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Le Tchad a fêté sa 61e année d’indépendance hier mercredi 11 août. Le Conseil Militaire de la Transition (CMT) et certaines personnes ressources souhaitent une transition apaisée pour un Tchad meilleur. Reportage.

13 heures passées lorsque le défilé militaire marquant les 61 ans du Tchad est terminé à la place de la nation de N’Djamena capitale du Tchad. En face de nous se trouve une trentaine de responsables, nous rencontrons Monsieur Nassour Guelendougssia Waïdou, ancien premier ministre qui s’apprête à quitter. Il accepte de répondre à nos questions. « En 1960 j’avais 13 ans, 60 ans après c’est-à-dire, en 2021, je suis à 74 ans. Je remercie le Bon Dieu de m’avoir permis d’avoir cet âge. Cela m’a permis aussi de me mettre au service de ma nation un tant soit peu. Quand on est responsable, on pense aux autres et non au soi-même. Aux jeunes frères, je leur demande de penser d’abord à leur vie, on ne travaille pas pour soi, mais pour le peuple. C’est tout ce que je peux dire », déclare-t-il. Un peu à ses côtés se trouve, madame le ministre Secrétaire général Adjointe du gouvernement. D’un air très jovial, s’exprime « Si sur le plan militaire nous avons su nous positionner dans la sous-région, pour le développement économique de notre pays, il reste encore beaucoup à faire. C’est la raison pour laquelle, je souhaite de tous mes vœux la paix pour notre pays afin qu’on puisse aussi décoller à l’instar des autres pays. »

Plus loin, on aperçoit un ex-secrétaire général du MPS, Emmanuel Nadingar, mais aussi juste à sa droite, un leader religieux Bishop Amane Mamaté, Président de l’Alliance des Églises Pentecôtistes au Tchad. Selon Emmanuel Nadingar, commémorer un anniversaire c’est en même temps une occasion de réjouissance, mais aussi un espoir pour un peuple. « C’est quand on est rassuré qu’on peut libérer son énergie. Je pense que nous devons mobiliser ensemble notre volonté pour construire positivement notre pays », estime-t-il. Pour le leader religieux, Bishop Amane Mamaté, C’est une fierté d’avoir une longévité de 60 ans. Il indique que pour un pays, c’est petit, mais pour un homme c’est important, avant de préciser que l’âge de 60 ou 61 c’est l’âge mur. D’après lui, s’il fallait faire une évaluation de 61 ans d’indépendance du Tchad, c’est triste. Ce qu’il faut peut-être faire dit-il, c’est de s’asseoir et réfléchir chaque année sur notre devenir. « Je souhaite que les Tchadiens déposent les armes. Vous avez vu le défilé avec les armes de tous les calibres. Si on réfléchit ensemble, Ce n’est pas pour tuer un Français, un Russe ou ceux qui nous les ont vendus, mais on tuera un Tchadien. Il faut réfléchir à la façon qu’il faut construire et non de se tuer », affirme l’homme de Dieu. Bishop Mamaté informe qu’ils reviendront prier pour la paix de la nation. Selon lui, si les Tchadiens n’ont pas la volonté de faire la paix, Dieu n’oblige personne. « La paix vient aussi de la volonté de tourner le dos au mal. Les Tchadiens doivent dépasser leurs préjugés et construire leur pays, car l’avenir de leurs enfants en dépend », lance-t-il.

Le président du CMT s’adressant à la nation tchadienne

Le président du Conseil militaire de transition (CMT), Mahamat Idriss Deby Itno s’est adressé, la veille, 10 août à la nation. Selon lui, le CMT obéit au souci cardinal de faire face à l’urgence absolue. Cette urgence précise-t-il, c’est de devoir défendre le Tchad contre toute agression et de préserver les acquis de paix et de la stabilité puis garantir ainsi, l’unité et la cohésion nationale. Pour lui, la guerre n’est pas finie et la menace d’attaques par d’autres groupes armés venus de l’étranger demeure. Il insiste sur l’objectif du CMT qu’est d’assurer la continuité de l’État, la survie de la nation et l’empêcher de sombrer dans le néant, la violence et dans l’anarchie. « La seule et unique raison d’être du CMT, c’est le Tchad, le Tchad éternel. Dans un sursaut patriotique, nous devons faire taire les rancœurs et les incompréhensions, transcender les intérêts égoïstes et surmonter les divisions pour nous concentrer sur l’essentiel, l’intérêt supérieur du Tchad. Aucun pays ne peut avancer sur le chemin du progrès si la haine est le pain quotidien de ses filles et de ses fils », note-t-il. Mahamat Kaka, informe que dans les prochains jours, et après les consultations en cours, un Conseil National de Transition, représentatif de toutes les provinces et de toutes les forces vives de la Nation sera également mis en place de façon consensuelle et concertée. Il explique que le CNT va exercer un contrôle législatif de l’action gouvernementale afin d’offrir au pays les bases d’une nouvelle constitution.

« L’objectif du processus est de nous permettre d’organiser des élections démocratiques, libres et transparentes dans les meilleurs délais. La démocratie et la liberté introduites au Tchad en 1990 sont et resteront des valeurs irréversibles ».

Moyalbaye Nadjasna

Le président du conseil militaire de transition (CMT), le général Mahamat Deby Itno a assisté hier mercredi 11 à la place de la nation au défilé marquant les 61 ans de l’accession du pays à l’indépendance. Il a profité de cette occasion pour déposer les gerbes de fleurs au monument des soldats tombés au front. Reportage

10 heures 15 minutes, c’est sous un ciel nuageux que le président du conseil militaire de la transition(CMT), le général Mahamat Deby Itno est arrivé à la place de nation pour assister au défilé militaire marquant les 61 ans de l’indépendance du Tchad. Après les honneurs militaires, le chef du CMT et président de la République s’est rendu au monument des invalides pour déposer les gerbes de fleurs aux soldats morts au front. Après la cérémonie de prise d’armes, le numéro 1 du CMT a assisté au défilé militaire et paramilitaire en présence des députés, des représentants des institutions internationales, des membres du gouvernement de transition et d’autres personnalités. Il est 10 heures et 30 minutes, le service d’information des armées annonce le programme du défilé militaire et paramilitaire qui est divisé en trois parties, à savoir le défilé aérien, le défilé de différents corps à pied et enfin le défilé motorisé, mettant ainsi en exergue l’arsenal militaire que dispose le Tchad. Aussitôt l’annonce, le défilé commence par l’armée de l’aire avec la démonstration de plusieurs avions de combat, des hélicoptères de différentes marques qui ont servi l’armée de l’air tchadienne dans plusieurs champs de batail. En faisant la démonstration de largage de ses commandos, un hélicoptère a fait écrouler une tente, mais tous les invités constitués majoritairement des policiers et autres corps kaki, sont sain et sauf. Après le massage impressionnant des avions de guerre avec leur génie, s’en est suivi la fanfare qui donne la cadence au défilé à pied de plusieurs corps de l’armée de terre. Il faut aussi noter que ce défilé militaire et paramilitaire à l’occasion de la célébration de 61 ans d’indépendance, plusieurs civils sont invités à prendre part à cette grande cérémonie.

 Parlant du défilé de l’armée de terre, il convient de souligner la particularité de cette cérémonie, avec pour la première fois de son histoire, le défilé de la première promotion des enfants de troupe du Tchad qui sont passés sous acclamation de plusieurs officiers tchadiens et étrangers présents à la tribune des officiers. Les enfants de troupe qui ont défilé sous la cadence de la fanfare ont été aussi ovationnés par plusieurs civils invités à cette cérémonie.

Enfin le défilé motorisé, qui marque la fin de cérémonie, est une occasion de montrer les engins de guerre que le pays dispose depuis son accession à l’indépendance. Le défilé motorisé qui a duré plus d’une heure d’horloge, a permis au service d’information des armées du Tchad d’expliquer les différents types d’arme et de camions que le pays utilise pour assurer sa défense et sa sécurité.  Le défilé a permis aux autorités du CMT de montrer aux tchadiens et au monde, que le pays de Toumai dispose un arsenal militaire qui lui permet d’assurer la défense et la sécurité de son peuple. Toutefois, il faut noter que, le passage des chars combat avec leur crampon, a dégradé l’esplanade de la place de la nation.

 Pour réussir cette cérémonie, le maire de la ville de N’Djamena, Ali Aroun a invité ses concitoyens à sortir massivement pour assister au défilé militaire.

Jules Doukoundjé

La République du Tchad va célébrer demain le 11 août 61 ans d’accession à l’indépendance. En prélude de cette célébration, le Dr Sali Bakari, enseignant chercheur au département d’Histoire à l’École Normale Supérieure (ENS) de N’Djamena retrace les grands moments qui ont marqué la vie sociopolitique du pays. Reportage

Le 11 août 1960, il y a 61 ans à Fort Lamy la capitale, actuelle N’Djamena que le premier Président François Tombalbaye, avait proclamé l’indépendance du pays. C’était en pleine nuit après un discours du ministre français de la Culture André Malraux, représentant du général de Gaulle à la cérémonie. Quelques heures plus tard, un grand défilé de l’indépendance était organisé à Fort Lamy et on hissait le premier drapeau du nouveau pays. Les Tchadiens s’apprêtent à célébrer l’anniversaire d’un pays qui a durant les 61 ans, a connu plusieurs conflits politico-militaires et qui peine à retrouver le chemin du développement socio-économique. Pour le Dr Sali Bakari, enseignant chercheur à l’École Normale Supérieure (ENS) de N’Djamena, à l’instar de nombreux pays africains qui ont accédé à l’indépendance en 1960, mais qu’à la différence de ces pays, le Tchad bascule très tôt dans la violence. Selon lui, avec la création du mouvement politico-militaire du Front de Libération Nationale du Tchad (FROLINA), le 22 juin 1966 à Nyala (Soudan), les militaires et les combattants tchadiens se sont invités sur la scène politique tchadienne et que l’armée a joué un rôle important et continue à jouer encore un rôle important dans la dynamique politique du Tchad.

« La preuve, le premier président du Tchad, François Tombalbaye sera tué lors d’un coup d’État, le président Maloum partira à suite à un bras de fer avec de tendances politico-militaires, Goukouni Weddey va arriver par les armes et partira par les armes. Hissein Habré a pris le pouvoir par les armes et partira par les armes, et enfin Idriss Deby Itno était arrivé au pouvoir par les armes et a été tué par les armes et qu’aujourd’hui c’est encore un militaire qui est au pouvoir », relate M. Sali Bakari. L’enseignant chercheur estime que, quand on parle de l’histoire politique du Tchad, au lieu qu’elle soit uniquement centrée sur le plan politique, sur les débats idéologiques et surtout sur les partis politiques, on se rend compte qu’au Tchad, quand on parle de l’histoire politique, les mouvements politico-militaires sont au centre de celle-ci. L’historien indique qu’une telle situation produit des conséquences désastreuses sur le plan économique et politique. A son avis, le Tchad n’a pas de possibilité de mener les deux guerres, c’est-à-dire la guerre pour le pouvoir, la guerre pour préserver le pouvoir et surtout la guerre pour le développement socio-économique. Il souligne qu’après 6 décennies d’indépendance, les indicateurs socio-économiques sont au rouge. Le chercheur a, point par point dépeint le tableau sombre du pays depuis l’indépendance jusqu’à nos jours. M. Sali Bakari a relevé par exemple le manque d’infrastructure qui empêche le pays de décoller.

Pistes de solutions

Pour permettre au pays de reprendre l’élan de son développement, l’historien affirme qu’il faut passer de la guerre pour le pouvoir et la préservation du pouvoir, pour la guerre pour le développement. « Le dialogue national inclusif devrait être une occasion pour revoir le contrat social tchadien », estime-t-il. Selon lui, les conflits ont pendant longtemps permis à la bourgeoisie politico-militaire de prospérer. Il est temps d’arrêter cela. Il estime que le prochain dialogue national inclusif devrait être une vraie occasion de discuter de tous les problèmes sociaux du pays. Du point de vue de la démocratie, M. Bakari reconnaît qu’il y’a toutefois une nette amélioration et que le pays a connu une nette avancée dans le domaine de la lutte syndical et de la société civile. L’enseignant chercheur propose qu’on remette le compteur à 0. Et réécrire un autre projet de société, sans cela, le pays fera toujours du surplace. Selon lui, un pays, c’est d’abord le label de qualité et d’excellence, et que le Tchad ne dispose pas ce label-là. Il souhaite par ailleurs que le gouvernement s’appuie sur les ressources humaines de qualité pour permettre au pays de décoller.

Jules Doukoundjé

Comme une bombe à fragmentation tirée de la capitale égyptienne, Le Caire, au cœur du pouvoir tchadien, l’affaire Tom Erdimi est-elle en train de révéler la suite d’une longue lutte, sans merci, entre membres d’un même clan pour le pouvoir à tout prix? Le nouvel ordre le Conseil Militaire de la Transition (CMT) est peut-être en train de gérer les « Gestapories » des services secrets tchadiens. Au-delà de ressembler, par son côté secret, à un film d’espionnage à la James Bond, et par son côté « gestion clanique » à une véritable histoire de gang, l’affaire Tom est-elle une affaire d’État? Qui aurait intérêt à l’arrêter? Est-il vivant ? Est-il mort? Pourquoi le retient-on dans une prison égyptienne sans donner des nouvelles à sa famille? Pourquoi la famille a attendu si longtemps avant de dénoncer l’affaire? Pourquoi tous ces silences?

D’abord, le silence du CMT. Il semble que le chef de la junte était au courant de cette affaire. Il a hérité d’un dossier chaud qui a peu d’impacts sur le pays, mais plutôt peut avoir des conséquences sur les différentes ramifications familiales qui s’entrelacent autour du chef du CMT. Les jumeaux Erdimi sont-ils encore si influents auprès du fils du Maréchal, Mahamat Kaka? Eux qui, dit-on, ont été influents voire ont établi un réseau dormant au cœur du pouvoir du Maréchal père, Deby Itno. Un réseau qui s'est matérialisé par l'assaut des rebelles qui avaient fait vaciller le père. En cette période de fragile transition, il serait donc risqué au jeune président de la transition d’engager un bras de fer avec le clan Erdimi. Le chef de la junte a vite compris qu’il est inutile de surréagir. Ce n’est pas, non plus, une bonne stratégique de ne rien faire. Et même contre-productif d’agir dans la précipitation.

Ensuite, Tom « la bougeotte » bouge en permanence. Depuis qu’il a quitté le Tchad pour son exil forcé aux États-Unis, Tom Erdimi vivrait, dit-on, dans une hantise permanente d’être traqué par les services de renseignements du défunt Maréchal Deby Itno. A tel point qu’il vivait presque en clandestin. Il avait disent certaines sources presque peur de son ombre. Et pourtant il n’a jamais cessé de voyager. Parfois avec son titre de voyage comme réfugié, souvent avec des faux passeports disent ses détracteurs. Sinon comment peut-on expliquer sa présence en Égypte? Que faisait-il dans ce pays? Son entourage soutient qu’il est rendu en Égypte par nécessité. Il voulait se rapprocher de sa famille.

Mais, pourquoi ce silence de la famille? Un silence gênant, étonnant, incompréhensible surtout que cette disparition daterait de septembre 2020. Ce n’est que récemment que les bruits sur l’arrestation de l’opposant ont commencé à filtrer à compte-gouttes dans certains milieux avant la mort du président Deby Itno. La famille était bien au courant. Mais dans une situation aussi délicate, elle a probablement choisi de se taire espérant certainement une issue heureuse. Et patatras, le Maréchal disparaît tragiquement laissant tout à découvert. Était-il de son vivant le commanditaire? Le service de renseignement tchadien aurait-il mis à son service le puissant service de renseignement égyptien? Tom Erdimi s’était-il établi en Égypte? Le mystère reste entier. Le silence n’est qu’à moitié brisé. Le nouveau prince Mahamat Kaka est dans cette affaire un héritier innoncent. La famille Erdimi a continué à se taire après quelques promesses. La junte ne voudrait, peut-être et surtout pas, être embarrassée par la présence des frères Erdimi en ce moment où son pouvoir n’est pas solidement assis.

Enfin, le temps est passé, le président de la transition s’est installé et le dossier Tom a disparu dans les dédales du palais. Subitement la famille se mobilise cette fois-ci publiquement. Les réseaux sociaux, les réunions familiales médiatisées et le tout accompagné d’un ultimatum de 72h au CMT. La famille veut avoir des nouvelles de Tom, mort ou vivant. L’ultimatum a expiré. Aux dernières nouvelles, le président de la transition a reçu les proches de la famille Erdimi pour leur faire comprendre que ni lui, ni le CMT ne sont mêlés à cette affaire tout en promettant aide et soutien pour résoudre le problème. Depuis le silence a repris service. C’est peut-être un indice fiable que Tom Erdimi serait bien vivant quelque part dans une geôle égyptienne. Peut-être même qu’il serait arrêté pour autre chose chuchotent-on dans les couloirs du Palais rose. Peut-être aussi que ce sont les longs bras du défunt Maréchal. Peut-être, peut-être. Beaucoup des « peut-être ». Beaucoup d’interrogations. Beaucoup de silences qui rendent cette nébuleuse affaire encore plus nébuleuse.

Bello Bakary Mana  

Le 11 août 1960, 11 août 2021, le Tchad va fêter ses 61 ans d’indépendance. Après six décennies, quel est l’état des lieux de la politique tchadienne? Le politologue, Dr Évariste Ngarlem Toldé analyse la situation politico-militaire.

Le politologue Dr Évariste Ngarlem Toldé précise que, les problèmes du Tchad ont leur origine dans les différentes constitutions taillées sur mesure. Il rappelle qu’à l’ère du Mouvement Patriotique du Salut (MPS), la constitution de 1996, a été modifié trois fois en 2005, 2018 et 2020. Selon lui, la modification à mainte reprise de cette loi fondamentale a constitué le nerf de guerre des acteurs politiques tchadiens. « Les politiciens continuent à s’entredéchirer jusqu’aujourd’hui. Cela fait que le Tchad avance d’un pas en avant et de deux pas en arrière remettant ainsi en cause la situation politique du pays », dit-il. Dr Évariste rajoute que la rébellion à commencer pendant l’indépendance et aujourd’hui encore on connaît des rébellions dans ce pays. Pour lui, le problème de la réconciliation et de la paix n’a jamais été réglé de façon fondamentale depuis les années 1965-66 entre les Tchadiens.

Pour revenir à l’actualité, le politologue note que le Conseil Militaire de Transition(CMT) est mal placé pour organiser le dialogue national inclusif. Car soutient-il que le CMT ne peut pas être juge et parti. Il souhaite par ailleurs que, les assises nationales soient confiées aux facilitateurs neutres avant de proposer par exemple, la francophonie ou l’Union africaine. Juste pour inspirer confiance aux acteurs, argumente-t-il. « Je crois que les gens demandent au CMT de revoir la charte de transition. Imaginez-vous, le CMT n’est constitué que des militaires, ce n’est pas diffèrent d’un coup d’État. Alors il faut faire en sorte que les civiles intègrent le gouvernement. Sinon, un gouvernement civilo-militaire. Le CMT doit remettre la balle à terre », dit Dr Évariste. D’après lui, si ce travail en amont rate, cette rencontre va porter les germes d’une dislocation future du pays. « Je préfère le terme Conférence Nationale Souveraine(CNS) au lieu de Dialogue national inclusif », insiste le politologue.

François Tombalbaye devient Premier ministre le 29 mars 1959 et son parti remporte les élections législatives de mai 1959. L’indépendance du Tchad est proclamée le 11 août 1960. Deux ans après l’indépendance, en 1962, François Tombalbaye a interdit tous les partis politiques à l’exception du parti présidentiel, le Parti Progressiste Tchadien(PPT). Le Tchad ne faisait pas œuvre originale en Afrique et la culture du parti unique s’est installée. Hissène Habré et Idriss Deby, chacun à sa manière, en fait usage. Fin octobre 1965, les paysans se révoltent à Mangalmé (préfecture du Guéra) contre une administration locale corrompue et des impôts trop lourds.

Dr Ngarlem Toldé, précise que le premier coup d’État au Tchad a été organisé en 1963. Il rajoute qu’après la mort de Tombalbaye, en 1975, de 1975 à 1979, c’était le règne militaire en association avec certains rebelles. Le politologue explique qu’en 1979, la Charte fondamentale a permis à Hissène Habré de devenir 1er ministre du Tchad. « La guerre civile éclate en plein cœur de la capitale, N’Djamena. C’était la guerre civile des tendances politico-militaires qui vont morceler le pays. Il y a eu plusieurs conférences de consultation qui n’ont pas abouti. 1982 Hissène Habré s’empare du pouvoir. 1989 c’est le parti unique, Unir, avec une 1ere constitution. Un an après, en 1990, le MPS est arrivé au pouvoir », explique l’enseignant chercheur. Il affirme que la conférence de réconciliation de Kanon 1 regroupait 4 tendances de rébellions et celle de Kanon II, 11 tendances. Selon lui, en 1969 , Ngarta Tombalbaye à l’époque, a envoyé le dossier avec Aboubakar Abba Sidick qui dirigeait le FROLINAT à Tripoli. Felix Malloum, lui, envoie son vice-président Mamari pour négocier un accord à Khartoum avec Hissène Habré. Pour Dr Évariste, ces rencontres de négociations et de réconciliations n’ont pas jeté les bases de la paix pour les fils du Tchad.  « Le Tchad est très fragile à cause de plusieurs problèmes comme l’insécurité, le fédéralisme, le bilinguisme. Les vrais problèmes du Tchad n’ont pas été débattus, du moins pas à la conférence nationale souveraine de 1993. Le cahier de charge n’a pas été mis en application », explique le politologue. Dr Évariste Ngarlem Toldé insiste sur les modifications répétitives de la constitution. C’est pour lui la base de tous les maux du Tchad. Il réitère son propos en mentionnant, « les différentes réconciliations nationales n’ont pas produit les résultats escomptés. »

Moyalbaye Nadjasna

La plate-forme des diplômés sans emploi procède depuis le 2 août dernier au recensement de tous les diplômés sans emploi du Tchad. L’objectif de ce recensement est de connaître le nombre exact de tous les diplômés sans emploi afin de mieux organiser la lutte pour l’intégration. Reportage.

Pour mieux organiser la lutte pour l’emploi, il faut connaître le nombre exact des diplômés sans emploi. C’est dans ce sens que la plate-forme des diplômés sans emploi a décidé de faire un recensement général de tous les diplômés au chômage. Le recensement est lancé depuis le 2 août dernier pour la ville de N’Djamena et pour les autres provinces du pays, c’est à partir de ce lundi 9 août qu’il est lancé. De l’avis du responsable de la plate-forme des diplômés sans emploi du Tchad, M. Néloumbaye Ngarari, la plate-forme a constaté qu’on ne connaît pas un chiffre exact des diplômés sans emploi au Tchad. Et que c’est dans ce constat que la plate-forme cherche à connaître un nombre exact de tous les diplômés qui sont à la recherche d’emploi. « C’est un plan pour la plate-forme, le recensement va nous permettre de revoir notre stratégie de lutte pour l’emploi », explique-t-il.  Selon lui, normalement c’est l’État qui doit faire le recensement de ses diplômés, mais l’État semble fuir sa responsabilité. La plate-forme le fait dans le sens de sa lutte, avant de dire qu’à la fin du recensement, ils vont révéler le but de cet exercice.  Une nouvelle plate-forme dénommée Wakit ma Tama, proche disent certaines sources du parti de feu président Idriss Deby Itno, qui chercherait à donner une formation pratique et adéquate aux diplômés sans emploi. À ce sujet, M. Ngarari, précise que leur mouvement est apolitique, et que leur préoccupation, c’est l’emploi. « Nous ne sommes pas des politiciens, nous sommes des diplômés sans emploi, nous cherchons du travail, nous avons faim, même si c’est un diable qui propose du travail, nous allons accepter », rétorque ce dernier.

S’exprimant dans le même sens, Deuzoumbé Narcisse, qui a obtenu sa maîtrise en histoire depuis 2011 et est sans emploi, souligne qu’il a déposé pour l’intégration à la fonction publique et qu’il continue d’attendre, avant de noter que ce n’est pas normal que l’université de N’Djamena forme les jeunes cadres et les abandonne à la merci de la nature. Pour ce qui concerne le recensement en cours, il ajoute que c’est une bonne initiative qu’il faut encourager. Le jeune diplômé sans emploi estime que l’État ne semble pas s’intéresser à la situation des diplômés sans emploi, sinon il allait faire un recensement pour connaître leur nombre. Deuzoumbé Narcisse exhorte ses camarades à sortir massivement pour se faire recenser. Il ajoute que ce recensement va leur permettre de connaître le nombre exact des diplômés sans emploi afin de mener des actions plus concrètes.

En une semaine, la plate-forme, section de N’Djamena a enregistré plus 3 000 diplômés sans emploi. Le responsable de la plate-forme appelle ses camarades de N’Djamena à se rendre à la bourse du travail pour se faire recenser. Pour le recensement, il est demandé une photocopie légalisée du diplôme et une carte d’identité nationale.

Jules Doukoundjé

La plate-forme des organisations de la société civile Wakit Tama et certains membres de l’opposition démocratique ont organisé ce samedi 7 août une marche pour demander le départ du CMT et la réécriture de la charte de la transition pouvant conduire à des élections démocratiques, libres et transparentes. Plusieurs milliers de manifestants ont répondu à l’appel de la plate-forme dans une ambiance joyeuse. Reportage

C’est sous un soleil clément que plusieurs milliers de manifestants ont répondu à l’appel de la plate-forme des organisations de la société civile, Wakit Tama et quelques membres de l’opposition démocratique pour dire non au Conseil Militaire de la Transition (CMT) et pour exiger la réécriture de la charte de la transition qui devrait permettre d’organiser d’ici moins de 18 mois les élections démocratiques, libres et transparentes. Minus de pancartes, de banderoles, de tambours et de sifflets que plusieurs manifestants de différentes couches sociales se sont rendus au rond Hamama, avenue Président François Ngarta Tombalbaye, située au quartier Djari, en face du Ministère de la Santé publique, dans le 8e arrondissement de la commune de N’Djamena. 

À 8 heures, l’ambiance était bon-enfant. En attendant les consignes des organisateurs de la marche pacifique, les manifestants chantent, sifflent et dansent. Sur les pancartes, l’on écrit, non au CMT, non à la dévolution du pouvoir monarchique, non à la France et plusieurs autres revendications sont aussi inscrites. Vers 8 heures 20 min, les organisateurs se concertent et donnent des consignes aux marcheurs. Les jeunes marcheurs forment un cordon de sécurité pour encadrer la marche pacifique. À 8 heures et 30 min, ils entament l’hymne national la Tchadienne et quittent le lieu de rassemblement sous le contrôle de plusieurs agents de sécurité publique pour le palais du 15 janvier.

 Main dans la main, plusieurs jeunes manifestants issus de différentes couches de la société civile, des organisations des jeunes, des diplômés sans emploi, les associations des personnes handicapées, l’association des victimes du régime du président Hissein Habré, l’association des retraités du Tchad et autres entités ont entonné plusieurs chants improvisés pour se rendre à l’esplanade du palais du 15 janvier. Ces marcheurs se sont arrêtés plusieurs fois pour lancer des messages aux riverains de ne plus avoir peur et de sortir massivement pour revendiquer leurs droits. Ils dénoncent aussi l’ingérence de la France dans la transition actuelle. La marche qui a duré plus de deux heures d’horloge s’est déroulée sans effusion de sang. Sur le plan sécuritaire, il faut noter que les agents de la sécurité publique ont fait preuve de professionnalisme irréprochable. Ces derniers ont quadrillé l’itinéraire de la marche, en se mettant devant et derrière les manifestants. Cette deuxième marche pacifique autorisée sous la gouvernance du CMT est suivie avec beaucoup d’attention par la communauté internationale et plusieurs associations des défenseurs des droits humains. C’est aussi la première marche pacifique autorisée, qui a vu la présence des observateurs des Nations Unies et les représentants de l’Union africaine.

Jules Doukoundjé

La Coordination des actions citoyennes, Wakit Tama, vient d’achever sa 2e marche pacifique ce, 07 août 2021. L’itinéraire est le même. Rassemblement et départ au Rondpoint Hamama, 8e arrondissement de Ndjamena, capitale du Tchad. Le mouvement boude le Conseil Militaire de la Transition(CMT), exige, la révision de la charte de transition et le décret de création du Conseil National de la Transition (CNT)

Kiri Justin, vit au quartier Walia, 9e arrondissement de N’Djamena, capitale tchadienne. Il est une victime, blessée lors de la manifestation du 27 avril dernier sévèrement réprimée par les forces de sécurités.  Ce jeune d’environ 29 ans se sert de sa béquille pour se mettre en rang avec ses camarades ce samedi 07 août. « Mais je ne vais pas croiser les bras, je continuerais à marcher tant que je vivrai pour une cause noble. La justice est rendue au nom du peuple tchadien et il faut qu’elle soit une réalité dans cette nation. Je suis déterminé et je vais foncer malgré mon état, car mon avenir et celui de mes cadets et cadettes y dépendent », dit-il. Noudjiram Jean Paul, un autre marcheur, il est écrit sur sa pancarte : non à la France. « Tant que la charte n’est pas révisée, nous ne cesserions pas de marcher jusqu’à ce que cela change. Nous ne voulons pas du CMT. Nous voulons un pays de liberté, un pays où il fait bon vivre. Nous ne voulons pas que la France se mêle de nos affaires ». Alladoum Maxime aussi marche et en donne ses raisons, « le CMT a une manœuvre inconnue. Et nous lui disons non. Le peuple tchadien est longtemps opprimé et martyrisé et cela suffit. Nous ne voulons plus demeurer dans l’esclavage, il faut que cela cesse. Nous sommes fatigués de tout dans ce pays. »

Arriver au point de chute, palais du 15-janvier de N’Djamena, la parole a été donnée aux représentants des jeunes sans-emploi, aux personnes handicapées, aux retraités, aux victimes de l’ancien président dictateur tchadien Hissène Habré et aux coordonnateurs de la plateforme Wakit Tama. Le Représentant de la plateforme des diplômés sans-emploi a lancé un appel aux diplômés sans-emploi d’aller se faire recenser. Il précise que, l’opération de recensement a débuté depuis le 02 août. Selon lui cette identification va leur permettre d’envisager d’éventuelles actions à mener. Pour le représentant des victimes de Habré, c’est la corruption et la méchanceté qui mettent aujourd’hui les gens dans la route. « Il faut que nos dirigeants comprennent que le Tchad appartient à tous. Nous voulons changer le comportement de tous les Tchadiens, à travers Wakit Tama », déclare-t-il. Les retraités affirment qu’ils ont 5 mois d’arriérés de pensions. « Ceux qui ont marché et qui ont été gazés par la police, un de leur qui est asthmatique vient de rendre l’âme. J’ai marché à cause de ses trois slogans du CMT, non au CMT révisé la charte et le décret concernant le CNT », dit leur représentant.

« Wakit Tama arrêtera que si l’étendard de la justice est élevé »

Monsieur Younous Mahadjir, Vice-président de l’UST affirme que c’est par la lutte qu’on peut libérer notre pays. Selon lui, il faut que ce système soit abattu, avant d’ajouter que, si un peuple veut se libérer il doit braver le destin, casser la chaîne de l’esclavage. « Celui qui participe dans la compromission n’existera pas dans l’histoire », précise-t-il. Mahamat Nour Ibedou abonde dans le même sens : « nous voulons la justice pour la jeunesse. Elle marche pour arracher son destin et tous nous disons non à ce système. »

Dr Sitack Yombatnan, citant un éminent penseur relate que « le monde n’est pas dangereux à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui restent dans le mal et qui accompagnent le mal. Ceux qui se mettent à accompagner le mal et ne disent rien et jouent à l’indifférence sont plus dangereux que ceux qui tuent les gens. »

Pour clôturer la manifestation pacifique, Me Max Loalngar, Coordonnateur de Wakit Tama, salue la mémoire des jeunes tombés dans la lutte. « Un pas encore un pas et tenir à gagner chaque pas », affirme Me Loalngar. Selon lui, le mouvement Wakit Tama arrêtera que si l’étendard de la justice s’est élevé. Il rajoute que si l’on veut un Tchad juste pour tout le monde il faut être déterminé. Il apprécie le génie créateur des jeunes marcheurs, qui ont initié un chant révélateur. « Ils nous ont dit qu’il est mort au combat, mais en réalité c’est un coup d’État », réitère-t-il.

Le coordonnateur de Wakit Tama annonce qu’une rencontre d’évaluation de la marche va se tenir le lundi prochain afin de déterminer la date d’une autre marche.

Moyalbaye Nadjasna

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