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À l’origine des détournements de fonds publics

Juil 16, 2022

Le Conseil Militaire de transition (CMT) s’englue chaque jour dans des scandales de détournements. Les Tchadiens observent cela médusés par l’audace des détourneurs, tétanisés par les montants faramineux et stupéfaits par la désinvolture avec laquelle la junte traite le dossier. Les alliés de circonstances et les partisans de la junte cachent mal leur gêne, eux qui avaient aidé cette pré-transition à s’installer. Ils bafouent lorsqu’on engage la discussion avec eux sur ces malversations. Alors qu’est-ce qui est à l’origine de ces détournements?

D’emblée c’est le coup de force de la junte qui est la matrice de ces détournements. Tout est permis depuis 30 ans. Et rien n’a fondamentalement changé. Le Maréchal qui tenait dans sa toile d’araignée tout ce vilain monde en les mettant à son service n’est plus alors le bar est ouvert, chacun se sert goulûment. Écrit comme ça, cela semble grotesque, mais…

D’abord, commençons par le commencement. Le Maréchal Idriss Deby Itno est mort. Vive le général Mahamat Deby Itno. La disparition du Maréchal devrait être une opportunité pour tout remettre à plat. Et dire clairement qu’il ne s’agit pas encore de la transition, mais de la pré-transition. Il est donc inapproprié et maladroit de parler de transition. La transition c’est plus tard. Cette chance de pré transition a été transformé en lutte de positionnement, certaines grandes figures ont embarqué prématurément dans ce qu’elles appellent transition. L’un d’entre-deux pousse même l’audace, tellement il est sûr de lui, en demandant aux Tchadiens de ne pas réclamer leurs  droits en manifestant parce qu’ils feraient basculer le pays dans l’anarchie. Un autre s’est terré dans son ministère où la justice devrait rayonner. Un dernier semble être dépassé par sa principale mission : la réconciliation. On ne le voit. On ne l’entend pas. Il est silencieux. Les soi-disant activistes tapies en France, bruyants et brouillons soudoyés et débarqués sont occupés par leurs chicanes. Ceux qui, à la naissance de cette pré transition militaire, voyaient les limites, les abus et la continuité des 30 ans d’errements avaient raison sur ceux qui se sont précités sans garde-fou pour donner un chèque en blanc au CMT.

Ensuite, c’est la théorie du « on reprend les mêmes et on avance comme avant » qui a été soigneusement mise en place en faisant quelques concessions à quelques accompagnateurs pour psalmodier ensemble ce mensonge du « on a échappé au chaos » comme si rien ne s’était passé. On ne construit pas du neuf avec du vieux matériau. C’est ce qui est arrivé avec ces détournements. Et comme c’est une pré-transition héritée du père et du système, pourquoi le changer? Il marche bien. Il produit des milliardaires arrogants et baveux qui siphonnent l’argent public sans être inquiétés. Voilà l’autre raison de ces détournements.

De plus, comment comprendre l’affaire du Secrétaire particulier (SP) Idriss Youssouf Boy (IYB)? La seule explication plausible ce que l’homme s’est cru tout permis. Tout le gloglota politique et médiatique le considérait comme le plus puissant homme de la pré-transition. Voire le vrai vice-président du CMT. Il aurait détourné en une année plusieurs milliards. Il l’aurait fait seul, lui, le surhomme? Et surtout que le récit du piège tendu à l’ex-SP relève d’un digne film d’espionnage. L’agence nationale de sécurité (ANS) a joué un rôle important dans l’arrestation et la détention de IYB. Et la justice dans tout cela? Elle est spectatrice. Une autre entorse aux règles. Si IYB est un détourneur, c’est à la justice de le déterminer. Et à l’inspection d’État d’enquêter en amont. Rien n’a été respecté. IYB n’est-il pas aujourd’hui un prisonnier sans jugement? Même le plus salaud des salopards a des droits et mérite qu’on s’y attarde. Le dossier IYB doit être traité dans les normes. Sinon il faut soit le relâcher, soit remettre le dossier à la justice. Comme le système depuis 30 ans a habitué les Tchadiens à des revirements claniques spectaculaires, Tchadiens ne soyez pas surpris que la méthode du maréchal ait encore de beaux jours devant elle.

Aussi, les affaires se suivent, se ressembles sauf les visages qui différent. Et chacune des affaires à une saveur théâtrale particulière qui oscillent entre, la rumeur insidieuse, le burlesque et la tragicomédie. A l'exemple de l’affaire de la Société nationale de ciment (Sonacim). C’était déjà une société qui a la palme de la mauvaise gestion au pays. L’affaire d’achat en argent liquide d’un groupe électrogène au montant faramineux de 650 000 euros est incompréhensible. Les explications données par la Sonacim sont minces. S’il faut bien acheter un groupe électrogène, faut-il procéder de la sorte? Est-il si urgent de répondre aux injonctions des Égyptiens? Et cette intervention sur les réseaux sociaux du dirigeant de l’entreprise égyptienne rajoute du flou au flou.

Enfin, la pré transition en a plein le bras. Le président du Conseil militaire de la transition encore plus, lui qui, disent plusieurs sources est au bout du rouleau. Il est surpris par l’ampleur des détournements et les origines de celles-ci. Toutes gravitent autour de la présidence. Dans ses discours ces derniers jours, il se remet au pouvoir de Dieu. Ils sont truffés d’un accent religieux, il oublie avoir hérité de façon divine un fauteuil républicain. C’est peut-être là le péché originel. Les Tchadiens ont besoin de rupture, vous pouvez encore PCMT redresser la barre sinon bientôt il sera trop tard.

Bello Bakary Mana

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