Les rideaux sont tombés sur le théâtre politique de la transition. C’est la fin. Une nouvelle page politique s’est ouverte avec l’investiture du président Mahamat Idriss Deby Itno le 23 mai dernier, la nomination d’un nouveau Premier ministre (PM) M. Allah-Maye Halina et la formation du gouvernement. Il y a-t-il de changement? Non. Pourquoi?
D’abord, le Premier président de la 5e République a placé son investiture sous l’angle du changement. Il a repris quasiment toutes ses principales promesses de campagne. 70% de dépenses de l’État iront au social : des hôpitaux et des routes seront construits, des soins seront prodigués gratuitement, l’école tchadienne sera refondée, une armée modernisée verra jour, etc. Toutes ces promesses sont arrosées d’un « je vous ai compris » à la Charles de Gaule. A-t-il vraiment compris les Tchadiens? Souhaite-t-il le changement comme il le clame? Pas sûr.
La preuve, c’est la nomination de M. Halina comme PM. Le président a certainement opté pour la loyauté, mais au sortir d’une transition avec des élections contestées, est-ce le bon choix? Non. Ce PM n’est pas politique. Il ne peut pas être un agent de changement. Son équipe non plus. Pis, il a très peu d’expérience gouvernementale. Pourra-t-il, au moins, faire de bons arbitrages face à certains poids lourds du gouvernement? Pas sûr. On sait l’admiration du président pour le nouveau PM lorsqu’il disait dans son livre autobiographique « De Bédouin à Président », que c’était comme son « grand frère ». Alors cette nomination est-elle sentimentale ? Chose certaine, la présidence veut une primature docile, avec M. Halina elle sera totalement soumise.
Aussi, le clou dans le cercueil du « changement » est illustré par la composition du gouvernement. Qu’est-ce qu’il y a de nouveau? Rien. Presque, la même équipe est reconduite. Il y a certes quelques nouvelles têtes qui ont fait leur entrée, mais elles occupent en majorité des rôles secondaires. Ils ne pourront donc pas insuffler le changement. Ceux qui ont cru au changement en ont pour leur compte. Ceux qui voulaient que rien ne change en appelant le nouveau président à ne pas inclure l’opposition sont, eux aussi, déçus. Même le leader de la Coalition Tchad uni et ses membres qui chantaient au lendemain des résultats définitifs « ial djidadd » (les poussins), « ial canard » (canetons), pour se moquer de leurs adversaires politiques sont ko debout. Mahamat Idriss Deby Itno est désormais le seul maître du jeu politique pour les 5 prochaines années. Et c’est bien fait pour ceux qui croyaient être malins. À malin, malin et demi.
Bello Bakary Mana