Le Collectif des associations et Mouvements des Jeunes du Tchad (CAMOJET) a organisé une marche le 10 février passé à N’Djamena, capitale tchadienne. Le cortège des manifestants est parti de la rue de corniche de Sabangali avec pour objectif d’atteindre l’esplanade du Palais du 15 janvier au quartier Njary. En route, ils ont été dispersés au niveau du boulevard Sao au quartier Moursal. Ialtchad Presse a rencontré le coordonnateur national du Comojet, Hamlha Douksia Senghor pour en savoir plus. Entrevue.
Quel est l’objet de votre marche du 10 février ?
Nous avons entrepris cette marche pour dénoncer la situation dans laquelle se trouve la jeunesse tchadienne. Elle est dans la misère partout au pays. Il y a des milliers des jeunes diplômés sans emplois. En 2019, le président Deby Itno a promis de faire intégrer 20 000 jeunes à la fonction publique. Nous sommes en 2021 et rien n’a été fait. Au jour d’aujourd’hui, moins de 7000 jeunes sont intégrés. Parmi eux, il y a ceux qui ont été intégrés soit par la corruption, soit par des astuces politiques, soit ils ont été parrainés par des gens tapis dans l’Administration publique. Où est l’égalité des chances ? Nous avons organisé cette marche pour dénoncer tout cela. Nous réclamons deux choses. Nous réclamons l’intégration des 20 000 jeunes à la fonction publique et demandons au gouvernement de trouver une solution définitivement à la grevé de la plateforme qui paralyse l’Administration publique, particulièrement le secteur de l’éducation. Tout le monde sait que l’avenir d’une nation c’est l’éducation. Nous ne voulons plus la fermeture des établissements scolaires et universitaires.
Il y a d’autres raisons ?
Cette marche a pour objectif d’exprimer notre désaccord avec la méthode du gouvernement qui consiste à marginaliser en piétinant la jeunesse tchadienne.
Cette marche a été à la veille interdite par un arrêté du ministre de la Justice garde des Sceaux ?
Oui, l’arrêté a été pris à la veille de notre marche. Mais nous avions au préalable introduit une demande pour l’autorisation de cette marche. Tenez-vous bien, la demande a été tout purement et simplement rejetée. Nous sommes rentrés avec notre demande. Sur quelle base cet arrêté a été pris ? Ils devaient réceptionner d’abord la correspondance et ensuite donner un avis favorable ou non favorable. Non, cela n’a pas été fait. Nous avons la constitution de la République nous. Elle nous donne le droit de nous exprimer. La marche pacifique c’est aussi l’expression de la démocratie. Nous avons marché ce matin dans une logique constitutionnelle.
Vous avez réussi à marcher de votre point de départ (rue de la corniche de Sabangali) à votre point d’arrivée (Palais du 15 janvier) ?
Non. Tous les endroits stratégiques où nous avons défini nos itinéraires ont été pris d’assaut par la police. Toutefois, nous avons quitté la rue de Corniche pour être dispersés sur le boulevard Sao. Nous ne voulons pas conquérir le pouvoir avec cette marche. Nous exigeons l’insertion sociale de la jeunesse. Il faut que cette jeunesse soit équitablement traitée et sans discrimination.
Au sujet de l’intégration, une commission a été mise sur pied pour vérifier l’authenticité des diplômes. Est-ce n’est pas à ce niveau que ça blogue ?
Justement une commission a été mise en place. Cette commission devait faire un travail sérieux pour un bon résultat. Malheureusement, elle ne fait pas un travail juste et équitable en faveur des jeunes. Elle est influencée par les politiques. Elle reçoit tout le temps les listes des politiques, des parrains de X, Y. La lenteur administrative n’a rien à voir avec ce qui se passe. C’est une volonté manifeste du gouvernement de maintenir la jeunesse tchadienne dans la misère.
Et pourtant, l’intégration de 20 000 diplômés à comprendre le ministre de la Fonction publique, c’est de prioriser les anciens dossiers en instance. N’est-ce pas le cas ?
Malheureusement sur les arrêtés sortis, ce sont des nouveaux diplômés qui viennent à peine de finir leur formation. C’est pour dire que ce sont des paroles politiques avec un grand écart sur ce qui est dit et ce qui est fait sur le terrain. Si réellement cela est appliqué, nous pensons que ce serait un grand soulagement pour ceux qui attendent depuis des années. En toute sincérité, la jeunesse tchadienne est délaissée.
Votre marche a été dispersée. C’est un échec ?
Notre marche n’est pas un échec parce que malgré l’interdiction, la jeunesse tchadienne a bravé l’interdiction pour s’exprimer. Si le gouvernement ne trouve pas de solution, nous mènerons une action plus grandiose cette fois-ci sur toute l’étendue du territoire national.
Réalisation Moyalbaye Nadjasna