Les taxi-moto appelés communément clando par les tchadiens sont devenus le moyen de transport urbain par excellence à Ndjamena, un moyen de transport de proximité. Ils sont visibles partout dans les carrefours et autres endroits tels que les bars et les marchés.
Les taxi-voitures ont désormais depuis quelques années des concurrents. Ce sont les taxi-moto qui son de plus en plus nombreux. Les habitués les reconnaissent plus facilement. Contrairement aux autres villes du pays à savoir Moundou, Sarh, Abéché, Pala et Bongor, le secteur de taxi-moto à N’djamena n’est pas réglementé et les activités liées à cela restent interdites. Ben-skin au Cameroun, Zémidjan au Benin, les taxi-moto sont appelés clando au Tchad.
A Moundou par exemple, ce moyen de transport urbain s’est imposé et a obligé la mairie à le réglementer. Les pilotes portent de gilets d’identification, les pièces de leurs motos et les leurs sont strictement contrôlées.
À N’Djamena, l’avènement des taxi-moto est accueilli avec soulagement par la population. Le clando est perçu comme le moyen de transport de proximité. « Le clando te laisse devant ta porte ou t’amène partout où tu veux, même à l’intérieur des quartiers là où c’est inaccessible aux taxi-voitures » nous disent certains clients en majorité des femmes. Ces femmes nous confient même qu’elles prennent le clando pour se rendre au bureau. La colère de certains chauffeurs de taxi-voiture est parfois perceptible. Ils n’hésitent pas à percuter en pleine circulation les pilotes de taxi-moto. Avec les autres usagers de la route ce n’est pas non plus le parfait amour.
Les taxi-moto font l’objet de plusieurs accusations. Ils sont source de cas d’accidents de la voie publique et d’insécurité disent les uns et les autres. Dans une note circulaire datée du 18 mars 2010 signée de l’ancien ministre de l’intérieur et de la sécurité publique Ahmat Mahamat Bachir, la circulation des taxi-moto a été interdite sur l’ensemble du territoire national. Motif : perturbation de la circulation (particulièrement à N’djamena), assassinat, vol etc. Puis quelques jours plutard, la mesure est levée dans les autres villes du pays mais reste en vigueur à N’djamena.
Coup d’épais dans l’eau ! Cette mesure n’a rien changé. Les taxi-moto circulent, puisque contrairement aux autres villes, le secteur n’est pas réglementé et donc impossible de faire la différence entre les motos des usagers ordinaires et les taxi-moto. Le port de gilet d’identification est inexistant. Le nombre de ces moyens de transport augmente au quotidien. On les voit partout à travers la ville au grand bonheur de nombreux usagers, cités plus haut qui pensent que les clando sont plus rapides même s’ils se plaignent quelques fois du prix.
Taxi-moto : gagne-pain
Les activités des taxi-moto sont devenues depuis peu des activités génératrices de revenus donc classable comme activités économiques. Une journée remplie peut rapporter jusqu’à 25.000 F CFA par jour selon les pratiquants. Le secteur absorbe de nombreux sans emplois et des laisser pour compte. Abdallah, la trentaine, marié et père de quatre enfants, est clandoman. Nous l’avons rencontré dans un carrefour au quartier dembé où il exerce, il nous confie que cette activité lui permet de nourrir sa petite famille. « Je fais honnêtement mon travail et amène mes clients en toute sécurité aux endroits désirés et à des prix raisonnables » précise-il. Répondant à la question sur la mesure d’interdiction toujours en vigueur à ’Ndjamena, Abdallah conseille plutôt au ministère de tutelle la réglementation du secteur, car poursuit-il, on ne peut pas interdire les activités des taxi-moto parce que la plupart de moto-taximen sont des gens désœuvrés qui ne cherchent juste à se prendre en charge. Comme lui, beaucoup des jeunes qui sont dans cette activité plaident pour une réglementation du secteur. Cela évitera selon eux beaucoup de dérives. Richard Madjitoloum est un client que nous avons rencontré au moment où il s’apprêtait à prendre le clando pour faire des courses. Il nous lance cette phrase avec grise mine pendant la conversation avec Abdallah « il n’ya au Tchad que les taxi-voitures ne demandent jamais la destination du client. Ailleurs les clients indiquent leurs destinations avant de monter à bord. Au Tchad, on vous prend par exemple à dembé et on vous laisse à ambassatna au marché central etc. » De plus en plus tendu, Richard s’exprime sur un ton dur « laissez-nous prendre tranquillement nos clandos ». Le ministère de tutelle doit donc penser à faire œuvre utile en autorisant la circulation des taxi-motos tout en appliquant de stricts contrôles pour éviter de diverses dérives et autres accidents de la voie publique.
Sécurité et service public
Mais une chose est vraie, c’est que les clandos sont à travers leurs pilotes des dangers publics, malgré le service qu’ils peuvent rendre à la population. Leurs allures en circulation sont dignes de films d’action. Ils faufilent entre les automobiles en toute vitesse sans se soucier de la vie de leurs clients ni du tort qu’ils peuvent causer aux automobilistes. Le non respect des codes de la route et le manque d’égard vis-à-vis d’autres usagers restent à déplorer chez les pilotes des taxi-motos.
Tout de même, il faut reconnaitre que les taxi-motos à N’djamena rendent un énorme service à la population. Ils desservent les quartiers périphériques, qui sont le plus souvent inaccessibles au moyen de taxi-voitures. Comme dans les autres villes du pays ou des villes des pays africains que sont Douala, Yaoundé et N’gaoundéré (au Cameroun) ou encore Cotonou au Benin, Bangkok en Thaïlande, le secteur des taxi-moto nécessite désormais d’être canalisé par de règlements. Par exemple, l’obligation de la régularisation (pièces des motos, permis de conduire, port de casques et de gilets d’identification, respect de code de la route etc.)
Et puis une chose et non de moindre, la construction des routes doit prendre en compte les véhicules à deux roues (comme par exemple le cas de la ville de Ouagadougou au Burkina-Faso où les routes construites ont des parcelles réservées aux automobilistes et motocyclistes séparées). Cela éviterait des nombreux cas d’accidents. Les contrôles de routine doivent être assurés pour dissuader les brebis galeuses qui se glisseraient dans le secteur. Tous ceux qui voudront ou exercent ce métier doivent donc se mettre en règle vis-à-vis de l’administration publique.
Dingamnaïel Kaldé Lwanga