Reportage

Reportage (1382)

Le président du parti Union des démocrates pour le Développement et le Progrès (UDP) Max Kemkoye a organisé une conférence de presse relative aux événements du 20 octobre dernier appelés « jeudi noir », hier jeudi 27 octobre au quartier Moursal dans le 6e arrondissement de la capitale tchadienne, N’Djamena. Reportage.

Suite aux manifestations réprimée du 20 octobre dernier qui a causé un nombre important de perte en vies humaine, les enlèvements, les arrestations et les dégât matériels, le président de l'UDP n'est pas resté à la marge. Il affirme que depuis le 20 octobre, le pays est entré dans une crise politique et s'achemine vers un totalitarisme absolu où tous les pouvoirs ainsi que les activités de la société civile, de toute opposition organisée, sont soumises et contrôlés par un système. « Exprimer ses droits et libertés est synonyme d'insurrection et peut être réprimée dans le sang ». M. Kemkoye condamne, selon lui, ce carnage inimaginable qui défie toutes les statistiques macabres de répression des manifestations pacifiques. « Nous affirmons que ce crime politique planifié est bel et bien un crime parfait, dans la mesure où en raison des finalités et les moyens utilisés, les autorités de N’Djamena invoquent la légitime défense pour protéger les forces de défense et de sécurité armées face à des citoyens à mains nues ».

Max Kemkoye déplore la position de la CEAC sur leur communiqué final désignant le président Félix Antoine Tshisekedi comme facilitateur. Facilitateur entre qui et qui ? « Nous attendons de précision sur la nature, l'agenda, les procédés et les objectifs de cette facilitation », dit-il. Il affirme qu’au-delà des déclarations officielles il faut questionner la motivation intrinsèque ayant commandé cette boucherie d’une rare violence. « Les institutions habilitées doivent ouvrir une enquête indépendante à l'effet de clarifier et de situer l'opinion nationale dans cette architecture confondue de responsabilité ». Dans cette conférence de presse, il souligne que le Mouvement patriotique du Salut (MPS) ex-parti au pouvoir n'a aucune leçon politique à donner aux Tchadiens sauf celles des crimes politiques, crimes économiques et crimes de sang. Selon ses propos, ce funeste parti doit se taire que de verser dans des déclarations pompeusement irréprochables et hystériques. « Nous apprenons de leur bouche que c’est tantôt une insurrection, tantôt un coup d'État. Est-ce un début d'ivresse de pouvoir du nouvel arrivant ou c'est le déni de réalité ou un nihilisme politique ? Il ajoute que le coup d'État suppose l'existence d'un plan opérationnel et tactique coordonné et d'importants moyens logistiques et militaires de troupes, des finances, c'est pourquoi les acteurs politiques doivent sortir de leur mesquinerie habituelle et s'affirmer durement pour sauver la démocratie et les libertés. Cela exige l'implication sincère et active de la communauté internationale. Il est encore possible pour faciliter l'ouverture en urgence d'un dialogue politique à minima devant conduire à l'apaisement.

Ousmane Bello Daoudou

Les eaux de Chari débordent dans les 3e, 4e et 5e arrondissements de la ville de N’Djamena. Reportage.

Il est 11h passé au bord du fleuve où les uns se lavaient et d'autres construisent, des enfants jouent et des femmes lavent leurs ustensiles à un mètre des eaux et de leurs domiciles. Pour les habitants, ces derniers ont été un véritable calvaire. « Toutes nos maisons sont par terre. Nous dormons dans la cour à la merci de la fraîcheur et des moustiques avec des maladies. Mes enfants et moi tous sont malades »,  dit Denebel Carmelle. Un autre résident Banago Abel affirme qu’ils se sont organisés pour boucher tout le long de leurs devantures. « Nous nous sommes cotisés pour acheter les sacs vides pour les remplir de sable et les placer pour empêcher ce débordement ». Un troisième résident dit, « la montée des eaux est trop puissante. Les couches vulnérables de la population souffrent, certaines maisons sont tombées, des résidents ont préféré quitter les lieux. Certains résistent pour lutter et survivre puisqu'ils n'ont pas un autre endroit pour aller se réfugier ».

Selon les résidents, la majorité des victimes viennent des provinces pour une meilleure vie à N'Djamena. Ils font face à cette situation sans aucune aide. « Nous demandons aux autorités de penser à nous. Nous avons peur d’attraper des maladies telles que le choléra. Le risque de catastrophe existe, il peut arriver à tout moment. Je d'amande au gouvernement via ses partenaires de venir au secours de cette population ». Un habitant sous couvert de l’anonymat dit que certains délégués vendent cet espace qui est situé au bord du fleuve qui n'est pas sensé être habitable, ils le remplissent l’espace avec toutes les poubelles de la ville et ensuite construire. Comment l'eau ne peut pas s’infiltrer pour envahir les maisons.

Au marché à Mil, les commerçants sont dépassés. « Nous n’avons que nos yeux pour voir. Nous sommes impuissants. Nous passons toute la journée sans rien vendre. Pas de clients. L'eau suit le passage de caniveau depuis le fleuve, certains sont bouchés, au début de la saison pluies la mairie est venue touchée par endroit, mais aujourd'hui voilà les conséquences », Mahamat Matar.

Pour Mahamat Adam Moussa, ils sont devenus comme des sentinelles. Aucun client ne traverse cette eau pour venir acheter. « Nous demandons à la mairie de nous venir en aide en évacuant cette eau qui bloque tout et tue nos commerces à petit feu ».

Ousmane Bello Daoudou

Cinq (5) jours après la manifestation contre la prolongation de la transition. Certains établissements publics sont déserts dans le 6ème, 7ème et 9ème arrondissement dans la ville de N'Djamena. La population vit dans une psychose et la peur au ventre. Quelques heures après la déclaration du président de la transition Mahamat Idriss Déby sur le deuil national, l'on constate dans toutes les écoles privées et publiques des drapeaux en berne. L'équipe d'ialtchad presse s'est rendue dans quelques établissements de la ville pour faire le constat. Reportage.

Le lycée la concorde, le lycée Félix Eboué, lycée d'enseignement technique commercial en passant par le lycée d'Abena tous sont presque déserts. L'on constate une absence totale des élèves. Au lycée de la concorde, l'administration est ouverte avec quelques enseignants sous les arbres. L'on observe une absence brillante des élèves et quelques-uns sont présents avec des visages remplis de peur. L'enseignant et inscripteur de cet établissement réagit, « l'école publique est une machine lourde qui commence difficilement, mais par rapport aux événements qui se sont déroulés, nous n'avions pas suspendus les cours mais avec la manifestation qui a commencé à l'aube, puisque le 20 c'était la journée chaude et les enfants étaient restés chez eux à la maison pour des raisons de sécurité. Jusqu'aujourd'hui ces élèves ont peur de venir au cours ». Après la concorde, c'est autour du Lycée de l'enseignement technique commercial, la cour était déserte mais l'on constate la présence des quelques enseignants et élèves. Ils ont repris lentement avec les cours notamment ceux de la classe de la terminale qui était dans la salle. Selon un responsable de cet établissement, « Depuis le début de ces événements, les cours n'ont pas été suspendus », a-t-il affirmé. Il ajoute que, « par peur, certains parents d'élèves empêchent leurs progénitures de venir à l'école pour des raisons de sécurité » a-t-il dit. Selon lui, les cours ont repris d'une manière effective depuis le lundi 24 octobre, dès 7h précise et finissent à 14h à l'exception de la classe de 3e qui finit à 13h. Quant au lycée Félix Eboué, les élèves se comptent au bout de doigts, la cour est presque vide, les tables bancs poussiéreux. Quelques salles de classe et bureaux administratifs cadenassés sauf la présence de quelques élèves, commerçants et enseignants dans la cour. Pour, Noumaïssei Sylvie, directrice administrative du collège Félix Eboué 1, les cours n'ont jamais été suspendu seulement que depuis les troubles du 20 octobre, les élèves ne se présentent pas souvent par peur où de l'inondation qui a engloutie certains quartiers dans la commune de 9e arrondissement. Elle appelle les parents d'élèves à inciter leurs enfants à reprendre le chemin de l'école dont leur avenir et celui du Tchad en dépend, a-t-elle affirmé. Au lycée d'Abena, la cour est également vide. On y voit que des salles vides comme au premier jour de la manifestation, aucun élève n'y est présent.

La manifestation du 20 octobre dernier a eu un impact négatif sur le pays d'une manière générale et particulièrement sur l'éducation nationale. La perturbation des cours pourrait impacter d'une manière négative le calendrier établi par le ministère de l'éducation nationale et de la promotion civique.

Abderamane Moussa Amadaye
Noël Adoum

La manifestation du 20 Octobre, lancée par une partie de l’opposition et les organisations de la société civile contre la prolongation de la transition est mal interprétée par les manifestants à Moundou dans la province du Logone occidental. Les hommes de médias au terrain, leader de droits humains et les victimes que nous avons interrogé expliquent comment les choses se sont déroulées à Moundou. Reportage.

Pour Mbaiwanodji  Adrien journaliste reporter à la radio Nada FM et correspond de la radio FM liberté c’est  pour la 1ère fois que Moundou connaît de tél problème. « Les jeunes sont sortis, il y a eu 25 morts d’après  les sources hospitalières sans compter ceux qui sont tombés aux quartiers suite aux balles perdues, 127 blessés sont abandonnés après les premiers soins d’urgence sans prise en charge. Et c’est  avec l’appui  de la plateforme de la société civile et les pompes-funèbres que  les gens ont pu enterrer leurs morts », dit-t-il.

Selon notre confrère, la manifestation a été très mal interprétée à Moundou, « on était aux premières heures quand les manifestants de doumbeur étaient sortis. Certains se sont violemment pris aux biens privés. Ils ont saccagé une boutique au quartier doumbeur, une boulangerie a été incendiée au quartier Gueldjeme et bien d’autres dégâts », explique-t-il.

Il poursuit que les manifestants ont pris en otage une boulangerie, « la première vague est allée prendre du pains et quelques bouteilles de jus et est parti. Un autre groupe est arrivée, c’est à ce moment que le propriétaire a cherché à défendre ses marchandises. Il a d’abord tiré trois balles en l’air et ça dégénéré ». Il ajoute qu’une autre équipe de manifestants est allée à Doyon pour saccager le marché, il y a eu de la résistance qui a causé 3 morts. « Mais le fait de dire que cette manifestation a pris une tournure communautaire, c’est  les dire des gens. Certes, il y a des messages de haines sur les réseaux sociaux qui appellent les uns à se soulever contre les autres » dit-il. Il assure que la mauvaise interprétation de la marche est à l’origine des débordements mais vite le calme est revenu. « A l’heure  où je vous parle les musulmans et chrétiens sont tous au marché » conclut-il.

Djikoloum Ngardinguina coordinateur de la LTDH du Logone et Tandjilé affirme « les gens ont profité de la situation pour agresser les autres parce qu’il y avait des gens qui se sont habillés en civile pour tirer sur les manifestants, cela a causé une confusion totale. Sinon il n’y a pas une guerre dirigée contre une communauté » martèle -t-il. Il ajoute que la manière dont les gens se comporte qui laisse les autres croire que les gens préparent quelques choses les uns contre les autres. « Les hommes politiques donnent de enflures aux choses, ils veulent tout simplement détourner  et diviser les gens », dit-il. Cette manifestation concerne tout le monde. Elle n’est  pas dirigée vers une communauté. Pour le moment, les boutiques sont ouvertes, les marchés aussi ouverts, il n’y a pas de tension. Le calme est revenu, conclut-il.

Nasradine Ahmat responsable de la boulangerie Nanou. Il explique comment les choses se sont déroulés « pour nous, cette manifestation est comme les  manifestations. Nous n’avons  pas pensé que les manifestants ont une autre idée derrière la tête. Nous avons ouvert nos portes comme d’habitude et à notre grande surprise un groupe des manifestants a pris d’assaut  notre boulangerie. Ils ont tout saccagé, tout brûlé » , explique-t-il. Selon M. Nasradine, la boulangerie est partie en fumée avec les matériels de travail : groupe électrogène, une voiture et quelques motos. « Une boutique à côté de nous est aussi partie en fumée. Si  forces de l’ordre  n’avaient pas vite intervenue, nous allons aussi enregistrer des pertes des vies humaines » explique-t-il.  Les manifestants ont demandé, semble-t-il, à leur frère chrétiens qui travaillent dans boulangerie de sortir pour éviter d’être  brûlés et ils ont refusé de sortir. « Je me demande si cette manifestation est antimusulmane ? Ils attaquent les musulmans et leurs biens pourtant tout le monde est concerné, ils ont tout saccagé mais ce n’est pas grave, Dieu est grand. Nous allons nous en sortir » se lamente-t-il-t-il.

Haoua Adoum Ibeth

Au lendemain de la manifestation du lieu jeudi 20 octobre dernier appelé encore «jeudi noir» par les militants de la société civile et des partis politiques.  Plusieurs personnes ont été arrêtées et déportées, d’autres sont portés-disparues. Les arrestations se multiplient chaque jour dans la capitale tchadienne et dans d'autres villes de province. Selon les Associations des Droits de l'Homme, certains sont placés dans des commissariats de la ville de N'Djamena, pendant d’autres sont déférés à la maison d'arrêt de Moussoro. Ces arrestations se déroulent souvent dans la soirée et dans la nuit semant la peur chez les habitants de certains quartiers précisent les mêmes associations. Reportage.

Après la manifestation de jeudi 20 octobre dernier, les forces de l'ordre ont procédé à des arrestations des manifestants en faisant du porte-à-porte, dans les quartiers sud, pour arrêter des individus. Les condamnations viennent des certaines Associations des Droits de l'Homme. 72 heures après,  c’est la chasse à l'homme ou  « la chasse à la sorcière sans pitié », clament les associations. Cheikh Saïd Secrétaire Général National de l'Alliance Tchadienne Universelle pour la Défense des Droits de l'Homme (ATUDDH) se dit horrifié par les violences extrêmes survenues lors des manifestations du 20 octobre. Il s'indigne devant le nombre élevé de pertes en vies humaines et des blessés qui ne se justifient nullement même si ces manifestations ne sont pas autorisées. L'ATUDDH dénonce les brutalités et l'usage inacceptable des armes de tout genre lors des manifestations supposées être pacifiques. L'ATUDDH affirme qu'elle suit de près l'évolution de la situation et l'instauration de l'état d'urgence et les résultats de l'enquête annoncée par le gouvernement.

La Commission Nationale des Droits de l'Homme (CNDH), elle aussi se dit préoccupée par la mort de plus de 50 Personnes, plusieurs blessées aussi bien à N'Djamena que dans d'autres villes du Tchad. Elle déplore que certains manifestants aient succombé à des blessures causées par des tirs à balles réelles provenant des forces de l'ordre et principalement de civils à bord de véhicules aux vitres fumées et sans plaques d'immatriculation. La CNDH exige du gouvernement la mise en place d'une commission d'enquête indépendante et crédible en vue de situer les responsabilités, de démasquer, d'arrêter, de juger et de condamner les auteurs de ces crimes odieux et inacceptables qui ont endeuillé des familles tchadiennes. Le président de la CNDH Mahamat Nour Ahmed Ibedou demande aux hautes autorités en charge de la sécurité de veuillez à interdire formellement aux agents des forces de l'ordre de porter des armes létales dans leur mission de maintien de l'ordre. Il exige également l'arrêt immédiat des arrestations des jeunes traqués dans leurs maisons et qui sont pour la plupart des innocents. Compte tenu de la situation, la CNDH entend diligenter  elle-même une enquête en vue de situer les responsabilités, a-t-il conclu.

Noël Adoum

La manifestation du 20 octobre qualifiée par le gouvernement de transition d'insurrection populaire armée n'a pas seulement causé des dégâts matériels, humains, mais aussi et surtout a remis en cause la liberté de Presse. Depuis ce jour plusieurs journalistes ont été arrêtés, d'autres torturés et un cas de décès signalé. L'équipe d'Ialtchad Presse a baladé son micro chez quelques professionnels du métier ce 24 octobre. Reportage.

Le 20 octobre dernier, une manifestation a été sévèrement réprimée par les forces de l'ordre. Certains partis politiques, des ADH et autres déplorent plus d'une centaine de morts, dont un journaliste, Orédjé Narcisse. Depuis lors, plusieurs journalistes ont été victimes de violence dans l’exercice de leur métier.

Yo-Hounkillam Jules Daniel, Directeur de Publication du journal Le Libérateur affirme qu'il a été victime de torture le samedi 22 octobre à 17h sous le viaduc de Chagoua, à quelques mètres de l'Ambassade des États-Unis. Il souligne qu'il partait voir son neveu fauché par balle réelle à l'hôpital. Toujours selon lui, à sa grande surprise, des policiers lui obstruent la route. ‹‹ Je me suis arrêté, avant que je me présente, des policiers appartenant au GMIP ont commencé à me tabasser ››, a-t-il déclaré. Il ajoute, ‹‹ c'est grâce à l'intervention d’un autre élément du GMIP qui était descendu du véhicule que j'ai eu la vie sauve », dit-il. M. Jules laisse soutient qu'après être sauvé, il a voulu s'arrêter, mais son sauveur lui a demandé de quitter les lieux sinon, ces policiers pourraient lui tirer déçu, a-t-il confié avec une voix fatiguée et un visage rempli de frustration. Le cas de Jules n'est pas le seul. Le Réseau des Journalistes Reporters tchadiens (RJRT) dénombre un nombre plusieurs cas des journalistes arrêtés, torturés, menacés ou encore tués.

Pour Leubnoudji Tah Nathan est Secrétaire Exécutif du RJRT, il dénonce le fait que les journalistes sont devenus la cible privilégiée des forces de l'ordre à chaque manifestation. Tout d'abord, le Secrétaire Exécutif du RJRT déplore l'assassinat du journaliste Orédjé Narcisse de FM CEFOD. Selon lui, Orédjé a été tué par balle qu'il suppose être délibérément tiré. ‹‹ Nous ne pouvons pas comprendre que ce soit une balle perdue dans la mesure où il en a reçu deux ››, a-t-il lâché. Il poursuit, ‹‹ dans ce cas, tout porte à croire que ce n'est pas une balle perdue, mais délibérément tirée par des gens qui l'ont visé et atteint ›› .  Le Secrétaire Exécutif du RJRT dénonce également l'arrestation d'un journaliste du journal Le Pays. Il affirme, ‹‹ Ayi Nathan a été arrêté alors qu'il observait la manifestation dans son secteur ››, a-t-il confié. Toujours selon lui, Ayi avait présenté ses pièces, mais les forces de l'ordre l'ont torturé. ‹‹ Il a été obligé de ramper sur des cailloux ›› précise-t-il. M. Nathan dénonce aussi l'arrestation de Ousmane Azarag, journaliste de Le Progrès. Il a été arrêté, torturé avant d'être relâché, dit M. Nathan. En province, M. Leubnoudji dénonce l'arrestation et la torture de deux confrères. L'une de la radio Lotico et l'autre de l'ONAMA. Selon le Secrétaire Exécutif du RJRT, plus de 10 journalistes ont été torturés. Il lance un appel aux autorités, qui doivent selon lui, prêcher l'apaisement, la retenue et le respect de la liberté de Presse et des hommes et des femmes de presse.

Signalons que malgré la dérogation spéciale accordée aux journalistes, ils sont toujours exposés à des maltraitances ou à des violations de leur droit depuis les évènements tragiques du jeudi 20 octobre.

Abderamane Moussa Amadaye

Le débordement des fleuves Chari et Logone n’ont pas épargné le quartier Farcha Milezi. Un site des sinistrés, les réfugiés des eaux est établi dans la forêt de Melezi depuis quelques jours. La rédaction s’est rendue sur les lieux ce samedi 22 octobre 2022. Reportage

C’est dans une ambiance bruyante, pointée de cris, très animée au cœur de la forêt urbaine où sont installés les réfugiés. Au milieu des hangars fabriqués à l’aide des morceaux de tissus et de fouloir attaché des unes aux autres que l'équipe des volontaires enregistre les sinistrés. Certains se font photographier, d’autres, des femmes sont couchées à même le sol. La croix rouge s'active, ses volontaires sont mobilisés pour encadrer les sinistrés.

Maman Azamto Solange, sinistré, expliques, « nous sommes arrivés avec mes enfants et mes petits-fils ici il y a 6 jours à cause du débordement du fleuve qui a atteint nos maisons. Elles sont détruites, nos moutons et nos chèvres sont emportés. Nous sommes chassés par ce phénomène naturel pour venir habiter dans cette forêt qui plein d’excréments. Nous sommes sous le soleil et nous avons faim avec nos enfants. Nous n’avons rien du tout ».

Une autre Tchikemi Eve dit avoir 5 enfants, « je suis ici depuis 5 jours, mais l'équipe d'enregistrement refuse de m'enregistrer alors que nous sommes des vrais sinistrés. Certains amènent leur famille pour les faire enregistrer, ils font semblant alors qu'ils ont des bonnes maisons viennent se faire photographier ».

Mme Haoua Mahamat Abakar chargée de la protection de l'enfance au site de Melezi donne les chiffres, « nous avons enregistré 4872 enfants en totalité répartie en genre 2000 garçons et 2872 filles en quatre tranches d'âge de 0 à 3 mois 1000 enfants. De 3 mois à 5 ans, ils sont à 172, de 6 à 11 ans ils sont à 1400 et de 12 à 17 ans sont 1300. L'enregistrement continue pour les nouveaux sinistrés. Deux espaces dénommés ami des enfants ont été créés pour prendre en compte le volet préscolaire. Pour Mme Amné Ahmat la Coordonnatrice adjointe, affirme que les activités sur le site consistent d’abord à d'identifier les sinistrés, ensuite les enregistrer et enfin leur distribuer les cartes.

Les réfugiés ont commencé à venir depuis le jeudi 13 octobre « jusqu’à présent nous avons enregistré 1173 ménages. Les bailleurs sont en train de construire les tentes ». Après cela les responsables du site logeront chaque ménage dans une tente. Dr Jules Gabrigo chargé des urgences au Médecin sans frontières indique MSF s’occupe du volet médical et d'assainissement. « Au niveau du site, nous avons une équipe sur place chargée de la consultation. Pour la journée d'hier, nous avons consulté 1116 patients parmi lesquels 44 cas positifs au paludisme, puis nous avons implanté 8 points d'eau et envisageons construire 32 toilettes et 32 douches. Nous avons distribué le nécessaire comme les nattes, moustiquaires, savons ».

Ousmane Bello Daoudou

La crue des eaux de Logone et Chari ne cessent de gagner de terrain dans certains arrondissements de la capitale tchadienne. Le 9e et 7e sont les plus confrontés par les inondations. Face à l'inefficacité de la mairie et les lourdes conséquences, le Président de la transition a décrété l'état d'urgence de catastrophe naturel en République du Tchad. Pour faire face la Direction Général de Génie Militaire (DGGM) est déployée pour secourir les sinistrés. L'équipe d'Ialtchad Presse était ce 22 octobre dans leur QG et quelques sites aménagés pour le constat. Reportage.

Il est 11h passé quand l'équipe d'Ialtchad est arrivée au Quartier Général du génie militaire installé à Walia, à une centaine de mètres du cimetière Ngondba aux abords de l'axe n°1 non loin du Campus Toukra. Un mini digue a été construit tout autour formant une île campant le QG. Des gros engins notamment des poclains et des chargeuses, des gros camions y sont mobilisés. Certains sont aux arrêts, d'autre par contre font des navettes. Des camions de sapeurs-pompiers du DGGM acheminent de l'eau potable dans les sites aménagés. Les camions font des voyages vers la population sinistrée afin de leurs aidés à déménager. Weré Stéphanie, une sinistrée (enceinte) de Walia Djigingali, résidente au camp de Toukra relève qu'elle est reconnaissante envers le génie militaire qui n'ont ménagé aucun effort pour la sauver des eaux. Elle souligne aussi que c'est grâce à eux qu'elle a trouvé les premiers soins, de l'eau potable etc. Toutefois, Stéphanie explique qu'il y'a des insuffisances tant sur le plan alimentaire, sanitaire que social. Elle invite les personnes de bonne volonté à leur venir en aide, a-t-elle laissé entendre. Un autre, éleveur occupant l'espace forêt, devant le cimetière Ngondba, durablement touché par les eaux affirme qu'ils manquent de tout. Selon lui, n'eût été l'intervention du génie militaire, personne d'eux ne sortira avec quelque chose de ses eaux.

Pour le Colonel Guerdi Abakar Adoum, Directeur Général de Génie Militaire, son équipe a été déployée depuis le 13 octobre dans le but d'assister les sinistrés. Il souligne qu'ils sont instruits par les plus hautes autorités du pays pour venir en aide aux vulnérables. Selon le Colonel, chaque jour, son équipe fait déménager des ménages des zones inondées vers le site aménagé. A l'heure actuelle, le Directeur Général de la DGGM affirme qu'il y'a plus de 60 000 personnes déplacées à cause des débordements de deux fleuves. Il soutient que malgré les travaux d'envergures entamés, le Chari et le Logone ne cessent de gagner de terrain. Il n'a pas oublié de souligner quelques difficultés, entre autres, des matériaux adéquats et des engins. Le Colonel Guerdi Abakar Adoum soutient aussi que la population est sous informée et le convaincre à quitter les zones de risque n'est pas chose facile, a-t-il indiqué.

Rappelons que les eaux de Logone et Chari ne cessent de prendre de volume importante. Chaque jour que Dieu fait, elles ne cessent de gagner de terrain malgré l'action gouvernementale. La quasi-totalité des digues ont lâché. Tous les quartiers situant entre le croisement de deux fleuves ne sont pas épargnés d'une éventuelle inondation générale, dont les conséquences seront fâcheuses.

Abderamane Moussa Amadaye

Au lendemain de la manifestation qualifiée par le gouvernement d'insurrection populaire armée, un calme précaire est revenu dans la capitale tchadienne. De Chagoua à Walia, d’Abena à Kambda en passant par Amtoukouin, les routes sont barricadées par les briquaillons, du cendre des pneus et quelques autres objets. Ialtchad Presse a fait un tour dans les différents quartiers de N'Djamena. Reportage.

Ce matin, vendredi 21 octobre, les forces de l'ordre confondues composées de militaires, des gendarmes, des nomades, de la police GMIP et de la mairie ont occupé tous les grands carrefours, les ronds-points ainsi que les coins et les recoins des quartiers sud de N'Djamena, capitale tchadienne. Ces forces lourdement armées sont en position de tires. La peur se lit sur les visages de la population. Les écoles, certains boutiques, marchés et restaurants sont fermés. Du siège de Parti Socialiste sans Frontière (PSF) en passant par l'ancien pont, la voie était dégagée et nettoyée par la mairie. L'on constate les navettes des véhicules de la police et des militaires toutes les 5 minutes. Une autre unité de l'armée est stationnée sur le terrain Festa Africa.  

De quartier Abena en passant par Walia, des barricades avec des dalles sont érigées, des cabines des parieurs, des pneus brûlés, des bricaillons au bord de la voie bitumée barrant les voies et obstruant la circulation des engins sur les voies publiques.  Plusieurs édifices et biens privés ont été saccagés, brûlés et réduits en cendre en l'occurrence le pont à péage et un bar à Walia. Au siège de RNDT le Réveil, les manifestants ont saccagé le lieu, cassé le mur et les portes, des documents sont consumés par le feu. Dans le siège de l'UNDR (l'Union Nationale Démocratique et de Renouveau) au quartier Abena, les manifestants ont brûlé le local, plus d'une dizaine de chaises et des nattes, certains bureaux ont changé de couleur après avoir été consumés par la fumée.

A l'hôpital le bon Samaritain de Walia plus précisément à la chirurgie, le constat est lourd, les victimes des tirs à balles ont occupé pratiquement toute la salle. Selon l'infirmier chargé aux urgences Klarangué Christophe, «parmi ces manifestants, notre hôpital a accueilli 46 manifestants blessés, dont 8 cas de décès», déplore-t-il. Il ajoute que «l'hôpital a pris tous les dispositifs nécessaires pour accompagner les blessés». Au quartier Abena, la cité est silencieuse comme morte où les populations sont en deuil. Le siège des Transformateurs est quadrillé par des militaires, cette zone est devenue quasiment inaccessible pour les civils.

La manifestation d'hier 20 octobre a laissé les traces sur les routes, dans les hôpitaux, personne n'est épargné. 24h après, un calme précaire règne sur la capitale, N’Djamena.

Noël Adoum

Après 24h de la manifestation du jeudi violemment réprimé par les forces de l'ordre, l'équipe de IalTchad Presse s’est rendu dans le quartier Moursal et Dembé pour constater l'ambiance d’après manifestation Reportage.

Il est 11h passé, ici le siège du Parti socialiste sans Frontière (PSF), les portes sont ouvertes un silence de mort y règne. Tout est calme. A l’intérieur tous les bureaux sont grands ouverts, les matériels sont saccagés, tout est à terre : matériels informatiques, documents déchirés, objets cassés traînent sur le sol. Aucune présence humaine sur les lieux sauf des cris des oiseaux animent les lieux. Après le bureau du PSF nous continuions, quelques personnes vont et viennent. Les camions Toyota remplis des militaires bien armés circulent, certains passants observent. Le service d'assainissement de la mairie de commune du 7e arrondissement est à pied d'œuvre pour le nettoyage des restants de pneus brûlés.

Dans le quartier un sentiment de frustration, de douleur sévit « nous avons perdu des amis, ils continuent toujours à nous massacrer, mais nous cherchons seulement la justice et l'égalité. Nous avons encore le temps de pleurer nos morts, soigner les blessés », disent les résidents. Pour eux, la suspension des partis et des organisations de la société civile n'attendent pas moins. Selon les habitants du quartier, le nouveau Premier ministre Saleh Kebzabo n’est qu’une marionnette, peu importe sa décision. « Nous avons pris conscience, il y a une lieur d'espoir qui vient de voir jour. Si les anciens ont failli, il faut se remettre en ordre de bataille. « Nous sommes dans la tristesse, les gens sont endeuillés, la manifestation est légale et autorisée par la charte de transition, nous ne voulons pas des assassins à la tête du pays », disent-ils. Ils poursuivent en soutenant que la déclaration du Premier ministre est une déclaration de guerre. « Nous manifestons pour une cause juste. Ce n'est pas pour le plaisir de manifester. Ce que nous avons fait est une introduction. Les gens sont morts ne sont pas morts gratuits ».

Du côté des commerçants et des vendeurs, « nous ne sommes pas de manifestants, mais hier il y avait un bouleversement sur nos activités à cause de manifestations », disent-ils. Selon eux, les autorités devaient sécuriser la manifestation, mais ce n'est pas le cas. Les forces de l'ordre ont maltraité et tué des simples manifestants à main nue, « nous ne sommes pas d'accord avec cette manière de faire » affirment-ils. Les commerçants dénoncent le couvre-feu. « Par ici nous sommes inondés, par là ils nous tuent ». Alors nous allons faire comment ? Pour cette vendeuse hier était douloureux, c'était très difficile. Nous avons enregistré des pertes, une grande partie est pourrie puisque nous sommes de débrouillard. Pour aujourd'hui il n'y a pas d'engouement comme avant, les gens ont peur de venir au marché. Si les clients ne viennent pas pour acheter, c'est compliqué pour nous, racontent-ils.

Ousmane Bello Daoudou

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