jeudi 28 mars 2024

Le secteur laitier peine à décoller (1)

Jui 16, 2021

La journée mondiale du lait a été célébrée le 1er juin passé. Au Tchad, le secteur laitier est embryonnaire et rencontre beaucoup de difficultés. Reportage dans une laiterie.

Klessoum à la sortie Est de N’Djamena. C’est dans ce village qu’Issa Adoudou Artine a implanté sa laiterie. Depuis 2015, il transforme localement des produits laitiers. Grâce au lait de vache que lui procurent des éleveurs à proximité de son usine, il fabrique du yaourt, de la crème liquide, du beurre, du fromage, etc.

Comme entrepreneur, investisseur et Tchadien, M. Artine tient à développer ses affaires dans son pays. Mais le climat d’affaires n’est pas propice, « il n’y a que des difficultés dans ce secteur. C’est vraiment pénible, intenable », dit-il d’air désabusé. Mais une seconde plus tard, il redevient combatif. Et s’emballe par son projet.

Difficultés

M. Artine évoque d’abord le manque de matière 1re : les vaches laitières. « Le Tchad est un pays d’élevage bien sûr. Mais le problème c’est quelle catégorie de cheptel dont le pays dispose ? », fait-il remarquer. Il est vrai que le Tchad est un pays agropastoral par excellence. Mais son cheptel ne compte vraiment pas des vaches productrices de lait. « Même si on a des millions de têtes de vaches, le lait qu’elles produisent est insignifiant et souvent ce n’est pas un lait de qualité », relève Issa Adoudou Artine. Il explique que cette faible production laitière est causée par le problème de pâturage et de traitement vaccinal.

« Le pâturage est un réel problème pour nos bétails », reconnaît un éleveur, fournisseur de M. Artine. Mal nourrie, la vache est incapable de produire du lait en quantité pour nourrir le veau, pour l’autoconsommation et pour la commercialisation. « Regardez, pour presque 20 vaches, elles ont produit à peine 2 litres de lait », dit-il en fixant le bidon de lait déposé sur la balance. 

Ensuite, le problème du personnel qualifié. Pour le patron de la laiterie Artine, on compte au Tchad assez de Médecins vétérinaires spécialisés en élevage, mais très peu « d’ouvriers qualifiés.» Pour le besoin, son organisation s’est dotée d’un centre de formation où des éleveurs sont formés sur des techniques d’entretien du bétail et de prélèvement du lait. « Avec ces b.a.-ba, ils nous rapportent du lait prélevé dans des conditions acceptables même si c’est en petite quantité », affirme Issa Adoudou.   

Enfin, la problématique de la commercialisation. Selon l’entrepreneur Issa Adoudou Artine, la transformation des produits laitiers est confrontée à l’absence « d’une politique de vulgarisation » et à un manque de prise de conscience à tous les niveaux. Ce qui entraîne, de facto, une méconnaissance des produits laitiers transformés localement. « Les gens continuent par consommer ce qui est importé alors qu’on a commencé par produire sur place », s’agace-t-il. Pour lui, il faut privilégier la production locale. Et pour cela, un plaidoyer est nécessaire. Car, dit-il, le produit laitier tchadien n’est pas compétitif.

Les difficultés sont légion, mais le patron de la laiterie Artine reste optimiste, « au Tchad, le secteur laitier est vierge ». Il évoque aussi le manque d’investissement des acteurs privés et un délaissement de l’État. « L’État ne donne aucune subvention, n’aide pas les éleveurs à entretenir leurs bétails contre certaines maladies », énumère-t-il.

Espoir

Malgré tout, il persévère. Pour ravitailler son usine de transformation, il a mis sur pied un projet pilote de croisement d’animaux productifs. Il a, pour l’instant, une cinquantaine de têtes dans ce projet. Il cultive aussi une variété d’herbe pour l’alimentation des vaches laitières. Et enfin,  il a un projet de construction d’une étable pour l’élevage sur place des vaches laitières.

Pour le décollage de ce secteur, Issa Adoudou Artine propose au ministère de l’Élevage de mener une politique de vulgarisation. Car, insiste-t-il, le secteur laitier est un secteur qui peut créer de la richesse et la prospérité d’un pays comme le nôtre qui est par essence un pays d’élevage. Mais regrette-t-il, « les autorités n’ont toujours pas compris les enjeux politiques et financiers liés à ce secteur. »

Christian Allahadjim

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