Cahin-caha, la campagne référendaire avance avec ses adversités politiques enchevêtrées des ambitions de différents acteurs politiques. Mais qui en sortira gagnant ?
C’est définitivement Succès Masra, le chef du parti Les Transformateurs. Il est le visage populaire de cette campagne référendaire qui a tourné à son avantage. À son seul avantage. Il attire la foule par millier. C’est spectaculaire et impressionnant le tour de force qu’il a réussi depuis son retour.
La démonstration de sa popularité a atteint son zénith à Moundou, la capitale du Logone occidentale. Il avait besoin de cela pour reprendre espoir après son exil. Ses prises de parole sont aussi énigmatiques que sa position. Il appelle les électeurs à faire le choix qui leur semble bon. Ils peuvent voter oui ou non, peu importe. Il s’en accommodera. Il est égal à lui-même: ni contre le fédéralisme ni contre l’État unitaire. Ce qui est important pour le « berger » de la Transformation, c’est le contact avec son « troupeau ». La foule vient à lui pour voir, toucher, entendre ce berger qui ambitionne de les mener vers le « pays transformé » quand il sera président de la République. Sa force de frappe est sa capacité à mobiliser les foules de tous les âges et de tous les horizons. Il a profité de la campagne référendaire pour mener subtilement sa propre campagne. « Aidez-moi à transformer ce pays, en devenant président. Est-ce que vous êtes prêts à aller aux élections? Qui peut vous battre?», lance-t-il, la voix cassée devant une foule hystérique.
Alors qu’en début de campagne le Premier ministre le Kaïgama Saleh Kebzabo a astucieusement ravi des caciques du Mouvement patriotique du Salut (MPS) la gestion de la campagne du Oui, mais cet exploit a été éphémère. Et n’a duré que 8 jours malgré s’être engagé dans la campagne, ne ménageant aucun effort physique, le Kaïgama est critiqué par la présidence au prétexte que sa coalition pour le Oui ne réussit pas à mobiliser. Pas d’attroupement populaire lors de ses déplacements marathons. Quelques partisans épars s’agitent. Pas plus. Le Kaïgama s’accroche, fait recours à l’ex-Secrétaire général du MPS, Mahamat Zène Bada. Trop tard, la piste est savonnée par l’ami de circonstance et l’adversaire de toujours, l’actuel Secrétaire général du MPS, Haroun Kabadi…Résultat : Le MPS reprend la main. Les caciques du parti créent l’Alliance pour le Oui. Ils réveillent leur vieille machine de campagne : les bureaux de soutien et les partis alliés. Ils sont ragaillardis. Se jettent dans la campagne référendaire, mais c’est difficile pour eux. Ils mettent les bouchées doubles pour ne pas laisser le terrain aux seuls Transformateurs. Sur le terrain, le Kaïgama Kebzabo et son gouvernement sont débordés par le succès de Succès. Quand ils mobilisent quelques centaines, Succès draine une marée humaine. Ils ne savent plus comment mener cette campagne référendaire. Ils font le dos rond et remercient le ciel que Succès avec sa stratégie de « ni, ni » est dans le camp de l’État unitaire « fortement décentralisé ».
Enfin, la présidence de transition observe perplexe cette campagne qui a fait émerger le chef des Transformateurs en acteur politique incontournable. Cette campagne référendaire est l’avant-goût d’un face à face inévitable entre le MPS et Les Transformateurs aux prochaines élections législatives. Et un duel inédit aux présidentiels entre-deux gagnants de la transition Succès Masra et Mahamat Idriss Deby.
Bello Bakary Mana