Dans ses vœux de la nouvelle année 2023, le Président des Transformateurs a déclaré qu'il demandera à l'ONU le droit à l'autodétermination d'une partie du Tchad, sans la nommer. Tout d'abord, cette déclaration s'inscrit dans un contexte politique marqué par la répression sanglante des manifestations du 20 octobre 2022, la suspension des partis politiques et l'exil de Succès Masra sous la pression du régime de transition dirigé par le général Mahamat Idriss Deby qui a succédé à son père. Ensuite, cette revendication sécessionniste de Succès Masra n'est pas nouvelle. Historiquement, jusqu'en 1984, la partie méridionale du Tchad échappait au pouvoir de l'ancien président Habré qui a réprimé dans le sang les séparatistes du général Kamougue. Enfin, le fédéraliste Yorongar est arrivé deuxième à la présidentielle de 2001 avant que le candidat Deby ne s'approprie de la promesse d'un référendum sur le fédéralisme à la présidentielle de 2021.
Pour revenir à Succès Masra, il utilise sa dernière carte politique : celle de la "rupture". A court terme, la menace de partition du Tchad est un moyen de pression pour ramener le pouvoir militaire à la table de négociation. Mais à long terme, c'est un suicide politique pour Succès Masra qui n'apparaît plus comme un rassembleur du peuple mais un diviseur de la nation. Malheureusement pour lui, sa quête sécessionniste a de faibles chances d'aboutir pour plusieurs raisons.
Primo, Succès Masra n'a pas une légitimité démocratique pour demander une division du Tchad et la création de deux États. Jusqu'à présent, il n'a été élu ni président, ni député ni maire comme le Président de Transition d'ailleurs.
Secundo, il est seul dans sa quête sécessionniste car il n'existe aucune unité dans le sud du pays pour demander une quelconque auto-détermination. C'est plus une démarche personnelle qu'une revendication populaire.
Tertio, il n'a pas un moyen de pression politique comme une rébellion armée à l'instar du MPLS de John Garang et Salva Kiir au Soudan. Même s'il n'exclut pas de prendre les armes.
Quarto, le régime de Transition au Tchad entretient des relations conciliantes avec les puissances occidentales par le bradage des ressources pétrolières et minières et l'interventionnisme militaire contre le terrorisme. Contrairement aux relations clivantes du régime soudanais d'Elbechir avec l'Occident. Donc, les officines occidentales n'ont pas un grand intérêt géostratégique à soutenir une division du Tchad.
Quinto, le sud du Tchad n'est pas aussi riche que le Soudan du Sud qui produisait 75% du pétrole du Soudan. Donc, les multinationales occidentales n'ont pas un intérêt économique à financer la division du Tchad.
Pour finir, l'intérêt du Tchad est de rester uni et l'intérêt des tchadiens est de privilégier le dialogue inclusif et la justice sociale pour créer les conditions de la paix et du développement.
Brahim Khalil Wardougou