Le creusage de l’ancienne tranchée réalisée en 2008 par l’ancien président Idriss Deby Itno pour empêcher les rebelles d’entrer à N’Djamena inquiète la population riveraine. Depuis quelques semaines, les autorités de la transition ont repris les travaux de creusage de cette tranchée d’environ 8 kilomètres de longueur et 3 mètres de profondeur. Elle fait peur aux populations riveraines, surtout celles du quartier Boutalbagara, dans le 7e arrondissement au sud de la capitale. Reportage.
De Mara, aux environs de la raffinerie de Djarmaya, au contournement du palais de la démocratie, à Gassi dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena, le creusage de la tranchée crée la psychose aux populations environnantes. En 2008, le président Idriss Deby Itno réalisait ce gigantesque trou pour stopper l’avancée des rebelles qui avaient failli renverser son régime. Mais, cette fois, la transition militaire conduite depuis 6 mois par son fils, le général Mahamat Deby Itno, le creusage de cette tranchée crée de moult réflexions.
Certains intellectuels, membres de la société civile et opposition qualifient ce vaste creusage de va-t’en guerre, alors que le pays est dans une période de transition qui appelle à un dialogue national de toutes les forces vives de la nation. À Boutalbagara, quartier situé dans le 7e arrondissement, au sud de la capitale, les habitants se souviennent encore de périodes difficiles de 2008 quand le gouvernement de l’époque estimait que le creusage de cette tranchée était salutaire pour empêcher une éventuelle avancée rebelle. Pour Noubadoum, Djimtibaye, habitant et riverain de cette tranchée, affirme que les populations démunies ne pourraient pas, en cas d’évacuation sanitaire d’urgence d’enjamber la tranchée qui divise le quartier en 2. Pour lui, les personnes âgées et malades qui ne peuvent pas se tenir debout et qui résident de l’autre côté de la tranchée, pourraient mourir à cause de ce trou qui rend difficile la circulation des voisins. « Ce qu’ils font n’est pas bénéfique pour les habitants qui peinent à se déplacer et à joindre les deux bouts », regrette ce père de famille. Pour cet homme, les populations ne sont même pas informées du creusage de la tranchée. De l’avis de Noubadoum Djimtibaye, même si les autorités ont instruit l’entreprise qui réalise cette œuvre de ne pas casser les maisons, le creusage de la tranchée divise les familles.
Abondant dans la même veine, une jeune femme, mère de 3 enfants expriment son indignation vis-à-vis du Conseil militaire de la transition (CMT). Mme Lartab Marie-Claire, assise sous un arbre devant son petit commerce confie que depuis que la tranchée est passée devant sa maison, elle peine à fermer les yeux la nuit. Elle s’inquiète pour ses enfants qui vont dans une école élémentaire située de l’autre côté de la tranchée. « Nous avons inscrit nos enfants dans une école qui est désormais située de l’autre côté de la tranchée. Il faut que les autorités nous disent comment faire pour amener nos enfants à l’école », s’interroge la jeune dame. Pour elle, l’État ne se préoccupe pas de l’éducation de leurs enfants. Mme Lartab Marie-Claire souhaite que les autorités mesurent leurs actes avant de les matérialiser.
Des nombreux de résidents voisins de la tranchée estiment que les milliards que l’État dépense inutilement pour creuser cette tranchée auraient suffi de faire des adductions d’eau potable et d’aménager les rues pour permettre aux citoyens de vaquer plus aisément à leurs occupations.
Jules Doukoundjé