Le jugement des organisateurs de la marche autorisée du 14 mai dernier prévue pour le 6 juin va se dérouler en audience foraine à Moussoro. Pour éclairer nos lecteurs sur certains termes juridiques et l'appréciation de la procédure pénale enclenchée, Ialtchad Presse s'est entretenu avec Me Mouné Koudanbé et le prof Ahamat Mahamat Hassane, ex-ministre de la Justice, analyste politique et enseignant-chercheur. Explications.
Pour éclairer la lanterne des lecteurs, Me Mouné Koudanbé précise qu'une audience foraine est une audience qui se tient hors de son tribunal de juridiction ou d'un bâtiment juridique officiel, dans une autre localité que celle où siège la juridiction. Il explique que dans le cadre de l'audience foraine, l'administration juridique se rend directement au-devant des justiciables. l'avocat souligne que la procédure engagée pour cette audience qui vise les leaders de la manifestation du 14 mai dernier est illégale parce que le tribunal de Grande Instance ne peut pas aller siéger dans le ressort d'un autre tribunal de même degré que lui.
Selon professeur Ahmat Mahamat Hassane, toute la procédure est nulle et les avocats des prévenus l'ont soulevée d'une manière assez explicite et exhaustive. « Le tribunal compétent dans cette affaire quel que soit la qualification qu'on puisse donner, c'est le Tribunal de N'Djamena. D'abord la procédure de leur arrestation est illégale même si certains ont refusé de répondre aux convocations, le Code de procédure pénale prévoit le mandat d'amener et le mandat d'arrêt. On aurait dû fait usage de toutes les procédures prévues par le Code de procédure pénale tchadien », dit prof Ahmat. À son avis, l’arrestation du porte-parole de Wakit Tamma Me Max est un enlèvement. Par conséquent ils ont commis une autre infraction, dit-il. Il rajoute que, c'est une déportation sans qu'il ne soit reconnu coupable d'une infraction, ou condamné. « Ils sont des prévenus et en droit tchadien ils sont dans la présomption d'innocence. C'est dommage, le droit tchadien a été violé dans tous les sens », martèle le professeur.
Autre précision : l'analyste Ahmat déclare qu'il ne faut pas oublier également que le procureur de la République de N'Djamena a fait une déclaration, soi-disant qu'il a reçu des instructions, ont signifié les avocats des prévenus. Le procureur quel qu’est son rang, qu'il soit procureur de la République près d'un tribunal de Grande instance ou procureur général, près la Cour d'Appel et leurs substituts, ils sont dans une situation de subordination vis-à-vis de l'exécutif. Il s'agit notamment du ministre de la Justice et de sa hiérarchie. « Ces parquetistes ne sont pas comme le juge de siège qui jouit de son intimité et guidé par son intime conviction. En ce moment, nous voyons que la Justice est dans une situation de violation de ses propres règles de procédure. C'est dommage pour la République du Tchad », lance-t-il.
Pour compléter son analyse, le spécialiste en Droit public affirme que les gens se sont rendu compte des multiples violations de la loi pénale et de la procédure pénale, ils ont déporté l'audience qui devrait se tenir à N'Djamena en audience foraine à Moussoro. Les raisons soutient prof. Ahamat, les magistrats de Mossoro ne sont pas compétents, car les infractions n'ont pas été commises sur leur ressort territorial, mais sur celui de N'Djamena. Pour couvrir leurs fautes de procédures et toutes les violations, ils ont contourné la loi pour organiser une audience foraine, poursuit l'analyste. Professeur Ahamat indique que les conditions de la tenue d'une audience foraine en dehors du tribunal sont claires. Et dit-il, il n'y a aucun impératif pour ouvrir une procédure d'une audience foraine. « C'est de la gymnastique intellectuelle pour couvrir le manquement de la procédure et les violations », assure l'enseignant-chercheur.
Moyalbaye Nadjasna