges suffisent déjà et que nous n’avions d’une quelconque autorisation. Après avoir fait le tour de Moursal avec nous, ils nous ont libérés tout en nous enjoignant l’ordre de rentrer de suite. » Elle affirme qu’ils n’ont pas subi des sévices. Cynthia s’interroge, « ce que je ne comprends c’est le fait qu’ils nous ont arrêtés malgré nos gilets estampillés Presse avec des badges. Je crois que les gilets procurés à la HAMA nous protègent. Mais hier, je me suis rendu compte que ces gilets nous exposent plutôt.  Ce que je réclame c'est vraiment qu’ils nous laissent travailler. C'est la liberté de la presse comme son nom l'indique que nous voulons. »

Pour le président de l’Union des journalistes tchadiens, Mahamoud Abbas, c’est inadmissible qu’on arrête des journalistes lors de tels événements.  D’après lui, l’UJT a toujours rappelé et interpellé des responsables que des journalistes sont présents pour informer en relatant ce qui se passe le terrain. « Donc leur place n’est pas dans des commissariats, en prison, mais dans des rédactions et sur le terrain pour collecter des informations », a fait savoir Mahamoud Abbas. L’UJT dit condamner fermement ces actes. « Nous condamnons avec force ces actes d’arrestation et de maltraitance des journalistes », a réagi le président de l’UJT.  Selon lui, plusieurs recommandations ont été faites aux responsables de la sécurité pour la protection des journalistes. Mais jusque-là rien. « Nous allons relancer les autorités. Si elles n’aboutissent pas, nous allons appeler tous les journalistes à cesser le travail jusqu’à ce que les gens nous respectent ».

Santana Togyanouba
Younous Sidick Abakar Choukou

La marche pacifique initiée par la coordination des actions citoyennes pour protester contre le Conseil Militaire de Transition (CMT) et l’ingérence de la France dans les affaires du Tchad le 27 avril passé a causé d’énormes dégâts humains. Les autorités et les organisateurs avancent chacun ses chiffres.

Selon le gouvernement, par le biais du procureur de la République, Youssouf Tom, N’Djamena, la capitale tchadienne a enregistré 4 cas de décès, dont une femme. Par contre, Moundou, la capitale économique n’a enregistré qu’un seul cas de décès.

Ce bilan dressé par le procureur est contredit par les organisateurs. D’après Me Max Loalngar, l’un des leaders de la coordination des actions citoyennes, que nous avons contacté, le bilan sur le plan humain est élevé. « 15 morts, dont 3 ont été signalés à Moundou et 12 à N’Djamena. Plus de 170 personnes arrêtées. Des blessées, on n’en parle pas », dit-il. Selon lui, la marche initiée par son organisation, pour protester contre la transition militaire et l’ingérence de la France dans les affaires internes du Tchad, a été une réussite. Car, dit-il, enfants, jeunes et personnes âgées sont tous sortis pour exprimer leur ras-le-bol.

Dans le souci de confirmer dans l’un ou l’autre cas les chiffres avancés par les organisateurs de la marche et les autorités, nous nous sommes rapprochés des responsables de la Morgue de l’Hôpital général de référence nationale (HGRN) de N’Djamena. Mais ceux-ci ont refusé de répondre à nos questions. 

Rappelons que la marche pacifique du 27 avril, initiée par la coordination des actions citoyennes dénommée « Wokit tama », a été durement réprimée par les forces de l’ordre. Les marcheurs rejettent la transition militaire et dénoncent l’ingérence de la France dans les affaires internes du Tchad. Malgré la répression, la coordination des actions citoyennes a encore appelé à une nouvelle manifestation pacifique ce mercredi 28 avril. Et promet d’autres.

Allarassem Djimrangar

Le président français, Emmanuel Macron a reçu ce matin son homologue Félix Tshisekedi, président de la République Démocratique du Congo, par ailleurs président en exercice de l’Union Africaine. Le chef de l’État français condamne la répression des manifestations ce matin, 27 avril à N’Djamena, capitale tchadienne.

Emmanuel Macron dit soutenir le processus de la transition qui doit ouvrir la voie à la démocratie et à la stabilité du Tchad. Vu l’évolution de la situation, il dit être préoccupé. Il affirme condamner avec fermeté, la répression des manifestations et des violences qui ont eu lieu ce matin à N’Djamena. Pour le chef d’État français, le respect des engagements pris par le Conseil Militaire de Transition (CMT) est celui d’une transition pacifique, inclusive sur le plan politique. Macron insiste qu’il a apporté son soutien à l’intégrité et à la stabilité à N’Djamena pour l’ensemble du pays. Il dit être pour une transition pacifique et démocratique, « je ne suis pas pour un plan de succession. » D’après lui, la France ne sera jamais auprès de ceux qui forment ce projet. Le temps est venu dit-il, de lancer un dialogue politique national ouvert à tous les Tchadiens, c’est ce qui est attendu aujourd’hui. « Le CMT serait le conditionnel de notre soutien. Nous resterons aux côtés de l’Union Africaine que préside le président Tshisekedi aujourd’hui et le G5 Sahel qui s’est engagé résolument dans la médiation de la situation qui me préoccupe très fortement», a lancé le président français.

Rappelons que le président français Emmanuel Macron, a signifié lors de son passage à N’Djamena pour les hommages à son homologue tchadien Idriss Deby, que la France ne laissera ni aujourd’hui ni demain ceux qui tenteraient de nuire à la stabilité et à l’intégrité du Tchad.

Moyalbaye Nadjasna

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