Répression à Abéché : le sultan et le nouveau chef de canton suspendus

Jan 28, 2022

Pour calmer la tension des manifestants, les autorités de la transition ont pris la décision de suspendre le sultan d’Abéché et le nouveau chef de canton à l’origine de la contestation. Mais cette suspension est critiquée par certains intellectuels et défenseurs des droits humains. Reportage

Le sultan du Dar Ouaddaï Abdelhadi Mahdi et le nouveau chef de canton de Bani-Halba sont suspendus de leurs fonctions par le ministre de l’Administration du Territoire. La note de suspension a été signée hier mercredi 26 janvier dans l’après-midi. Ces suspensions sont la conséquence de la manifestation des habitants de la ville d’Abéché contre la cérémonie d’intronisation du nouveau chef de canton de la communauté des arabes Bani-Halba. Ce chef contesté était nommé par décret depuis 2019 par le défunt président Idriss Deby Itno, mais il n’a pas été intronisé pour des raisons de la covid19. 

Beaucoup d’analystes voient en cette suspension une solution provisoire par les hautes autorités de la transition qui cherchent à calmer la situation. D’autres pensent toutefois que c’est la conséquence de l’ingérence des autorités politiques aux affaires des chefferies traditionnelles.

 Pour le professeur Ahamat Mahamat Hassan, ancien doyen de la faculté de droit de l’université Adam Barka d’Abéché et ancien ministre de la Justice, garde de sceau chargé des droits humains sous le défunt président Idriss Deby Itno, ce qui se passe à Abéché est déplorable. Selon lui, c’est une situation malheureuse qui s’est produite dans le Ouaddaï. L’ancien ministre estime que c’est une caractéristique dans laquelle tout le Tchad se retrouve et la province du Ouaddaï en particulier. Le professeur explique qu’il s’agit d’un repli identitaire et l’affirmation de l’identité. Pour Ahamat Mahamat Hassan, les arabe Bani-Halba et le royaume du Ouaddaï sont une même famille depuis des siècles et le royaume en lui-même s’appelait le royaume Abbassit du Dar Ouaddaï, c’est-à-dire descendant de Abbas l’oncle paternel du prophète Mohamed. Il souligne qu’il n’y avait pas de différence entre les deux communautés, c’est la politique qui s’est insérée pour diviser pour régner. L’ancien ministre de la justice dit précise que la manifestation contre la cérémonie d’intronisation, n’est que le côté superficiel de l’affaire. A son avis, le profond, c’est une question d’affirmation entre le nouveau sultan qui a un déficit de légitimité à la base et le nouveau chef de canton qui est contesté par rapport à une question de territoire.

Au sujet de la suspension du sultan et du chef de canton, il note que ce sont des mesures conservatoires pour voir au clair. L’enseignant chercheur ajoute aussi que ces mesures ont pour objet d’éviter les troubles et gérer les conséquences, telles que les morts, les blessés et les arrestations. Selon lui, la suspension permet de contrôler la communauté mabba, ressortissants du Ouaddaï qui ont fermé les boutiques à N’Djamena pour soutenir leurs parents à Abéché. « Ces mesures conservatoires sont des paracétamols pour soigner une typhoïde, il faut plutôt trouver les vrais médicaments. Pour les vrais médicaments, il faut revoir l’intronisation du sultan qui a un problème de légitimité d’origine héréditaire », propose l’ancien ministre de la Justice. A propos du chef de canton, il souligne qu’on n’installe pas un chef de canton sans territoire et sans population. c’est juste une manipulation, ajoute-t-il. Il demande au gouvernement de se rattraper pour redresser les choses profondément, ça pourrait rétablir la stabilité et l’ordre dans chaque canton. « Le problème de chefferie, le caractère coutumier et traditionnel est héréditaire. Il faut revenir aux origines », suggère le chercheur.

Pour le président de l’Alliance tchadienne universelle pour la Défense des Droits de l’Homme (ATUDDH), Acheikh Ben Said, la suspension du chef de canton et du sultan n’est pas normal. Le président de l’ATUDDH, ces 2 autorités traditionnelles sont nommées par décret et le décret est resté toujours valable. A son avis, ce n’est pas une manifestation qui faire annuler un décret. Pour faire partir une autorité, il faut écrire au ministre de tutelle et non par une manifestation.

Pendant ce temps, la délégation de l’Union européenne et les missions diplomatiques au Tchad expriment leur préoccupation à la suite des informations faisant état de plusieurs morts et de blessés le 24 janvier à Abéché, causés par des tirs à balles réelles contre les manifestants.

Elles appellent au retour au calme et au rétablissements des réseaux internet et de communication dans les meilleurs délais.

Jules Doukoundjé

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