La Ligue tchadienne des Droits de l’Homme (LTDH) condamne la violence perpétrée par les forces de l’ordre sur les manifestants dans la capitale provinciale, Abéché, située dans l’Est du Tchad. Une manifestation contre l’intronisation d’un nouveau chef de canton Bani-Halba a mal tourné faisant plusieurs blessés et de morts. Le gouvernement s’est réuni et a dépêché une délégation à Abéché. Reportage.
La ville d’Abéché située dans l’Est du pays à plus de 850 km de la capitale tchadienne N’Djamena est coupée du monde, depuis mardi dans l’après-midi. Pour mieux contrôler la situation, les autorités provinciales ont fermé l’entrée de la ville. Depuis hier mardi, il n’y a ni entrée ni sortie. La ligne téléphonique et la connexion Internet ont été coupées. C’est depuis plus de 4 jours déjà que les habitants de cette vieille ville exigent l’annulation de la cérémonie d’intronisation du chef de canton Bani-Halba, une tribu arabe nomade installée dans les féériques d’Abéché. La manifestation a mal tourné et faisant plus de 4 morts et de blessés à balles réelles.
Le président par intérim de la LTDH, Me Adoum Mahamat Boukar dénonce, « ce qui se passe à Abéché est grave ». Selon lui, la manifestation a été réprimée d’une manière disproportionnée par les forces de l’ordre. Le défenseur des droits humains affirme que des arrestations continuent jusqu’à présent. « C’est la désolation totale. C’est incompréhensible, le travail de l’administration c’est de prévoir et de prévenir », dit-il. Me Adoum Mahamat Boukar affirme que c’est l’administration qui a créé ce conflit et le gouvernement est totalement responsable de ce qui se passe en ce moment. À son avis, ce sont les autorités qui poussent la population à un soulèvement populaire. Le président par intérim de la LTDH craint le raidissement de la communauté Nidjilim et demande la mise sur pied d’une commission d’enquête indépendante pour situer les responsabilités. « Nous demandons au gouvernement de cesser la création des chefferies traditionnelles de façon anarchique. Ce sont les causes des conflits », tempête-t-il. Pour lui, si la population manifeste, il y a des méthodes pour mettre de l’ordre en utilisant juste des grenades lacrymogènes et non tirer à balle réelle. Il soutient que les forces de l’ordre se sont rendues au cimetière pour disperser les parents qui inhumaient les leurs.
Le président national du Parti Union nationale pour le Développement et le Renouveau (UNDR), Saleh Kebzabo a exprimé sa tristesse sur le nombre de morts. Il a condamné la répression en dénonçant, lui aussi, l’usage brutal et disproportionné de la force contre la population civile. M. Kebzabo est aussi vice-président du comité technique d’organisation du dialogue national inclusif (CODNI). Il demande au gouvernement de mettre fin à cette violence dont la responsabilité lui incombe, du fait de son ingérence continue dans les affaires coutumières et traditionnelles.
Le gouvernement sort du silence en organisant une réunion de crise hier autour du Premier ministre de la transition Pahimi Padaré Albert pour examiner la situation et trouver une solution. Déjà, une délégation gouvernementale a été dépêchée sur place pour rencontrer les acteurs et prendre des mesures pour la quiétude.
Le porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication Abderaman Koulamallah condamne fermement les actes de violence et invite les populations à s’inscrire dans le processus de dialogue, de réconciliation nationale et du vivre-ensemble. M. Koulamallah regrette les pertes en vies humaines et présente ses condoléances aux familles endeuillées.
Il a appelé au calme et à la responsabilité de chacun en attendant les conclusions de la mission et les mesures qui en découleront.
Jules Doukoundjé