Au lendemain de la condamnation des leaders de Wakit Tamma, lundi 6 juin à Moussoro à la suite d'une audience foraine, la rédaction d'Ialtchad a sillonné quelques organisations de défenses des droits de l'homme ce mardi 7 juin. La Commission nationale des droits de l'homme(CNDH) et la Ligue tchadienne des droits de l'homme(LTDH) se félicitent de leur libération même si elle est conditionnelle. Elles déplorent le laxisme de la Justice tchadienne dans le respect du droit de la défense. Reportage.
11 heures. Palais de Justice de N'Djamena, capitale tchadienne. La cour grouillait de monde, quelques auditions des prévenus de la maison d'arrêt se déroulaient. Mais les avocats n'ont pas encore levé leur mot d'ordre de grève malgré la libération de leurs collègues arrêtés. Notre objectif est de rencontrer le président par intérim de la Ligue tchadienne des droits de l'homme (LTDH) Me Adoum Mahamat Boukar. Dans son bureau, après de poignées de mains, nous allons à l'essentiel : après procès des leaders des Wakit Tamma à Moussoro.
Me Adoum Boukar estime que même si les leaders de Wakit Tamma ont été libérés, ils ont écopé quand même d’une condamnation avec sursis. Selon lui, la LTDH avait condamné dès le début cette affaire « les droits de la défense n’ont pas été respectés », a-t-il dit. Pour lui, profiter de la bonne foi des gens pour les livrer aux services de renseignements généraux (SRG ) n'est pas du tout normal. À son avis ce n'est pas un bon procès. « C'est une affaire purement politique à qui on a donné un habillage juridique. Alors si la justice se comporte de cette manière, il n'y a plus de garantie pour les citoyens lambda. Il faut que le droit de la défense soit respecté. Les conditions d'un procès équitable ne sont pas réunies, pour ce jugement. Bien que les gens sont libérés, mais c'est une condamnation avec sursis », lance-t-il. Le président de la LTDH, affirme qu'ils s'attendaient à ce que la procédure soit annulée parce qu'elle est nulle au départ. Les avocats, dit-il, ont interjeté Appel et attendent que ces leaders soient rétablis dans leurs droits. Me Boukar assure que jusqu'à ce qu'une nouvelle décision soit prise par la Cour d'Appel, les leaders de Wakit Tamma peuvent exercer librement leurs activités.
13 heures. Nous sommes au bureau de M. Mahamat Nour Ibédou, Président de la Commission nationale des droits de l'homme du Tchad (CNDH). Nous déclinons l'objet de notre visite qui reste le même: après procès de Moussoro. Il répond en affirmant qu'il faut d'abord se féliciter de cette libération même si elle est avec un sursis. Son institution a toujours plaider pour la libération de ses camarades leaders de Wakit Tamma. Il soutient qu'il faut restaurer un climat social afin de nous permettre d'avancer plus sûrement vers le dialogue national inclusif (DNI). La justice elle aussi a fait preuve de la sagesse, dit le président de la CNDH. « En âme et conscience, ces genres d'arrestations en cette période n'étaient pas la bienvenues. C'est à l'actif de tous, car leur arrestation n'arrangeait personne et dans l'intérêt de personne surtout pas du peuple tchadien », dit M. Ibédou. La justice tchadienne a toujours été liée à l'exécutif, c'est quelque chose à améliorer, dit-il. Le président de la CNDH soutient que jusqu'à nos jours notre justice n'a pas encore retrouvé ses lettres de noblesse. « C'est l'une de nos missions et nous allons faire en sorte que la Justice joue pleinement son rôle en toute objectivité, surtout il y a eu beaucoup d'entorses dans la procédure d'arrestation des avocats. C'était complètement une procédure biaisée. On a marché sur des principes de justice », confie le président de la CNDH.
M. Mahamat Nour Ibédou promet qu'en tant que conseiller du gouvernement, du Conseil national de transition (CNT) et du Président de la République, ils vont dire que la bonne gouvernance dépend du respect des droits de l'homme et des principes.
Moyalbaye Nadjasna