Comme tout tchadien j’ai appris au hasard des lectures la condamnation par contumace de certains leaders de l’opposition armée parmi lesquels figure curieusement l’ancien président Hissein Habré. Je suis autant surpris et scandalisé que les nombreux chercheurs qui se sont exprimés à propos. Comme si cela ne suffisait pas, point de mesure de honte à lire le ministre sénégalais qui ridiculise l’Etat et son ministre de justice ; en somme un Etat naïf, peu sérieux, de mauvaise foi qui n’a aucune conscience de ses actes !
Apprendre que la justice tchadienne a condamné H.H on croirait à un gag. Mais cette information relayée par les sites tchadactuel, AFP, de nombreux sites en anglais, le tout couronné par le site de la présidence…ce n’est pas de la plaisanterie ! Si c’en est une, elle est indubitablement de mauvaise augure. Mais on y voit de l’amalgame, de la méconnaissance des principes élémentaires des règles juridictionnelles, enfin pourquoi avoir attendu si longtemps, si c’était aussi facile que cela !
1- L’amalgame
H.H jugé avec les rebelles. La confusion est totale à l’image du fonctionnent général de cet état dans lequel on ne sait jamais qui fait quoi et pourquoi. L’idée de juger les rebelles est bonne et correspond aux exigences minimales d’une démocratie opérationnelle. La mise à sac de la capitale en février suffit de motif pour l’exercice d’une telle juridiction. Mais la connexion avec H.H reste défectueuse. Et s’est-on seulement fait une petite idée de la mise en œuvre d’une décision juridictionnelle aussi bâclée et moralement ostentatoire au premier coup d’œil ?
2- Mépris des principes élémentaires de procès
Alors que le ministre sénégalais de justice ancien avocat de H.H est mis en mal de se retrouver contraint d’organiser le procès de son ex client, procès auquel le Tchad montre sa bonne volonté de coopération financière…voilà que les turpitudes doublée d’incompétence lui font tirer le joker ! La procédure Habré suivait son cours depuis 2000 au Sénégal puis d’échelle africaine. C’est dire que le Tchad titulaire de la compétence de principe l’avait cédé. Les échanges, les actes nationaux pris à cet effet attestent que le pays s’est complètement défait de l’affaire Habré. On n’a pas vu le Tchad broncher quand le Sénégal se battait pour maintenir l’affaire sur le terrain africain. Sachant que le principe « ne bis in ibidem », norme impérative de haut standard empêche un double jugement pour les mêmes faits et les mêmes personnes…le Tchad dont la justice est internationalement présentée comme corrompue depuis l’affaire arche de Zoé n’avait pas à faucher l’herbe sous les pieds de la communauté internationale. L’arrêt condamnant H.H à la peine de mort n’est rien d’autre qu’un sabotage d’une bonne justice qui était en cours. A quelque chose malheur étant parfois bon souhaitons que deux milliards destinés à aider la justice sénégalaise soient employés aux réparations et indemnisations !!!
3- Si c’était si facile !
Voilà bientôt 18 ans que nuit et jour certains tchadiens attendent justice. Alors que le procès est au plan international présenté comme l’un des plus techniquement complexe, comme sous l’effet d’une baguette magique, tout est résolu ! Le caractère expéditif de la justice tchadienne a été décrié lors du procès Arche de Zoé. Bon ce fut expliqué que la France avait assez de la comédie qui commençait par se faire longue et il fallait couper court. Mais pour H.H vu qu’on a attendu 18 ans était-ce impossible d’attendre encore quelques années ? En agissant ainsi l’Etat tchadien prouve à tous que c’était si facile, de résoudre l’affaire Habré. Alors pourquoi avoir laissé moisir les victimes depuis tout ce temps ? Là encore une bonne fessée pour le Tchad l’ancien avocat se sert du caviar bêtement servi par les autorités tchadiennes : plus de jugement ! Il faut tout arrêter. Il a raison « non bis in ibidem ». L’exécution de la décision exigera de l’extradition de H.H vers le Tchad. Ma foi si on ne l’a pas extradé en vue d’un jugement de qualité en Belgique moins encore vers le Tchad en vue d’un procès, ce n’est vers le Tchad pour sa mise à mort qu’on le ferait. En plus c’est désormais une coutume internationale que l’on extrade par vers les pays où il y’a risque de peine de mort. Au Sénégal au moins il y’a des juristes. Tant pis pour ceux ne le savent pas !
Albert TAMWARI