On les connait à travers leurs émouvantes paroles et leur ton métallique. Samouraï est un groupe né des tripes des étudiants qui ont voulu dire stop aux calvaires de la jeunesse. Panik, Prophète et Cyclone sont les gladiateurs du rap tchadien. A la veille du lancement de leur album, Ialtchad Presse est allé à leur rencontre, découvrez ce trio sans façon.
Ialtchad Presse : Comment vous introduire aux lecteurs du Magazine ?
Samouraï : Nous sommes le Possy Samouraï avec trois (3) guerriers qui sont : Panik l’enfant seul, Prophète Dachette et Cyclone la Révolution.
Ialtchad Presse : Quand et comment est né le groupe samouraï ?
Samouraï : Samouraï est un groupe crée le 09 mai 1999 par des étudiants. En créant Samouraï, nous ne voudrons pas seulement exprimer notre ras-le-bol face aux multiples problèmes qui entravent le plein épanouissement de la jeunesse tchadienne, notamment le chômage, la précarité, mais nous voulons partager nos idées et nos œuvres avec ces milliers de jeunes martyrisés. Nos textes s’adressent à des jeunes sans distinction d’ethnie ou de religion. Nous sommes des « conscientisateurs ». Voilà notre raison d’être.
Ialtchad Presse : Parlant de musique quel genre prêchez-vous ?
Samouraï : Nous faisons du Rap, du real Hip-hop engagé qui sort de nos entrailles. Nous croyons que c’est le seul moyen ou plutôt le moyen le plus civilisé pour décrier les situations difficiles comme le chômage, la misère que nos gouvernants refusent ou ne parviennent pas à gérer.
Ialtchad Presse : Quelles sont vos réalisations à ce jour ?
Samouraï : Faire de la musique au Tchad n’est pas du tout facile à cause de la situation socioéconomique du bled. Les sponsors ne répondent pas, les financements sont quasi inexistants. Cependant, on s’est démenés à sortir un album intitulé « Lettre ouverte ». Il y a d’ailleurs un titre qu’on a envoyé pour participer au Prix Découvertes RFI.
Ialtchad Presse : Récemment vous étiez au Gabon, c’était dans quel cadre ?
Samouraï : Nous étions au Gabon dans le cadre du festival Gabao Hip hop. Le Festival Gabao est devenu aujourd’hui incontestablement la principale plate-forme de promotion et de diffusion des musiques et cultures urbaines en Afrique Centrale. La compétition est sans égale, les artistes sont venus d’un peu partout et l’organisation a été un succès. Dommage qu’on n’a pas remporté le prix du meilleur groupe rap de la sous-région.
Ialtchad Presse : Comment se porte la musique au Tchad?
Samouraï : La musique au bled c’est de la merde, c’est comme le bled lui – même qui va clopin-clopant. On ne tient qu’à deux fils au maximum : la persévérance et l’espérance. Quoique difficile, nous ne démissionnons pas, nous irons montrer au reste du monde que la musique tchadienne existe et qu’elle va de jour en jour mieux.
Ialtchad Presse : Que peut-on savoir de vos projets?
Samouraï : Beaucoup de choses en réalité. Cependant, pour l’immédiat, nous nous attelons à lancer au courant du mois de novembre, notre album et faire sa promotion. C’est un album de 12 titres intitulé « Lettre ouverte ». Ensuite nous envisageons aller en tournée dans les provinces et puis dans les pays voisins notamment au Cameroun et en Centrafrique Dieu voulant.
Ialtchad Presse : Une dédicace à vos fans ?
Samouraï : Big up à tous nos fans, à ceux et celles qui nous supportent malgré tout. Samouraï vous dit Respect ! C’est grâce à eux que nous sommes devenus ce que nous sommes, qu’ils se rassurent qu’on leurs donnera toujours le meilleur de nous-même pour mériter encore, un peu plus leurs supports.
Ialtchad Presse : Un autographe à Ialtchad Magazine ?
Samouraï : (Rire !) Vous ne manquez pas d’humour. Ialtchad comme le nom l’indique est subtilement un appel à l’unité autour de l’Etat nation, parce que tous, nous sommes les fils d’une seule nation le Tchad, notre patrie aimée. Alors Ialtchad, (fils du Tchad) debout et à l’ouvrage, l’avenir est à vous. Ialtchad c’est nous ! C’est vous ! C’est tous les tchadiens ! Nous vous couronnons avec des encouragements massifs. Croyez-nous, dans la petite liste des exceptionnels tchadiens qui ont fait quelque chose pour leur pays, votre place est assurée. A vous aussi respects.
Yasmine Kaman
L’ensemble musical le plus en vue et le mieux structuré du Tchad Soubyanna Music représenté par son Directeur Artistique dans une interview exclusive accordée à Ialtchad Presse, lève le voile sur la raison de leur scission avec leur ancien groupe Safi Music, et retrace la genèse de Soubyanna Music. Il énumère par ailleurs les entraves de l’orchestre et leur perspective d’avenir. En outre, Sa Majesté Caman Seïd n’est pas allé du dos de cuillère pour tirer le rideau sur ce qu’il qualifie de pseudo conflit qui opposerait Soubyanna Music à Placide Marouf alias Cidson Obama… Entretien
Ialtchad Presse : Quand et comment a été créé le groupe Soubyanna Music. Expliquez-nous les raisons ?
Caman Seïd : La date de la création de Soubyanna Music coïncide avec la date de la proclamation de l’indépendance du Tchad. C’est le 11 août 2002. Les objectifs qu’on s’est fixés dans notre groupe d’avant c’est-à-dire Safi Music étaient foulés aux pieds par nos leaders et on a préféré créer notre propre groupe et continuer notre aventure musicale.
Ialtchad Presse : Quelle est la raison fondamentale de votre scission avec votre ancien groupe Safi Music ?
Caman Seïd : Ce qui importe pour nous présentement, c’est la projection vers le futur. L’avenir de Soubyanna Music, l’avenir de notre carrière musicale sont entre autre nos soucis majeurs. Le showbiz évolue au Tchad. L’industrie de la musique s’émancipe de plus en plus dans notre capitale. Au-delà des concerts qu’on donne les week-ends ; Soubyanna Music est une institution, une école qui a pour leitmotiv la promotion de la musique du terroir. Vous conviendrez avec moi que la problématique de l’originalité de la musique tchadienne est un sujet des débats dans le milieu culturel actuellement. Soubyanna Music est en perpétuel création pour apporter sa pierre à l’édifice afin d’assoir un genre musical authentique aimé et accepté des mélomanes et du public. Soubyanna Music se mets au-dessus de certains débats stériles, de certaines considérations à l’époque de l’âge de la pierre taillée pour donner plus de visibilité à la musique tchadienne. Le temps a réparé les frustrations du passé de Safi Music ; on a muri. Maintenant que la page est tournée, parlons du présent et du futur. Il y a toujours eut des scissions dans des groupes, ce n’est pas un phénomène nouveau et extra. Considérez les choses comme telles et mettons cela dans les calendes grecques.
Ialtchad Presse : Il y a une sorte de contraste, une concurrence pas du tout heureuse entre Soubyanna Music et un Ex membre du groupe, Marouf Placide alias Cidson Obama. Pourquoi cette tension larvée ?
Caman Seïd : Parlez plutôt de pseudo conflit parce qu’en réalité, il n’y a pas de conflit entre nous. En plus, de quelle concurrence parlez-vous, et sur quel plan d’ailleurs ? (ironisant) je ne savais pas que vous avez de la peine à distinguer le jour et la nuit. On ne compare jamais une institution à un individu. Ce sont les médias et certains animateurs des radios de proximité et une frange de la population qui ont créé ce pseudo conflit. Il a voulu voler de ses propres ailes, c’est plutôt encourageant. Cependant, je ne tolérerais plus qu’on parle de manière subjective de Soubyanna Music. On n’aime pas construire dans ce pays. On aime plutôt détruire. C’est dommage. Le Tchad est immense, que celui qui veut voler de ses propres ailes, n’a qu’à voler mais je conjure qu’on laisse tranquille Soubyanna Music.
Ialtchad Presse : Pourquoi n’appelez-vous pas le chat par son nom ?
Caman Seïd : Je ne veux point faire de la publicité de quelqu’un. Pourquoi Soubyanna Music doit le caresser dans le sens du poil. Nous sommes des intellectuels, des personnes réfléchies, cadres de Soubyanna Music raison pour laquelle nous ne voudrons pas nous prêter à certains jeux futiles. Cependant, à un moment donné, il faut taper des points sur la table pour faire taire certains énergumènes qui tiennent des propos incongrus à l’endroit de Soubyanna Music. Nous assumons notre responsabilité et l’avenir dira qui a raison.
Ialtchad Presse : Qu’est-ce que Soubyanna Music fait de concret pour la promotion de la musique tchadienne ?
Caman Seïd : Soubyanna Music est une école. Nous avons une dizaine de jeunes qui ont intégré le groupe sans toucher auparavant un instrument musical. Maintenant, chacun d’eux excelle dans son instrument de prédilection. Nous, les cadres, essayons de leur transmettre les connaissances que nous avons acquises tout le long de notre parcours musical. Nous avons un cadre culturel ouvert et accessible à tous les autres artistes pour leur spectacle. Nous comptons enregistrer notre troisième album. À cet effet, nous allons inviter quelques artistes musiciens nationaux en featuring avec nous. Ceci, pour encourager le brassage et l’inter relation entre nous. Nous avons aussi contacté des musiciens internationaux de renom pour entrer au studio avec nous et le contact est établi.
Ialtchad Presse : Ne trouvez-vous pas très monotone vos prestations tous les week-ends dans votre royaume culturel ?
Caman Seïd : Vous empêchez vous de boire de l’eau plate pour étancher votre soif ? « Non » me répondrez-vous surement. Eh! Ben, les fans et supporters de Soubyanna Music ont toujours soif de nous. Cette sympathie et attachement inconditionnel de nos fans et supporters méritent des réponses. Cette réponse, c’est jouer pour eux. Nos fans aiment ce qu’on fait, la preuve, ils sont présents tous les week-ends à nos concerts avec le même enthousiasme. Je ne peux vous décrire cette alchimie, cette ambiance qui prévaut dans nos concerts. Nous formons une grande famille, la communion est extraordinaire entre nous. À N’Djamena, il manque des cadres et structures de divertissement pour que les gens viennent se relaxer pendant les weekends. Ne soyez pas surpris, si je vous dis que nos supporters nous suivent à Sarh, Moundou, Abéché pour suivre nos concerts. C’est notre humilité et professionnalisme qui nous créditent ce capital de sympathie. On parle de monotonie lorsqu’une activité devient chiante. Or, nous, même si on joue de lundi à lundi, nos supporters répondrons toujours présents et nombreux.
Ialtchad Presse : Vous avez deux albums (Eternel et Se souvenir…) sur le marché discographique, vous avez votre cadre (Royaume Culturel) pour vos spectacles. Vous vous estimez satisfaits ?
Caman Seïd : La construction de notre cadre pour nos productions est certes un pas de géant quand on sait que la situation socioéconomique des artistes musiciens tchadiens est peu reluisante. Cependant, l’enregistrement des deux albums reste pour nous un chantier à peine entamé. Nous progressons lentement mais très surement. Ces réalisations sont loin d’être une fin en soi.
Ialtchad Presse : Vous êtes l’un des groupes le mieux structuré au Tchad jouissant d’une autonomie financière relative. Comment gérez-vous ce statut et cette image ?
Caman Seïd : Donnez à César ce qui est à César. Ne lésinez pas sur les mots. Soubyanna Music est actuellement et, reste jusqu’à preuve du contraire, le meilleur groupe musical du Tchad. Nous avons une structure qui est l’épine dorsale de l’Association culturelle de Soubyanna Music. Nous avons le président avec ses deux vices, un manager, un chargé de communication, des conseillers. Côté artistique, nous avons le chef d’orchestre, le directeur artistique, des chargés de matériels et de discipline, un leader des jeunes etc. lorsqu’une structure s’organise bien, elle prospère. Mais cela n’explique pas que Soubyanna Music roule sur l’or. Nous avons énormément de difficultés d’ordre matériel et financier mais avec la grâce de Dieu et le soutien de nos supporters nous tenons encore la barque. On s’organise bien et c’est cela la force de Soubyanna Music.
Ialtchad Presse : Voilà un an que Talino Manu est mort. Vous qui l’avez côtoyé des années durant, quel sentiment vous anime à cet effet ?
Caman Seïd : Talino Manu reste pour nous sur le plan humain un grand frère, sur le plan artistique une icône, un leader incontesté. L’artiste qu’il est, a laissé un grand vide à combler dans la famille des artistes. J’éprouve une joie immense en voyant Toumaï Star Accadémy pérenniser l’héritage artistique de Talino Manu. Je crois qu’on doit soutenir ce groupe. Repose en paix MANU ; c’est le moins qu’on puisse dire.
Ialtchad Presse : Quels sont les projets avenir de Soubyanna Music ?
Caman Seïd : Bientôt, vous aurez sur vos téléphones portables et sur les écrans de votre téléviseur deux clips inédits et en exclusivités de Soubyanna Music pour annoncer l’album de nos clips. Le public réclame depuis longtemps et nous allons répondre à leur requête parce que le public compte beaucoup pour nous. Nous fignolons la dixième année d’existence de Soubyanna Music que nous allons fêter à N’Djamena, Moundou et Abéché. Voilà pour le moment le moins qu’on puisse vous dire sur nos projets avenir.
Ialtchad Presse : Votre dernier mot …
Caman Seïd : « Le crapaud a beau coasser et se gonfler, il n’atteindra jamais la taille de l’éléphant ». J’adore cette maxime ivoirienne qui met en relief un batracien et un pachyderme. C’est plein d’enseignement. Et pour finir, permettez que je félicite votre Magazine pour cette importance qu’il accorde à la culture tchadienne en consacrant une place de choix aux artistes musiciens. Ialtchad Presse, l’appellation est subtile et perspicace. Longue vie à vous.
Interview réalisée par Dingamnaïel Kaldé Lwanga
Ialtchad Presse : Belle, rieuse avec un style particulier, comment peut-on mieux vous présenter aux lecteurs de Ialtchad Presse ?
Audrey Lynda Shey : Battante chanteuse, optimiste, toujours à l’écoute des autres. Ambassadrice itinérante de «Sos village d’enfant ». Voilà un peu une idée de moi.
Ialtchad Presse : À quand remonte votre révélation pour la musique ?
Audrey Lynda Shey : J’ai eu la chance d’être née dans une famille des artistes. A neuf ans je participais déjà à la chorale pépinière de la paroisse du Sacré-Cœur.
Ialtchad Presse : Être artiste pour une femme au Tchad n’est pas donné, l’avouez-vous ?
Audrey Lynda Shey : Oui, je suis la première fille à sortir un album de la musique contemporaine et j’avoue que c’était du pain sur la planche. Avec ma tête rasée derrière l’album et dans mes premiers clips, c’était du jamais vu. Pour certains c’était la prostitution incarnée. Je recevais de menaces de tous genres. Mais avec le temps et grâce à ma persévérante communication, la compréhension a fait jour. Les thèmes que j’aborde dans mes chansons y sont pour beaucoup de choses. Aujourd’hui j’ai que des fans et j’en suis fière.
Ialtchad Presse : Définissez-nous votre musique ?
Audrey Lynda Shey : Je ne veux pas trop donner de l’étiquette à ce que je fais. On y trouve du tout (rap, soul, ragga, reggae, techno, etc.). C’est en quelque sorte de la World musique. Je fais du moderne avec toujours en toile de fond le traditionnel pour que ceux qui m’écoutent s’y retrouvent.
Ialtchad Presse : Vos réalisations à ce jour ?
Audrey Lynda Shey : Un premier album auto production “Et les gosses ?” qui est un plaidoyer pour les enfants de la rue sortie en Août 2005. Ce qui m’a permis d’être Ambassadrice de « SOS village d’enfants ». En 2007, ma tournée nationale et mon concert à Paris ont été un grand succès.
Ialtchad Presse : Des projets, Audrey?
Audrey Lynda Shey : Oui, sortir mon deuxième Album puis faire une tournée internationale. Je cherche à créer un centre d’accueil et de formation pour les enfants de la rue. Aussi, j’ai deux documentaires audiovisuels à réaliser. L’un porte sur le paludisme chez la couche la plus vulnérable de la société, les femmes enceintes et les enfants. La seconde porte sur les mineurs infectés par le VIH.
Ialtchad Presse : Vivez-vous de votre art ?
Audrey Lynda Shey : C’est vrai que dans ce pays on ne vit vraiment pas de son art, mais moi j’en profite, je l’avoue. Surtout il faut savoir attacher plusieurs cordes et au cas où elles se rompent, il en restera au moins une qui vous mènera au bout. Je suis aussi hôtesse de l’air.
Ialtchad Presse : Un message pour vos fans ?
Audrey Lynda Shey : Rêvez, rêvez et encore rêvez. Soyez optimistes, croyez en vos rêves. Ne perdez jamais l’espoir, et aussi un sourire à chaque fois qu’il le faut pour garder bonne mine.
Yasmine Kaman
Guy Djikoloum connu sur le nom de Sultan est un de nos rares confirmés artistes. Talentueux rappeur, Sultan n’a pas tardé à comprendre que le Rap est un vecteur de conscientisation par excellence. Avec ses paroles revendiquées, Sultan s’impose comme l’ambassadeur par excellence de la jeunesse. A vous de le découvrir à travers ces quelques lignes.
Ialtchad Presse : Bonjour Guy ! Présentez-vous à nos lecteurs ?
Sultan : Je suis sultan Rappeur Tchadien, mon nom à l’état civil Djikolom Guy.
Ialtchad Presse : Pour ceux qui ne connaissent pas ton histoire, comment as-tu commencé à faire de la musique ?
Sultan : J’ai commencé la musique très jeune. D’abord j’ai commencé par les play-back, et plus tard en classe de 6e j’ai commencé à écrie mes chansons. J’ai intégré le groupe Komplyce en 1994 et j’ai fait ma première scène la même année au CCF de N’djamena. Voilà c’est partie pour l’aventure.
Ialtchad Presse : Sultan en solo et en même temps leader du groupe Otentic, faites nous une brève rétrospective du parcours ?
Sultan : Oui ! C’est qu’on était un groupe de cinq personnes au départ. En 2003, on part pour Ouaga ou on a fait l’Album « Wakitt-Tama » qui est notre 3e album en 2006 pour des raisons familiale quelque éléments du groupes on quitté le navire, du coup je me suis retrouvé seul et il fallait que je m’assume. Voila pourquoi je me suis retrouvé en solo et engendrer l’Album « Ikun » dont le titre enfant soldat est sur toutes les lèvres.
Ialtchad Presse : Quand on parle de la musique tchadienne vous vous attendez à quel genre de sonorité ? Est-ce celle faite par tout tchadien ou seulement celle faite sur des percussions du terroir ?
Sultan : Je ne connais pas de frontière à la musique. Il appartient à chaque artiste de valoriser les rythmes et sonorités de son terroir pour apporter une originalité à sa création. Le Tchad est un pays très riche en sonorités musicales et pour partager cette richesse avec le reste du monde, il va falloir observer un certain nombre de règles de la musique et du showbiz.
Ialtchad Presse : Ce n’est pas à démontrer, la musique tchadienne a toujours eu des soucis pour s’exporter. Votre opinion ?
Sultan : Oui! C’est vrai. Cependant si la musique tchadienne peine à s’exporter c’est parce qu’il y a un manque cruel d’infrastructures discographiques comme les maisons de disque et de distribution, des tourneurs de spectacle, etc. Sinon notre musique a fait ses preuves, elle est bien apprécier à l’étranger.
Ialtchad Presse : Quel regard portez-vous sur la place qu’occupe la musique au Tchad ?
Sultan : Ca dépend. Si c’est auprès des tchadiens, la musique occupe une place très importante car à travers nos œuvres nous interpellons les gens à une prise de conscience collective sur les phénomènes que nous vivons au quotidien. Et ça, les tchadiens l’ont bien compris. L’artiste est le miroir de la société. Cela dit, il reste beaucoup à faire du coté du gouvernement. Il nous faut une vraie politique culturelle et des investissements dans les infrastructures pour la promotion de la culture en général.
Ialtchad Presse : Sultan comme Ministre de la Culture, quelles seront vos priorités ?
Sultan : Comme ministre de la culture mes priorités seront de valoriser l’art tchadien et faire tout pour que les artistes tchadiens aient un statut. La contribution de l’art pour l’unité du peuple est immense. L’art on peut vendre l’image positive du Tchad à l’extérieur.
Ialtchad Presse : Vos projets, Sultan ?
Sultan : A court terme je produirai bientôt un jeune rappeur qui s’appelle Rayis ki. Ensuite je compte monter un festival pour décembre. A long terme c’est l’enregistrement de mon prochain album qui me mettra sur la route d’Afrique et d’Europe.
Ialtchad Presse : Une dédicace pour Ialtchad Presse ?
Sultan : Je n’ai jamais douté qu’un autre Tchad est possible et Ialtchad Presse fait partie des prémices de cet avènement. Continuez, la jeunesse vous sera reconnaissante. Merci de me rendre visite.
Interview réalisée par Dingamnaïel Kaldé Lwanga
MATANIA : « Le don de chanter nous viens de Dieu »
Sorties de la chorale de l’Eglise Apostolique de Moursal, les cinq filles qui constituent le groupe Matania, le seul groupe musical féminin du Tchad confie dans Ialtchad Magazine la genèse du groupe, ses ambitions et les difficultés qu’il rencontre.
Ialtchad Presse : Bonjour les filles ! Présentez votre groupe à nos lecteurs.
Mariam Matania : Nous sommes les filles de Matania. Nous étions sept filles au départ. Actuellement, nous sommes restés cinq. Je suis Mariam Toufdi, notre leader vocale ici à mes côtés s’appelle Ménodji Clarisse, il y a Florence Toufdi, Brigitte Mbatalbaye, et enfin Patricia Tébébaye.
Ialtchad Presse : Y a-t-il une signification particulière à « Matania » ?
Ménodji Matania : Matania est un nom tiré de la Bible qui signifie le don de l’Eternel en Hébreux. Nous sommes vous et moi le don de l’Eternel. Puisque nous sommes crées à l’image de Dieu, il faille que nous lui rendons en retour louange et adoration d’où la genèse même de notre groupe.
Ialtchad Presse : Depuis combien d’années existe Matania et comment a été créé le groupe ?
Ménodji Matania : Matania existe il y a de cela neuf ans déjà. C’est à l’Eglise Apostolique de Moursal à partir de la chorale qui préparait les veillées de Noël. Après, on a concerté nos Pasteurs afin de créer une autre chorale au sein de l’Eglise. Leur réponse était catégoriquement NON, pour la simple raison que le groupe H’SAO (Hirondelles SAO) est parti de la même manière et qu’ils ne voudraient pas que le même scénario se répète.
Ialtchad Presse : Quelles sont les raisons fondamentales qui vous ont poussé a crée Matania ?
Mariam Matania : Mise à part Mounira Mitchala que nous connaissons à l’époque, et qui est la seule femme à faire de la musique, la gente féminine était quasiment inexistante sur la scène musicale tchadienne et nous avons décidé très jeunes déjà à nous imposer, parce que le talent, la volonté et tous les « ingrédients » sont réunis pour nous permettre de réussir musicalement.
Ialtchad Presse : Quel est votre genre musical ?
Ménodji Matania : Nous mélangeons les sonorités traditionnelles à celles modernes pour un genre dit world music. Notre musique est transfrontalière.
Ialtchad Presse : Des filles choristes qui changent de cap en faisant de la musique profane. Quelle est l’appréciation des membres de votre église ou de votre entourage ?
Mariam et Ménodji : Les membres de notre Eglise ont toujours dit que les filles qui font de la musique, sont des prostituées. Il faut prendre cela comme des préoccupations et l’instinct de protection des parents. Les pesanteurs socioculturelles sont très vivaces au Tchad jusque-là et il y a lieu de tolérer certaines prises de position catégorique des parents et de notre environnement proche. Cependant, le mieux serait d'orienter les jeunes que d’avoir de l’a priori à tout bout de champ sur eux. On a été traité de tous les noms, des oiseaux de mauvais augures mais nous prenons cela comme des challenges pour nous permettre de progresser.
Ialtchad Presse : Quelles sont vos réalisations musicales ?
Mariam Matania : Nous avons un album « Talou ni loumou » qui veut dire rassemblons nous. Cet album comporte huit titres qui parlent de la paix, de l’injustice, de la situation précaire des orphelins, de l’amour et nous nous insurgeons des affres des guerres. Nous avons remporté la médaille d’or au Niger lors des jeux de la Censad l’année dernière.
Ialtchad Presse : Quelles sont les difficultés que vous rencontrées ?
Mariam et Ménodji : Nous n’avons pas de structures et des cadres pour nos répétitions et éventuellement pour nos spectacles.
Ialtchad Presse : Quels sont vos projets ?
Ménodji Matania : Nous travaillons pour notre deuxième album et nos clips. Nous allons ouvrir un orphelinat et voyager partout dans le monde.
Ialtchad Presse : Votre dernier mot……
Ménodji Matania : Nous voudrons remercier notre mentor Hassan Sylla pour son soutien, nous voudrons aussi remercier tous fans et enfin toutes nos reconnaissances à Ialtchad Presse pour cette importance qu’il accorde aux artistes tchadiens.
Interview réalisée par Dingamnaïel Kaldé Lwanga