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IaltchadTribune (117)

Héritage politique de Fronçois NgartaTombalbaye et les origines de la crise institutionnelle permanente

L’éditorialiste du pouvoir MPS M. Djonabaye Dieudonné dit Bendjo, ex-porte-parole du journal N’Djaména Bi-hebdo et de la Ligue Tchadienne des Droits de l’Homme (LTDH), avait réalisé un reportage très intéressant diffusé à la Télé- Tchad, avec des images d’époque montrant feu le président François N’garta Tombalbaye dans sa croisade contre le Soudan du général Djafar El-Nimayri en 1965. L’objectif déclaré était d’établir un parallélisme quasi- absolu entre les déclarations et le combat « natio- naliste » de Tombalbaye d’avec celui du général Idriss Deby Itno (IDI) qui serait, selon le réalisateur, l’héritier spirituel du premier président.
Nous n’allons pas nous intéresser à cet aspect de la question ; nous saisissons la balle au bond pour faire plutôt une analyse historique sommaire, surtout à l’attention des jeunes tchadiens qui ne disposent d’aucun repère pour connaître la vraie histoire de leur pays.

À l’origine
Qu’est-ce qui avait amené Tombalbaye à s’attaquer au Soudan en 1965 ? Pour mieux le comprendre, il faut revenir au contexte de l’époque. Cette année-là, le premier mouvement armé contre le pouvoir central de Fort-Lamy venait de se créer au Soudan, en l’occurrence le FLT de Mahamat Ahmat Moussa[1][2]. Un autre groupe, le FROLINAT (Front de libération nationale du Tchad), celui qui allait bouleverser le destin de ce pays, était en gestation et sera créé l’année suivante à Nyala, toujours au Soudan. Donc, à l’origine du conflit tchado soudanais, il y eu le rôle majeur du grand voisin dans la formation de la contestation armée contre un pouvoir X installé à N’Djaména. Le Soudan était sous la forte influence du régime nationaliste pan arabiste de Gamal Nasser en Égypte. L’idéologie dominante était la lutte contre l’impérialisme occidental qui chercherait à détruire l’identité culturelle et religieuse du monde arabo- musulman. Tous les mouvements de contestation armée qui verront le jour ici et là reprendront à leur compte cette idéologie comme base de leur programme politique. Les mouvements armés tchadiens ne seront pas du reste [2][3]. C’était le prix du soutien des pays arabes !

Les causes
Ce que ne disait pas Tombalbaye, c’est sa propre responsabilité dans la tournure des évènements. En effet, Tombalbaye une fois au pouvoir à la faveur de l’Indépendance, se soucia plus de la conservation de son fauteuil et fit les mauvais choix politiques qui lui coûteront finalement la vie. En 1962, il imposa une révision constitutionnelle renforçant ses prérogatives et imposa le parti unique pour couper l’herbe sous les pieds de ses adversaires, à l’époque presque tous originaires du « grand Nord » (Koulamallah, Abbo Nassour, etc.). La démocratie parlementaire fructueuse de 1946 fut abolie au profit de la dictature et du pouvoir personnel. Ce qui déboucha sur la première révolte populaire du 16 septembre 1963 à Fort-Lamy (Quartier Mardjane Daffack et consorts) réprimée dans le sang par la toute jeune armée tchadienne encadrée par des officiers français.

Les soutiens extérieurs
Tombalbaye s’appuya sur le soutien de la Françafrique et de la Légion étrangère française pour nourrir son arrogance politique et son penchant pour l’exclusion. Ses opposants, qui ne pouvaient pas se renier en ralliant le parti unique PPT RDA, préférèrent jouer sur l’opportunité du soutien arabe via le Soudan, pour organiser leur réplique à cette dictature. La géopolitique régionale leur allait être favorable, car avec le boom pétrolier des années 70, les pays arabes allaient disposer de grands moyens de pression sur l’Occident pour imposer leur volonté hégémonique sur l’Afrique subsaharienne. Dès lors, nos deux grands voisins du Nord et de l’Est prendront de l’ascendance sur la quasi-totalité des élites dites « nordistes » du Tchad, devenant les parrains incontournables de leur marche progressive vers le pouvoir. Tombalbaye désabusé se retournera contre le Sud à qui il imposera, sous couvert d’initiation ‘Yondo’[3][4] chez les Saras d’une part et en lançant la périlleuse et brutale « opération 750 tonnes de coton » au village de Kalgoua de l’autre, un climat insupportable d’oppression des fonctionnaires, de délation et d’incarcérations de dignitaires militaires soupçonnés de prendre conscience de l’état déliquescent du régime, (le mythe de Moabaye planton au ministère du plan’[4][5]). La trahison et la mort clôtureront son épopée politique.

Les premières illusions de victoire
Cependant, le FROLINAT ne connaîtra sa véritable apogée qu’après Tombalbaye. Pourquoi ? Parce que l’ancien président était un homme intelligent et rusé. Après avoir utilisé la Légion française pour affaiblir les foyers rebelles du Centre- Est entre 1968-1970 (Le fondateur Ibrahim Abatcha a été capturé, tué et décapité vers Am Timan, sa tête exposée au bâtiment de l’actuel Ministère des Relations Extérieures), Tombalbaye se tourna brusquement vers les pays arabes, rompit avec Israël, libéra et réhabilita ses opposants « nordistes » devenus ses plus farouches partisans. Des transfuges du FROLINAT furent récompensés avec des postes sensibles dans l’appareil d’Etat. Tombalbaye s’allia les faveurs de certaines chefferies puissantes du grand Nord, tel que Iriba ou des tribus hostiles au FROLINAT en l’occurrence les arabes Missiriés de feu Acyl Ahmat, qui lui prêteront main forte jusqu’à sa chute et sa mort. Ces manœuvres mirent un temps en difficulté les groupes rebelles du FROLINAT.

Le tournant
Après avoir joué pour Tombalbaye, un personnage obscur allait marquer une rupture dans les plans machiavéliques de celui-ci. Il s’agit de Hissène Habré (HH). Initialement « infiltré », semble-t-il par Tombalbaye et les services secrets français dans la rébellion pour la contrôler de l’intérieur, HH allait vite trouver ses propres marques, ayant constaté le vide intellectuel et idéologique qui prévalait au sein de ladite rébellion. Favorablement accueilli par Goukouni Oueddeï et placé à la tête de la 2e armée basée au Tibesti, HH allait organiser le rapt des européens dont Mme Françoise Claustre en 1972 à Bardaï. La rébellion du FROLINAT allait bénéficier durablement du coup médiatique de cette affaire « terroriste » de prise d’otage. Tombalbaye échouera aux portes de Bardaï. Sa volte-face anti-française (opération authenticité, campagne contre « Dopelé » Foccart [5][6]) lui coûtera la vie des mains des membres de sa propre armée et non pas du FROLINAT son ennemi juré !

L’incompétence des successeurs
Arrive au pouvoir, le 13 avril 1975, le Conseil Supérieur Militaire (CSM), pratiquement le régime le plus médiocre qu’a connu le pays. Les officiers de Tombalbaye, mal préparé à la gestion du pays et manquant de culture politique, allaient précipiter l’Etat dans la déchéance irrésistible. Le général Félix Malloum, chef de l’Etat, se trouva bien seul à croire en sa « politique de réconciliation nationale » avec la rébellion du FROLINAT, la fameuse politique de « la main tendue ». Dans son entourage militaire, deux tendances opposées : les partisans de la force autour de Kamougué d’un côté et de l’autre ceux de la neutralité de l’armée avec feu général Djogo. Très vite, les incohérences des militaires donnèrent le change aux deux grands groupes du FROLINAT issus de la scission [6][7] de 1976 entre HH (CCFAN) et Goukouni Oueddeï (FAP) de se réorganiser, de s’équiper d’armements modernes et de menacer directement la capitale N’Djaména. La spécificité arabe blanche vaudra la création du Conseil Démocratique et Révolutionnaire (CDR) de Acyl Ahmat, souvent considéré à tort ou à raison comme la marque de l’invasion arabe et islamiste sur le Tchad.

La fin d’un système de gouvernance
Avec la chute de la prestigieuse garnison de Faya-Largeau en février 1978, la plupart des cadres civils et militaires « nordistes » furent convaincus que le pouvoir « sudiste » vacillant de Malloum ne se relèverait plus jamais et que la route de N’Djaména était désormais ouverte. C’est alors qu’interviendra la lutte des tendances dites « politico-militaires » pour la conquête du pouvoir par les armes dans le jeu politique tchadien. Le premier qui s’installe aux bords du Chari devra s’imposer aux autres, telle sera jusqu’à ce jour la règle cynique de l’alternance, après le coup de force institutionnel fait par Tombalbaye ! La défaite de Faya-Largeau, qui démontra l’irresponsabilité des membres du CSM accrochés aux délices du pouvoir à N’Djaména, causera le basculement de la grande majorité des « sudistes » dans la tendance radicale « anti-nordiste FROLINAT », civils et militaires compris. Désormais, le mot d’ordre politique des « sudistes » sera jusqu’à ce jour « La Survie » à tout prix. Sans entrer dans trop de détails connus ou volontairement occultés, on retiendra simplement qu’après avoir perdu pied à N’Djaména (le pouvoir central), les « sudistes » tenteront l’expérience de l’autonomie dans un premier temps avec Kamougué sous le Comité permanent pendant 3 années au Sud (« Zone méridionale »). Cette expérience finira en queue de scorpion à cause des divergences inter-sudistes ravivées : une partie de l’ex-armée nationale tombée dans le piège de la défense du « terroir d’origine » de la majorité des soldats « sudistes » et devenue simple tendance, se rallia à HH et mis fin à l’aventure du Comité permanent.
Cependant, la propension à la résistance « sudiste » ressuscitera une première fois sous HH avec les groupes Codos, sans réussir l’unité idéologique des « sudistes ». Puis, sous le régime actuel avec les groupes de Ketté Moïse et Laoukein Bardé, disparus. Il parait évident que les « sudistes » ont bien abandonné l’option de la lutte armée qui ne leur a pas réussi, en comparaison avec les mécontents du grand Nord. Aujourd’hui, certains « sudistes » attendraient comme des sujets hébétés l’avènement d’un Tchad unitaire, laïc, républicain (égalité des citoyens) et démocratique (Accord du 13 août 08 ?), qu’ils croient que d’autres, confusément « les rebelles », « les français » ou autres qui prennent des risques, accepteraient de le leur gratifier généreusement ?

Le nœud du problème
La grande leçon à tirer du règne chaotique du CSM étant que la résolution du problème tchadien dépend du contenu qu’on lui donne et de la capacité des hommes à s’assumer. Le CSM a perdu pour avoir marginalisé les forces vives du Nord, les cercles d’influences ethniques et religieuses, le recrutement et le bon traitement des « nordistes » dans l’armée. Malgré la valeur militaire incontestable et la bravoure de nombre d’officiers et soldats « sudistes » de l’époque, ils seront pris au piège dans une guerre qui n’était plus celle d’une armée nationale mais des fractions tribales, régionales, religieuses. Ils ne pouvaient plus tenir sur un terrain hostile avec des populations réclamant leur départ et ne reconnaissant plus le pouvoir vacillant qu’ils défendaient. Aux « sudistes » d’en faire le bilan aujourd’hui !

Le recours
Pour revenir au Soudan, ce pays continuera à jouer un rôle grandissant dans le placement des chefs de guerre à la tête du Tchad, en l’absence d’une vision commune de l’Etat et de la république défendue par nos élites. Le Soudan n’est que le cheval de Troie d’un faisceau de puissances étrangères qui décident du sort des tchadiens restés immatures politiquement. Ce sont toujours des tchadiens qui vont, comme en 1965, demander l’aide soudanaise pour venir détruire leur pays, en tentant de s’emparer du pouvoir. Au contraire d’un autre voisin puissant du Nord qui avait un véritable conflit frontalier avec le Tchad, le Soudan attend patiemment d’être sollicité sans se fatiguer. À qui la faute ?

Leçons
Il est de la responsabilité des compatriotes qui ont souvent flirté avec le Soudan depuis ces lointaines années, de faire le bilan de leurs gains, par rapport à tout ce que le pays a perdu et continue de perdre encore à cause d’eux. La vision rétrograde de l’Etat butin de guerre et vache à lait, la stratification de la société selon une logique pro esclavagiste, la violence qui fonde le droit et la tribu qui doit dominer sur l’Etat, qu’est-ce qu’ils ont apporté de « révolutionnaire » et qui pourrait être retenu comme tel tant par les tchadiens avertis que par les historiens ? Personne n’assumera cette responsabilité à leur place devant l’Histoire. Il est vrai que les luttes dites de « libération nationale » en Afrique et ailleurs se sont appuyé sur le soutien transfrontalier pour gagner. Cependant il n’y pas d’exemples, à notre connaissance, aboutissant à l’aliénation de l’identité et de la souveraineté d’un pays, comme ce fut le cas chez nous.
En résumé
, l’héritage politique de Tombalbaye n’est pas étranger aux tentations qui détournent l’esprit des pseudos révolutionnaires une fois au pouvoir. Un, que ce serait-il passé si Tombalbaye n’avait pas changé la florissante démocratie parlementaire des années 46-60 par le système de la pensée unique et le culte de la personnalité pour assouvir sa soif de pouvoir personnel ? Deux, voyons un seul instant la liste des évènements lugubres de notre sombre passé qui n’auraient peut-être pas eu lieu : révolte et répression urbaine du 16 septembre 1963, disparition des hommes politiques tels que Jean Baptiste, Silas Sélengar et d’autres en prison sous la torture (prémices de la DDS), révolte de Mangalmé 1965, coup d’Etat militaire du 13 avril 1975, etc., etc. Trois, y aurait-il eu le phénomène de la rébellion armée et de tous les cauchemars qu’il ne cesse d’infliger aux tchadiens ? Quatre, Tombalbaye aurait-il été tué par sa propre armée fatiguée de poursuivre un « ennemi intérieur » perpétuellement reconvertible ?           

Gains et pertes
Tombalbaye avait bien géré la république, avec un petit budget d’une dizaine de milliards CFA, une gendarmerie de 1500 hommes mal équipés mais formés, disciplinés et déterminés, une administration territoriale tenue avec prudence par des cadres dont le niveau dépassait rarement le Bac mais qui se souciaient de la Loi , etc. Ce qui l’a perdu, c’est son obstruction à la démocratie qui l’avait pourtant amené au pouvoir, la soif du pouvoir personnel, éternel. La majorité des Saras Madjingaye[7][8] n’avaient pas connu physiquement Tombalbaye durant son règne, mais eux et les autres « sudistes » paieront chèrement et injustement pour lui jusqu’à ce jour, même les faits imaginaires inventés pour recruter et motiver plus de combattants contre son régime !

Erreurs fatales
Tombalbaye a voulu torpiller la règle du suffrage universel et du pluralisme démocratique, dans un pays complexe, pour être toujours « l’homme providentiel » ou « l’ombre du manguier » selon des griots de l’époque. Tous ses efforts et ses succès éphémères ont favorisé sa déchéance dans la folie du pouvoir, sa chute et sa mort violente. Son ami El Hadj Ahidjo du Cameroun fut plus sage en partant à temps : son pays tient encore debout et continue d’attirer les responsables tchadiens qui veulent « décompresser » le week-end !

Conséquences
En plus du conflit graduel Nord-Sud, Tombalbaye avait laissé faire son entourage tribalisé qu’il voulait transformer en cour royale haïtienne. Résultats : en 1978, au plus fort de la débâcle de l’armée majoritaire « sudiste » au grand Nord, des émeutes éclatèrent au Mayo Kebbi, contre l’hégémonie politique des Saras, les supposés « parents » naturels de Tombalbaye. Cette blessure sud-sud continue encore à entretenir des rancunes entre « sudistes » à l’esprit primitif, se traduisant par des coups bas et des incompréhensions systématiques à tout bout de chemin, pour leur grand malheur ! Si les élites du grand Nord seraient en train de vivre tragiquement le revers de la médaille du FROLINAT, leurs compatriotes « sudistes » ont baissé les bras depuis longtemps. Les leaders publiques « sudistes » sont restés handicapés par leur réflexe unique de survie et l’indifférence quasi volontaire envers la situation chaotique généralisée dans le grand Nord, telle une cynique revanche. Comme si personne ne devrait franchir le vrai faux mûr Nord-Sud qui est déjà pourtant tombé de lui-même, faute d’arguments, sous le coup des évènements contradictoires !

Le chant du cygne
Si aujourd’hui la classe politique crie à l’unisson que la solution passe par la mise en œuvre de l’Accord du 13 août 08, a-t-elle tiré les bonnes leçons depuis Tombalbaye, quand on sait que les leaders de cette époque s’accrochent encore au perchoir sans rien apporter de nouveau ? Qui est réellement pour le triomphe du suffrage universel : un bulletin = une voix = un (e) citoyen ayant réellement qualité pour voter ? Qui est prêt à abandonner les armes, par amour pour son pays et à se plier aux règles communes dans tous les domaines ? Pourquoi depuis plus de vingt ans, en matière pénale et criminelle, on consacre deux catégories de tchadiens irréconciliables : d’un côté les gens de la dia au-delà du 16ème parallèle et de l’autre l’écrasante majorité des ethnies préférant l’entente et la conciliation entre elles ? Quand un jour le pouvoir inévitablement changerait de pôle socio idéologique, quelle sera la coutume qui sera imposée ? Etc.

Et demain ?
Quand on sait ce qui se passe au Darfour, après avoir été pratiqué plus de 2O ans dans le Sud Soudan, quand on se réfère aux modes préconisés par ceux qui préfèrent le chemin de Rabah pour arriver au pouvoir et s’y maintenir en pratiquant la cruauté légendaire de ce dernier, on est encore loin de trouver une élite affranchie pour écourter les maux et fléaux importés au pays des Sao et de Toumaï. Le Harmattan souffle toute l’année du Nord-Est au Sud-Ouest et assèche tout sur son passage. Quand les Toyota ayant remplacé les chevaux de Rabah s’en mêlent, petit à petit, le Tchad devient un gigantesque désert, avec comme décor les champs de combats fratricides, une nature dégradée et des populations cannibalisées qui s’entredévorent çà et là loin de ce qui pourrait leur apporter réellement la paix et un peu de repos sur cette terre !… Tombalbaye avait-il pensé à tout cela ?

Enoch DJONDANG

[8]1] Des erreurs pourraient être faites sur les dates, les lieux et certaines nominations sans changer le fond du dossier ;
[9][2] Ce mouvement rebelle rallia le CSM du général Malloum avec 150 hommes ;
[10][3] Contrairement aux autres mouvements de libération nationale africains, ceux du Tchad n’avaient pas de véritables références idéologiques hormis la reprise laconique du discours nassérien
[11][4] Cette campagne ‘initiatique’ était politisée et visait à rééduquer les potentiels opposants de son groupe ethnique
[12][5] Matraquage médiatique organisé sous forme de satyres injurieuses et lues à la radio avant les infos
[13][6] Imitation aveugle du Mobutisme et caricature de Jacques Foccart sous le sobriquet de ‘Dopelé’
[14][7] ‘Officiellement’, la cause serait l’occupation de la bande d’Aouzou par la Libye  ;
[15][8] Ethnie d’origine du premier président de la république, région de Koumra dans le Sud ;

Dossier: « A l’occasion du 4e anniversaire de son investiture, le 08 août 05 : Portrait d’Idriss Déby, ses atouts et ses faiblesses  »

Pour commencer, nous tenons à signaler que cet article ne relève pas de l’utilisation « des procédés détestables, indignes et mensonges pour provoquer le scandale [1][1][1]», et ne donnerait lieu en France à aucune poursuite de la part de la DGSE ou du Secrétaire Général du Gouvernement français, moins encore aux menaces d’escadrons de la mort. Il est en symbiose totale avec la Constitution et la loi n°029 sur le régime de la presse au Tchad. Pourquoi dresser un portrait du Président Idriss Déby (ID) ? D’abord parce qu’il est un homme public, sa vie privée n’est pas concernée. Il gère le sort de tout un peuple au quotidien, donc nos destinées individuelles sont liées d’une certaine manière aux faits et gestes de ce seul personnage. Ceci étant, qui est celui qui dirige le Tchad depuis une quinzaine d’années ?

Les atouts du Président Idriss Déby 

Il faut comprendre une chose : il n’y a pas d’école ou de diplôme de référence pour devenir Président de la République. Tout part d’une conjugaison de circonstances et de la personnalité. L’histoire du général Déby est couramment remontée à l’époque où il était Commandant en Chef (COMCHEF) des Forces Armées Nationales Tchadiennes (FANT) d’Hissène Habré, avant sa révolte le 1er avril 1989. Or, il faut aller plus loin dans le temps.

Un, Idriss Deby est avant tout un militaire, un vrai militaire engagé régulièrement pour faire carrière avec l’uniforme. Il n’est pas un maquisard produit du FROLINAT, comme beaucoup d’autres chefs de guerre. IDRISS DÉBY avait été moulé dans le système politico-militaire qu’il combattra par la suite, celui des régimes dits « sudistes » de Tombalbaye-Malloum. De ce fait, il détient les mots de passe nécessaires pour maîtriser et neutraliser cet ancien système de gouvernance. C’était un atout considérable pour sa destinée, face aux « lobbies sudistes ».

Deux, du côté des « nordistes », la logique du rejet systématique des « sudistes » a fonctionné à merveille pour verrouiller complètement l’expression politique démocratique et s’assurer l’allégeance grâce aux vieux démons du conflit « nord-sud » ; jusqu’à ce que ce créneau atteigne sa saturation et cède définitivement la place au clanisme pur et dur qui n’a plus rien à voir avec la solidarité coreligionnaire. IDRISS DÉBY s’impose aujourd’hui comme la seule réalité politique et militaire du Nord, situation ambiguë puisqu’il a en face de lui une pléiade d’expressions politiques divergentes au Sud : Ce déséquilibre entretenu est-il un atout pour lui et pour les nordistes ou un danger à moyen terme ?  

Trois, Idriss Deby était entré dans les rangs du FROLINAT-FAN (Front de Libération Nationale du Tchad-Forces Armées du Nord) au bon moment, comme du sang neuf ; ainsi, il pourra mieux s’adapter à la logique dictatoriale de Hissène Habré pour devenir l’un des piliers du pouvoir de celui-ci. D’ailleurs, Hissène Habré se méfiait beaucoup d’IDRISS DÉBY qu’il croyait utiliser comme un pion. En 1985 déjà, les mouchards de la DDS de la région de Biltine soupçonnaient IDRISS DÉBY et son cousin feu Brahim Mahamat Itno[2][2][2] d’avoir massivement recruté des Bidéyat[3][3][3] (300 éléments) à Aramkolé dans l’intention de tenter un coup d’Etat. Rien d’étonnant que trois ans plus tard, les officiers et combattants Béri soient obligés de quitter précipitamment N’Djaména et les autres garnisons pour le Darfour, pour créer le Mouvement Patriotique du Salut (MPS) actuellement au pouvoir. C’est le grand atout d’IDRISS DÉBY : la solidarité active de son groupe ethnique ne lui a jamais fait défaut !  Jusqu’à preuve du contraire, la minorité clanique dissidente du groupe Abbas Koty et du CNR est restée marginale. Aucun autre chef politico-militaire, excepté Habré en son temps, n’a eu tant de soutien de « ses parents » comme IDRISS DÉBY.

Quatre, Idriss Deby considère ses amis et collaborateurs comme de potentiels adversaires : ainsi, il sait mieux que quiconque, même mieux que les marabouts, à quel moment la puissance et l’aura d’un collaborateur pourrait devenir un danger pour lui. Et il évite au mieux de se laisser surprendre, quitte à pousser à la gaffe. Nombre de chefs rebelles sont tombés dans son piège, en croyant être plus malins. Toutes les oppositions politico-militaires en gestation actuellement sont nées des préoccupations sécuritaires du général IDRISS DÉBY. À cela, il faut ajouter tous ceux qu’il a habilement ralliés à sa cause après les cures de diète sèche imposée aux partis d’opposition. Disposer des armes de ses adversaires pour les combattre est un art qui constitue l’un des atouts incomparables d’IDRISS DÉBY.

Cinq, Idriss Deby connaît les mentalités tchadiennes mieux que quiconque, que n’importe quel leader politique ou de la société civile. Sa capacité de s’adapter à la diversité de ses interlocuteurs lui permet d’avoir toujours une marge de manœuvre secrète, quelle que soit la situation. Si ses pourfendeurs l’accusent de ne pas être un homme de paroles, c’est parce que dans la pratique politique locale, il y a deux paroles qui font foi selon : ce qui se dit pour l’opinion et ce qui se concocte dans les salons de thé. En usant couramment de la délation, les interlocuteurs du Président IDRISS DÉBY le conforte et le légitime dans son rôle de maître des jeux. Tout ce qu’ils vomissent pour gagner un poste ou une place au soleil, IDRISS DÉBY y trouve des données supplémentaires pour décider en son âme et conscience. Peu importe qu’on l’accuse de favoriser l’instabilité politique institutionnelle permanente : pour le Président IDRISS DÉBY, premiers ministres, ministres, colonels, préfets et autres ne sont que des passagers qui peuvent être débarqués à tout moment, en l’air, lors d’une escale, selon la seule volonté du commandant de bord qu’il est, après Dieu. Il connaît l’insatiabilité des cadres tchadiens pour les postes, en l’absence d’un sens civique et de dignité élevée. En les remplaçant constamment, il s’assure le zèle des plus cyniques prêts à tout pour satisfaire leurs ambitions mondaines. Et il semble avoir pleinement raison puisque les candidats se font toujours plus nombreux !

Six, Dans le même ordre d’idée, selon la logique des états-majors, IDRISS DÉBY a toujours le dernier mot sur ses adversaires : ceux qui se retrouvent en prison ou clochardisés dans la rue peuvent s’estimer heureux d’avoir la vie sauve ! Même en exil, il ne faudrait pas croire échapper facilement au poing du général IDRISS DÉBY. Seul Dieu pourrait vous protéger si vous êtes dans la ligne de mire et non pas vos mille précautions ! Cet aspect des choses rend IDRISS DÉBY extrêmement redoutable, comme César, et apprécié des stratèges politico-militaires français qui n’en demandent pas mieux. Pour ces milieux à la logique implacable, c’est plutôt un grand atout.

Sept, ses traits de caractère lui auront souvent porté chance sur le plan stratégique. Par exemple, ce fut en douceur qu’il acheva de régler le litige tchado-libyen d’Aouzou et il devint tactiquement le pilier de la CENSAD. Dans cette position, il s’impose comme le garant de la paix des braves entre les visées libyennes et le nationalisme tchadien. Malgré les méfiances, en dépit de l’existence du Mouvement pour la Démocratie et la Justice au Tchad (MDJT) Toubou, le remuant voisin du Nord ne pourra se passer si vite des services du général IDRISS DÉBY, s’il veut prétendre viabiliser son espace vital CENSAD. Paradoxalement, l’arrivée en force des intérêts pétroliers américains dans le décor est un atout supplémentaire pour dissuader le voisin du Nord de ne plus réitérer les aventures d’invasion et de déstabilisation d’antan.

Huit, par rapport aux Français, IDRISS DÉBY reste la seule carte encore valable à moyen terme. En effet, le général Déby a rendu d’immenses services à la préservation du pré carré français en Afrique Centrale, par les interventions militaires en RDC, au Rwanda, au Congo, en Centrafrique. L’armée française a donc une grosse dette envers lui. Aucun autre leader, même ancien militaire, ne peut rivaliser sur ce point de relations soudées entre les généraux légionnaires de Paris et IDRISS DÉBY. Leur lobby ayant la mainmise totale sur la politique de la sous-région, c’est une garantie et un atout supplémentaire pour le général Déby. Paris n’est toujours pas prêt d’accepter l’arrivée au pouvoir à N’Djamena d’un civil, de surcroît par la voie légitime des urnes. Patassé en avait fait l’amère expérience en Centrafrique et IDRISS DÉBY dut être sollicité pour mettre un terme à « son imposture » (selon ses propres termes). Ce rôle de gendarme régional, à lui seul, justifie aux yeux de Paris, la préférence perpétuelle pour IDRISS DÉBY.

Ce sont là quelques atouts principaux qui font d’IDRISS DÉBY l’homme indispensable du point de vue des puissances intéressées par le Tchad. Peu importe les tableaux sombres que les Tchadiens eux-mêmes, à travers les partis politiques et les associations civiles, font de l’œuvre du Président Déby et de son régime. Pour le moment, l’ensemble des intérêts collectifs des Tchadiens pèse peu sur la balance par rapport à ce que représentent, en terme de garantie par les atouts d’IDRISS DÉBY, les intérêts mercantilistes et stratégiques à court et à moyen terme des puissances étrangères. Le pouvoir au Tchad est avant tout un point d’équilibre entre intérêts géostratégiques étrangers, et cela pour des années encore. Le président Déby l’avait lui-même déclaré un jour.

L’exploitation du pétrole ne fera qu’accroître ces pesanteurs d’ingérences extérieures : les acteurs politiques tchadiens devraient définitivement cesser de jouer aux choristes naïfs en continuant de ne voir que des principes et des idéaux charitables du côté des partenaires de leur pays. Il faudrait désormais s’exercer à faire les parallèles avec des intérêts implacables, en vertu desquels des surprises fort désagréables pourraient leur être servies collectivement. S’en prendre à la personne de Monsieur Jean-Pierre Berçot est une marque de naïveté indélébile des auteurs de la pétition adressée au Quai d’Orsay contre ses propos du 14 juillet 2005. Car il n’a fait qu’exprimer une position très officielle de son pays, qu’on le comprenne ou non ! Les élites tchadiennes sont peut-être en retard sur la nouvelle lecture de la réalpolitique africaine, sur la Françafrique et le redéploiement américain, qui est déjà d’ordre public international. N’est-il pas temps de se décoloniser mentalement et d’évoluer ?
Alors IDRISS DÉBY aurait-il, par ces atouts relevés ci-haut, une baraka éternelle ? Tout homme, quoi qu’il fût par sa puissance, par sa fortune ou sa réussite sociale, a des faiblesses qui peuvent parfois causer sa ruine totale, mieux que les coups de ses adversaires.

Les faiblesses du président Deby

Premièrement, la plus grande faiblesse du Président IDRISS DÉBY, c’est sa faiblesse envers les siens, ses proches Béri des clans Kouryara et Ourara. Il est vrai qu’il avait pu compter sans limite sur leur solidarité tribale, mais le destin de chef d’Etat est personnel et unique. Ni en monarchie, ni en république dans l’histoire de l’humanité, ce rôle ne se partage avec un clan, une tribu, une ethnie entière. En pratiquant la discrimination en faveur des siens, d’une ampleur jamais connue auparavant, dans un pays où plus de deux cent ethnies différentes cohabitent tant bien que mal, IDRISS DÉBY a créé une confusion et un danger difficilement contournable pour l’avenir des siens. Ceux-ci auraient de meilleures perspectives s’ils avaient gardé leur place naturelle parmi les composantes de la nation. Malheureusement, la confusion profonde et aveugle entre eux et le pouvoir d’IDRISS DÉBY amplifie les risques de péril qui planent sur la fin éventuelle d’un régime quelconque en Afrique. Même si nous autres sommes si vulnérables et méprisables, nous devons avoir le courage et l’amour de prévenir ceux de nos compatriotes qui ne savent pas là où ils vont, quitte à ne récolter que violence et souffrance.

Deuxièmement, tout tient à la personne physique du Président IDRISS DÉBY. Personne dans son entourage ne dispose des mêmes atouts que lui pour profiter un jour de son héritage politique. Tous ces pantins, avec les mêmes appuis extérieurs et la même baraka, n’auront pas la trempe nécessaire. C’est pourquoi, dans les milieux des puissances, la disparition d’IDRISS DÉBY est d’abord perçue comme une catastrophe. Et c’est IDRISS DÉBY qui l’aurait voulu ainsi, dans la pure tradition napoléonienne. Car avec ses atouts, il pouvait, s’il le voulait, très bien construire une véritable armée nationale sous contrôle. Une telle armée serait seule en mesure de mieux stabiliser les acquis de son pouvoir et éviter les revanches génocidaires. Une armée clanique, en son absence, cristallisera les ressentiments de la majorité des Tchadiens contre elle (et le groupe tribal de référence). À court terme, l’armée tribale sera gagnante dans une confrontation post-Déby, mais à moyen terme on ne voit pas comment elle échapperait au rouleau compresseur des milices populaires et fragments d’armée résiduelle des autres groupes ethniques du Nord au Sud, qui se seraient réarmés et réactivés entre temps ? La seule possibilité d’éviter une telle probabilité chaotique, c’est de régler tout de suite la question de la réorganisation de l’armée nationale. La conscience du général Idriss Déby, en tant qu’officier supérieur formé dans les traditions républicaines, est vivement interpellée en faveur de la paix pour les générations montantes, lasses des guerres pour la guerre sans fin !

Troisièmement, dans le même ordre d’idées, le sujet étant très sensible et dangereux, il y a en vérité moins de risques pour IDRISS DÉBY en décidant de ne plus briguer un autre mandat qu’en insistant pour rester coûte que coûte au pouvoir. Car les tares et les avaries de son régime, en prenant des proportions incontrôlables, priveront IDRISS DÉBY de ses atouts plus rapidement et mieux que ne l’auraient fait ses adversaires. Pour se donner une carrure et une légitimité propre qu’ils n’ont pas, ceux-là même qu’il a fabriqué et tant chéri contre les autres, déclencheront par maladresse et excès de confiance l’apocalypse tant redoutée. Et ils y seront cyniquement encouragés jusqu’à l’autodestruction totale du clan. Cette hypothèse, le Président Déby l’avait lui-même émise dans ses commentaires lors de l’affaire brumeuse du coup de force manqué du 16 mai 2004. Ce n’est donc ni une diffamation, ni une injure ni une incitation à la haine tribale, mais une probabilité reconnue par le Président lui-même ! Alors, comme un adage de chez nous le dit : « Qui peut détacher de ses liens l’hyène, mieux que celui qui l’a attachée ? ».

Nous préférons nous arrêter là, car pour ça seulement on peut vous couper la tête ou vous jeter dans la fosse aux lions ! Mais vraiment, si l’on devait approfondir cet exercice d’analyse politique, on aboutirait quand même à la confirmation de l’adage selon lequel « les peuples ont les dirigeants qu’ils méritent ». Nous voyons venir la clameur et la réprobation virulente, de part et d’autre contre cet article. Cependant, en empruntant une logique de « militaro », comme l’aurait mieux dit notre regretté ami Roné Béyem, nous sommes sûrs d’une chose : nous serons mal lus et mal compris, une fois de plus ! Advienne que pourra !  

Djondang Enoch

[1][1][1] Propos de Son Excellence Jean-Pierre Berçot Ambassadeur de France au Tchad le 14 juillet 2005, et qui tient lieu actuellement de leitmotiv pour la répression sévère et « pour l’exemple » de l’exercice de la liberté d’opinion.
[2][2][2] Redoutable Ministre de l’Intérieur d’Hissène Habré, arrêté et tué après le 1er avril 1989 par la DDS,  terrible police politique de la dictature déchue.
[3][3][3] Sous-groupe ethnique des Zaghawa vivant entre Fada et Iriba dans le Nord-Est du Tchad voisin Darfour soudanais. Zaghawa et Bidéyat se regroupe sous l’appellation Béri distincte des Goranes et Toubous.  

Nul ne peut ignorer que notre culture tchadienne avec  toutes ses  diversités, est en nette stagnation, pour ne pas dire en état de régression ,cela est dû évidement à plusieurs raisons subjectives et objectives, je peux citer parmi tant d’autres, le manque de considération et du respect aussi bien populaire et officiel à l’égard des hommes et des femmes de la culture, (artistes, humoristes, musiciens, etc.),la quasi inexistence  des infrastructures à caractère culturel, à savoir les maisons culturelles, les centres de formation ,et la liste peut s’allonger. mais au-delà de toutes ces raisons qui menacent l’existence de notre riche culture tchadienne, nous devons d’abord  déterminer les responsabilités  qui sont à l’origine de cette régression remarquable que vit notre culture dans toutes ses formes, en commençant par la musique et les chansons traditionnelles et modernes qui ne comptent  qu’une  poignée des professionnels, la plus part d’entre eux sont inconnus au niveau national, tandis que les autres malgré leur notoriété médiatique et sociale .n’incarnent pas la vraie culture tchadienne, qui fût incarnée par des talentueux comme Ahmat Pecos, Ahmad Djalali et Moussa Chauffeur, quant au niveau théâtrale et cinématographique, je peux dire avec regret que jusqu’à maintenant le Tchad n’a pas pu enregistré de succès dans ce domaine, ni sur le plan populaire, ni sur  le plan institutionnel, puisque tous ceux qui s’engagent dans ce genre des domaines, se heurtent finalement à des difficultés socio-économique qui les obligent à abandonner cette voie et à chercher une autre alternative, à titre d’exemple : toutes les troupes théâtrales ou presque, disparaissent après une courte durée d’existence. !!!

Quelles sont  les causes déterminantes de ce fiasco culturel ?

  D’après mon humble analyse, La non considération, le mépris et le rejet qui sont réservés par notre société à tous ceux qui veulent incarner, interpréter et diffuser notre culture, sont l’une des  principales causes.

  • Toute activité culturelle nécessite des moyens financiers et des infrastructures  culturelles qui sont capables de l’accueillir, ce n’est pas le cas de notre pays qui ne dispose presque pas des salles de projection, maisons des jeunes, centres culturels, laissant la porte ouverte aux étrangers qui ouvrent des centres culturels, afin de diffuser leurs cultures.
  • Le manque de conscience culturelle chez la plus part d'entre nous, qui  négligent et ignorent tout ce qui est tchadien et reçoivent par contre la culture d’autrui. Exemples : un tchadien peut avoir pour lui seul une dizaine voire une centaine de cassettes et CD étrangers, mais pas une seul cassette de : Moussa Chauffeur, Kafani, Alhadj Ahmat Pecos, Issa Moussa, Youssouf Hamid, Moudjos, Alhadj Ahmat Djalali, Talino, Gazounga, Said Alkouk, Moukhtar Waddassabila, etc.

Nous pouvons certes, nous ouvrir à la culture des autres, sans que cette ouverture soit au détriment de notre propre culture.

Les responsabilités sont-t-elles partagées ?

    Les responsabilités sont sans nul doute partagées entre l’individu et la société sans  pour autant oublier l’Etat, qui lui aussi se taille la part du Lion dans ce cette sérieuse crise. D’abord chacun d’entre nous est appelé à respecter, avant les autres, ses valeurs culturelles et traditionnelles, les montrés aux autres, si l’occasion se présente, malheureusement, l’individu tchadien s’est désintéressé de ce devoir.

    La transmission des valeurs culturelles et coutumières d’une génération à l’autre doit être garantie par  la société (la famille, l’école, l’entourage…) et cette dernière doit jouer son rôle dans ce sens, cela ne se réalise qu’à travers une renaissance culturelle générale, prônée par les élites les plus influentes culturellement dans notre société, à savoir les Musiciens, les Artistes, les Journalistes, les Ecrivains, les Educateurs et tous les intellectuels.

  • il faut que nos éducateurs et enseignants mettent sur pied une méthode éducative moderne et diversifiée, qui prend en considération la musique moderne, les contes populaires, la musique traditionnelle, et tous les autres aspects culturels;

  • il est temps que nos décideurs politiques prennent le courage et désenclavent ce pays médiatiquement, afin que la culture tchadienne occupe sa vraie place, ne serait-ce que sur les plans national et sous régional (Télévision et  Radio nationales en sens vrai tu terme);
  • le ministère de la culture doit être plus actif sur le plan culturel au lieu de devenir un simple département politique, il est important donc de dire que l’existence d’une politique  et d’un agenda culturels permanents, la construction des infrastructures culturelles, l’organisation des semaines culturelles, des expositions, des voyages, des concours, des prix culturels et autres, est une tâche qui incombe essentiellement au ministère de la culture;

  • Nos représentations diplomatiques doivent apporter leurs contributions en ce sens, j’ai du mal à comprendre que nos ambassades ne parviennent même pas à organiser des modestes journée culturelles, pour montrer  notre culture aux pays hôtes, alors leurs homologues des autres pays organisent de temps en temps des petites activités culturelles, en collaboration avec les unions estudiantines installées à l’extérieure, pour prouver aux pays qui les accueillent qu’ils  sont là pour représenter diplomatiquement et aussi pour faire la diplomatie culturelle;

  • Malgré le manque des moyens, les Unions estudiantines Tchadiennes ont, elles aussi, le devoir de faire connaître la Culture tchadienne partout dans le monde, en collaborant avec d’autres unions estudiantines étrangères;

  • le pouvoir public est appelé  également à encourager et à aider financièrement et moralement, tout initiative consistant à  diffuser, moderniser et conserver notre belle culture, à créer des  centres de formation en la matière, à obliger les médias publics et privés de consacrer une bonne place à la culture tchadienne, tout en récompensant tous les talentueux, bref, à réorganiser le champ culturel ,pour qu’un jour, les uns et les autres puissent connaître la valeur de leur culture, la conserver et la transmettre avec fierté à la génération future. Si chose faite, notre culture sera sans  aucun doute, une culture bien existante, visible et capable de relever les défis d’une mondialisation multiforme qui ne connaît pas les frontières et ne tolère pas  les cultures stagnantes.

Je ne saurai terminer sans rendre un sincère hommage au courageux cinéaste tchadien Mahamat Saleh Yacoub, ainsi qu’à tous ceux qui militent à l’intérieure comme à l’extérieure du Tchad, pour la renaissance de l’identité tchadienne.

Abdelsemi Ahmad Djibrine

A - une terre, des hommes, des animaux et des plantes.

L’homme sent toujours la chaleur de ce qu’il aime. Vers où orienter son affection si ce n’est vers son terroir ?  Comment ne pas percevoir les sanglots de sa terre natale lorsque les méandres d’un destin tragiques s’unissent en bregma et portent des coups aussi fatals que compromettants ?
L’Ennedi (c’est d’elle que je veux parler), éternel paysage, bombait son bréchet en sorbet de grège et embrassait tous les peuples par son sol avenant, riche d’eau, de pâturages et de gibiers. Des hommes persécutés par d’autres hommes, des familles acculées par l’histoire, des communautés en quête de ciel bienveillant, tels des oiseaux migrateurs qui faisaient une ultime halte, trouvèrent en Ennedi une terre de refuge. Depuis plus de trois milles ans l’Ennedi accordait l’asile et le gîte à tout martyrisé qui cherchait protection. Hérodote, l’historien grec et natif d’Halicarnasse (vers 484 avant J.-C.) de passage pour la Cyrénaïque et côtoyant les plateaux en grés de l’Ennedi, baptisa les peuplades qui y habitaient «  les Ethiopiens troglodytes. » Extrême méfiance de la survie obligeait, ces tribus faisaient le vide devant tous les aléas de l’histoire, dans leur agilité des biques. Depuis la visite de l’historien grec, des peuples sont venus de tous les horizons pour peupler les coins les plus retranchés, les vallées les plus foisonnantes de gibiers, les pâturages les plus accueillantes et les points les plus aquifères. La montagne leur servait de forteresse, de bouclier et de refuge dans le cas de moindre alerte!

Le climat, jaloux de l’hospitalité de ce terroir, décida d’instaurer sa dictature d’assèchement et les terres humides se vidèrent  de leur vitalité, s’essorant comme des peaux de chagrin. Les hommes se rendirent compte que la terre, en cet endroit-là, ne voulait plus les contenir. Des grands exodes vers le Sud se présentèrent comme une nécessité. Les hommes hommes poussèrent alors leurs vaches aux cornes en rapières pour descendre vers le Bhar-el-ghazel pour fonder le royaume mythique du Kanem. Tous ne furent pas partis et les uns s’obstinèrent à braver la sécheresse et à jurer fidélité à leur matrice. Des hommes sont certes restés, mais aussi les animaux et les plantes dont la présence contrastante continue de subjuguer l’esprit des hommes et des sciences.

De nos jours, parmi ces dévoués parmi les dévoués, se trouvent les crocodilus niloticus, proches congénères du crocodile du Nil et retranchés dans les gorges du Guelta d’Archy. Ces sauriens, sobriété impose, réduisent leur physiologie et leur anatomie pour parer à la rudesse de la terre ennedienne devenue radine. Maîtres incontestés des eaux intarissables du Guelta, les seuls sauriens rescapés de tout le Sahara perpétuent leur existence par un pacte avec le dieu de la survie. Ils hébètent les visiteurs par leur présence insolite et inattendue. Majestueux, ils communiquent leur hospitalité en cédant les berges et les bans d’Archy par une apnée discrète dans les profondeurs de leur biotope.
Les damans, grassouillets ruminants, se jettent du haut des acacias au signal de leur factionnaire en poste et regagnent leurs terriers creusés dans l’âme des montagnes. Après le passage du passant qui passe son chemin, objet de leur précipitation vers les abris, ces sortes de suricates de l’Ennedi répondent à l’appel des bourgeons et feuilles des acacias et savonniers.
Le mouflon à machette scrute l’horizon du haut d’un piémont avant de regagner la vallée et dévorer les gousses d’arbres généreux.
Les  fouettes-queues, localement appelés dounedoune et scientifiquement l’uromastyx dispar dispar, nuques collées aux parois des rochers, résistent aux efforts des bergers qui raffolent leur chair douce et savoureuse. Quand le soleil bascule de son zénith et ses rayons portent la chasuble de la clémence, ces lézards de palmiers se lancent en quête d’une nourriture frugale. Leurs ébats amoureux se bercent aux roucoulements des colombes bleues qui, elles-mêmes, vivent leurs amours, gésiers remplis des graines sauvages providentielles.
L’oiseau lourd ou l’outarde ou localement kourouloukou, chair susceptible de réveiller la virilité évanescente d’un prince du Golfe, accorde peu d’attention à sa sécurité précaire et déambule de gommier en gommier, en glanage des gommes arabiques qu’elle avale avec appétit.
Les lycaons, carnassiers voraces, rebelles et faussant compagnie au chien qui a accepté son adoption par l’homme, vivent en meutes solidaires depuis la nuit du temps et défient l’homme de l’Ennedi en s’attaquant à tout animal domestique loin des pâtres.
L’hyène dans sa robe rayée, son train bas et son garrot haut, jette mufle en l’air, avant d’engager nuitamment un assaut meurtrier dans une bergerie mal gardée. Ses crocs de plusieurs tonnes se serrent sur sa proie qu’elle emporte vers sa tanière, semant les bergers qui se lancent à ses trousses.
Le chacal, bruyant par ses glapissements nocturnes, a vainement tenté d’avertir les chevriers de l’arrivée inamicale de sa lointaine parente, l’hyène, à qui il emboîte les pas avec prudence. Profitant du tohu-bohu occasionné par la visite de la dame hyène, le malicieux chacal s’approche à son tour de l’enclos des cabris et s’empare d’un agneau qu’il l’étouffe entre ses crocs effilés.

Bien qu’en mutation régressive, la terre de l’Ennedi reste encore un havre d’une flore variée : de l’anodin et commun Caletropus procera ou sanou à l’Acacia aegytiaca et autre Cornulaca monocantha, en passant par l’Acacia scorpioïde ou téréli, l’Acacia seyal ou Edzri, l’Aristida plumosa ou maly, l’Acacia radiana ou téhi, Hyphaena thebaïca ou palmier-doum, Panicum turgidum ou guin-chi, Salvadora persica ou ouyou, Boscia augustifolia ou arkinn, Acacia laeta ou touhou-i, Phoenix daeta ou timi (palmier dattier) etc… Une mystérieuse plante subsiste encore dans la gorge rocheuse humide de Bachikélé et ses congénères se trouvent à trois mille kilomètres, au Cameroun. Cette présence insolite laisse inextinguible et inoxydable la mémoire de l’Ennedi à sauvegarder ses vieilles relations hospitalières. Une mémoire taillée dans le roc et gravée sur le papyrus des temps pharaoniques.
Dès les premières pluies d’une saison peu grippe-sou, la vie végétale ressurgit et chaque plante donne sa dîme à l’homme et aux animaux. Les plus démunis des arbres servent aussi à quelque chose, par exemple servir de support à une niche ou à un nid d’oiseau.

Cette narration qui apparaît de prime abord comme une éloquence à la nature est loin d'être l'objet de mon opinion. En effet des drames qu'a connus l'Ennedi seront relatés dans un second article qui sera intitulé: les sanglots de l'Ennedi (2)

(à suivre donc!)

Sidimi Djiddi Ali Sougoudi

Les rites sexuels d’origine préhistoriques ne sont jamais regardés en face. Nul n’osait et n’ose le faire tant ils sont mystérieux, choquant et affreux. La prostitution sacrée, le droit de cuissage (femme confiée à un monarque pour un temps avant de regagner son futur conjoint),  le culte de lingam et du yoni, la circoncision sont les vestiges les plus connus de ces pratiques mystérieuses dont la propagation a été universelle et dont le rôle, dans la formation des religions et des sociétés, a été capital. L’accouplement bestial (entre Eve et le serpent) fait apparaître une hypothèse surprenante sur les origines de l’humanité. L’accouplement rituel entre une prêtresse et un prêtre (ainsi que les fidèles entre eux) a été un usage si répandu que, au temps d’Hérodote, « sauf les grecs et les égyptiens, tous les peuples faisaient l’amour dans les temples.» En 1877 le clergé orthodoxe tolérait encore - une fois par an- des accouplements de fidèles dans une église chrétienne.
  Ne faut-il alors survoler  une foule de croyances, superstitions, usages sociaux ou religieux pour édifier les esprits sur l’arlequinade de ces pratiques ?

1 - les cultes sexuels : la femme et l’animal.

Pendant une période certainement très longue, il a existé partout une cérémonie consistant à livrer les femmes vierges à des animaux, en vue de défloration.
          * le bouc de Mendès : la ville de Mendès en Égypte vénérait le bouc et ses habitants avaient une cérémonie religieuse au cours de laquelle une femme et un bouc étaient accouplés.
          * le rite de Kenelcunnil (Irlande) : dans cette partie de l’Irlande, près de l’Ulster, les païens de l’époque procédaient à un accouplement d’un homme et un animal. A l’occasion d’une intronisation du roi, la tribu se réunissait autour d’une jument blanche. L’homme destiné à devenir roi devait s’accoupler en public avec la jument. Ensuite l’animal était égorgé et la viande cuite. Le futur roi devait prendre un bain dans le bouillon (rite de baptême) tandis que la chair était partagée (communion) entre lui et les membres de la tribu. Cette cérémonie regroupait quatre rites : accouplement, meurtre, baptême et communion.
          * de nos jours chez certaines peuplades totéistes d’Afrique ou d’ailleurs, le jeune homme doit avoir commerce avec un animal vivant ou avec le premier gibier tué, lors de l’initiation.
          *l’asvamedha dans l’Inde ancienne : l’on sacrifiait un cheval en l’étranglant (sans égorger) ou étouffé par des étoffes précieuses. Les femmes du roi faisaient  une procession autour du cadavre, trois fois vers la droite et trois fois à gauche. La première épouse s’approchait du corps de l’animal, saisissait le membre viril du cheval et le faisait entrer dans son …vagin.
         *Stavorinus, un hollandais qui voyagea dans l’Inde entre 1768 et 1771 notait que les femmes et les hommes s’accouplaient aux animaux dans la localité de Batna. Une femme indigène avait voulu assouvir sa fureur érotique avec un étalon. Cela lui coûta la vie quelques heures plus tard.

2 - l’accouplement rituel :

    Le mot harem dériverait du HRM selon Pierre Gordon et désignait le lieu sacré, le sanctuaire en plein air. D’où la notion de la présence des femmes dans les sanctuaires en vue de l’accouplement rituel.
  En Afrique, chez les Yorouba du Nigeria du Sud, la cérémonie de l’accouplement rituel commence par l’union entre le prêtre et la prêtresse. Ensuite les fidèles s’isolent par couples dans les ténèbres. Les hommes doivent prendre autant des partenaires qu’ils le peuvent. Dans une secte de la tribu de Balouba, les femmes doivent se livrer à tous les hommes présents à la réunion.
   La « danse des chefs » chez les bushmen : au cours de cette danse les femmes se rangent en cercle. Le « chef », le sorcier et le magicien se place au centre. Lorsque la danse commence, le chef se met à sauter à quatre pattes comme un animal. Les danseuses s’agitent alors en prenant les postions les plus licencieuses. Au bout d’un moment le chef bondit sur la femme la plus avantageuse sur le point de vue de la lascivité. 

3 - la défloration rituelle : (la défloration = faire perdre la virginité d’une fille)

    Pendant une longue période, les hommes reçurent leurs épouses des animaux. La défloration rituelle a continué, l’animal étant remplacé par un prêtre, un roi, un étranger etc.

-  La nuit de noces : dans de nombreuses traditions anciennes appartenant à toutes les religions de la terre, il fut jadis une époque où les filles étaient obligées d’aller se faire déflorer par des religieux vivant dans les forêts, revêtus de peaux de bêtes et de cornes d’animaux. Ces religieux préhistoriques appartenaient à des confréries initiatiques. Ils étaient hommes-taureaux, hommes-chevaux, hommes-loups, hommes-lions. Ils revêtaient pour l’occasion selon le cas la dépouille de l’un ou de l’autre de ces animaux. Les hommes-lions existent de nos jours dans le Sud du Tchad mais l’on ne sait s’ils jouent aux rites de défloration !

-  La défloration matriarcale : c’est la défloration rituelle par les femmes dans le matriarcat. L’animal, la femme et l’homme ont exercé tour à tour la fonction de déflorateur, dont le mari est devenu le titulaire dans les sociétés

Musulmanes et chrétiennes patriarcales. À une époque reculée, la défloration de la jeune fille par une femme constituait un rite très répandu.
      Au Pérou, la mère déflore sa fille dans un lieu public. C’est également le cas au Kamtchatka et à Madagascar. Aux Philippines et en Afrique centrale, la défloration est effectuée par les vieilles femmes du clan. Elle est souvent suivie de la dilatation forcée du vagin.
Au Béloutchistan, elle est pratiquée avec un rasoir.
    Diodore de Sicile parla des mœurs des habitants des îles de Baléares : « pendant le festin de noces, les parents et les amis vont l’un après l’autre, depuis le premier jusqu’au dernier, d’après le rang d’âge, jouir des faveurs de la mariée. Le jeune époux est toujours le dernier qui reçoive cet honneur.

En Océanie, chez les tribus Aruntas, le fiancé confie sa future épouse à plusieurs de ses amis qui l’entraînent dans la brousse où ils la déflorent avec un couteau de pierre, avant d’avoir des relations sexuelles avec elle. Les autres hommes de la tribu peuvent se satisfaire autant. Le jour de la cérémonie, la fille vient s’asseoir sur les genoux de sa mère et pleure. Le fiancé la demande en mariage. La mère prend la main de sa fille et celle de son futur gendre, les met l’une dans l’autre. Le mariage est considéré comme conclu. La fiancée passe sa nuit de noce… chez sa maman !
  Aux îles Marquises, les invités participent à la nuit nuptiale, du plus vieux aux plus jeunes.
  La défloration avant la puberté est une coutume plus particulière à l’Inde. Chez les Todas, elle est pratiquée par un homme venu d’une tribu voisine et qui passe la nuit avec la fillette.
 Au Cambodge, c’était le prêtre qui déflorait la fille pendant la cérémonie avec son doigt trempé dans du vin. Ensuite le vin est bu par la famille du mari.
   La défloration aux enchères : actuellement la défloration rituelle est pratiquée en Afrique. Elle s’est occidentalisée, donc commercialisée. Quelquefois le jeune époux noir, après la cérémonie du mariage met la défloration de sa femme aux enchères. Le bénéficiaire de l’adjudication est enfermé dans une case avec la jeune femme et le mari attend à la porte.

4 - Le mariage par le rapt et violence

   Autrefois, quand la bête déflorait les filles, celles-ci, effrayées, prenaient la fuite. Une rejointe, on devait user de violence pour la ramener et on la contraignait à subir l’assaut de la bête qui, probablement, était quelquefois mortel.
   La fuite de la femme et sa capture ont dû tellement impressionner nos lointains ancêtres qu’à une époque récente il se pratiquait la fuite de la femme, la poursuite de l’homme et la résistance simulée de la fuyarde. Une vierge prend toujours la fuite. Il s’en toujours une poursuite et parfois une lutte.
   Dans les régions du Nord du Tchad, chez les Toubous (Gorane) ce rite est toujours d’actualité. La fille est d’abord prise par un enlèvement socialement accepté après la « fatiha » ou dot. Le fiancé et les siens doivent impérativement veiller sur elle pour l’empêcher de s’évader. Au moment du rapt il peut s’en suivre une violence, si la jeune fille est entourée de ses amies ou parents collatéraux.

   En Laponie, il n’existait naguère de mariage que par enlèvement et la plus grande violence y présidait. De même qu’en Océanie.
  Chez les Araucans, le mariage traditionnel consiste en un rapt d’une rare violence.
    En Russie, en milieu chrétien, le fouet jouait un rôle important au siècle dernier. Il figurait dans chaque foyer et c’était un devoir pour le mari de fouetter son épouse. Au BET qui est trop loin de la Russie, « angouli-karah », la cravache en cuir d’hippopotame est très souvent employée pour mener la fiancée récalcitrante. Elle est l'emblème qui accompagne tout nouveau marié qui la brandit en toute circonstance.

5 - la prostitution rituelle :

    Les cités sacerdotales et les temples ont pris la suite des anciens cultes en plein air. Il y eut des accouplements rituels. C’était la prostitution sacrée !
    Hérodote disait : « il y avait à Babylone un temple de Mylitta. Toute femme née dans le pays était obligée, une fois dans sa vie de se rendre à ce temple pour s’y livrer à un étranger. »
     Chez les arméniens les filles de gens distingués se prostituaient dans les temples d’Anaitis pendant très longtemps avant de se marier.
    En Lydie, les filles s’adonnaient dans les temples à la prostitution, puis se mariaient en apportant comme dot le fruit de leur prostitution.  Dans ce royaume de Lydie, au II° siècle, Aurélia Aemilia reçut d’un Oracle le conseil impératif d’aller se prostituer dans le temple comme c’avait été la coutume de ses ancêtres (coutume tombé en désuétude à son époque.)
     À Babylone, le mariage consistait en une vente aux enchères. Les plus jolies femmes trouvaient sur-le-champ des maris opulents qui payaient le prix fort. Le produit de la vente était partagé entre les hommes qui consentaient à prendre pour épouses les plus laides et celles qui n’avaient pas trouvé acheteur. Ce marché de filles avait lieu dans chaque ville deux fois par an ; il était présidé par trois habitants connus pour leur honnêteté.

Les Sonah du proche orient étaient des prostituées au service de sa grande déesse.
À Jérusalem, dans l’enceinte du temple, des femmes devaient vivre confinées dans des cellules. Elles tissaient des vêtements pour les pieux sacrés qui étaient des piliers, colonnes, obélisques et phalles qui reproduisent l’organe sexuel masculin. Il y avait dans les temples des hommes consacrés  qui s’acquittaient d’une fonction religieuse : défloration des vierges. Ces hommes furent chassés du temple à une époque où fut publiée la défense d’y apporter le prix de la prostitution.

6 - la dot

  La dot apportée par l’épouse au mari est constituée à l’origine par le salaire de prostitution de jeunes filles. Ce genre de tribut, quand les mœurs évoluent, sera versé par un cadeau fait par le beau-père.
   Le tombeau du père de crésus – Alyatte- avait été payé avec la contribution des marchands, des artisans et des prostituées. La part de celles-ci était la plus considérable.
   A Hiérapolis, près de l’Euphrate, des femmes se tenaient assises devant le temple pour faire commerce de leurs corps. Le gain était soit utilisé  pour obtenir la protection de la déesse soit pour se constituer une dot en vue de se marier.
   Dans la nouvelle Numidie, à Cicca, existait une colonie phénicienne qui se rendait dans les temples pour se prostituer et amasser une dot. La coutume fut supprimée par l’empereur Constantin.
    Dans l’île de Chypre, le soir venu, les femmes avaient coutume d’errer sur les rivages dans le but  de séduire les étrangers. Toutes les filles qui naissaient à Chypre étaient vouées au service de la déesse et devaient s’offrir aux hommes.
     En Grèce,  pour le culte d’Aphrodite à Corinthe, les femmes libres venaient se prostituer dans le temple du Mont Eryix qui était aussi ancien que riche, dans l’enceinte duquel d’innombrables colombes, oiseaux consacrés à Aphrodite étaient nourris.

7 - La prostitution hospitalière

Si les grands de ce monde peuvent bénéficier du droit de cuissage, la prostitution hospitalière est une adaptation à l’usage des gens communs.
    En Perse, une coutume existait à l’époque où Alexandre Le Grand envahit la Perse. Lors d’une invitation, quand un mari organisait un dîner, pendant le festin et le vin,  ses épouses se déshabillaient. C’était une invite à l’accouplement.
   La tribu africaine des Wagogo, on pratique l’échange des femmes entre les amis. C’est également le cas des  Basouto.
   Chez les gallois, dans la confrérie de chevalerie, quand un membre de la secte visite un autre, celui-ci laisse son hôte avec sa femme, prétextant aller donner de l’avoine au cheval du visiteur. Celui-ci consomme alors la femme.
En Suisse, en juillet  1760, il subsistait un genre de prostitution hospitalière.

Parler des rites sexuels dans le monde est une tâche titanesque. La liste des bizarreries sexuelles est longue, très longue. En apportant ces quelques repères, j’ose croire que beaucoup auront compris que la sexualité est multiple dans ses rites. Ce qui est une infamie ou une outrance dans certains milieux demeure une vertu dans d’autres endroits. Comme quoi à chacun son passé et surtout à chacun ses coutumes et ses convenances. Les hommes du passé lointain nous auraient huée s’ils apprennent que l’on fait l’amour le sexe enveloppé dans des caoutchoucs (condom) ou l’on s’échange des salives lors de kiss french. Cependant il n’est pas interdit  de jeter un regard dans la préhistoire de nos rites sexuels qui subjuguent par leurs singularités et leurs monstruosités.

Sidimi Djiddi Ali Sougoudi

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