Donc le Mouvement Patriotique du Salut (MPS), ex-parti au pouvoir, a tenu son congrès extraordinaire. Prévu pour 2 jours, tenu en une journée. C’était expéditif. Cela ne ressemble en rien à un congrès de redynamisation. La redynamisation attendra. Tout le monde attendait un congrès qui dynamitera le parti, mais il semble que la dynamite a été désamorcée. Reste que le désormais ex-Secrétaire Général (SG) Mahamat Zene Bada est évincé au profit de Haroun Kabadi. Personne ne s’attendait à cette désignation par acclamation. Pourquoi le choix s’est porté sur Kabadi? L’homme qui refusa d’être Président par intérim. Quel est le scénario?
Acte1
C’était en amont du congrès. Tout commence avec la mort du Maréchal président Deby Itno. C’est la panique parmi les plus proches. Dr Haroun Kabadi au titre de deuxième personnalité est appelé par l’entourage familial pour constater la vacance du pouvoir. Il rassure tout en refusant d’assurer l’intérim. Il présente ses arguments : son âge, sa santé, le chaos en perspective, le choix de l’armée et d’un militaire respecté pour faire face à la situation. En fait, Kabadi se disqualifie pour mieux rebondir, peut-être…Vite il s’isole. Il travaille à convaincre les chancelleries occidentales. Il écrit avec l’aide du président de la Cour Suprême la Charte de la transition. Ses adversaires disent qu’il serait fatigué. Ses amis politiques rétorquent qu’il a toute sa tête. Kabadi est un homme de pouvoir craint par ses amis comme ses adversaires. Il est là où on ne l’attend jamais.
Acte 2 :
Organiser le MPS. Le parti n’entend pas céder la scène à d’autres. Il est un parti de gouvernement. Il entend le rester vaille que vaille. Kabadi a la charge de le reformer. Il est le seul parmi ses camarades disent plusieurs à être capable de jouer ce rôle. Surtout en cette période trouble. Sa force : sa capacité d’écoute et son habileté de grand manouvrier. Il peut, dit-on, écouter pendant des heures amis et adversaires. Il aura la mission de nettoyer le parti, de renflouer ses caisses, de faire émerger ou recruter des cadres jeunes et compétents, etc. Il aurait exigé et obtenu d’être seul maître à bord du navire MPS. Il a la liberté de former son Bureau politique, de sélectionner ses secrétaires adjoints, de mettre sur pieds des groupes thématiques pour mieux se préparer au futur Forum.
Aussi, l’autre cible est le Conseil National de Transition (CNT), l’organe législatif. Le parti de Bamina fait des pieds et des mains afin que le CNT ne lui échappe pas. Le pays entier et ses diasporas cherchent à en faire partie. Le MPS entend, bien là aussi, garder la main. Il n’y a personne d'autre que Kabadi pour négocier ou imposer cet arrimage. L’objectif est à haut risque, mais le grand manœuvrier Kabadi peut trouver l’astuce et la formule tout en ne laissant rien paraître. Une tâche difficile, mais que l’ex-PAN affectionne.
Acte 3 :
Les membres du parti de Bamina veulent se comporter, malgré ce régime d’exception du Conseil Militaire de Transition (CMT), comme un parti de gouvernement. Les caciques du MPS agissent et pensent à comment être au cœur des actions du CMT. Le principal but de l’acte 2 consistera à contrôler l’ agenda du CMT et la feuille de route du gouvernement de la Transition. Ils surveillent d’un mauvais œil les actes de l’actuel Premier ministre de transition Pahimi Padacké Albert qui n’est plus un allié, mais bien un potentiel adversaire.
Enfin, ce congrès n’est qu’un acte dans un grand scénario qui s’écrit sous le regard des Tchadiens. D’autres actes suivront. A la sortie de ce congrès, le grand scénario en cache bien d’autres petits scénarios. Le MPS est le cheval de Troie. Il semble que Kabadi est déjà bien en selle. Comme dans la mythologie grecque le guerrier Kabadi se lancera, peut-être, le moment venu dans la grande mêlée politique. Et tentera de galoper vers la victoire. Mais souvent en politique comme dans le cinéma il faut toujours voir la fin pour comprendre.
Bello Bakary Mana