L'avenue du 11 août est située au quartier Djambal Barh dans le 3e arrondissement de la capitale tchadienne, N’Djamena. Elle abrite sur ses abords un petit et sympathique marché au citron avec une particularité : pas des vendeurs mais seulement des vendeuses. Le produit vedette est le citron. Immersion sur cette avenue.
Il est 10 h 30 min en ce jeudi 9 octobre. Au contournement du ministère des Affaires étrangères, la petite plaque indique Avenue du 11 août, autrement avenue de l’indépendance en référence à la date de la proclamation de la République du Tchad). Cette avenue qui longe le mur du côté sud de l’hôpital de la Mère et de l’Enfant et les logements de la Mairie est connue des habitués pour son commerce de citron au bord de la route. C’est ce que lui a valu le surnom de la « rue du citron ». On ne peut parler de cette avenue sans se référer au petit marché au citron qui s’est implanté là, il y a 4 ans.
Sur cette avenue, dames de tous les âges et jeunes filles vendent de citron, gingembre, citronnelle, tamarin, pamplemousses, mandarines, etc. Les clients en voiture, à moto ou encore des piétons viennent acheter, discutent les prix dans un langage très fleuri.
Mme Martine est vendeuse. Devant sa table, elle guette patiemment les clients. Veuve et mère de 5 enfants, elle exerce ce métier depuis plus de 5 ans. Sur ce lieu, elle est à sa troisième année. Elle a choisi de s’installer sur cette avenue pour selon elle, sa proximité aux hôpitaux de la Mère et de l’Enfant et la Référence nationale. « Mais également pour sa fréquentation remarquée aux heures de pointe », dit Mme Martine.
Plusieurs vendeuses affirment que l’emplacement du petit marché au citron est stratégique. En fait, beaucoup d’usagers et de fonctionnaires évitent d’emprunter le tronçon de l’Avenue Charles de Gaule qui passe devant la Présidence de la République. Ils préfèrent prendre cette avenue. Et ils en profitent pour s’approvisionner. Pour eux, le petit marché au citron est accessible sans encombrement.
Fanta Oumar fait partie de ces femmes qui se débrouillent pour être indépendantes et subvenir à leurs besoins. Elle est étudiante en 2e année en Économie à l'université Emi Koussi. Elle se lève chaque jour de bonne heure pour s’approvisionner au marché de Dembé, plus au sud de la capitale tchadienne, N’Djamena, avant de revenir s’installer sur cette avenue. « Pour moi ce commerce est le seul moyen pour moi de préparer la rentrée. Je le pratique occasionnellement. Par exemple, je le fais à chaque congé ou pendant les grandes vacances », dit-elle. Le fameux marché de Dembé est le lieu du premier rendez-vous de toutes les braves dames de la capitale. Elles sont les « lève-tôt » et les « couche-tard » de la ville. Au petit matin, les silhouettes de ces vendeuses arpentent rues et ruelles des environs pour s’approvisionner en produits frais. Chacune selon ses capacités financières. Certaines par sac, d’autres par « coro ».
Ensuite elles prennent d’assaut les minibus pour rejoindre le petit marché au citron. Sur place, elles le tri des citrons. Les premières qualités (en bon état) sont vendues en l’espèce en détail. Les deuxièmes qualités (amochés) sont vendues aux propriétaires de stand ou espace qui fabriquent du jus. Un « coro » (tasse) de citrons amochés se vend à 1 000 F CFA. Un litre et demi de jus frais de citron est vendu à 1 500 F CFA. « C’est avec le revenu de ce commerce que je m'occupe de mes enfants et de moi-même. Dieu merci, je ne me plains de rien », explique Mme Martine.
Les vendeuses ont le vent en poupe grâce à la pandémie du COVID-19 au Tchad. Les affaires sont bonnes. « Depuis que le coronavirus est arrivé, le commerce marche bien. Je finis parfois mes marchandises avant de rentrer et les bénéfices sont satisfaisants », affirme Marguerite, vendeuse et voisine d’étal de Mme Martine.
L’Avenue du 11 août ou Avenue du citron ? C’est à chacun son avenue. Chose certaine, l’Avenue du 11 août est devenue l’endroit par excellence pour acheter son citron à N’Djamena. Pour commercer avec des dames fortes !
Christian Allahdjim