Pour permettre à la femme tchadienne de s’épanouir et d’obtenir son autonomisation, l’État et ses partenaires, mais aussi les associations de la société civile et les associations féminines ont pendant des années lutté et sensibilisé les femmes dans les milieux ruraux et urbains. Cette lutte a porté des résultats, mais beaucoup reste encore à faire. Reportage.
Au Tchad, les pesanteurs socioculturelles font que les femmes jouent un rôle de second plan dans nos sociétés. Que ce soit en le milieu urbain ou rural, les femmes tchadiennes sont confrontées à d’énormes difficultés qui les empêchent parfois de s’épanouir.
Pour améliorer la condition de vie de celles-ci, l’État avec ses partenaires a mis en place des politiques sectorielles pour l’autonomisation des femmes. À part le gouvernement et ses partenaires, il existe plusieurs autres associations féminines qui font un travail de titan pour aider leurs sœurs à connaître et à réclamer leurs droits. C’est dans ce sens que l’association pour la promotion des libertés fondamentales au Tchad (APLFT) mène pendant plus de 2 décennies une lutte dans le pays pour permettre aux femmes tchadiennes de connaître leurs droits afin de les réclamer.
Pour la chargée des affaires juridiques à l’APLFT, Djékounda Nembaye, la clinique juridique aide les femmes à connaître leurs droits et à obtenir justice. Elle souligne que beaucoup de femmes viennent se plaindre à la clinique juridique de l’association et surtout sur des cas liés à la prise en charge et à la réclamation des biens successoraux. Selon elle, l’APLFT aide beaucoup les femmes en détresse à entrer dans leurs droits.
Mme Djékounda Nembaye explique que l’association fait des sensibilisations et organise des causeries éducatives avec les associations des femmes pour les sensibiliser sur leurs droits et leurs devoirs. « Lors des sensibilisations, nous choisissons les thèmes par rapport aux groupes que nous venons sensibiliser », dit-elle. Au sujet de la participation de la femme à la gestion de la chose publique, la juriste de l’APLFT, précise que c’est une activité quotidienne de l’association. À son avis, même en dehors de la semaine nationale de la femme tchadienne, l’APLFT sensibilise, au moment convenu, sur cette cause. À propos des droits de ses consœurs tchadiennes, la jeune dame ajoute que la sensibilisation est faite dans les langues maternelles pour que celles-ci comprennent mieux afin qu’elles s’en approprient. L’APLFT est dans 17 provinces du pays et fait un travail remarquable dans les zones rurales, mais dit-elle, le poids de la tradition pèse beaucoup et elle pense qu’il va falloir que les autorités locales et traditionnelles puissent accepter que ces femmes s’affirment. « Tant que les femmes rurales sont sous le poids des us et coutumes, il sera difficile pour elles d’affirmer leurs droits en zones rurales. » La chargée de la clinique juridique de l’APLFT révèle qu’en milieu urbain, la situation s’est nettement améliorée, mais c’est dans le monde rural que le véritable défi se pose.
Abondant dans le même sens, assistante, chargée de la lutte contre la violence basée sur le Genre, Mme Narompi Yvette, affirme que la semaine de la femme tchadienne devrait être une semaine de réflexion sur la condition de la femme et non-être limitée aux festivités. « Ça devrait être le moment pour les femmes de réfléchir sur leur devenir et non une semaine pour acheter des pagnes et s’afficher », dit-elle. Selon elle, depuis toujours au Tchad, la femme a été vue comme un être qui n’a pas la capacité à occuper les postes que les hommes ont occupés. Elle estime que les femmes ont des atouts et des compétences requises pour pouvoir exercer les mêmes activités que les hommes. Mais, dit-elle, malheureusement les femmes pensent que le 8 mars est seulement une semaine dédiée à la tenue et à la fête. La chargée de lutte contre la VBG constate aussi que la femme entre temps ne se positionnait pas dans la prise des décisions, mais de nos jours, la situation a nettement évolué, à cause de la sensibilisation et dans le renforcement des échanges.
Pour Nadine Mapaté, du bureau VBG, beaucoup de femmes dans certaines contrées du pays trouvent que c’est normal qu’elles soient violentées par leurs maris. Elle explique que certaines femmes en milieu rural pensent que le fait d’être tapée par son mari est un signe d’expression d’amour. La jeune dame soutient aussi qu’au nom de la tradition, certaines femmes sont contraintes de souffrir en silence, au risque d’être la risée de tout le village. Pour mettre fin à ces pratiques néfastes pour l’épanouissement de la femme, Nadine Mapaté suggère que les femmes se surmontent pour franchir ces lignes rouges invisibles qui les empêchent de se libérer. Selon elle, il faut que les femmes acceptent de se sacrifier pour mettre fin à ces pratiques.
Jules Doukoundjé