La présidente du Conseil Administratif (CA) du Réseau national des personnes vivant avec le VIH/SIDA au Tchad (RNPVVIH), Mme Naikode Eveline plaide pour la lutte contre la stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec le VIH/Sida, sans cela, il serait difficile de mener à bien la lutte contre le Sida. Elle a fait cette déclaration au cours d’une dédicace du livre intitulé « Contre vents et marées » de Dinguest Zenaba qui parle d’une prostituée du marché Mokolo de N’Djamena infectée par le VIH. Témoignage.
L’intervention de la présidente du conseil d’administration (PCA) du réseau national des personnes vivant avec le VIH/SIDA au Tchad (RNPVVIH) Mme Naikode Eveline à la cérémonie de la dédicace du livre de la romancière tchadienne, Dinguest Zenaba, a ému toute la salle. Cette dame a témoigné sur la stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec les VIH/SIDA. Elle a pris son propre exemple pour expliquer comment il est possible de vivre avec cette maladie qui a endeuillé et continue d’endeuiller le Tchad et toute l’Afrique au sud du Sahara. « J’ai découvert ma sérologie en 2002. J’ai décidé moi-même de faire dépiste sous le conseil de mon employeur, l’ONG médecin sans frontière qui a demandé entre temps à tous ses employés qui veulent bien se faire dépister. Et au cas où le résultat s’avérait positif, elle prendrait en charge à 75 pour les frais médicaux », explique dans une voix douce la PCA du RNPVVIH. Mme Naikode Eveline qui était écoutée avec beaucoup d’émotion indique qu’elle avait en 2002 obligé son mari pour qu’ils aillent faire le test ensemble. Elle confie que son mari ne pouvait attendre les résultats pendant une semaine et était retourné à son poste à Pala dans le sud. Elle était chargée de récupérer les résultats qui étaient malheureusement positifs. Selon elle, son mari n’a pu résister à la mauvaise nouvelle. « J’ai prié pour que le seigneur me donne la force d’accepter le résultat au cas où c’est positif. Je soupçonnais mon mari depuis 2 ans », souligne-t-elle. La PCA des personnes vivant avec le VIH a par ailleurs noté que quand le médecin lui avait remis le résultat, c’était elle-même qui l’avait consolé.
Après avoir pris les résultats, elle s’était rendue à Pala pour remettre à son mari qui s’était écroulé en demandant pardon à son épouse. « J’ai accepté son statut de séropositif, en suite 2 ans plus tard j’ai perdu mes deux enfants et cela m’a tellement touché. J’ai décidé de créer une association pour lutter contre le VIH. J’ai dit aussi que le SIDA ne passera plus jamais par moi », se confie-t-elle. Son association a adhéré au RNPVVIH en 2004 et depuis ce temps, elle n’a pas cessé de mener le combat contre le VIH/SIDA.
Les PVVIH ont besoin de soutien
Pour lutter efficacement, il faut une acceptation de soi et de la famille. Mais au Tchad comme partout en Afrique au sud du Sahara, les PVVIH souffrent de la stigmatisation et de la discrimination. La PCA affirme que la discrimination est le fait de fixer ou de catégoriser quelqu’un à cause de son statut de sérologie. Selon elle, cette discrimination constitue un frein majeur dans la réduction du taux de prévalence du VIH au Tchad. A son avis, c’est une atteinte aux droits des PVVIH. Pour Mme Naikode Eveline, les PVVIH subissent tous les jours la discrimination et la stigmatisation et s’auto stigmatisent eux-mêmes. Pour elle, ce phénomène social commence en milieu familial, mais aussi dans le milieu de la santé. La responsable des PVVIH révèle que les résultats d’étude de l’indice sur la stigmatisation effectuée en 2013 montrent un taux plus élevé de stigmatisation en milieu social et familial. 56% des PVVIH consultées ont déclaré avoir fait l’objet de stigmatisation de la part de leur entourage, dont 59% des femmes et 48% des hommes. En ce qui concerne l’accès au travail, au service de santé et à l’éducation, elle souligne que 22,8% déclarent avoir au moins une fois perdu un emploi et leur source de revenus à cause de leur statut de sérologie.
Selon Mme Naikode, les services de planification familiale ont été refusés à 4% de femmes séropositives à cause de leur statut et 19% des PVVIH déclarent obligé de changer de résidence ou être incapable de payer leur loyer. Elle précise que cette situation frappe plus de femmes avec 20 % contre seulement 17 % d’hommes.
Toutefois, elle reconnaît que les actions menées par le gouvernement et ses partenaires ont donné de l’espoir. Elle souhaite que les nouvelles actions doivent viser à sensibiliser les familles et la société afin d’aider les personnes vivant avec la maladie plutôt que de les stigmatiser.
Jules Doukoundjé