La 8e édition du marché de l’artisanat tchadien a ouvert ses portes hier 3 décembre à N’Djamena. Artistes et artisans exposent leurs produits. Ialtchad Presse est allé parler avec les artisans, artistes de leur métier et de leurs produits. Reportage.
Il fait chaud ce vendredi 4 décembre à N’Djamena, la capitale du Tchad. Dans les jardins de l’Institut français du Tchad (IFT), des tentes sont installées ici et là. Ils servent de stand à des artistes et à des artisans. Nous sommes au marché d’artisanat tchadien organisé par le Collectif des artistes et artisans du Tchad (CAAT). Le 8e du genre qui prendra fin le 12 décembre. Tisserands, peintres, maroquiniers, sculpteurs, couturiers, brodeurs, promoteurs des produits bios sont présents. Ils sont patients, heureux. Ils attendent les passionnés d’arts. Ils attendent tous les N’djamenois.
Ouvert hier 3 décembre, le marché se met en place peu à peu à l’IFT. Certains stands sont occupés, d’autres sont encore vides. Au deuxième jour de cette exposition-vente, l’engouement n’y est pas encore. Le public est absent. Mais les produits sont là. Et de qualité.
Devant ses produits bios, Mingueta Noubarabaye est en place depuis le matin. Elle exerce son métier de transformatrice des produits locaux depuis 5 ans. Elle est à sa deuxième participation à ce marché. Elle attend patiemment la clientèle. Mais il n’y a encore personne. Personne. Seulement des exposants qui errent d’un stand à un autre. « On s’est installés hier seulement. Donc le public n’est pas informé. Mais j’espère qu’il répondra présent », dit-elle mi-optimiste.
Ahmat Hassan Gonsallo est artiste peintre, créateur d’art décoratif. Il a 27 ans de métier dans le corps. Il est à sa 8e exposition depuis le début de cette initiative. Dans son stand, il expose des objets issus de l’art naïf. « C’est un art qui n’est pas réaliste parce qu’il renferme toutes sortes de couleurs », affirme-t-il. Ce cadre lui permet d’exposer, d’exprimer et de vivre de son art. Au-delà, « c’est aussi une occasion de rencontrer d’autres artisans », dit-il. Chez lui également, la clientèle tarde à se présenter. Il lance un appel au public, « venez nous soutenir ».
L’art tchadien se porte très bien et se développe plus vite que la musique. Et les artisans tchadiens sont des courageux. Les artisans et artistes présents sont unanimes, ils affirment que malgré les obstacles l’artiste tchadien produit. Mais on le mène en bateau en lui proposant des associations, de faux projets, etc. A la fin on racle l’argent en son nom auprès de l’État, des ONG, et on le laisse tomber.
Mme Antoinette est tisserande et brodeuse. Sur la table de son stand sont exposés des tissus, des sacs, des porte-clefs et d’autres objets fabriqués localement. Sourire aux lèvres, elle accueille deux expatriées. Elles sont venues s’acheter un sac et deux tissus pour se coudre des jupes. « C’est déjà bien. Mais où sont les Tchadiens ? »
Selon Djibrine Yacoub Senoussi, chargé de communication adjoint du CAAT, le marché de l’artisanat est une initiative de l’ambassade de France au Tchad. « La 1re et la 2e édition ont été organisées par l’Ambassade de France grâce à l’IFT », souligne-t-il d’emblée. Ce n’est qu’à partir de la 3e édition que le CAAT s’est approprié l’activité. L’objectif de ce marché est, toujours d’après Djibrine Yacoub Senoussi, de favoriser les échanges entre les artistes et artisans du Tchad et de la sous-région. D’après lui, les artisans étrangers ont toujours pris part à cet événement. Cette année, dit-il, la pandémie du Covid-19 a tout bouleversé. « Avec cette crise sanitaire, les étrangers n’ont pas pu se déplacer sur N’Djamena pour prendre part à cette 8e édition », regrette Djibrine. Le souhait du CAAT est que l’art tchadien déborde hors du pays. « Nous espérons un jour organiser ce marché dans un autre pays », dit le communicant du CAAT.
L’art tchadien est vivant et évolue, le véritable problème reste le marché de la consommation locale. « L’engouement du public est notre véritable problème. Le public tchadien aime accorder de l’importance à ce qu’on importe », exprime avec force et émotion M. Djibrine. Il interpelle la population tchadienne sur ce comportement qui impacte négativement l’art tchadien. « Les artisans tchadiens ont du talent. Pourquoi ne pas les valoriser ? Ils méritent mieux », martèle-t-il.
Christian Allahadjim