Le creusage de la tranchée n’a pas fini de faire couler d’encre. Le secrétaire national du parti Un Nouveau Jour, Dr Nasra Djimasngar demande aux autorités du Conseil Militaire de Transition l’arrêt du creusage de la tranchée autour de la ville de N’Djamena, capitale tchadienne. Si rien n’est fait, il va appeler tous les riverains victimes de la tranchée de s’inscrire sur une liste ouverte par son parti afin de poursuivre l’État. Reportage.
La reprise du creusage de la tranchée réalisée en 2008 par l’ancien président Idriss Deby Itno pour empêcher les rebelles de l’époque d’entrer à N’Djamena met mal à l’aise beaucoup d’hommes politiques et certains membres de la société civile. Le secrétaire national du Parti Un Nouveau Jour (opposition), Dr Nasra Djimasngar ne passe pas par le dos de la cuillère pour exprimer son inquiétude. Il estime qu’en creusant ce trou, l’on n’a pas tenu compte des habitants aux abords, le sort de ceux qui habitent après la tranchée n’a pas aussi été pris en compte par les autorités de la transition. Selon lui, tous les travailleurs qui vivent au-delà de la tranchée auront du mal à rejoindre leurs lieux de travail à l’heure. Il souligne que beaucoup d’habitations aux abords vont s’écrouler par l’effet de l’érosion dès les saisons de la pluie prochaines, sans garantie de dédommagement de l’État. L’opposant s’inquiète aussi que les agresseurs se cachent dans ce vaste et profond trou pour commettre leurs forfaits. « 13 ans après, le CMT vient de réveiller ce cauchemar dans l’esprit des Tchadiens alors même qu’ils se préparent à aller au DNI pour enterrer définitivement la hache de guerre. Non seulement cet ouvrage en réalisation plonge le peuple dans une psychose, mais il cause de dommages incalculables à la population riveraine », explique Nasra Djimasngar. Le SG du parti Un Nouveau Jour exige l’arrêt immédiat de la réalisation de cet ouvrage et le remblayage de la partie déjà ouverte.
S’il n’est pas entendu, l’homme politique menace d’appeler les populations riveraines de ce trou de s’inscrire sur une liste constituée par son parti afin d’intenter une plainte contre les auteurs de cet ouvrage. Il affirme par ailleurs qu’un pôle d’avocats sera constitué pour envisager d’autres actions n’est pas à exclure après concertation avec les résidents.
Depuis plusieurs semaines, la population de N’Djamena assiste au creusage de la tranchée autour de la capitale. Pour rappel, cette tranchée fut ouverte par le président Idriss Deby Itno au lendemain des évènements du 2 février 2008 marquant l’entrée des rebelles dans la capitale. Lorsque la tranchée était creusée en 2008, peu de gens s’étaient installés au-delà. De nos jours, avec le phénomène de l’étalement urbain, la ville s’est étendue à des kilomètres au-delà de la tranchée.
Jules Doukoundjé
Le secrétaire général de la confédération libre des travailleurs du Tchad (CLTT) et membre du Conseil National de Transition (CNT), Brahim Ben Said tente de décortiquer l’importance du pacte social triennal signé entre le gouvernement et les organisations syndicales des travailleurs du Tchad. Il estime que c’est dans l’intérêt supérieur des travailleurs et du pays que cet acte a été signé. Reportage.
Pour apaiser le climat social délétère qui s’est installé depuis quelques années, le gouvernement et les organisations syndicales des travailleurs tchadiens ont signé au début de ce mois un pacte social triennal. La signature de ce pacte tant attendu par les deux parties va contribuer, estiment les observateurs, à l’instauration et à la consolidation d’un climat social apaisé, propice à amélioration significative des conditions de travail et de vie des travailleurs. Pour le secrétaire général (SG) de la confédération libre des travailleurs du Tchad (CLTT), Brahim Ben Said, ce pacte permettra à certains contractuels de l’État d’entrer dans leurs droits. Pour lui, les organisations syndicales souhaitent que le gouvernement paie les cotisations à la caisse nationale de la prévoyance sociale (CNPS) pour que les contractuels puissent bénéficier des droits sociaux et des allocations familiales pour ceux qui sont partis à la retraite. Il révèle que c’est depuis plus de 40 ans que l’État ne verse pas ses cotisations à la CNPS et que beaucoup de contractuels retraités sont morts sans avoir leurs pensions de retraite. Brahim Ben Said souligne que dans l’accord, il est prévu d’harmoniser le salaire des fonctionnaires.
Au sujet des textes qui régissent la sécurité sociale au Tchad, le syndicaliste précise que ces textes sont vétustes et le système de calcul à la CNPS et la caisse nationale des retraités du Tchad (CNRT) sont dépassés et ne répondent plus aux normes. Il explique qu’avant, le système de calcul se faisait par point, mais de nos jours cela se fait par pourcentage. « Aujourd’hui la fonction publique paie mal les retraités. À la CNPS les taux de cotisations ont été augmentés de 3 à 8%, mais la pension n’a pas bougé. Nous avons demandé que la pension soit revalorisée », dit le SG de la CLTT. Il affirme que le SMIC était avant de 5000 F CFA quand les gens partaient à la retraite, il est à 60.000 F CFA de nos jours, il appelle à la révision du système de calcul de la CNPS et de la CNRT. Selon lui, avant le fonctionnaire tchadien n’était très gradé, mais de nos jours, on a des gens qui ont de gros diplômes. Pour ce fait, les organisations syndicales souhaitent qu’on révise la loi portant sur le statut de la fonction publique. M. Brahim Ben Said affirme que les organisations syndicales demandent, surtout concernant l’enseignement supérieur, que le gouvernement suive l’exemple de la CEMEAC pour revaloriser les salaires.
Concertant la garantie de l’accord signé le 4 octobre dernier, le SG estime que pour la stabilité du pays, il faut que cet accord soit appliqué, dans l’intérêt général de tous pour un Tchad nouveau. « Pour un nouveau Tchad, il faut corriger les erreurs du passé, réparer l’injustice », ajoute-t-il. Il soutient que l’accord est bénéfique pour les deux parties, mais il insiste sur le fait qu’il faut mettre en place des mécanismes de suivi qui pour que l’accord soit respecté.
À propos des retraités qui menacent de descendre dans les rues de la capitale, le syndicaliste dit que les retraités ont des arriérés que l’État a prévu de payer en deux tranches, une partie en septembre dernier et une autre partie au début de l’année prochaine. Selon lui, le retraité tchadien végète dans la pauvreté, la pension de retraite est si maigre qu’il faut la revaloriser. Il propose qu’on paie les retraités mensuellement. Brahim Ben Said affirme que les cotisations qui sont retenues sur les salaires ne sont pas reversées à la CNRT, elles sont versées au trésor public.
Jules Doukoundjé
8,916 900 milliards de FCFA, c’est le montant du projet de budget de l’exercice 2021 du Conseil National de la Transition (CNT). Salaires, indemnités, frais de session, achat de véhicules, matériels bureautiques et informatiques, carburant y compris. Ce budget continu a suscité des réactions des acteurs politiques. Reportage.
M. Salibou Garba, ex-député et président national du parti, Alliance national pour la Démocratie (AND) affirme que le projet de budget du CNT n’est pas du tout une surprise. « Cela a toujours été la pratique. À ce que je sache, l’Assemblée Nationale (AN) sortante qui comptait plus de membres disposait déjà d’un budget 2021. Les seules dépenses d’installation ne peuvent pas justifier les montants révélés.», dit-il.
Salibou Garba rappelle que le journal Abba à travers ses articles a signalé les surfacturations, révélé un rapport interne d’exécution du budget de l’AN : « une clé USB à 396 000 frs, un ordinateur de bas de gamme à 1 500 000 frs, la construction du dos d’âne à l’entrée de l’AN à plus de 60 millions. Demandez les prix des travaux non indispensables de l’hémicycle, les coûts des miradors, etc. », rappelle-t-il. Le leader politique déclare qu’il faut se demander à combien ont été vendues les voitures de fonction à leurs utilisateurs, en ventes forcées. Il ajoute que, les frais de mission ont été détournés, refusés aux ayants droit. Le président du parti AND soutient que le personnel est recruté de façon ahurissante. « À moins de 200 unités à la 2e législature, nous sommes passés à plus de 1400 selon feu Président Idriss Déby, un personnel invisible, mais qui émarge chaque mois. La liste est longue, très longue », clame l’ancien parlementaire. Pour M Salibou Garba, ceux qui ont conçu et monté le Bureau du CNT savaient très bien ce qu’ils faisaient. Il affirme que c’est la poursuite du pillage à ciel ouvert des ressources de l’État. C’est le comble de l’insouciance, insiste-t-il.
Le président du parti Union National pour le Développement et le Renouveau (UNDR) M. Saleh Kebzabo abonde dans le même sens. Dans un tweet le 14 octobre 2021, l’ancien député écrit, « une véritable entreprise de pillage à ciel ouvert qui se met en place au CNT. La défunte AN a donc emporté tous les matériels roulants et de bureaux au point que le CNT doive tout racheter ? Un vrai scandale d’État en cours. »
Le président du parti socialiste sans frontière (PSF) de Yaya Dillo demande la dissolution complète du CNT. « Demain ils feront des marchés et détourneront les moyens de l’État. Ils achètent des voitures à 85 millions pendant que les gens meurent de faim », martèle-t-il.
D’après le président de l’AND Salibou Garba, au moins 4 membres du CNT n’ont pas fait acte de candidature, donc ils n’ont pas déposé de dossier. Selon lui, les militants FAR ont été harcelés pour déposer le dossier de Yorongar après la clôture du dépôt de dossier. « L’intéressé doit se demander ce qu’il fait dans cette galère. Une assemblée monochrome à souhait pour voter par acclamations. Adieu les débats contradictoires pour trouver des consensus durant toute période de transition », dit-il. Il estime que ceux qui ont pris le pouvoir par la force ignorent que le Tchad est en période de transition. Selon lui, ils se comportent en détenteurs légitimes du pouvoir, uniquement préoccupés à vider les caisses de l’État.
« Quitte de la transition inclusive, consensuelle et apaisée. Il revient à la communauté internationale qui est en charge de sa supervision de tirer la sonnette d’alarme en vue de recadrer et redresser cette transition », conclut Salibou Garba.
Moyalbaye Nadjasna
Dans un passé récent, la forêt de Walia constituait une ceinture verte pour la capitale tchadienne, N’Djamena. Aujourd’hui avec l’agrandissement de la ville, elle se vide peu à peu de ses arbres. Cause: certaines populations riveraines coupent clandestinement les arbres pour servir de bois de chauffe. Reportage.
9 h. Foret de Walia dans le 7e arrondissement de N’Djamena. Le soleil commence à être brûlant. Le mouvement humain est constant. Véhicule, motocyclistes et piétons se frayent chacun un passage au cœur de cette forêt entre les cimetières de Ngonba et de Toukra. Ils zigzaguent entre les cultures de riz, de sorgho, des jardins d’oseille, des sables stockés çà et là. Selon le chef de secteur forestier de Walia, la coupe des arbres est préoccupante. « Nous effectuons souvent de contrôle à l’intérieur comme au pourtour de la forêt, mais les gens sont terribles. Il arrive qu’on prenne des gens, mais la plupart des femmes avec des enfants au dos. Certaines personnes agissent tard dans la nuit, vraiment les gens ne sont pas conscients », dit-il.
Un voisin de la forêt sous couvert de l’anonymat affirme, « j’habite depuis 3 ans derrière la forêt. Les agents forestiers font souvent des tours de la forêt à motos. Pendant la nuit, on entend parfois de tirs dans la forêt pour dissuader les coupeurs des arbres ».
M Loumou Brazza Soulé, technicien forestier s’indigne de la situation. Pour faire l’historique, il rappelle que cette forêt existe depuis 1952. Il précise qu’elle prend sa source ici à Walia et s’étend jusqu’à la périphérie de Koundoul. Le technicien ajoute qu’avec l’agrandissement de la ville, elle rapetisse petit à petit, cédant la place aux habitations. M Loumou déplore le fait que les populations riveraines empêchent les arbres de vivre. Elles coupent clandestinement les arbres pour une utilisation personnelle. Pourtant, dit-il, l’arbre joue un rôle très important dans la vie de l’homme. D’après lui, l’arbre produit de l’oxygène, c’est un purificateur de l’air, une source de vie. « Les arbres génèrent de pluies, car ils émettent des molécules qui servent de germes qui finissent par former des gouttes d’eau qui tombe en pluie. Enfin, les arbres facilitent les relations humaines en offrant des lieux de rencontre et d’activité pour tous ». Pour lui, l’arbre joue beaucoup de rôle à la survie de l’Homme et il est indispensable de le protéger.
Les agents des eaux et forêts installés à un jet de pierre du Lycée de Walia patrouillent tous les jours dans le secteur. Mais cela n’empêche visiblement pas la coupe des arbres même tard dans la nuit. Le technicien forestier soutient que les bois récupérés par la patrouille sont envoyés dans les maisons d’arrêts et commissariats. Pour confirmer les propos du chef de secteur, M Loumou Brazza Soulé affirme que la plupart des personnes arrêtées pour coupe abusive des arbres sont effectivement les femmes. « Ce sont des femmes avec des bébés au dos qui coupent les arbres. Quand tu les prends, elles te disent qu’elles sont veuves avec des enfants. Comme c’est un cas social, on est obligé de les laisser partir», explique, M. Loumou l’air désemparé.
Autorisations d’exploitation véritables gangrènes
En plus de ces cas d’abattage des arbres, le technicien des eaux et forêts donne d’autres raisons. « La forêt est certes absorbée par la ville, mais les éleveurs nomades qui s’installent coupent aussi les arbres pour nourrir leur bétail. La Mairie aussi donne des autorisations à des tierces personnes pour exploiter l’espace de la forêt pour des fins personnelles. Tout cela contribue à la destruction de la forêt et ce n’est pas facile de la protéger à 100%. » Selon lui, ils sont à couteaux tirés avec la Mairie pour cesse de donner des autorisations d’exploitation à des individus.
Pour le technicien des eaux et forêts, ceux qui coupent les arbres abusivement sont envoyés devant les tribunaux afin de répondre de leurs actes conformément à la loi en vigueur. Seulement il regrette les autorisations communales pour les grillades dans ces espaces forestiers. Ces autorisations entravent malheureusement le travail des agents forestiers sur le terrain. Il propose aux autorités de mettre des grillages pour encercler la forêt. « C’est le seul moyen de protéger le reste de ces arbres. Même s’ils font de leur mieux pour protéger les arbres, il faut nécessairement clôturer ce secteur forestier de Walia ».
Kouladoum Mireille Modestine
Le gouverneur de la province du Mandoul, Mme Diamra Betolngar a réuni le 15 octobre dernier à Koumra, la capitale provinciale, les chefs traditionnels et coutumiers pour réfléchir sur les problèmes qui minent la province. Ils ont trouvé un consensus sur les modalités de réparations civiles en cas d’infractions graves. Mais ce consensus ne plaît pas à certains ressortissants et à la société civile qui qualifient la résolution de dia, contraire aux us et coutumes de la province. Reportage.
La province du Mandoul est l’une des provinces du sud où sévit depuis plusieurs années de conflits intercommunautaires qui empêchent le vivre ensemble et la cohabitation pacifique. Pour tenter de résoudre ce mal qui gangrène le Mandoul, la gouverneure, Mme Diamra Betolngar, en poste depuis juillet 2020, a réuni le 15 octobre dernier tous les chefs coutumiers et traditionnels pour trouver des solutions. La gouverneure et les chefs coutumiers et traditionnels ont trouvé un consensus sur les modalités de réparation civile en cas d’infractions graves, surtout sur le conflit agriculteur et éleveur qui fait couler du sang chaque année. Selon ce consensus, en cas d’homicide volontaire, les parents du mis en cause devront payer 1,5 million de F CFA avec avance de 200.000 F CFA pour organiser les obsèques, accident de circulation et autres infractions, 1 million avec avance. Le comité de recours est composé d’un imam, d’un prêtre, d’un pasteur et d’un représentant associatif.
Pour la gouverneure, c’est après une longue concertation avec les autorités traditionnelles et religieuses qu’ils ont trouvé ensemble bon de mettre en pratique ces mesures envoyées depuis N’Djamena. Selon elle, la raison principale qui a motivé leur décision commune est la réalité tchadienne. « Nous savons tous que dans notre pays, on condamne une personne au sud, mais elle se retrouve libre au nord ou à l’Est et vice versa. C’est pourquoi nous sommes convenus d’adopter des réparations à l’argent pour permettre aux familles de la victime d’organiser le deuil de leur parent tué. Ce n’est pas une affaire de dia ou quoi que ce soit », précise Mme Diamra Betolngar.
Prenant le contre-pied, un jeune de cette province qui s’exprime sous couvert de l’anonymat, rétorque que le complot a atteint un niveau alarmant, celui de sa formalisation officielle, après qu’il fut progressivement mis en place depuis des décennies. Selon lui, le Mandoul est officiellement soumis à des lois iniques qui font des habitants autochtones des sous-hommes et les chefs de cantons et villages contraints de signer ce pacte inique et inconstitutionnel.
La polémique autour de ce consensus considéré par certains intellectuels du pays, les ressortissants de la province et certains membres de la société civile a fait réagir un magistrat. À propos de la dia au Mandoul, un magistrat qui préfère garder l’anonymat, écrit en réponse à ceux qui tentent de justifier le consensus que l’allocation des réparations civiles relève de l’appréciation souveraine du juge. Selon lui, ce sont les personnes qui ont directement souffert du fait dommageable qui ont le droit de solliciter l’allocation des réparations civiles. Il précise par ailleurs qu’il n’appartient pas à un groupe d’individus de se substituer à elles, au nom de la réalité tchadienne pour fixer le montant de la « dia ».
Jules Doukoundjé
Le creusage de l’ancienne tranchée réalisée en 2008 par l’ancien président Idriss Deby Itno pour empêcher les rebelles d’entrer à N’Djamena inquiète la population riveraine. Depuis quelques semaines, les autorités de la transition ont repris les travaux de creusage de cette tranchée d’environ 8 kilomètres de longueur et 3 mètres de profondeur. Elle fait peur aux populations riveraines, surtout celles du quartier Boutalbagara, dans le 7e arrondissement au sud de la capitale. Reportage.
De Mara, aux environs de la raffinerie de Djarmaya, au contournement du palais de la démocratie, à Gassi dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena, le creusage de la tranchée crée la psychose aux populations environnantes. En 2008, le président Idriss Deby Itno réalisait ce gigantesque trou pour stopper l’avancée des rebelles qui avaient failli renverser son régime. Mais, cette fois, la transition militaire conduite depuis 6 mois par son fils, le général Mahamat Deby Itno, le creusage de cette tranchée crée de moult réflexions.
Certains intellectuels, membres de la société civile et opposition qualifient ce vaste creusage de va-t’en guerre, alors que le pays est dans une période de transition qui appelle à un dialogue national de toutes les forces vives de la nation. À Boutalbagara, quartier situé dans le 7e arrondissement, au sud de la capitale, les habitants se souviennent encore de périodes difficiles de 2008 quand le gouvernement de l’époque estimait que le creusage de cette tranchée était salutaire pour empêcher une éventuelle avancée rebelle. Pour Noubadoum, Djimtibaye, habitant et riverain de cette tranchée, affirme que les populations démunies ne pourraient pas, en cas d’évacuation sanitaire d’urgence d’enjamber la tranchée qui divise le quartier en 2. Pour lui, les personnes âgées et malades qui ne peuvent pas se tenir debout et qui résident de l’autre côté de la tranchée, pourraient mourir à cause de ce trou qui rend difficile la circulation des voisins. « Ce qu’ils font n’est pas bénéfique pour les habitants qui peinent à se déplacer et à joindre les deux bouts », regrette ce père de famille. Pour cet homme, les populations ne sont même pas informées du creusage de la tranchée. De l’avis de Noubadoum Djimtibaye, même si les autorités ont instruit l’entreprise qui réalise cette œuvre de ne pas casser les maisons, le creusage de la tranchée divise les familles.
Abondant dans la même veine, une jeune femme, mère de 3 enfants expriment son indignation vis-à-vis du Conseil militaire de la transition (CMT). Mme Lartab Marie-Claire, assise sous un arbre devant son petit commerce confie que depuis que la tranchée est passée devant sa maison, elle peine à fermer les yeux la nuit. Elle s’inquiète pour ses enfants qui vont dans une école élémentaire située de l’autre côté de la tranchée. « Nous avons inscrit nos enfants dans une école qui est désormais située de l’autre côté de la tranchée. Il faut que les autorités nous disent comment faire pour amener nos enfants à l’école », s’interroge la jeune dame. Pour elle, l’État ne se préoccupe pas de l’éducation de leurs enfants. Mme Lartab Marie-Claire souhaite que les autorités mesurent leurs actes avant de les matérialiser.
Des nombreux de résidents voisins de la tranchée estiment que les milliards que l’État dépense inutilement pour creuser cette tranchée auraient suffi de faire des adductions d’eau potable et d’aménager les rues pour permettre aux citoyens de vaquer plus aisément à leurs occupations.
Jules Doukoundjé
Les fidèles musulmans de la confrérie Tidjaniya du Tchad commémorent depuis 17 octobre la Aïd al Maouloud. Une fête qui célèbre l’anniversaire de la naissance du Mohammed de l’islam. La plupart des musulmans de la Tidjaniya vont à la mosquée, prient, apprennent la vie et les enseignements du Prophète et récitent les poèmes et les chants religieux. Reportage.
Selon Cheik Abdadayim, SG du Conseil Supérieur des Affaires islamiques du Tchad, le Maouloud c’est la commémoration de la naissance du prophète Mohammed. Il affirme que c’est une célébration qui a lieu le 12 du mois « Rabi Al Awal », vu comme le mois de la naissance du prophète. « C’est une occasion de joie de reconnaissance et de remerciement pour les musulmans de se rappeler l’histoire du prophète et d’enseigner sa tradition, réciter le Saint Coran », explique le SG du CSAI.
Cheik Abdadayim, précise que Maouloud est un souvenir, et le prophète est un modèle pour tout musulman. « Le musulman doit, dans son comportement de tous les jours, respecter ce que le prophète a dit, ce qu’il a fait. C’est une façon de louer Allah, du fait qu’il nous a donné un prophète et aussi du fait qu’il a envoyé l’islam comme dernière version de sa volonté sur la terre », dit-il.
Pour le Chef de garage Gambo, Maouloud est un moment de reconnaissance, et de souvenir. « Ce n’est pas une fête à proprement parler, parce que les fêtes en islam sont au nombre de deux : la fête de Ramadan et celle de Tabaski. Il n’y a pas un contenu défini où les gens doivent respecter des prescriptions. C’est à chaque communauté de s’organiser par des conférences, des prières, des séances de lecture du coran », dit le fidèle.
Mouloud est célébrée la nuit par tout acte de bien que ça soit dans le sens spirituel ou social. Il y a des gens qui vont préparer à manger, comme d’autres vont rendre visite à leurs parents, où se retrouver à la mosquée pour la veillée. Au cours de cette veillée, il y a des prêches qui sont faits sur la vie du prophète, des rappels sur les hadiths (tout ce qui est attribué au prophète comme parole, acte ou approbation).
Ce 18 octobre, les musulmans vaquent normalement à leurs activités. Sauf les travailleurs qui sont à la maison suite à la journée déclarée fériée et chômée payée par le ministre tchadien de la Fonction publique.
Moyalbaye Nadjasna
La présidente du Conseil Administratif (CA) du Réseau national des personnes vivant avec le VIH/SIDA au Tchad (RNPVVIH), Mme Naikode Eveline plaide pour la lutte contre la stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec le VIH/Sida, sans cela, il serait difficile de mener à bien la lutte contre le Sida. Elle a fait cette déclaration au cours d’une dédicace du livre intitulé « Contre vents et marées » de Dinguest Zenaba qui parle d’une prostituée du marché Mokolo de N’Djamena infectée par le VIH. Témoignage.
L’intervention de la présidente du conseil d’administration (PCA) du réseau national des personnes vivant avec le VIH/SIDA au Tchad (RNPVVIH) Mme Naikode Eveline à la cérémonie de la dédicace du livre de la romancière tchadienne, Dinguest Zenaba, a ému toute la salle. Cette dame a témoigné sur la stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec les VIH/SIDA. Elle a pris son propre exemple pour expliquer comment il est possible de vivre avec cette maladie qui a endeuillé et continue d’endeuiller le Tchad et toute l’Afrique au sud du Sahara. « J’ai découvert ma sérologie en 2002. J’ai décidé moi-même de faire dépiste sous le conseil de mon employeur, l’ONG médecin sans frontière qui a demandé entre temps à tous ses employés qui veulent bien se faire dépister. Et au cas où le résultat s’avérait positif, elle prendrait en charge à 75 pour les frais médicaux », explique dans une voix douce la PCA du RNPVVIH. Mme Naikode Eveline qui était écoutée avec beaucoup d’émotion indique qu’elle avait en 2002 obligé son mari pour qu’ils aillent faire le test ensemble. Elle confie que son mari ne pouvait attendre les résultats pendant une semaine et était retourné à son poste à Pala dans le sud. Elle était chargée de récupérer les résultats qui étaient malheureusement positifs. Selon elle, son mari n’a pu résister à la mauvaise nouvelle. « J’ai prié pour que le seigneur me donne la force d’accepter le résultat au cas où c’est positif. Je soupçonnais mon mari depuis 2 ans », souligne-t-elle. La PCA des personnes vivant avec le VIH a par ailleurs noté que quand le médecin lui avait remis le résultat, c’était elle-même qui l’avait consolé.
Après avoir pris les résultats, elle s’était rendue à Pala pour remettre à son mari qui s’était écroulé en demandant pardon à son épouse. « J’ai accepté son statut de séropositif, en suite 2 ans plus tard j’ai perdu mes deux enfants et cela m’a tellement touché. J’ai décidé de créer une association pour lutter contre le VIH. J’ai dit aussi que le SIDA ne passera plus jamais par moi », se confie-t-elle. Son association a adhéré au RNPVVIH en 2004 et depuis ce temps, elle n’a pas cessé de mener le combat contre le VIH/SIDA.
Les PVVIH ont besoin de soutien
Pour lutter efficacement, il faut une acceptation de soi et de la famille. Mais au Tchad comme partout en Afrique au sud du Sahara, les PVVIH souffrent de la stigmatisation et de la discrimination. La PCA affirme que la discrimination est le fait de fixer ou de catégoriser quelqu’un à cause de son statut de sérologie. Selon elle, cette discrimination constitue un frein majeur dans la réduction du taux de prévalence du VIH au Tchad. A son avis, c’est une atteinte aux droits des PVVIH. Pour Mme Naikode Eveline, les PVVIH subissent tous les jours la discrimination et la stigmatisation et s’auto stigmatisent eux-mêmes. Pour elle, ce phénomène social commence en milieu familial, mais aussi dans le milieu de la santé. La responsable des PVVIH révèle que les résultats d’étude de l’indice sur la stigmatisation effectuée en 2013 montrent un taux plus élevé de stigmatisation en milieu social et familial. 56% des PVVIH consultées ont déclaré avoir fait l’objet de stigmatisation de la part de leur entourage, dont 59% des femmes et 48% des hommes. En ce qui concerne l’accès au travail, au service de santé et à l’éducation, elle souligne que 22,8% déclarent avoir au moins une fois perdu un emploi et leur source de revenus à cause de leur statut de sérologie.
Selon Mme Naikode, les services de planification familiale ont été refusés à 4% de femmes séropositives à cause de leur statut et 19% des PVVIH déclarent obligé de changer de résidence ou être incapable de payer leur loyer. Elle précise que cette situation frappe plus de femmes avec 20 % contre seulement 17 % d’hommes.
Toutefois, elle reconnaît que les actions menées par le gouvernement et ses partenaires ont donné de l’espoir. Elle souhaite que les nouvelles actions doivent viser à sensibiliser les familles et la société afin d’aider les personnes vivant avec la maladie plutôt que de les stigmatiser.
Jules Doukoundjé