Les victimes de crimes et de répressions de l’ancien président Hissène Habré se sont rencontrées à huis clos ce jeudi 26 août au siège de leur association située au quartier Chagoua, dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena. L’objectif de cette rencontre avec leurs avocats est de s’enquérir de la mort de l’ex-président au sujet de leurs indemnisations. Reportage.
Des centaines de victimes, composées des femmes et des hommes, de l’ancien dictateur tchadien, Hissène Habré se sont réunies ce jeudi après-midi au siège de leur association, située sur l’avenue Jacques Nadingar, au quartier Chagoua, dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena. Le mot d’ordre de cette rencontre est d’avoir plus d’information avec leurs avocats et conseillers juridiques pour la suite de leurs indemnisations. Après la mort de l’ex-président Hissène Habré, décédé à Dakar, au Sénégal de suite de covid-19, les victimes ont de position mitigées sur le décès de celui qui a été pendant longtemps à l’origine de leurs souffrances.
Pour le secrétaire général de l’association des victimes de crimes et de répressions de Hissène Habré (AVCRHH), Koumato David, la mort est un destin pour tout homme. Et la mort d’Hissène Habré n’entame en rien à leur lutte. A son avis le but de leur lutte est d’arriver à la réparation et aux indemnisations. Pourtant jusque-là, rien n’est fait. Bien qu’ils ont reçu à le condamner à perpétuité. Koumato David précise que le fait que l’ex-président soit condamné à perpétuité est déjà une grande victoire pour les victimes, avant d’ajouter que ce serait plus encore, quand toutes les victimes seront indemnisées. « Nous exhortons l’Union africaine (UA) qui est à la manœuvre de tous les jugements, avec le gouvernement sénégalais et les autorités tchadiennes de mettre leurs efforts ensemble pour indemniser au plus vite les victimes qui sont en train de mourir ».
Selon lui, plus de 300 victimes sont déjà mortes sans être indemnisées et qu’il faut faire vite pour que celles qui sont encore en vie puissent rentrer dans leur droit. Ce dernier précise que les victimes ne quémandent pas, ils réclament leur droit. Il rappelle que sur les 7 000 victimes qui constituent l’association, plus de 300 sont déjà mortes, « cela n’est pas normal de les traîner ». Au sujet de la mort de Hissène Habré, il affirme que l’ex-dictateur est condamné à perpétuité donc il doit mourir en prison. Et rapatrier ou pas la dépouille n’est pas leur problème. Le problème c’est le gouvernement de transition qui a dit qu’ils peuvent rapatrier son corps si sa famille le veut et qu’ils ne s’opposent pas.
Le SG de l’AVCRHH, souligne que le fait que le gouvernement de transition confirme que la dépouille de l’ex-président n’aura pas des honneurs est une satisfaction pour les victimes. « Ce qui nous préoccupe, c’est nos indemnisations. Le reste, ce n’est pas notre problème, sauf que les choses restent à moitié c’est cela notre préoccupation », explique Koumato David.
Même son de cloche chez les victimes
Autre réaction dans le même sens. Le coordonnateur de l’AVCRHH, Ousmane Abakar Tahir, soutient que le décès de Hissène Habré n’est pas lié à l’indemnisation. Selon lui, les victimes ont gagné tous les procès contre l’ex-dictateur, et que cela ne les inquiète pas. Il révèle que leurs indemnisations sont évaluées à plus de 75 milliards de f CFA. Et la moitié doit être versée par l’État tchadien. De l’avis de Moctar Nganansou, une victime, Hissène Habré est un homme, donc il est mortel, et qu’il est mort comme toutes les victimes. Ce dernier regrette que son bourreau meure de sitôt, avant de préciser qu’il ne jubile pas de sa disparition, mais qu’il aurait souhaité que l’ex-président purge sa peine jusqu’au bout. Pour cette veuve et victime qui s’exprime sous couvert de l’anonymat, les femmes victimes sont très fatiguées, il faut que l’État tchadien et l’UA leur payent leurs droits. Selon elle, le procès est clos depuis 5 ans et l’horizon est toujours sombre. Entre temps les victimes meurent sans être indemnisées, « cela a trop duré ».
Aux dernières nouvelles, les épouses de l’ancien président ont décidé que la dépouille de leur mari soit inhumée au cimetière musulman de Yoff, en terre sénégalaise. Au moment de publier cet article, la levée du corps a eu lieu.
Jules Doukoundjé