En ce début de saison de pluies où les cotonculteurs s’apprêtent à sarcler leurs champs, il nous est semblé utiles de nous faire une réflexion sur la Coton Tchad et la vie des producteurs.
Après plusieurs années de gloire et de fierté pour l’économie nationale, la COTON-TCHAD, ex COTON-FRANC ne semble plus avoir les mêmes renommés qu’autrefois. Il y a de cela encore quinze ans, les cotonculteur Tchadiens étaient fiers du coton qu’ils cultivaient et ont toujours eu à faire leurs projets en fonction du jour de payement de l’argent du coton. « Quand l’avion viendra (avion amenant de l’argent pour payer les cotonculteurs), je vais, acheter un charrue, une houe, je vous donnerai chacune une étoffe Wax, je doterai ma deuxième femme, j’organiserai la cérémonie de mariage de mon fils aîné…etc. ». C’est par ces genres d’expressions que les paysans expriment leur foi en ce que peut leur rapporter le coton. Dans les marchés hebdomadaires qui alimentent le monde rural en produits de première nécessité, le simple fait d’être un cotonculteur est une garantie qui te permet d’avoir une dette auprès du commerçant car il sait que, « Quand l’avion viendra… ». Ainsi le coton faisait vivre ses travailleurs qui étaient fiers tant de leur activité que du fait qu’ils participent à l’économie nationale.
Mais aujourd’hui la done semble changer, car le cotonculteur a oublié l’expression « quand l’avion… » Et découvre un nouveau vocabulaire difficile à maîtriser qu’à admettre. Ces termes sont entre autres, « Impayé, Baa Mani, taxe, commerce équitable, AV … » ces termes compliqués pour l’homme rural créent des situations souvent difficiles à vivre. Avec la nouvelle terminologie, impayé signifie que ton argent a été retenu en remboursement à la dette d’une autre personne dont les récoltes n’ont pas été bonnes. Une chose bizarre, ce que bien qu’on soit dans une économie libéralisée, le producteur de coton n’est pas à mesure de fixer lui-même le prix de son coton. Pourtant, quand la COTON-TCHAD lui donne ses engrais en dette, c’est elle qui fixe le prix. Baa-Mani quant à lui est un terme utilisé dans la région de la Tandjilé pour désigner le fait de ne rien gagner de ses récoltes, c'est-à-dire que le prix du coton vendu est égal au prix de l’engrais donné en crédit par la COTON-TCHAD. Bref la vie du cotonculteur a changé avec la nouvelle terminologie. Plus de Wax après les récoltes, les jeunes ne peuvent plus espérer sur le coton pour se marier, le père de famille ne peut plus prendre une deuxième femme car même si « l’Avion viendra », il repartira avec ce qu’il a amené. Le cahier des enfants à la rentrée n’est désormais possible que par la grâce de l’argent du charbon produit en détruisant l’environnement.
Mais si le coton ne donne plus le bonheur à ses producteurs, le constat n’est pas le même chez les employés de la société cotonnière. Un tour à Moundou permet de le constater. Des grosses Cylindrés, des villas climatisées avec bouquet Satellite…ne sont pas des choses qui manquent aux agents de la maison mère. On serait certainement tenté de savoir comment le niveau de vie des agents de la COTON-TCHAD va grandissant alors que celui des paysans ne fait que se détériorer. Autre chose ce qu’on va nous faire croire que le prix du coton au marché mondial a baissé et que la maison ne fait plus de bénéfice donc pas d’augmentation de salaire. Mais par quel moyen sont sorties les « bagnoles dernier cri » qui sont garés chaque jour devant la direction et les usines avec des immatriculations de type Particulier ? Certainement il y a des choses à savoir pour lesquelles, le gouvernement, l’assemblée nationale ainsi le contrôle d’Etat ont intérêt à agir. Car, le Tchad est un pays à 80% rural.
NDakmissou GEDEON
L’instabilité politique tchadienne connaît des rebondissements incessants au point où l’opinion internationale se demande les motivations concrètes de ces mouvements prônant le changement ainsi que les tenants et les aboutissants de leurs projets. Mais au-delà de ces conflits, le peuple exprime-t-il le sentiment de vivre ensemble ? Et quels rapports avec les conflits interarmées ?
En effet, la délimitation du territoire n’aura peut-être pas suffit à forger un peuple d’une diversité ethnique peut-être sans précédent à vouloir vivre ensemble quoique certains aient réussi à le faire, je veux dire d’autres nations. Cependant, devrions-nous prendre des exemples sur leurs construits sociopolitiques ou voudrions-nous marquer notre différence par notre esprit belliqueux et enfoncer ce beau pays dans un cercle vicieux à tout jamais ? Telle est la question que se pose une frange de jeunesse tchadienne en quête d’un avenir commun et désirant une solution autre que des combats sanglants aux issus incertains et dont la main invisible à ce sujet n’en dit pas moins. Ainsi donc, trouver les causes profondes de ces soutiens systématiques externes serait trouvé le Graal. D’ailleurs c’est ce qu’essaient de faire la plupart de ces mouvements mais leurs positionnements politiques ainsi que le choix du leadership ne semblent pas convaincre les parties prenantes et peut-être même pas l’opinion publique tchadienne car il y’a jamais deux sans trois. Enfin bref la peur d’une énième réplique de ces processus hante le peuple. Coup du sort, manque de lucidité tactique, quelles sont les causes de ces échecs politiques ?
Je pense que certaines causes de nos échecs sociopolitiques seraient d’abord le manque du sentiment de vivre ensemble, s’en suit l’égocentrisme. En fait, on fait semblant de vouloir vivre ensemble et que toutes nos actions se résument qu’autour du pouvoir. Comme si tout tchadien est né pour gouverner et que tous les moyens sont bons pour y arriver. Tabous ou constat cruel, en tout cas il est temps de lever le voile car ce problème est un facteur fondamental d’unité et de cohésion SOCIALE d’un peuple. Son champ d’action inclus nos différences culturelles, ethniques, religieuses, et l’esprit de progrès commun. Mais aujourd’hui le constat est alarmant tant au niveau interne qu’externe car la communication inter tchadienne est difficile du fait qu’on n’aime pas vivre ensemble. La préférence clanique l’emporte sur le patriotisme engendrant l’émergence des nombreuses parties politiques ayant des visions politiques différentes les uns des autres. Or le multipartisme n'est pas synonyme de tribalisme. Cette confusion est source des divergences fondamentales fragilisant certaines coalitions tant politico-militaires que civiles pour conflits d'intérêts entrainant ainsi des échecs stratégiques perpétuels écartant progressivement la perspective d’unité. D’ailleurs les échecs des multiples et récents affrontements opposant ces différents antagonistes illustrent parfaitement la fragilité de notre capacité à communiquer et à nous entendre, je dirais même que c’est l’égocentrisme implicite. Nos échanges ne se résument qu’à des confrontations physiques menant à des hostilités aux issues non négociables et que la force physique l’emporte sur la raison. Jamais de compromis. Jamais. Dans ce cas, construire un pays relève d'une équation complexe et difficile mais pas impossible car nous pouvons encore compter sur la nouvelle génération comme levier d’action indispensable pour rendre le système vertueux.
Jeunesse tchadienne, nous sommes face à notre destin et nous nous devons de relever les défis. Nous devons tirer les leçons du passé pour construire un avenir meilleur. Mais construire ce pays, c'est avant tout sortir des stéréotypes ethniques et des préjugés, dépasser le clivage nord-sud, musulman-chrétiens, mettre de côté nos intérêts personnels et communiquer en ayant un dialogue responsable afin d’agir ensemble. Nous devons partager des valeurs patriotiques et faire de nos différences culturelles un atout pour renforcer les liens qui nous unissent et promouvoir une image positive de notre pays sur le plan international afin d’oublier ce cliché qui nous associe aux sauvages. Oui nous pouvons changer la vision de notre société par une synergie issue des dialogues et compromis sincères dans le respect de nos traditions et dans l’intérêt de nos progénitures. Que l’héritage de nos parents ne nous obscurcisse pas la vision d’un Tchad nouveau mais qu’il nous serve de base constructive d’un avenir responsable et meilleur. Seul une telle volonté, un tel engagement peut apporter des changements radicaux au sein de la société. Nous devrions alors mettre de côté nos haines, nos rancœurs, notre vision négative de l’autre. Desserrons enfin nos points et tendons-nous les mains pour une unité durable .Faisons du dialogue et de l’ouverture d’esprit une arme de construction d’un avenir meilleur, c’est la clé de notre destin commun car ensemble tout est possible.
Piquet DINGAMMADJI
Par le temps qui court, beaucoup de familles s’interrogent sur l’avenir de leurs enfants. Rien d’anormal puisque la finalité des études, c’est avant tout la réussite professionnelle avec à la clé un emploi répondant aux attentes de chacun ou du moins un job pour assurer les besoins physiologiques tels que manger, boire et dormir. Mais hélas, la donne change et l’idéologie qui fait de l’école un gage de réussite professionnelle tend à disparaitre laissant place à certaines pratiques totalement arbitraires voire malhonnêtes. Ainsi donc, quelles perspectives pour cette jeunesse à qui cette institution reste encore l’unique alternative ? Et quid des autres qui choisissent d’autres chemins ? Que des interrogations silencieuses auxquelles les réponses ne peuvent tomber du ciel.
Bref, bon nombre des jeunes tchadiens se cassent la tête à bicher des milliers de page pendant des années dans l’espoir d’un avenir meilleur ; et pourtant à l’arrivée, rien, nada de nada. Pour les plus dégourdis, en moyenne, 16 années de courage et d’abnégation auraient suffi pour atteindre l’objectif final : décrocher une licence. Pour d’autres un peu plus mais peu importe le temps. À croire que cela leur aurait servi à quelques choses mais en fin de compte rien, au pire, chômeurs ou encore diplômés sans emploi. Triste constat. Des efforts consentis pendant des années qui finissent dans une impasse, autrement dit à la poubelle. Alors doutes, incertitudes, pessimismes mêlées au désespoir sont des sentiments qu’éprouve cette frange de la population confrontée au jour le jour à la triste réalité de notre société. Jamais autant d’incertitude n’a transcendé l’esprit de cette génération qui se sent complètement lâchée voire abandonnée à la merci du destin. Et pour couronner le tout, la crise financière complique la donne par effet de ricochet donnant ainsi raison au gouvernement qui peine à embaucher. Le piston reste alors l’unique solution ; encore qu’il faut avoir le minimum d’argent requis pour prétendre postuler à un poste ; et que faire pour les plus démunis alors ? D’ailleurs la probabilité de succès de ce processus baptisé piston est minime par ce que certaines personnes, de mauvaise foi, en font un fonds de commerce ou de quoi compléter leurs fin de mois. Même pas étonnant parce que tout le monde le sait et personne ne fait rien pour dénoncer ou prohiber cette pratique.
En revanche, ceux qui ont la chance d’étudier à l’étranger finissent par y rester par peur de se retrouver au chômage réduisant ainsi le capital humain, source de développement socio-économique de notre pays. Et c’est ainsi que la plupart de l’élite tchadienne se retrouve à l’étranger au service de leur pays d’accueil observant le leur agonisé lentement et progressivement alors qu’elle est capable de proposer des solutions alternatives aux dérives qu’il(le pays) traverse. Il faut aussi dire que le climat sociopolitique ne favorise peut-être pas le retour au bercail de cette frange de la population. Enfin bref d’autres jeunes réussissent quand bien même à grimper facilement les échelons et avoir des postes clés au sein de l’institution républicaine ; coup de chance, mérite ou favoritisme, allez savoir ? En outre, certains qui travaillent en ce moment sont parfois défavorisés financièrement vis-à-vis des étrangers même à compétences égales. Manque de confiance de l’état, discrimination, sinon pourquoi ? Pire encore certains organismes ne veulent pas leurs donner des postes de responsabilité sous prétexte qu’ils n’ont pas de compétence recherchées. Certes, mais l’état a une part de responsabilité dans cette situation par ce qu’il ne propose pas d’une manière significative un cadre de formation de haut niveau permettant d’accéder à ces postes. Et on s’étonne tout de même que le pays soit pauvre alors qu’on donne des sommes d’argent faramineuse à l’élite étrangère. À quand le déclic alors ?
Enfin, quelles solutions pour ceux qui ne sont pas faits pour les études ? Y’a-t-il un cadre d’accompagnement social pouvant les aider à trouver leur chemins ? Pourquoi s’étonner si beaucoup finissent brigands, alcooliques, assistés ou autres ; constituant ainsi une charge énorme pour la population active. Et j’ajoute au passage les chômeurs, les paysans car sans solde eux aussi. Plus leur masse est importante augmentant considérablement le taux de chômage, plus la population active subit les effets directs. Conséquence, pouvoir d’achats très faible. Tandis que le prix des denrées alimentaires augmente, la consommation des ménages diminue entrainant ainsi l’économie dans le gouffre et le pays devient de plus en plus pauvre. Que faire pour améliorer cette situation alors ? Le débat est ouvert.
Piquet DINGAMMADJI
En visitant N’Djamena après une longue absence à l’étranger on peut remarquer avec aisance que tout ou presque est stagnant dans la première ville du Tchad. Que ce soit dans les infrastructures routières, l’assainissement des eaux usées, l’éclairage public, l’énergie…et j’en passe. Mais en même temps il faut reconnaître que le pouvoir public se force, vraisemblablement, à injecter de l’argent pour moderniser notre pays, ne serait-ce que pour notre capitale qui ressemble à une grande bourgade malgré l’entrée du Tchad au club des pays exportateurs du pétrole depuis cinq années écoulées.
Les promesses Younsoumi
Bien que toutes nos principales avenues ne sont pas encore goudronnées, faute de volonté politique et non de moyen car la caisse publique n’a jamais connu une aisance financière pareille à celle que nous connaissons actuellement grâce à la rente pétrolière. Bien entendu nous sommes appelés à être optimistes dans la mesure où notre Adoum Younsoumi tient à ses bonnes promesses grinçant les dents de pas mal des Tchadiens et selon lesquelles son département s’engage à bitumer annuellement une soixantaine de kilomètres dans la capitale et une vingtaine dans les grandes villes.
…et Monsieur Communication
Il me semble que Younsoumi n’est pas le seul prometteur de grands projets dans l’actuel Cabinet de YSA. Notre illustre journaliste et Ministre de la Communication Mahamat Hissein nous a promis de moderniser son vétuste secteur à travers une numérisation qui débarrasserait le tout jeune ONRTV ainsi que l’ATP au moins de l’archaïsme qui les caractérise depuis toujours. Que font les autres Ministres ? je pense que les autres membre de l’Exécutif n’échappent pas à trois hypothèses : soit ils craignent de donner des promesses sans lendemain à leurs concitoyens, soit ils préfèrent laisser les choses se faire en temps et en heure voulus, soit ils n’ont rien ou presque comme promesse réalisable dans l’avenir proche.
L’opération Zen Bada
S’il ya un prix annuel à décerner pour tout responsable tchadien faisant couler beaucoup d’encre, tout en étant le grand sujet de toutes les lèvres, ce serait sans doute l’actuel Maire de la Ville de N’Djamena, Zen Bada Qui l’emportera pour cette année. L’opération de déguerpissent menée par la Mairie a suscité l’ire des plusieurs familles devenues vulnérables après la destruction de leurs maisons. Je pense que la dignité de ces victimes ne sera conservée que si l’Etat s’engage à verser une vraie indemnisation suivie d’une mesure d’accompagnement permettant aux habitants des endroits déguerpis de se reloger ailleurs. Cette opération certes a permis à l’Etat de récupérer ses réserves occupées illégalement, ce qui permet la réalisation de projets à intérêt public dans des endroits stratégiques. Bref, ça contribue à la modernisation du pays dans la mesure où la loi s’applique à tous sans distinction et que l’opération de déguerpissement ne devient pas un jour une opération de destruction pour destruction car nul n’est contre le réaménagement de la ville de N’Djamena s’il se fait dans un climat de sagesse et entente entre l’Etat et les habitants concernés.
L’énergie introuvable
En attendant la naissance de la fameuse raffinerie de N’Djamena l’électricité reste toujours un lux pour la plus part des abonnés de la STEE qui digèrent mal que leur pays exporte du pétrole alors que leur Etat n’est toujours pas en mesure de régler cette crise qui handicape le développement du Tchad pis, les choses ne s’arrêtent pas sur ce stade puisque les charbonniers ont aussi monté sur le cran en défiant un pouvoir public qui veut organiser l’activité voire fixer le prix du sac de charbon à 3000 F CFA alors que le prix se sont envolés jusqu’à 12 000 F CFA à cause de la mauvaise gestion de cette crise par les autorités concernées qui sont à mon avis incapables, à l’heure où je parle, d’apporter une alternative à ce produit nécessaire à la cuisine tchadienne qui ne peut pas se débarrasser de ce produit sans la généralisation ainsi que la subvention du Gaz de Ville qui demeure comme la plus part de produit nécessaire un lux, jusqu’à ce que le contraire soit réalisé .
ABDELSEMI AHMAT
Certes, avec le vent de la démocratie qui a soufflé en Afrique dans les années 1990, on avait cru que le Tchad a rompu avec cette tradition de guerre que connaît le peuple tchadien depuis l’indépendance. Hélas! Quelles années plus tard après la chute de la dictature, nous constatons que la démocratisation du pays n’a ni apaise ce conflit, ni éradiqué ses germes. Les facteurs prédisposant ce grand pays le Tchad au conflit sont de nouveau manipulés à des fins politiques. Or “ toute manipulation politique majeure prépare l’esprit à la guerre civile”. Les grandes puissances et les pays limitrophes se calfeutrent derrière ce conflit pour réaliser leurs projets au Tchad en aidant soit les rebelles ou le gouvernement. Tout porte à croire que le Tchad se porte bien et que le pays devient de plus en plus crédible. Cependant, cette stabilité est un silence imposé au peuple tchadien par une élite clanique et ou militaire compradore par des méthodes cœrcitives. Tout laisse croire que le grand risque d’une explosion sociale est prévisible avec la situation donc traverse les fonctionnaires de la fonction publique et les querelles entre les autorités du pouvoir central.
Pendant la Conférence Nationale Souveraine de 1993, les participants ont mis sur place des structures pour instaurer une démocratie consensuelle et participative au Tchad. Mais depuis 1996, celle-ci s’est envolée en éclats et la volonté d’un seul parti (le MPS) prime sur la volonté générale. Le MPS s’est accaparé de tous les pouvoirs et même de la liberté d’expression ou de l’opinion du peuple tchadien. Les autres partis politiques qui reviennent d’eux-mêmes s’associer à lui sont phagocytes et les leaders auxquels il fait la cour et qui refusent sont liquidés. Alors, la conséquence directe de cette pratique politique est la présence de deux oppositions : une opposition politique très mal structurée pour faire face au régime d’une part et une opposition politico-militaire divisée incapable de s’organiser d’autre part.
Le manque d’une volonté politique réelle à dialoguer pour résoudre ce conflit et la vision de cette élite décidée à confisquer pour longtemps le pouvoir, ne fait que réveiller les démons de la violence. A présent, le pouvoir a réussi à briser toutes les oppositions par des pratiques politiques moyenâgeuses et à contrôler à lui seul tous les organes prévus par Montesquieu pour l’épanouissement des citoyens. Or un monarque devient despote dès qu’il s’accapare de tous les pouvoirs. C’est pourquoi aucune règle d’une politique démocratique ne sous-tend actuellement les actes du régime, sinon, un “ machiavélisme “ dépourvu de sens et une “politique de l’Autruche”. Les acteurs de la mouvance au pouvoir clament haut et fort que c’est le MPS qui a instauré la démocratie au Tchad. Il est le seul garant de celle-ci donc le seul habilité à déterminer les règles du jeu politique.
Par contre, comme le disait Emmanuel Kant « Aucun Malheur n’est plus effrayant pour l’homme que de se voir livrer à une création de même nature que soi qui pourrait vous contraindre à suivre son propre arbitraire et à faire ce qu’elle veut » L’élite au pouvoir oublie que l’ordre social ne peut en aucun cas reposer sur des contraintes et les répressives. La démocratie est un régime globalisant et rassemblant. Les dialogues et les consensus sont les seuls moyens qui l’enracinent dans un pays comme le Tchad. Étant ni une fin en soi, ni un acquis définitif cette pratique d’autodestruction des autres formations politiques comporte assez de risques car la démocratie n’est qu’une pellicule mince qui se déchire pour un rien et laisse réapparaître la barbarie. Généralement, les guerres civiles ont souvent pour causes :
- la frustration des acteurs sociaux ;
- le gouvernement d’un pays par les mœurs d’un clan ou d’une ethnie;
- l’apparition d’une élite qui veut vivre du travail des autres ou qui monopolise à elle seule tous les biens sociaux;
- le refus de la légitimité d’un régime par le peuple:
- la stratification sociale en dominant/dominé et surtout lorsqu'un groupe d’individus ou un peuple se révolte avec les armes contre les autorités légales.
A présent on compte une centaine des mouvements politico-militaires qui combattent le régime de N’Djamena et une autre centaine des partis politiques qui luttent pour un véritable changement démocratique au Tchad. À quand le changement ?
Bref, retenons que tous les déclics de la guerre sont en place. La seule chance du salut du peuple tchadien réside dans la capacité de l’élite au pouvoir à gérer ces contradictions. Nous avons constaté que le conflit tchadien rejaillit aux années trois et aux années neufs de chaque décennie. Alors avec la prolifération des conflits interethniques les populations tchadiennes commencent par se regarder avec méfiance et mépris comme à la veille de l’année 1979. Même si le régime de N’Djamena a encore le soutien de la Libye et surtout de la France, on remarque que les relations Franco-tchadiennes vont de plus en plus mal ce dernier temps.
Si la pratique politique nous permet de présager l’avenir du Tchad, l’économie qui est le point cardinal de tout conflit social doit mieux étayer nos investigations. Depuis 1979, les activités économiques sont entrées en dysfonctionnement avec l’organisation sociale. Mais depuis 1992, une bourgeoisie militaire est mise en place et un prolétariat encore inorganisé subit ses injustices. La gabegie est légalisée. Cette gestion anarchique des deniers publics a causé la faillite de presque toutes les entreprises d’Etat. Avec le diktat du Programme d’Ajustement Structurel ( PAS ) imposé au pays du tiers-monde par les institutions de Bretton Woods, la plupart de ces bourgeois d’Etat sont devenus des actionnaires dans les entreprises et dictent en ce moment leurs lois à la population tchadienne toute entière sans logique économique, sinon, guidés par le seul désir de s’enrichir le plus vite que possible comme toujours. Les grands commerçants qui depuis toujours ont le monopole du secteur commercial y sont évincés pour plusieurs raisons.
Or, en privant un individu de ses attaches traditionnelles, cela crée en lui l’irritabilité, qu’on ignore la fin. Pour reconquérir leurs anciens droits, ces commerçants ne pourront-ils pas s’unir un jour et financer une vraie rébellion contre ce régime. De même la mise en valeur de certaines ressources minières du Tchad offusque des fois, car certaines ressources, minières et naturelles du pays sont bradées à des richissimes d’après-guerre ou des groupes d’individus. Eu égard à ce qui se pratique, l’activité politique n’est plus la capacité d’un acteur à dominer les rapports dans la répartition des biens tel que chacun trouve son compte, mais un moyen de s’enrichir pour les autres. D’après une enquête réalisée par N’Djamena-Hebdo, 72% des N’Djamenois vivent au seuil de la pauvreté absolue et 28% vivent dans une opulence insultante. Bien que les inégalités sociales existent dans toutes les sociétés, le fossé va toujours grandissant entre les riches et les pauvres au Tchad. Par ce procédé de disposer du peuple tchadien et de ses avoirs, les initiatives privées sont frappées par des taxes qui les découragent de plus en plus relatif à leurs activités commerciales. Cette même source précise que 81% des N’Djamenois estiment que le risqué d’une guerre à N’Djamena est possible car le circuit économique est mobilisé par une élite qui ne tolère ni la concurrence économique ni ne laisse de chance à l’autre de se réaliser pour évoluer dans ces secteurs commerciaux. De même ce fameux pétrole pour lequel Américains, Français et Libyens ont fait couler à flot le sang des Tchadiens est aujourd’hui sur le marché mondial. La passion de voir ce pétrole coulé et l’obsession de compter ses dollars sèment de la trouille dans la tête de certains acteurs politiques.
Souvent, il est remarqué que tous les pays qui passent par la guerre changent des codes de conduite sociale. Pour retrouver ce code de conduite de paix, il faut que les institutions religieuses travaillent d’arrache-pied. Depuis la fin de cette tragédie de 1979 par exemple où les facteurs confessionnels ont été manipulés subtilement à des fins politiques, l’islam et le christianisme se disputant âprement le terrain et se montrent de plus en plus offensifs au Tchad l’un comme l’autre. L’islam qui a bénéficié du soutien du pouvoir politique a tendance à prendre le dessus sur tout le territoire. Après avoir reçu l’autorisation d’organiser le BAC arabe dont le taux de réussir des candidates oscille toujours entre 70 et 80%, un institut de promotion de la langue arabe a été créé en 1992 et s’ajouter aujourd’hui autres instituts au pays. Un tel établissement n’a rien de mauvais en soit dans un pays laïc comme le Tchad. Ce qui hante l’esprit, est la vision des musulmans de faire du Tchad un Etat musulman. Mise à part cette raison, la seconde qui effraie les non musulmans, est cette confusion qu’il y a entre l’islam en tant que religion et l’arabe en tant que langue de communication au Tchad. Pour beaucoup de musulmans tchadiens, l’arabe est indissociable de l’islam. Avec la création de cet institut qui, en fin de compte est devenu une université et qui délivre le doctorat du troisième cycle et des doctorats d’Etat à ses étudiants, n’assisterons-nous pas à une arabisation du pays se posent la question les tchadiens non musulmans ? A ces deux faits que nous pouvons considérer comme un stade normal de développement de l’islam, s’ajoute le bilinguisme était décrété par le gouvernement (arabe et français deux langues officielles).
Au vu de toutes ces données rien ne nous étonnerait si demain le français est relégué au second rang et le Tchad, proclame Etat musulman. Les preuves ne font pas défaut pour prouver cela. A la conférence Nationale Souveraine en 1993 par exemple, l’imam de la grande mosquée de N’Djamena à la personne de Hassan Hissein Abakar avait clairement revendiqué l’application de la charia à la radio et à la télévision tchadienne.
Vu les massives violations des droits de l’homme dans la zone méridionale, les populations du sud revendiquent depuis 1993 la fédération du pays. Mais l’Etat reste cantonné sur sa position d’Etat unitaire. Derrière ce refus de l’Etat ne se cache-t-elle pas des raisons d’ordre religieuses, se posent la question les sudistes ?
Car le principe de l’islam est: un seul Etat ( un seul peuple), une seule réligion et une seule langue. Le refus de cette fédération par presque tous les leaders du nord ( musulmans ), la multiplication des mosquées dans la zone méridionale, le développement de la coopération islamo-arabique tout azimuts ne témoigne-t-il pas ce projet à long terme au Tchad ? Si l’islam a un projet pour la zone méridionale, le christianisme de son côté n’est pas resté inactif. Non seulement il résiste à l’ouragan de l’islam dans sa zone, il sort aussi de plus en plus de sa zone géographique. Depuis 1990, les églises évangéliques ont déclenché une opération : ” Tchad pour Christ en l’an 2000”. Cette opération se propose d’aller de village en village pour annoncer la Bonne Nouvelle de Christ à toute la population tchadienne. Ayant fini avec la zone méridionale, il ne reste que la zone septentrionale fief de l’islam. Réussiront-ils à pénétrer ce milieu dominé par l’islam depuis plus de sept siècles ? Ce qui frappe l’œil actuellement, c’est la manière dont les églises et les mosquées poussent chaque jour comme des champions un peu partout sur le territoire national. Des sectes de tous genres ont trouvé un terrain favorable pour s’y installer, tous se regardent de mauvais œil et sont toujours très méfiantes les unes faces aux autres. Elles ont perdu leur caractère de tolérance d’avant la guerre civile et mieux ont tendance à se politiser ou à se laisser manipuler encore par le politique. Peut-être un appel à la cohabitation religieuse ou à la tolérance sera lancée par le gouvernement les jours à venir. Exemple: le 26 septembre 1992, est né à N’Djamena dans une famille chrétienne un enfant qui portait inscrit à son avant-bras droit le nom du prophète MOHAMED. L’église catholique voulait s’occuper de la vie de cet enfant en vertu de la foi chrétienne de ses parents. Mais les autorités islamiques ont converti ces derniers à l’islam et s’occupent de la vie de cet enfant. Comment est devenu cet enfant, beaucoup des tchadiens musulmans comme chrétiens se posent la question ?
Là encore, le problème ne se pose pas car l’enfant est encore mineur. Ce qui effraie c’est l’attitude ou la religion qu’adoptera cet enfant à l’âge mûr. En dépit de tous ces constats, il est possible que nous assisterons dans les prochaines années à un affrontement entre les fidèles de ces deux religions compte tenu de l’intolérance qui les animent. À partir du religieux, on peut penser à une explosion du faite que “ les tensions annonciatrices des grandes pulsions belligènes s’accompagnent des ferveurs religieuses. Lorsque les peuples se mettent à parler de leurs dieux et de leurs ancêtres, c’est que la guerre n’est pas loin” Nous demandons aux autorités tchadiennes de prendre leurs responsabilités pour éviter cela.
Mieux toute tentative de faire du Tchad une république ayant pour fondement idéologique une quelconque religion mettrait en péril l’intégrité déjà dangereusement menacée. La violence, l’orgueil et l’injustice font perdre le pouvoir aux princes. Poursuivant presque cette même politique austère de Tombalbaye et de Hissein Habré, à l’égard de certains peuples dans un contexte de démocratie, aucune couche sociale n’est actuellement épargnée des injustices de l’élite au pouvoir. Comme la privation, l’injustice elle aussi crée la frustration qui à son tour conduit à des véhémences. Nous pouvons dire aussi que l’injustice participe souvent à l’arbitraire et au désordre. Or lorsqu’un peuple vit dans le désordre, beaucoup de gens luttent pour le pouvoir ; mais non pour un changement réel du terme. C’est ce qui expliquerait peut-être ces nombreux coups d’Etat ou encore ce grand nombre de mouvements politico-militaires qui luttent pour le pouvoir au Tchad.
En plus de l’injustice qui alourdit le climat entre les acteurs sociaux, il y a les licenciements abusifs du personnel des sociétés paraétatiques ou étatiques et la mise à retraite des soldats de l’armée qui sont de nature à favoriser une explosion sociale. L’injustice, la frustration et l’arbitraire ont créé un climat d’insécurité et favorisé le développement du banditisme que l’on appelle au Tchad “ les Colombiens “Dans les campagnes les couches sociales ne cessent de se provoquer à cause des biens sociaux. À côté de cette couche des professionnels, il y a la masse estudiantine. L’accès aux universités n’est plus destiné à quiconque. Les concours d’entrée dans les écoles professionnelles sont l’apanage de quelques-uns et de plus l’État étouffe le génie de certains tchadiens par la géopolitique comme l’atteste beaucoup de documents sur la géopolitique. Comment est-on arrivé à cette situation de chômage chronique des bacheliers ? Depuis quelques années le gouvernement délivre chaque année plus de six mille attestations de BAC aux candidats. Mais ce qui offusque, est le fait que les universités au Tchad n’ont pas une capacité de mille places en première année. Que feront les cinq milles autres bacheliers qui ne réussiront pas à s’inscrire à l’université alors qu’ils ont la même chance d’accès que les autres. De plus ceux qui réussissent à se faire former soit à l’université soit dans les écoles professionnelles sont automatiquement mis au chômage tantôt parce qu’ils sont mal formés tantôt par manque de structures d’accueil. L’Etat par des procédés dilatoires empêche leur intégration à la fonction publique. Pour être intégré dans la fonction publique, il faut être militant ou militante de MPS ou avoir un parent bien place dans l’administration publique tchadienne.
Les initiatives privées sont la chasse gardée de la bourgeoisie naissante. Dès que ceux-ci tentent de s’y lancer, ils sont durement frappés par des taxes incroyables. Cette même bourgeoisie refuse de les employer au profit d’une main d’œuvre non qualifiée donc moins chère à payer. Or” le citoyen est membre de la société de travail. Sa première exigence est celle d’une part équitable au produit social... Tout son style de vie intervient dans la définition de cette équité et c’est au gouvernement de calculer ce qui est acceptable et accessible à toute la communauté… L’unité et la cohésion de celle-ci ne résisteront pas à la longue à un régime d’injustice flagrante à des différences de revenues trop accuses, à des décalages trop criant entre les niveaux de vie des divers groupes… L’inégalité des chances d’accès à la direction des affaires sociales, l’oppression pesant sur certains groupes poussent les parties désavantageuses de la population à la révolte…” C’est pourquoi nous assistons à un nombre important des jeunes bacheliers licenciés dans la rébellion qui luttent pour un changement profond au Tchad. Ainsi donc, la société explosera un jour au fil du temps.
Gaya- Ple Ben Seïd
Qui a dit que l’Afrique était une terre de « spécificités » ? Rien de ce qui parait normal sur d’autres continents ne se justifie automatiquement en Afrique. Peu de temps après les indépendances, dans les années 60 du siècle dernier, l’on a estimé que l’Afrique n’était pas prête de fonctionner sur la base de systèmes politiques pluralistes, à cause d’un risque de déchirements tribaux préjudiciable à la construction d’Etats-nations. Alors, la plupart des pays africains ont adopté le système du parti unique, avec ce qui s’en suivit : la restriction et le contrôle des libertés publiques, les répressions aveugles des ‘minorités’ opposées à l’ordre établi, la formation de véritables dynasties familiales au pouvoir appuyées par la tribu la plus favorisée, etc.
Ce système, qui ne différa pas de régimes militaires comme civils, fut longtemps justifié et même soutenu par les anciennes puissances coloniales voulant des pantins sûrs pour garantir leurs intérêts sordides tendant au pillage des richesses du continent. Jusqu’à ce que la fin de la guerre froide, dans les années 90 vienne desserrer l’étau de la pensée unique dans le monde et que, subitement l’Occident se redécouvre les vertus de la démocratie qui a fait son salut au sortir de la deuxième guerre mondiale. On s’est rappelé des immenses attentes des populations africaines et des processus de démocratisation ont été engagés çà et là, avec plus ou moins de bonheur.
Dans l’ensemble, il y eu plus d’échecs que de réussites. Dans le meilleur des cas, comme au Mali, au Bénin, en Zambie, en Tanzanie, entre autres rares exemples ‘acceptables’. Sinon, le seul acquis fragile, en voie de remise en cause actuellement, c’est la liberté de parole retrouvée au sein des élites africaines. Au début très allergiques, les pseudos dictateurs ont fini par comprendre que cette liberté de parole était le minimum qui devrait être concédé à leurs opposants et aux sociétés civiles, au risque de précipiter leur ‘tour de Babel’ de pouvoir éphémère. Avec l’aide des services spéciaux et des mafias redoutables de l’Est comme de l’Ouest, ils s’évertuent à maîtriser les rennes des systèmes démocratiques en cours.
Les procédés sont de plus en plus connus : hold up électoraux, tronquage des listes… Cependant, l’éveil des consciences allant grandissant, les méthodes de rétorsion contre la démocratie naissante africaine et ses espoirs évoluent aussi.
En Guinée Conakry, la reprise en main est à présent effective : le pouvoir vieillissant de Lansana Conté a mis les bâtons dans les roues de cette ‘pré transition’ du gouvernement de Lansana Kouyaté, obtenant sa chute prévisible. Ainsi, s’appuyant sur la mise à l’écart des partis politiques par les forces sociales et la soif de ces derniers de retrouver les délices du pouvoir, les conseillers de Lansana Conté ont bien joué sur cette faille du système pour réhabiliter leur régime agonisant. La faute des syndicats consistait à croire à une élimination possible du régime honnis par un processus légal intégré au système en place lui-même. C’est sans compter avec le fond de mentalité perverse et assoiffée qui motive la classe politicienne.
Au Kenya, paradis vacancier des Occidentaux, le septuagénaire Moï Kibaki s’accroche au pouvoir. Après avoir été élu précédemment, avec la bénédiction de l’ancien dictateur Arap Moï, Mr Kibaki s’est rappelé subitement qu’en Afrique, seuls les dictateurs durent au pouvoir. La lutte pour le pouvoir étant synonyme de montée de nouvelles classes tribalo affairistes ou de la déchéance de celle aux commandes, il lui parut suicidaire de respecter les valeurs de la démocratie pour sa propre survie et celle de son ethnie majoritaire la plus favorisée. Au prix d’un début de guerre civile, il obligea l’opposition à un marché de dupes dont seule l’issue en fera une jurisprudence africaine recommandable. En effet, à la fin de cette gestion partagée de pouvoir entre lui et Raïla Odinga, il n’est pas sûr que les conditions d’un passage de témoin élégant et pacifique soient réunies pour autant. Le camp de Kibaki n’y a pas intérêt. La transition actuelle n’est donc qu’une mi-temps !
Au Zimbabwe, l’Afrique se ridiculise en inventant la notion de ‘héros’ à qui tout un peuple doit une allégeance éternelle. Mr Mugabe, quadragénaire dont on sait que les capacités de gouverner sont réduites par l’âge, est devenu la réincarnation africaine de la folie du pouvoir. Qu’il ait ‘arraché’ aux blancs les terres riches des fermes, cela faisait partie de l’Accord d’Indépendance. Rien d’héroïque ni de spectaculaire ! Il l’aurait fait unilatéralement sans accord préalable, comme Nasser en nationalisant le canal de Suez ou Mossadegh avec le pétrole iranien sous le règne du Shah Pahlavi, il serait effectivement un héros, un grand héros. Non seulement il l’avait fait tardivement, ayant passé le clair de son temps à éliminer les autres mouvements politiques de son pays tels que la ZAPU de Joshua N’Komo, mais il utilisa la répartition de ces terres comme arme politique démagogique en faveur de ses partisans, créant ainsi un nouveau clivage entre citoyens d’un même pays. La famine qui s’est installée dans cet ancien grenier d’Afrique australe serait-elle aussi un complot britannique ? Personne n’a prouvé que l’opposant Morgan Tsvangiray défendrait les intérêts de la minorité des fermiers blancs, sinon comment expliquer que la majorité des électeurs noirs, c’est-à-dire de ceux qui ont intérêt à posséder les terres confisquées aux blancs, ont préféré Tsvangiray à Mugabe ? L’opinion africaine serait-elle plus éclairée que les intéressés zimbabwéens eux-mêmes pour les assimiler collectivement à des pantins des impérialistes ? Pourquoi Mugabe devrait-il s’arroger le droit de ne pas quitter le pouvoir et imposer un tribut à son peuple pour l’avoir libéré des blancs ? N’est-ce pas la même propagande derrière laquelle se réfugient les potentats africains pour s’accrocher au pouvoir ?
D’autres pays et non des moindres ont fait sauter le verrou de la limitation des mandats présidentiels. Ce garde-fou était ce qui leur causait le plus de difficultés, après toutes les autres manœuvres réussies de coup de force institutionnel. Tant qu’ils seraient en vie, rien d’écrit ne devrait les empêcher de s’accrocher au pouvoir. C’est comme un mal de l’air en avion ou en altitude : l’idée de tomber est plus insupportable que le malaise en lui-même ! À défaut, la méthode Obasenjo – Poutchine pourrait intervenir, quand le potentat partant est sûr de contrôler l’appareil sécuritaire de l’Etat et se permettre d’installer son poulain aux commandes.
La Mauritanie a bien suivi cet exemple avec le dernier coup d’Etat. Aux arguments pertinents et au soutien exprimé aux putschistes par une frange importante de l’élite politique mauritanienne, nous opposons une question simple : à quoi sert-il d’élire des dirigeants pour les renverser avant la moitié de leur mandat ? S’il y a crise politique, la Constitution ne prévoit-elle pas des mécanismes de règlement respectueux du suffrage universel ? À vrai dire, les putschistes supportent mal cette normalisation de la vie publique qui devrait passer, à ses débuts, par cette instabilité inévitable. Les élites qui contrôlent le système politico-économique mauritanien sont des tentacules de l’ancien pouvoir dictatorial de Ould Taya. Ce coup d’Etat est une reprise en main qui compliquera davantage la vie démocratique dans ce pays pauvre et divisé sur une vraie base raciste et esclavagiste. Seul un semblant de pouvoir aux apparences démocrates et à l’ancrage tyrannique sera accepté par les vrais maîtres du jeu internes et extérieurs.
La promotion des ‘spécificités’ africaines, atteignant leur apogée, aboutissent à des scénarii du type « traduction manu militari devant la Cour pénale internationale ». Les chefs de guerre (petits chefs d‘état bananier autoproclamés) et les chefs d’Etats en fonction sont ainsi jaugés comme les pions d’un damier, pour mettre en œuvre le nouveau droit international humanitaire et politique. Là aussi, des voix s’élèvent toujours d’Afrique comme en retard pour protester, comme si ce développement n’était pas prévisible ? Alors, on tente rapidement de mettre en place des tribunaux nationaux au Darfour pour juger les criminels de guerre dont on niait jusqu’à l’existence quelques jours plus tôt ?
Face à l’impossible alternance normale, de plus en plus d’intellectuels et même de démocrates déçus adhèrent à la logique du coup de force, soit à la manière mauritanienne, soit par l’organisation de rébellions armées ou la prise de contrôle du directoire rebelle (comme en Centrafrique). Tout en déplorant le caractère regrettable du procédé de « putsch », ces élites africaines gauchisantes le considèrent comme le moyen le plus approprié de vaincre le refus d’alternance promu par les potentats en place. Peu importe les casses, les milliers de réfugiés et de déplacés, la déscolarisation d’une génération d’enfants, la flambée des pandémies telles que le VIH Sida, les morts : il semble qu’on ne peut faire autrement, à cause des spécificités africaines !
À quel ridicule s’exposent les Africains ? Et ce seront encore les mêmes Africains qui crieront à la générosité internationale dans les grands forums où les autres continents viennent pour proposer et vendre : le don des céréales contre la famine endémique et ‘structurelle’, les médicaments gratuits contre le VIH Sida pour les milliers de femmes violées par les ‘libérateurs’ de tout poil, l’eau potable (après avoir gaspillé l’argent public dans l’armement massif, la subversion et les placements à l’étranger), le gros lot des troupes onusiennes pour sauver des pays en dérive… C’est vraiment dommage !
Enoch DJONDANG
Nos dinosaures spécialistes de la vie politique tchadienne ne vont pas démentir leur réputation de ‘serviteurs des pompes funèbres’ de la République. En effet, la routine et la monotonie ont retrouvé leurs droits dans la gouvernance de notre pays. Après la fièvre des revendications de la CPDC autour de l’Accord du 13 août 2007, le processus prend du plomb dans l’aile, dans une ambiance générale morose.
Pour qui connaît les habitudes des tchadiens, peu d’entre les compatriotes se soucient de rendez-vous avec les urnes dans quelques mois, si ‘tout se passe bien’ comme dirait l’autre. Ils respirent un coup parce que la nature, en l’occurrence la saison des pluies, vole à leur secours en réduisant au strict entraînement les exercices militaires de part et d’autre des belligérants. Une période propice pour rattraper les activités et les intérêts perdus en début d’année, avant le retour de la saison des campagnes guerrières après les pluies. Rien ne préjuge d’une avancée notable vers la paix, alors le peuple joue au pragmatisme et s’occupe de son quotidien devenu très difficile avec la cherté croissante de la vie, phénomène face auquel les pouvoirs publics décident mais ne peuvent imposer leurs sentences. On ne touche pas aux lobbys commerciaux familiaux puissants qui savent à quelle porte frapper !
Le parti au pouvoir, qui a su s’adapter à toutes les situations, ne voudra pas perdre du temps. Mettant à profit sa restructuration interne et son renforcement du sang neuf de nombreux fugitifs des partis de l’opposition et de la rébellion armée, il a déclenché l’offensive de la conquête des forces vives, sachant que les dinosaures de la CPDC ont d’autres chats à fouetter dans les tiroirs et tirelires du gouvernement. L’expérience a prouvé maintes fois que l’opposition ne sera jamais prête pour un scrutin. Sa seule stratégie, de moins en moins payante ces dernières années, a été le boycott comme alibi pour ne pas répondre de ses propres carences. Le MPS le sait et met en place sa toile sur le pays. Qui le lui reprocherait ? Qui est prêt à perdre ‘bêtement’ pouvoir et privilèges dans un pays intéressant à l’ère pétrolière comme le Tchad ?
La CPDC tombe dans son propre piège de ‘coalition de salon’. Ce jugement n’est pas trop sévère au regard de la réalité ambiante. Quel parti membre de cette coalition a-t-il opté pour la stratégie offensive de la conquête du terrain, en même temps que le MPS au pouvoir ? Qu’attendent-ils ? Les moyens ? Qui leur en fournira et quand ? Les leaders entrés dans le gouvernement sont de vieux loups qui ont très vite adopté comme credo la fameuse ‘solidarité gouvernementale’, et par conséquent se sentent moins concernés par les préoccupations diffuses de leur coalition politique CPDC. Ils savent que leurs intérêts propres seront garantis tant qu’ils tiendront cette solidarité et que leur idylle durera uniquement le temps du mariage de raison. Après quoi, certains seront encore plus fatigués et usés tant par les affaires que par l’âge pour aller jouer aux gladiateurs dans l’arène politique conflictuelle des élections contre l’intrépide IDI.
Par sa présence minoritaire et son influence marginale au sein du gouvernement actuel, la CPDC est plutôt obligée par le programme social de IDI que par sa ‘feuille de route’ mal négociée et largement inconnue du grand public. C’est une DCP (Démocratie Consensuelle et Participative) au rabais qui ne dit pas son nom. En effet, en terme de produits, les tchadiens verront plus le ‘social’ promis par IDI d’ici quelques mois que la mise en place d’un nouveau processus électoral isolé des préoccupations les plus pertinentes sur l’état de la gouvernance (généralement abandonnées par les partis politiques à la société civile). Et les scrutins se joueront sur ce plan là ! N’ayant pas oublié la tendance volteface inavouée de ses alliés politiques du moment, IDI ne se laissera pas surprendre par ceux-ci renfloués financièrement par leur passage aux affaires. IDI n’aime pas jouer aux prolongations de matchs et le dernier quart d’heure a toujours été gagné par lui jusqu’ici, autant avec ses opposants politiques que rebelles. Comme l’a enseigné Machiavel, c’est la fin qui compte et non pas les procédés utilisés !
Les autres membres de la CPDC se cramponnent au comité de suivi comme si c’était à ce niveau que la mise en œuvre de l’Accord du 13 août 2007 se fera exclusivement. Quand ils tiendront la dernière réunion de suivi avant les campagnes électorales, le MPS aura déjà intelligemment conforté son statut de favori. Ils auront beau tenté de s’agripper aux faits et gestes menaçants des politico-militaires, réclamé des dialogues inclusifs, le MPS fera sa campagne même sous la menace rebelle et gagnera sans aucune peine faute d’adversaires sérieux. Si non, qu’ils nous démontrent comment au rythme actuel et avec leurs méthodes de caméléons arrosés ils comptent remporter la moindre élection ? Le suffrage universel peut réserver des surprises désagréables aux leaders fanfarons.
Dans leur lutte pour la survie au quotidien, les tchadiens ne connaissent pas les partis politiques, parce que ceux-ci ne connaissent les tchadiens que quand arrive le temps des élections. Par contre, les tchadiens connaissent mieux les rebellions armées, parce qu’ils sont appelés périodiquement à vivre les frayeurs et les affres de la guerre dans leurs localités, comme cela se passe en permanence dans l’Est du Tchad. Dès que les Toyota sont annoncées à X00 km de N’Djaména, le fameux ‘sauve qui peut’ fait le reste ! D’ailleurs, en vérité l’Accord du 13 août 2007 ne concernera que les régions où l’on ne vénère ni ne stocke les armes de guerre. Dans l’autre Tchad guerrier, les urnes ne sont pas les bienvenues et il n’y a pas de consultation qui tienne. Ce sont les régions à démographie électorale super galopante et où les résultats sont toujours au-delà des 90% qu’il vente ou qu’il pleuve. Et il n’y a pas de CPDC ni de démocratie dans ces contrées-là !
Contrairement à beaucoup d’autres pays, les partis politiques au Tchad se comportent comme de simples clubs de quartiers bons à réclamer leur part de bonbons à ‘papa’, mais incapables de développer leurs activités et de coller leurs réactions aux phénomènes publics sociaux, économiques, culturels ou environnementaux de l’heure. Le seul sujet dans lequel tous ces opposants excellent, c’est la critique des toussotements de IDI et de ses proches, comme si cela suffisait pour remplir la calebasse vide du citoyen ou devenir un projet de société novateur ? Quid des débats internationaux actuels, aucune présence idéologique affirmée sur les tribunes politiques africaines (à l’exemple de Goupandé ou de Ziguélé de la RCA voisine !), aucune signature littéraire, toujours le jeu des coulisses et les coins sombres ! Dans ces conditions, des recensements prévus au lancement de la campagne législative prochaine, seul le MPS sera en mesure d’évaluer à son avantage ce qui aurait été réellement fait selon les termes de l’Accord du 13 août 2007. Parce que présent sur le terrain, même avec les moyens de l’Etat : tant pis pour celui qui n’est pas conséquent avec lui-même en prenant des responsabilités !
Le contexte politique de démocratisation se dégrade de plus en plus en Afrique en ce moment. Après avoir usé jusqu’au hold up électoral, pour coincer les oppositions politiques les plus audacieuses et les empêcher de prendre en main hors contrôle néocolonial les ressources des pays africains, l’Occident évolue vers l’imposition des partages aléatoires de pouvoir là où la force de l’opposition et la détermination des peuples pour le changement rend nulle l’utilisation des anciennes méthodes (exploitation du préjugé tribal, délation, achat des consciences, corruption massive, fausses rumeurs malveillantes, tricherie, etc.). Nous sommes encore loin d’un tel schéma nouveau, en l’absence d’une vraie opposition cohérente. C’est pourquoi l’Accord du 13 août 2007, dans notre contexte sclérosé, permettra cette fois-ci au camp d’IDI de gagner sans trop se fatiguer et en toute légitimité. Beaucoup seront choqués par cette analyse provocatrice, et pourtant si les mêmes causes produisent les mêmes effets, par un simple A + B + C=, l’on pourrait aboutir aux mêmes conclusions.
C’est aussi pourquoi nombre de cadres et d’intellos, en faisant ces calculs mentaux rapportés à leur personne et aux préoccupations de survie physique et matérielle, font vite le choix de la carte politique à prendre, comme au loto ou au tiercé ! ‘La force de l’homme tchadien n’est-elle pas dans la marmite’, plutôt que dans son cerveau et/ou dans ses bras, comme disait l’autre compatriote ? Et la vie continue, ‘les chiens aboient et la caravane passe’, dit aussi le slogan gagnant[i] ! L’éditorialiste officiel Bendjo ne me démentira pas ?
Enoch DJONDANG
Il est, aujourd’hui évident que l’homme, qui , pour des raisons inavouées veut, mordicus, faire valoir à l’opinion publique internationale que Hissein Habré n’est rien d’autre qu’un vulgaire dictateur mégalomane , se trouve, lui-même, être un opportuniste mercantiliste à l’affût des situations lui générant de liquidités dont ni l’odeur infecte ni la couleur ensanglantée ne gênent ce malfrat dans sa quête perpétuelle de délices morbides. Dans son dessein cynique de déstabiliser Habré, sa famille, les tchadiens et partant toute l’Afrique noire afin de remplir ses poches étrangères à la cause continentale, Reed Brody ne ménage aucun effort pour que sa fausse accusation contre l’africaniste Habré devant qui, les velléités expansionnistes occidentales se sont vues mortifiées, trouve droit de cité dans une société planétaire inique, cœur d’un monde sans cœur, dirigée partialement par des grandes puissances comme les USA représentant les Amériques et la France l’Europe tout entière.
Dans l’émission « Grand Reportages » récemment diffusée sur les antennes de la RDI, l’énigmatique Brody ayant fait de l’affaire Habré une potentielle vache à lait, refuse un poste aux Nations Unies proposé par l’un de ses amis prétextant que l’affaire était à son paroxysme et qu’il ne pouvait laisser tout tomber. Visiblement, il s’attendait à une éventuelle extradition de l’ancien homme fort du Tchad du Sénégal dont l’issue n’est rien d’autre, pour lui, que jaillissement de pognon, or, argent, diamant qui rendrait ses programmes de vacances et de bamboula bien aisés et arrondis. Quelques jours plus tard quand Denis Sassou, président du Congo Brazzaville par sa lecture posée, rendit publique de l’intention des chefs d’Etats de l’Union Africaine de juger Hissein Habré au Sénégal, la gêne était ostensiblement lisible sur le visage du ridicule Brody mais il opta de la dissimuler par une exclamation de joie feinte. « … et voilà ses propres anciens pairs reconnaissent ses actes et le condamnent…. C’est l’essentiel » s’exclame-t-il. Eh bien, Brody ! Ses anciens homologues ne l’ont nullement condamné mais ils ont simplement peur de toi et de ces barbares que tu représentes et, qui, en ce moment où je rédige mon article t’instiguent de plus belle. Non seulement, l’Afrique tout entière se refuse de sacrifier un homme qui durant de longues années difficiles porta son flambeau au-devant de la scène mais aussi un des éminents fils de l’Afrique centrale en l’occurrence Menyé W. Boumoua t’ayant démasqué dans ton intrinsèque nature te décrit en ces termes : « Il y a quelques jours, Reed Brody, un juif sioniste originaire d’un pays de l’Europe de l’Est (Bulgare ou Hongrois comme Sarkozy), devenu américain par nationalité, et émargeant à la mystérieuse nébuleuse dénommée Human Right Watch, appellation trompeuse qui peut abuser de plus d’un pour peu que l’on considère les activités et les positions à géométrie variable et très sélectives de cette officine d’un poids financier considérable et redoutable dont les ingérences néfastes sont principalement dirigées contre les pays du Tiers-Monde, en particulier l’Afrique, Reed Brody donc, très tôt appâté par la mine d’or que représentait l’affaire Hissein Habré, a inondé, comme il sait le faire régulièrement, le Net d’un morceau de sa littérature de caniveau aussi fétide que démagogique ; ».
La littérature de Brody est aussi empuantie que le derrière d’une hyène. Frère Boumoua, aviez-vous aussi réalisé que la cause qu’il défend et sa politique sont aussi creuses et vides qu’une paume de mendiant ?
Les tchadiens dans leur ensemble, par ma voix, vous expriment Professeur Boumoua leur profondes gratitude pour avoir, par votre article si joliment étoffée, défendu une préoccupation qui est, normalement, la leur. Toujours est-il que nous avons grandement besoin de ces augustes fils de l’Afrique, qui comme vous s’érigent en défenseurs de notre cher continent tout entier. En disant cela, mes pensées vont vers tous ces chefs d’Etats, qui sans raison valable, se sont vu arrachés prématurément à leur peuple à l’instar de kwame Nkrumah du Ghana et Hissein Habré du Tchad. Pour ne citer que ceux-là.
Ali Souleymane