vendredi 29 mars 2024

Abel Maina, l'activiste politique

Jui 07, 2022

C’était une grande gueule des réseaux sociaux. Il s’est fait un nom en s’attaquant violement au régime du défunt président Idriss Deby Itno et a certaines personnalités. Il tirait sur tout ce qui bougeait au nom de l’activisme politique. Il a continué, à l’arrivée du Conseil Militaire de Transition (CMT), dénonçant un coup d’état avant de rallier la transition au nom du dialogue national inclusif. Et de tomber dans le silence. Je reçois l’ex-activiste politique Abel Maina pour faire le point sur les actualités, son retour au pays et les péripéties qui entourent ce retour, ses convictions, la transition…

Bonjour M. Abel Maïna

Bonjour Bello, bonjour à tous les téléspectateurs de Ialtchad. C’est un plaisir pour moi sur le plateau de Ialtchad, un média qui a bercé le début de notre jeunesse et le début du combat que nous menons. C’est grâce à Ialtchad que nous sommes peut-être devenus des activistes. Je me souviens quand j’ai commencé à lire Ialtchad, c’était au début de mes études à Cotonou, au Benin en 2001-2002. C’était le premier site d’information qui me permettait de lire, de savoir, de découvrir. Savoir aujourd’hui que Ialtchad a grandi moi qui a connu Ialtchad pendant toutes ces années, plus de 20 ans. Ialtchad est aujourd’hui le média le plus connu et surtout je suis en studio. Et c’est surtout un honneur pour moi, Bello (permettez-moi de vous tutoyer), de te rencontrer.

Ancien activiste ou toujours activiste ?

Je pense que….puff, cela me fait rire lorsque les gens disent ancien activiste. Parce que les choses pour lesquelles je me suis engagé n’ont pas du tout changé, elles demeurent encore là. Je ne suis un activiste religieux ni pour autre chose. Pour le moment, je suis un activiste des droits de l’homme, contre l’injustice. Et ça même si les gens n’aiment pas je reste activiste.

Est-ce que l’injustice le pays ?

On ne peut pas dire que l’injustice a quitté le pays. L’injustice ne demeure pas seulement dans le pays, mais il demeure dans le monde entier. L’injustice a toujours existé et existera toujours. On doit continuer à se battre contre cela. L’injustice au Tchad ce n’est pas quelque chose qu’on peut bannir, mais qu’on peut atténuer.

M. Maïna vous êtes au Tchad. On est au Tchad. On ne vous entend pas dénoncer les arrestations, on ne vous voit pas manifester. La manifestation et les dénonciations c’est bon quand on est à l’étranger et c’est mauvais quand on est au Tchad seulement?

On est rentré dans le cadre du dialogue national. On ne peut dialoguer en étant dans la rue. Le dialogue il s’asseoir et discuter, quand on est dans la rue avec des cailloux et des pancartes, ce n’est plus le dialogue. C’est le rejet et la dénonciation directe pour ne pas discuter. Nous nous sommes rentrés pour le dialogue national et pour réussir la transition. On ne peut pas être dehors manifester

Abel Maïna, le dialogue est une chose et la transition est une autre chose. Est-ce que vous êtes en train de nous dire, en période de transition, « ne manifester pas, ranger-vous, ne dites rien, attendez le dialogue » c’est cela ?

Non, ça dépend. Nous, nous sommes sortis pendant la tuerie de Sandana, la police nous a embarqués, nous avons étés gazés. Nous sommes sortis pour un cas bien précis, mais lorsqu’il s’agit de la politique, nous ne pouvons pas sortir manifester du. Moment où nous avons accepté dialogue avec le Conseil militaire de transition (CMT).

Lorsque vous dîtes cela « dialoguer avec le CMT », les gens ne sont pas dupes. Vous les 4, vous représentez qui ?

Écoutez, d’abord nous représentons nous-mêmes d’abord. Nous représentons les différentes voies…ce n’est pas une histoire de groupe, de parti politique, de rebelles le dialogue c’est la rencontre de tous les filles et fils du Tchad.

Abel Maïna, dans la lutte, dans l’activisme il y a ce qu’on appelle la cohérence dans les idées et dans l’action. On vous a vu dénoncé le coup d’État constitutionnel du fils qui succède au père. Aujourd’hui vous vous assoyez  ici pour dire « tout ça n’a pas existé ». On balaie ça du revers de la main, c’est cela ?
 
Non je n’ai absolument pas dit cela. Je pense qu’a un moment donné il y a un temps pour la guerre, il y a un temps pour la paix, un temps pour la discussion, un temps pour les injures, un temps pour tout. Le fils nous lui avons dit qu’il a un pouvoir qui n’est pas légitime, parce qu’il n’est pas élu, qu’il n'est pas sorti des élections. Par contre il faut tenir compte de la situation exceptionnelle du Tchad. Est-ce que le président de l’Assemblée nationale est lui-même légitime de prendre le pouvoir ?

C’est quoi la situation exceptionnelle du Tchad ?

La situation exceptionnelle du Tchad, c’est qu’on eut un chef de l’État qui est mort sur le terrain. Et ceux-là qui ont occasionné la mort du chef de l’État n’ont pas pu prendre le pouvoir. Même s’il avait pris le pouvoir ça serait un coup d’État, un renversement du régime.

La constitution le prévoit

La constitution dit que le mandat est de 5 ans, mais son mandat a duré 12 ans sans les élections. Donc lui-même n’est pas légitime.

Donc vous Abel Maine activiste vous préférez le coup d’État que de suivre les textes ?

De toutes les façons, il y a un problème. Haroun Kabadi n’était plus dans les textes parce que les textes ne lui donnaient que 5 ans.

Vous êtes là depuis quelques mois, qu’est ce qui a changé ?

Écoutez beaucoup de choses ont changé.

Donc le système d’avant n’existe plus ?

C’est difficile de dire que le système d’avant n’existe plus parce que le chef est mort au front. Le système a mis beaucoup de temps, on ne peut pas le balayer d’un coup. Il faut du temps, un processus. Ce qui a changé en premier, les opposants sont dans le gouvernement, les activistes indésirables comme nous sont au Tchad, les manifestations sont autorisées, pour la jeunesse les coûts d’Internet a beaucoup baissé, le changement est un processus aujourd’hui on a gagné que les manifestations soient autorisées…

Là les manifestations sont interdites

Les manifestations sont interdites parce qu’a un moment donné…parfois même aux États-Unis, en France les manifestations sont interdites quand cela rentre dans le cadre de la sécurité…

On n’est ni la France, ni les États-Unis

oui on n’est ni la France ni les États-Unis, dans ce cas on n’a pas besoin d’avoir la même démocratie que celle des États-Unis ou de la France.

On est au début de quelque chose, il faut laisser les gens exprimer leurs avis

Les gens expriment leurs avis, mais quand c’est une seule manifestation…les gens se sont attaqués aux biens des particuliers tchadiens, ces stations Total appartiennent aux Tchadiens, ils ne portent que le nom Total, c’est vrai qu’il y le symbole, mais ça appartient aux Tchadiens. II faut savoir qu’au Tchad, il n’y a pas de système d’assurance alors comment est-ce que le commerçant à qui on a détruit les biens, comment il va relancer ses activités. Les casses…

Quels nombres de casses il y a eu concrètement ?

Écoutez même s’il y a eu une seule casse

On a vu quelques pompes de stations chamboulées, pas plus

Même s’il y a une seule pompe chamboulée, ce n’est pas bien.

C’est la faute à qui ?

On ne dira pas que la faute est à X ou Y.

Est-ce que vous en train de dire que cette manifestation n’est pas bonne parce qu’il y a eu des casses malgré que ça s’est passé en dehors de l’itinéraire et des heures de la marche ?

Oui.

C’est une manifestation autorisée, est-ce que vous tenez compte de ça pour juger ?
Non je ne juge pas les manifestants ni les organisateurs des manifestations. Ce n’est pas à moi de le faire c’est à la justice de le faire. Déjà moi ça me pose un certain nombre de problèmes qu’on puisse arrêter des leaders et qu’on les jette en prison pendant plus de deux semaines.

Quel problème cela pose ?

Cela me pose personnellement le problème de respect des droits des individus. On peut les convoquer et les laisser libres. C’est véritablement un problème pour moi au Tchad, pour toute chose on arrête les gens, on les envoie en prison.

Abel Maina, je vous rappelle que c’est une marche autorisée, vous trouvez normal qu’on arrête les leaders de la société civile sans autre forme de procès ?

Je viens de dire que je ne trouve pas ces arrestations normales.

Parce que quand je vous entends c’est comme le discours d’un officiel

Je dis, je n’approuve pas leurs arrestations parce que ce ne sont pas des gens qui vont fuir. Je n’approuve pas qu’on les envoie à Moussoro non plus.

Vous êtes la bande de 4, il y a vous et 3 autres qui sont rentrés. Expliquez-vous aux Tchadiens, car vous êtes pris en charge, nourris, logés aux frais des contribuables tchadiens, est-ce que ce n’est pas gênant ?

Pourquoi cela me gênerait de venir et de trouver le minimum que j’ai déjà. On ne m’a pas pris en France dans la rue, sans maison sans électricité. Lorsque je viens au Tchad invité par le chef de l’État, il faut qu’on me mette dans cette condition.

Combien vous avez reçu pour rentrer au pays ?

Je défi qui que ça soit nous n’avons rien reçu. Je le dis aux Tchadiens, nous n’avons rien reçu.

Vous n’avez rien négocié, même pas un poste ?

Aucun poste, aucune négociation.

Un de vous a été nommé. Êtes-vous en attente d’un poste ?

Nous sommes d’abord venus dans le cadre du dialogue national…

Pourquoi n’avoir pas attendu alors ? Pourquoi n’avoir pas dit nous rentrons sans aucun marchandage ?

C’est normal…nous sommes les invités du chef de l’État

Avez-vous fini avec vos démêlés avec la communauté Béri ?

Je n’ai pas de problème avec la communauté Béri. J’ai des problèmes avec quelques individus qui prétendent être de la communauté Béri.

Vous reconnaissez avoir commis des torts sur une communauté ?

Je ne dis pas que reconnaît avoir commis un tort, mais pour moi cette parenthèse, elle est fermée.

Il n’y a pas un dossier à la justice ?

Quel dossier à la justice ? Vous avez vu un dossier à la justice ? Je n’ai pas reçu de convocation, j’ai reçu deux individus à la maison, ils sont venus faire leur show avec leurs téléphones. Jusqu’aux preuves du contraire, si un procureur ou un juge m’appelle je viendrai.

La France s’ingère-t-elle dans les affaires tchadiennes ?

La France ne soutient que ses intérêts. Si les Tchadiens décident de faire partir le Conseil militaire de transition, la France ne peut pas s’opposer à ça. Le débat sur l’ingérence de la France est un faux problème.

Les préparatifs du Dialogue national, vos impressions ?

Le dialogue national a commencé dès la mort du Maréchal. Et c’est un processus, chaque jour il y a des tractations. Le dialogue est donc en bonne voie.

Le pré-dialogue de Doha avec les politico-militaires, qu’est-ce que vous en pensez ?

Si les gens sont réunis depuis 2 mois à Doha cela veut dire que c’est en bonne voie.

Quel rôle a joué Ibedou dans votre retour ?

Un rôle important

Étiez-vous ses relais ?

Des partenaires, on ne peut pas être ses relais. Nous on a existé dans la lutte associative avant que Ibedou ne se lance en 2011.

Réalisation Bello Bakary Mana

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