Le ramadan est un mois sacré pour les fidèles musulmans. C’est aussi l'un des cinq piliers de l'Islam. Les musulmans tchadiens ont commencé le jeûne empruntant le neuvième mois du calendrier lunaire musulman, le 13 avril. Ce jeûne doit bientôt prendre fin avec la célébration de l'Aïd el fitr. Pour comprendre le sens de cette fête, Ialtchad Presse a rencontré le Secrétaire général du Conseil supérieur des Affaires Islamiques au Tchad (CSAI), Cheikh Abdadayim Abdoulaye Ousman. Reportage.
Il est pratiquement 10 heures lorsque nous entrons dans la grande cour de la grande Mosquée de N’Djamena, capitale tchadienne. Plusieurs personnes démunies, des femmes veuves, des enfants, des personnes handicapées et des vieillards remplissent la cour. Ils sont venus pour les prières, mais aussi pour bénéficier des actes de bienfaisance en ce mois saint de l’islam.
Reçu par le Cabinet du SG Cheikh Abdadayim Abdoulaye Ousman, très rapidement sommes introduits à son bureau. D’un air affirmé, le SG du Conseil supérieur des Affaires Islamiques au Tchad (CSAI), nous reçoit à son tour avec amabilité. Sans tarder nous échangeons sur le sens de la fête de l'Aïd el fitr. Selon lui, la communauté musulmane a deux fêtes. Le premier est l'Aïd el fitr qui marque la fin du jeûne de ramadan et la seconde c’est la fête de Tabaski appelée l'Aïd el Ad Ha. Ce sont des célébrations musulmanes qui datent du temps du prophète Mohammed, informe-t-il. Cheikh Abdadayim que les fidèles musulmans suivent le chemin de leur prophète. Pour lui, qui dit une fête dit la joie même s’il y a d’évènements qui peuvent signifier aussi douleur. Pour lui, la fin de Ramadan se fait en tenant compte de l’apparition de la lune, elle a lieu 29 ou 30 jours après le début du ramadan. Tout est compris dans le Saint Coran que ce soit lunaire ou solaire. « Pour comprendre, il faut savoir que le calendrier musulman est, contraire au calendrier grégorien occidental. Comme les cycles de la lune sont plus courts, le Ramadan commence à chaque fois dix à douze jours plus tôt que celui de l'année précédente. Le début, mais également la fin du Ramadan sont déterminés par l'apparution de la lune dans le ciel», explique-t-il.
Pour le SG du CSAI, lorsque le jeûne s'achève, les musulmans croyants célèbrent la fin du ramadan : l'Aïd el-Fitr qui signifie fête de la rupture. Selon lui, l'Aïd el-Fitr n'est pas que l'occasion de faire la fête. C’est l’occasion de rassemblements familiaux et amicaux durant lesquels on se présente des vœux de bonheur et de santé en ce jour de fraternité. Dans le monde entier dit-il, les musulmans fêtent l'Aïd el-Fitr, en préparant un repas riche avant de se livrer à des prières. D’après Cheikh Abdadayim, Il est également du devoir des fidèles de garder une partie de leur nourriture pour les plus pauvres. Les bons actes doivent se poursuivre, a-t-il indiqué pendant ce temps de bénédiction.
« Cheikh Abdadayim, il faut du bon sens des fidèles pendant la fête »
Le SG du CSAI soutient qu’il n’est pas bon pour un musulman de se mettre rapidement en colère pendant le ramadan. « Je vous conseille plutôt d’être ouvert, faire preuve de maîtrise de soi. Soyez tolérants et pardonnez toujours au-delà de tout. C’est vertueux. Quand on est dans un esprit d’adoration, il faut suivre les conditions et les conseils», recommande-t-il. Cheikh Abdadayim exhorte les fidèles à persévérer dans les prières en commun dans les mosquées mêmes après le Ramadan. Pour lui, Il faut continuer même dans les Nafales (jeûnes et prières volontaires) pendant et après le ramadan.
«Ce que nous déplorons dès que le ramadan finit, quelques fidèles se jettent dans le péché à travers les actes interdits. Aller dans les bars, livrer des bagarres, repartir vers la vie de débauche, constituerait des obstacles selon, les Oulémas pour les imposteurs de rater la miséricorde d’Allah », dit le SG du SCAI. C’est la même chose lorsqu’il s’agit aussi du pèlerinage signifie-t-il. D’après Cheikh Abdadayim, le ramadan est un entraînement qui permet de bien se comporter et continuer sur le bon chemin.
Durant ce mois bénit, les musulmans promeuvent les interdits et doivent traiter durement leur corps. Une manière de purifier leur esprit. Ni boisson ni nourriture, les restrictions s'appliquent également au tabac et aux relations sexuelles. Une fois la nuit tombée, les fidèles ont le droit de se réunir pour « rompre le jeûne ». À noter que le Ramadan est synonyme de recueillement et de méditation.
Moyalbaye Nadjasna
Tantôt maintenue tantôt interdite, la marche pacifique de ce samedi semble avoir été un échec. Sur l’itinéraire prévu et dans les quartiers, les manifestants ont fait place aux forces de l’ordre. Reportage.
N’Djamena, capitale du Tchad. Samedi 8 mai, jour de la deuxième marche pacifique initiée par la Coordination des actions citoyennes (CAC) dénommée Wakit Tama pour protester contre la mise en place du Conseil Militaire de Transition (CMT).
Walia, dans le 9e arrondissement. Le soleil s’est levé, il y a deux heures déjà. Mais le quartier est bien calme. Pourtant le 27 avril dernier, ce secteur a été le théâtre de violentes manifestations. Ce samedi, il est sous une haute surveillance sécuritaire. Des véhicules bourrés des éléments du Groupement mobile d’intervention de la Police (GMIP) et des militaires sont garés à des endroits stratégiques : établissements scolaires, ronds-points, devanture de l’hôtel 3AS.
Devant le lycée de Walia, plus de 4 véhicules du GMIP font instantanément la ronde afin de disperser toute tentative de rassemblement de personnes sur ce lieu. Il faut rappeler qu’à la marche précédente, ce lycée a été investi par les manifestants, brûlant des pneus bloquant ainsi la circulation sur l’unique route nationale. Un peu devant, au niveau du Lycée privé AGORA, un homme a mis le feu sur un tas de saletés. Instant d’après, un véhicule de marque Toyota L200 bourré d’éléments s’arrête : « qui a mis le feu ? » lui demande avec insistance le chauffeur. Le monsieur, l’air perdu répond vaguement que ce n’est pas lui. Les policiers le laissent et continuent leur chemin.
Au niveau de l’hôtel 3AS, au moins 5 véhicules militaires sont garés. Comme il n’y a aucun mouvement dans le secteur, certains éléments prennent une pause dans les véhicules, d’autres sont couchés à même le sol.
Sous le viaduc du pont de Chagoua, la présence de ces hommes en treillis donne l’impression qu’une guerre se prépare. Véhicules militaires, policiers, des armes de gros calibre sont visibles. Malgré ce déploiement impressionnant, les activités tout autour du pont semblent fonctionner normalement.
À l’espace FEST’AFRICA où devait commencer la manifestation, ce sont toujours les forces de sécurité qui ont pris d’assaut les lieux alors qu’il était déjà 9 heures passées. Elles sont sur place au petit matin. « Les leaders ne sont pas encore arrivés, mais déjà les policiers sont venus chasser les gens qui étaient là ce matin », dit un vendeur.
À quelques mètres, nous apercevons un véhicule de police s’arrêter devant un jeune tenant dans sa main une chemise cartonnée, téléphone à l’oreille. Un policier s’approche de lui et demande à fouiller la chemise. Une fois le spectacle fini, nous nous sommes approchés du jeune homme : « ils m’ont demandé qui j’appelle. Je lui ai répondu que c’est mon petit pour qu’il vienne me déposer quelque part en ville ». Heureusement, il n’a pas été arrêté.
Même constat à Atrone, Habbena et Gassi dans le 7e arrondissement, réputés bastion de la contestation. Ces quartiers sont pris d’assaut par les forces de l’ordre composées de militaires, des éléments du GMIP, de la Garde nationale et nomade du Tchad (GNNT) et des gendarmes. L’avenue Mathias Ngarteri communément appelée l’axe CA7, connu pour être un terrain d’affrontement entre manifestants et forces de l’ordre, est calme ce samedi. La circulation est fluide. L’axe menant du rond-point 10 octobre jusqu’au quartier Ambatta est l’endroit ciblé par les forces de l’ordre qui font de navettes pour traquer tout récalcitrant. Devant le sous-poste de police situé derrière le centre de santé d’Atrone, plus de 5 véhicules bourrés d’hommes en treillis sont stationnés dans le but de veiller sur le sous-poste, qui le 27 avril dernier est pris en otage par les manifestants. Des camions-citernes chauffe-eau du GMIP sillonnent également la zone.
Malgré tout ce dispositif mis en place, cela n’a pas empêché de groupes de manifestants de sortir. Toutefois, leur action a été vite étouffée par les forces de l’ordre qui patrouillent sans cesse ces zones. Aucun cas de brûlure des pneus n’est signalé dans ces quartiers.
Selon le coordinateur de Wakit Tama, Me Max Loalngar, les autorités les ont piégés. « Elles ont dit que la marche allait être autorisée. Donc nous avons indiqué un lieu de rassemblement et un itinéraire. Mais avant que le rassemblement ne soit effectif, les forces de l’ordre ont commencé par tirer sur les gens », s’insurge-t-il. Du coup, la marche pacifique qui devrait être encadrée s’est transformée en des manifestations sporadiques.
Si la marche de ce jour, comparée à celle du 27 avril, semble ne pas avoir drainé assez de monde, Me Max Loalngar estime que c’est une réussite sur le plan idéologie. « Parce que cela a permis de constater que les autorités de transition sont de mauvaise foi. Elles ont adopté une attitude guerrière en dévoilant leur caractère sectaire », dit-il.
Bilan : Wakit Tama évoque une quinzaine d’arrestations à N’Djamena dont 9 devant la base de l’opération Barkhane. Une vingtaine d’autres à Moundou et une dizaine à Sarh. 10 blessés dont 3 graves sont également enregistrés à N’Djamena. Un journaliste de la télévision nationale habitant le quartier Atrone, Djimitibeye Yemingaye a été tabassé par les militaires alors qu’il était devant son domicile. Une équipe des journalistes de la Rfi aussi ont été brièvement interpellées à l’espace Fest’Africa. Leur enregistrement a été effacé. Officiellement, les autorités n’ont pas encore fait une communication.
Christian Allahadjim
Togyanouba Santanan
Allarassem Djimrangar
Trois pasteurs de l’Alliance des églises pentecôtistes au Tchad ont été suspendus de toutes activités religieuses sur l’ensemble du territoire national tchadien, par le ministre de l’Administration du territoire et de la Décentralisation. La décision de suspension du 5 mai, leur reproche d’avoir pris part aux manifestations du 27 avril, contraire à leur vocation apolitique. Ialtchad Presse est allé à la rencontre de ces hommes de Dieu. Reportage.
15 heures passées, nous sommes au quartier moursal, 6e arrondissement de N’Djamena. Sous l’ombre d’un Nimier, sont assis en convivialité les trois hommes de Dieu suspendus. Pasteurs, Keleypetté Dono et Bekoutou Marabey Pierre sont de l’Église du Christ Universel, puis Pasteur Targoto Josias, de l’EMENVI. Pasteur Bekoutou Marabeye, est le plus âgé des trois. Il parle aux noms des deux autres, « cette suspension ne nous fait ni chaud ni froid… ».
Selon pasteur Bekoutou, le ministère de l’Intérieur les a interpellés hier 06 mai pour leur notifier la décision les suspendant à ne pas exercer leurs activités religieuses sur toute l’étendue du territoire national. « Ils sont dans leur droit, c’est tout à fait normal. Ils font leur travail et ils sont payés pour ça. Mais pour nous, cela n’a aucun impact. Nous ne sommes pas nommés par décret ni arrêté de leur ministère. Nous sommes des serviteurs de Dieu. Nous avons choisi notre voie celle d’écouter et de recevoir de Dieu. Et non à recevoir des ordres des humains mortels comme nous », a-t-il indiqué. Pour lui, c’est une décision qui peut arrêter leur corps charnel et non l’esprit que Dieu a mis en eux. D’après lui, nous sommes des créatures de Dieu et nous convergeons vers lui. Il rajoute qu’eux les serviteurs de Dieu ont une mission, celle de rendre compte à Dieu.
Pasteur Bekoutou Marabeye confirme qu’ils ont pris part à la manifestation. «Nous sommes les bergers et les bergers doivent se mettre à l’avant-garde des brebis et non à la queue afin de ne pas les laisser divaguer seules dans la nature. La plupart des manifestants qui sont blessés ou morts sont des fidèles des églises. Nous avons fait cette marche d’une manière symbolique et prophétique pour que le monde sache que rien ne va plus dans cette nation», déclare-t-il. Selon le religieux, ils n’ont pas marché au nom de l’Église, mais plutôt au nom de leur groupement dénommé, «plateforme des serviteurs de Dieu pour la justice et le droit au Tchad». Il affirme qu’ils ont marché en conscience en tant qu’hommes de Dieu pour désapprouver le coup d’État perpétré par le Conseil militaire de la transition (CMT) après le décès du président Idriss Deby. Il dit que leur plateforme trouve anormal ce qui s’est passé et il faut le dénoncer. « Cette décision de suspension de nos activités ne nous fait ni chauds ni froids», dit-il. Pour le pasteur, les premiers missionnaires qui sont venus en Afrique et au Tchad ont su que les noirs sont des gens avancés quand bien même qu’ils seraient acculturés. Il renchérit en signifiant que ceux-ci ont empêché que de faire extérioriser les pensées des noirs. «C’est ainsi qu’ils ont étouffé les premiers chrétiens pour dire que si vous faites la politique vous n’irez pas au ciel», indique le pasteur.
«Lorsqu’un chrétien ne fait pas la politique, c’est un corrompu»
Le pasteur poursuit que dans la Bible, il est noté que les militaires, les douaniers, les administrateurs étaient venus voir le prophète Jean-Baptiste, pour recueillir de lui des conseils et il a mis chacun à sa place. « Ce n’est pas aujourd’hui qu’on ne doit pas faire la politique. Lorsqu’un chrétien ne fait pas la politique, c’est un corrompu. Il s’aligne avec ceux qui détruisent le pays. Aujourd’hui, ce sont les chrétiens qui ont détruit le pays par leur mensonge, leur vol», affirme le pasteur de l’Église du Christ Universel. Bekoutou Marabey Pierre signifie qu’il y a des chrétiens constitutionnalistes dans ce pays qui ne peuvent même pas lever un petit doigt pour dénoncer ces choses. «L’heure est venue pour démanteler ces choses. Les chrétiens doivent dire la vérité à la lumière de la Parole de Dieu. Il faut remettre la pendule à l’heure», martèle le serviteur de Dieu. Il rappelle que le président défunt a dit que le fondement de la nation tchadienne est à terre. Pour cela, Pasteur Bekoutou Marabey Pierre déclare qu’il faudra dès à présent chercher à relever ce fondement afin que le pays se tienne debout. «Nous voulons un pays de justice et d’équité ou n’importe quel tchadien puisse trouver son compte. Nous ne cherchons pas notre intérêt, nous ne cherchons pas non plus à nous positionner quelque part, mais nous voulons faire jaillir la vérité qui est la colonne vertébrale de la justice», conclut-il.
Le révérend pasteur Batein Kaligué Batein est le Secrétaire général de l’Entente des Églises évangéliques et missionnaires au Tchad (EEMET). Selon lui, les pasteurs suspendus ne relèvent pas de sa responsabilité. «Toutefois, c’est une situation qui est arrivée et cela nous prend à la gorge en tant que serviteur de Dieu. L’Administration a joué son rôle», signifie-t-il.
Nous avons joint au téléphone le ministre de la Justice Garde des Sceaux, M. Mahamat Ahamat Alabo. Mais d’après lui, «si quelqu’un est lésé, il porte plainte à la justice.»
Moyalbaye Nadjasna
A quelques jours de la fête du ramadan, les ateliers de couture ne se désemplissent pas. Malgré les difficultés, les couturiers communément appelés « tailleurs » travaillent fort pour satisfaire leurs clients. Reportage.
N’Djamena, capitale tchadienne. Il est 10h ce vendredi 7 mai. La température est de 36° Celsius. La fête de Ramadan est dans quelques jours. Et dans la ville, les préparatifs vont bon train.
Sur l’avenue El Niméry et Charles de Gaulle, dans les 2e et le 3e arrondissement de la ville, des commerces de circonstance sont ouverts tout le long des trottoirs menant au grand marché. On y trouve des vendeurs de chaussures, des jouets, des jus, des prêts-à-porter, etc. Et la fête ne se prépare pas seulement sur les marchés, mais également chez les couturiers.
Dans des ateliers de couture sur les avenues El Niméry et Charles de Gaulle, il y a du monde. Tailleurs et clients se mêlent. Certains tailleurs, assis sur des nattes, s’activent à fixer des boutons. D’autres, par contre, les yeux rivés sur leurs machines travaillent à tue à-tête. Les clients, quant à eux, se disputent de la place. La fête du Ramadan approche et la pression monte, de tout côté. Le constat est le même dans les différents ateliers de couture visités. Les modèles les plus sollicités sont les djellabas simples et les grands boubous. Le prix de couture n’est pas fixe. Le prix varie d’un modèle et d’une qualité par rapport à autre. Toutefois, le prix pour les djellabas oscille entre 5 000 à 30.000 francs CFA.
Haroun, un client rencontré dans un atelier de couture non loin de la grande mosquée Roi Fayçal. Il ne cache pas sa satisfaction. « Comme vous pouvez le constater, je suis venu retirer mon habit que j’ai confié le samedi dernier au couturier. Ce qui me plaît chez lui, est qu’il respecte toujours ses rendez-vous. Il n’est pas comme les autres qui vont te rouler dans la farine », se réjouit-il. Par contre, Idriss, un autre client, rencontré dans un autre atelier, est très en colère. « Mon tailleur n’est pas sérieux. Je lui ai remis le tissu avec l’argent depuis la fin du mois d’avril. Mais jusqu’à présent, il n’a rien fait. Trop c’est trop ! Je vais bouger d’ici avec mon habit. Sinon, il me restitue mon argent ainsi que mon tissu », menace-t-il.
Les couturiers rencontrés déplorent le délestage intempestif d’électricité depuis le début du mois du ramadan. Selon eux, ce délestage leur crée un manque à gagner. Ils sont obligés de refuser de prendre en grande quantité les tissus des clients de peur de ne pas tous les coudre à temps. Et cela joue sur les affaires. « Depuis le 13 avril dernier, on a jamais passé une journée avec le courant. Les coupures intempestives d’électricité sont monnaie courante. Cela fait que nous n’avons pas de clients comme dans les années précédentes. Parce qu’on se réserve de prendre les tissus de gens en grande quantité », se plaint Abakar, couturier au grand marché. Alhadji Ousman, renchéris en affirmant que le problème de l’électricité est un véritable problème. Mais depuis quelques jours, dit-il, tout semble s’améliorer. « Quand il y a délestage, nous utilisons les groupes électrogènes, cependant cela ne nous arrange pas tellement. Mais Dieu merci, depuis trois jours, il n’y a pas de coupure d’électricité dans mon secteur ».
Allarassem Djimrangar
Par un arrêté rendu public ce 7 mai par le ministère de la Sécurité publique, les manifestations pacifiques sont autorisées. Mais sous plusieurs conditions.
D’après les termes du document, les manifestations pacifiques sont autorisées « conformément à la charte de transition et à la volonté des plus hautes autorités au respect de l’État de droit. » Et pour cela, indique l’arrêté ministériel, « les forces de l’ordre prendront toutes les dispositions sécuritaires nécessaires à cet effet. » Mais tout cela n’est possible qu’à certaines conditions.
Le ministère de la Sécurité publique exige d’abord des organisateurs d’une manifestation pacifique une demande d’autorisation préalable indiquant un itinéraire bien défini. Cet itinéraire, précise le document, peut être modifié en commun accord avec les autorités au moins cinq jours avant la date demandée.
Ensuite, les organisateurs d’une manifestation pacifique doivent signer un engagement auprès du ministère de la Sécurité publique. L’arrêté n’a pas mentionné la nature de cet engagement.
Puis le ministère de la Sécurité exige des organisateurs d’une manifestation la sensibilisation et l’encadrement des manifestants afin d’éviter tout trouble à l’ordre public.
Et enfin, la dernière condition à remplir est la détention d’une autorisation de fonctionnement pour toute organisation appelant à une manifestation.
Autre précision, le ministère fait savoir que l’objectif d’une manifestation pacifique est d’exprimer une opinion dans le respect des textes en vigueur.
Pour Me Max Loalngar, coordinateur de la plateforme Wakit tamma qui appelle à une marche ce 8 mai, le décret cité dans ce document est désuet. « Qu’on ne nous perturbe pas avec des décrets de 1962 qui sont morts et enterrés avec leurs auteurs », s’agace-t-il. D’après lui, il n’existe dans la législation actuelle aucun argument du droit positif qui ne peut être opposé pour poser tel ou tel acte. « C’est pour cela que la marche de demain (8 mai) est maintenue », confirme Me Max Loalngar.
Prenant en compte quelques points énumérés dans le communiqué du ministère de la Sécurité publique, le coordinateur de Wakit tamma rassure que la marche sera « pacifique ». « Nous allons nous encadrer », promet-il. Au contraire, Me Max Loalngar demande que les forces de l’ordre s’abstiennent de se présenter aux abords de cette manifestation. « Celle-ci faisant suite à la marche du 27 avril réprimée dans le sang, nous pensons que la présence des forces de l’ordre serait de nature à troubler l’ordre public », estime-t-il. Car, dit-il, le sentiment d’une victime de voir son bourreau peut la pousser à agir violemment.
Ainsi, la marche du 8 mai a pour point de rassemblement l’espace Fest’Africa de Chagoua et avec point de chute le rond-point Fontaine de l’union. « Une motion et un schéma de sortie de crise seront présentés », annonce Me Max Loalngar.
Aux dernières nouvelles, le ministère de la Sécurité publique vient d’interdire la marche.
Après une trêve de 10 jours, la Coordination des Actions Citoyennes (CAC) annonce une grande marche pour le 8 mai.
« La lutte continue en mémoire de nos martyrs », a déclaré le coordonnateur de la CAC, Me Max Loalngar, dès l’entame de son point de presse. Depuis le 27 avril, date de la première manifestation de contestation de la prise de pouvoir par le Conseil Militaire de Transition (CMT), la plateforme a décrété une trêve. « D’une part pour enterrer nos morts et panser nos blessures, d’autre part pour honorer nos hôtes de la mission de l’Union Africaine (UA) », a dit M. Loalngar.
Pendant cette trêve, affirme Me Max, la junte militaire au pouvoir a étalé sa mauvaise foi en « formant un gouvernement fantoche en dépit de multiples appels au bon sens et à la raison. » « Ni le retour à l'ordre constitutionnel ni le schéma malien proposé par certains n'a trouvé grâce à leurs yeux », déplore-t-il. Aussi, indique le coordinateur de la plateforme Wakit Tamma, le pouvoir a usé de tous les moyens pour tenter de briser la dynamique populaire : trafic d'influence, achats de conscience, clientélisme, etc. « Tout y est passé. Mais le peuple est debout, la CAC reste mobilisée pour le bien-être de toutes nos communautés du nord au sud, de l'est à l'ouest », souligne-t-il.
Pour la plateforme, la junte militaire en ordonnant de tirer sur des civiles, a méconnu les libertés publiques. Et pour cela, elle est disqualifiée pour présider à la destinée du pays. « Parce que le sacrifice de nos chers martyrs n’est vain, les revendications populaires doivent s'intensifier », appelle Me Max Loalngar.
La plateforme Wakit Tamma dit maintenir son appel à la marche pacifique et invite toutes les organisations de la société qui ne se sont pas encore engagées dans la lutte à cette date, de se joindre sans délai à la mobilisation du peuple pour les actions citoyennes futures. « La toute prochaine marche pacifique est justement prévue pour le samedi 8 avril, sur toute l'étendue du territoire. Nous devons ensemble tracer nos sillons pour façonner le modèle tchadien que nous voulons inclusif, généreux et dynamique. Peuple tchadien, ta liberté naîtra de ton courage », lance Me Max Loalngar.
Il faut signaler que l’Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR), le parti de Saleh Kebzabo dit suspendre sa participation aux activités de cette plateforme. « L’UNDR demande à ses militants et sympathisants de suspendre les marches et toutes autres formes de manifestations en attendant de voir clair dans les négociations qu’il faut engager avec les autorités de la transition pour la gestion de ces marches pacifiques », a instruit Célestin Topona Mocna, 1er vice-président de l’UNDR lors d’un point de presse fait ce 6 mai.
Avant d’annoncer son retrait, l’Undr a tenu à préciser que le secrétaire national administratif du parti, le Professeur Avocksouma Djona qui avait désapprouvé publiquement, dans un point de presse, la veille le choix de son parti et de son chef Saleh Kebzabo de faire partie du gouvernement de transition est du passé. Et que le professeur a reconnu son erreur d’avoir pris la parole publiquement pour contredire la ligne du parti. Il s’en est excusé.
Joint au téléphone M. Avocksouma a affirmé que son parti a raison sur la forme, car il devrait avant sa sortie en discuter en interne. Quant au fond du sujet, sa position n’a pas changé. Il affirme qu’il continuera à soutenir les actions de Wakitt Tamma comme citoyen tchadien.
Le ministre de l’Économie du Plan, et de la Coopération Dr Issa Doubragne et le Représentant résident de la BAD au Tchad, M. Ali Lamine Zène ont apporté un éclaircissement conjoint sur la question de la coopération Tchad-BAD sur la situation actuelle au Tchad. C’était ce, 06 mai 2021 en présence des journalistes au Cabinet du ministre de tutelle. Reportage.
Ali Lamine Zène, Représentant résident de la BAD au Tchad a précisé que la Banque Africaine de Développement (BAD) a entrepris d’évaluer la situation des projets qu’elle finance. Selon lui, aucun impact négatif n’a été relevé au niveau des ressources humaines, de l’Administration, des ressources financières et sur les biens de la banque. « En pareille circonstance, toutes les institutions multilatérales internationales marquent un arrêt évaluatif. C’est de ça qu’il s’agit. Et la BAD est dans son rôle. Elle a convenu avec le gouvernement du Tchad d’un traité, d’un accord de siège qui prévoit une disposition pour qu’en pareille circonstance d’évaluer la situation», dit le banquier. Pour lui le gouverneur de la BAD est informé qu’une deuxième étape d’évaluation est en route. Il rajoute qu’ils n’ont pas arrêté le travail, ils le font afin de permettre à ceux qui ont le monopole de la décision au niveau du Conseil d’Administration s’imprègnent de l’évolution de la situation. Le Représentant résident affirme que l’objectif est de donner le cursus nécessaire pour poursuivre la coopération et l’intensifier. «Cela se fera au niveau de notre diagnostic que nous partagerons avec le gouvernement. Ce qui importe pour la BAD, c’est de faire une lecture réelle de l’évolution de la situation sur le terrain. Nous avons vu ce qui s’est passé. Le CMT est mis en place, une charte et un gouvernement sont opérationnels, un calendrier est effectif pour une période de transition. Qui devrait en principe aboutir à des élections libres et démocratiques». D’après lui, la banque intégrera tous ses éléments pour se décider dans les jours ou semaines à venir. M. Ali Lamine Zène affirme que le gouverneur a donné les assurances qu’il faut pour qu’il traduise au président de l’institution Dr Adessinan, qui suit à distance cette situation. «Nous nous réjouissons de l’évolution positive de cette situation. Nous sommes une banque africaine appartenant à tous les pays qui la composent dont le Tchad. Toutes les opérations que nous finançons vont au bénéfice du peuple tchadien», conclut-il.
«Le Tchad ne fait pas l’exception de la procédure conservatoire…»
Intervenant à la suite du Représentant résident de la BAD au Tchad, Dr Issa Doubragne, ministre de l’Économie du Plan, et de la Coopération, gouverneur auprès des banques a fait le point sur leur réunion partenariale. Il note que leur réunion a été accès sur l’évaluation de la situation qui a prévalu au Tchad et qui a emporté tragiquement le président Idriss Deby Itno. Pour lui, dans une telle circonstance, les membres des institutions multilatérales de financement et du développement enclenchent des procédures conservatoires. Le Tchad ne fait pas exception, indique-t-il. « Le dernier cas avant nous c’était le Mali. Dans de telles situations, ce sont les éléments d’appréciation faite qui déterminent la normalisation de cette circonstance. La banque a juste déclenché la procédure conservatoire. D’autres banques institutions multilatérales l’ont aussi faite à l’exemple de la Banque Mondiale», explique Dr Issa Doubragne. Selon lui, ils sont depuis une semaine en pourparlers avec ces institutions pour évaluer les possibilités d’une reprise ou d’un retour à la normale. Il insiste en ne précisant qu’en ce moment, aucun programme, n’a été suspendu. «Tout est en marche, ce sont des principes normaux qui ne remettent pas en cause les engagements des uns et des autres. Nous avons bon espoir que le cas spécifique du Tchad n’est pas similaire à d’autres, puisse être rapidement évalué», signifie-t-il. Il informe que suite à la mission d’évaluation de l’Union Africaine (UA), la Francophonie envisage une mission, la CEEAC et le G5 Sahel. Pour lui, les partenaires du Tchad sont dans la dynamique d’observation objective de la situation sur le terrain.
«La situation est sous contrôle. Il y a tous les moyens de contrôle et de suivi pour que le Tchad puisse retrouver les équilibres. Ce qui va permettre à la transition d’être gérée dans l’apaisement et que nous aboutissions aux élections libres, transparentes et démocratiques souhaitées par tous », dit le ministre.
Les journalistes ont relevé l’Email de la BAD notifiant la suspension des décaissements, mais ils ont aussi cherché à comprendre la teneur de la directive mentionnant les conditionnalités à remplir pour que les décaissements reprennent.
Selon Dr Issa Doubrangne, cette suspension peut être de deux façons. Elle peut être de principe ou rentrer dans la phase opérationnelle à un niveau ou tout est gelé. Pour lui, présentement tous les projets financés par la BM et la BAD sont fonctionnels. La suspension de décaissement veut dire qu’aujourd’hui en cours d’évaluation, un nouveau décaissement ne peut se faire. Un nouveau projet ne peut pas être validé comme en temps normal, jusqu’à ce qu’un constat soit établi. Pour lui, il y a plus de peur que de mal. C’est la même chose dans toutes les banques institutions multilatérales. Elles respectent leurs principes internes parce qu’elles sont auditées. Ce que la banque a fait est un dispositif de sa réglementation et ne peut aller au-delà, car elle est apolitique.
Le ministre de l’Économie du Plan, et de la Coopération invite la presse la semaine prochaine à une réunion élargie à d’autres partenaires. Il s’agit de l’Union européenne, de la Banque africaine pour le développement, de la Banque mondiale et tous ceux qui de près ou de loin appuient le Tchad en matière de mobilisation de ressources. Car selon lui, sans les ressources, la transition en cours ne pourrait aboutir aux résultats escomptés. «Telle est l’option que nous allons renforcer dans les semaines et mois à venir».
Moyalbaye Nadjasna
Le ministre de la Défense, le Général Daoud Yaya Brahim a démenti les allégations selon lesquelles l’armée tchadienne s’est livrée à des actes inhumains sur les rebelles du Front pour l’alternance et le changement au Tchad (FACT) faits prisonniers.
Cette sortie médiatique du patron de la Défense nationale, le Général Daoud Yaya Brahim fait suite à la publication des capsules vidéo sur Facebook accusant l’armée tchadienne de traitements inhumains et dégradants sur les prisonniers de guerre. D’après Daoud Yaya Brahim, ce n’est que de la diffamation. Car, selon lui, l’armée tchadienne est une armée bien formée et instruite sur le droit international humanitaire. « L’armée tchadienne qui a été victime de plusieurs incursions terroristes s’est toujours comportée de manière humanitaire. Jamais un soldat tchadien n’a torturé un prisonnier moins encore le tué », affirme-t-il. Pour lui, ces informations sont de nature à ternir l’image du Tchad, du Conseil militaire de transition (CMT) et des forces de défense et de sécurité.
Pour couper court à la désinformation, le ministre Daoud Yaya Brahim a promis inviter la presse et la Croix-Rouge à visiter ces prisonniers. « La plupart des prisonniers de guerre sont aujourd’hui, entre les mains de la gendarmerie nationale, qui sont en phase d’enquête. A partir de lundi prochain, je demanderai à la Croix-Rouge, à la presse d’aller les visiter pour leur poser de questions et voir leur état de santé », dit Daoud Yaya Brahim.
Sur la question du dialogue souhaité par l’état-major du FACT, la réponse du ministre est sans ambages : « dialoguer avec des terroristes ? Moi je ne connais pas de rebelles, je ne connais que des terroristes ». A entendre le ministre le dialogue est exclu. Car, soutient-il, ces hommes armés qui ont fait leur incursion au nord du Tchad en avril ne sont même des Tchadiens. « La plupart d’entre eux sont nés en Europe, en Arabie Saoudite, en Libye. Et comme vous le savez la Libye est devenue un Etat néant, un bastion des terroristes », a-t-il-martelé.
Le ministre Daoud Yaya Brahim rassure que la situation sécuritaire est sous contrôle. « Il n’est point besoin de paniquer. Les forces de défense et de sécurité sont en situation de ratissage », informe-t-il. Il appelle les autorités en charge de l’enseignement de relancer les activités académiques. Egalement, le ministre félicite la population du Kanem pour sa collaboration avec les forces de l’ordre pour débusquer les rebelles déguisés en civil.